This is Halloween, everybody make a scene~ {Kim'}

Ecouter cette musique en boucle n'était pas forcément le mieux à faire en ce moment. Des pas se rapprochaient très dangereusement, et Tsumi éteignit son appareil avant de risquer de se faire prendre. Mais croyez-le ou non, il n'est pas si parano que ça.

Jetant un coup d'œil à travers les fourrés, la racaille put apercevoir avec soulagement une longue chevelure colorée. Son pouls se calma ; il n'irait pas encore en conseil de discipline. Mais alors qu'il se redressa hors des buissons, il vit que la propriétaire de ces longs cheveux mauves s'était installée à ce qu'était sa place quelques instants plus tôt et, malgré qu'il ne la voyait que de dos, Tsumi sut rapidement son identité. Rapprochant discrètement ses lèvres de l'oreille de la demoiselle, ses mains se posèrent sur ses épaules.


« Tiens, Kim'. Ça fait un bail qu'on ne s’était pas croisés, n'est-ce pas ma jolie ? »

Il agrémenta son murmure d'un coup de langue dans le cou de la française, sachant qu'il n'allait pas tarder à se faire remonter les bretelles pour sa délicate politesse.

Un sourire amusé se dessina sur le visage de Tsumi lorsqu'il vit la jolie populaire tressallir sous son coup de langue. C'est vrai que le cou reste un endroit très sensible, et ce chez pas mal de personnes, dont la racaille elle-même. Mais qui oserait risquer d'y déposer un baiser pour s'en rendre compte ?

Lorsque Kimmy se retourna, les amants n'étaient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. Sa surprise l'amusa davantage ; pour une fois, le jeune homme se laissa aller à une certaine bonne humeur. D'ailleurs, il n'aimait pas vraiment méditer sur des faits qui pourraient le pousser dans une trop longue réflexion. Débattre sur le Bien et le Mal, s'imaginer des tas de scénarios, tout ça n'était pas vraiment son passe-temps favori. Les idées noires ou la méditation allaient attendre un peu avant d'assaillir le brun, il avait actuellement quelque chose de plus intéressant à faire.


« Et non, toujours pas décidé à prendre des cours de politesse. Estime-toi heureuse que je ne t'ai touché que le cou. »

Ses lèvres s'étirèrent, et une pointe d'ironie teinta sa voix.


« Moi, fumer ? Allons, tu deviens parano ! Quoique ça ne m'étonne pas d'une bourge... »

Il ajouta cette dernière phrase après un léger silence. Content de sa provocation, Tsumi posa ses mains sur le dossier du banc et s'y appuya pour le sauter. L'instant suivant, il était assis aux côtés de la française, décontracté au possible, cherchant dans la poche avant de son jeans son paquet de cannabis. Après tout, à part Kimmy, qui allait le voir ? Il confectionna un joint avec l'habilité d'un habitué avant de l'allumer. Ceci fait, il le proposa à sa voisine.


« Allez, tu vas pas dire non pendant une fête ? »

Sa provocation se lisait dans son regard. En réalité, il n'avait pas spécialement envie de partager. C'était plus pour l'embêter qu'autre chose, et Tsumi n'avait plus beaucoup d'herbe en réserve. Conclusion, il serait bon pour lui de revoir Leandro et leur dealer commun, cela faisait déjà un bon moment qu'ils ne s'étaient pas croisés. Voyant que la petite sorcière n'avait pas touché à son joint - heureusement pour lui qu'elle ne l'a pas envoyé valser il ne sait où - il en tira une bouffée. Tournant lentement son visage vers la jeune fille, il posa une main sur son cou et en rapprocha ses lèvres, expirant la fumée de la drogue sur sa peau tendre.

Le souvenir de leur petite aventure lui effaça le sourire, le rendant presque sérieux. Ce que Kimmy ne pouvait voir, vu que le visage de la racaille se trouvait maintenant près de ses clavicules. Il se rappelait de ses paroles, de l'espoir qu'elle avait de toucher ce qui pourrait être son coeur. En avait-il vraiment un ?

Et vlan, espèce d'« emmerdeur » ! Ce fut un brave et grand sourire satisfait accueillit l'insulte de Kimmy. Mais lorsque cette dernière s'empara de son précieux joint, il se contint de sursauter du banc et de lui courir après pour le récupérer, car si le bâtonnet d'herbe en cours de carbonisation se trouvait à présent entre ses lèvres, c'était sa faute à lui. Décidément, il n'aurait pas dû le lui proposer ; la française avalait les bouffées fumeuses par brassées, lui semblait-il. Les doigts cramponnés sur le banc, Tsumi suivait d'un oeil attentif la provocation de la petite voleuse.

« Je t'ai entendue ! »

Non en fait, la racaille n'avait rien entendu à ses chuchotements, mais il était toujours bon de le faire croire, des fois où ses mots pouvaient avoir une quelconque importance pour elle. Lorsque ses jambes fines la portèrent de nouveau à Tsumi, ce fut froidement qu'il l'accueillit sur ses genoux, tandis que Kimmy semblait s'amuser. Alors qu'elle s'attelait à caresser de sa langue l'oreille du jeune homme, celui-ci récupéra d'un air agacé son joint. Ou du moins, ce qu'il en restait, quelque chose de bien trop petit pour offrir une dernière bouffée à son fumeur. Formidable. Le jeune et fougueux monsieur Tadashii était de ces êtres lunatiques qui n'ont jamais vraiment cherché à contrôler leurs humeurs et émotions, ce qui faisait que, de joyeux fumeur, il était devenu junkie aigri. Pour un simple joint, oui.

Il accueillit donc les lèvres de Kimmy, d'abord froidement, puis ardemment, avant de serrer son corps dans ses bras et de l'allonger vivement sur le banc dans sa longueur. Il souriait d'un air affamé et joueur, mais son regard exprimait une soif de violence. Il avait besoin de se défouler, pas d'être tendre et de faire l'amouraché.

« Je suis con. C'est bien, et alors ? J'en ai rien à faire de ce que tu peux penser de moi. »

Il se rappelait alors les rumeurs. Sur lui d'abord, qu'il avait démenti de long en large et en travers, en partie en se vantant de sa liaison d'un soir avec la petite bourgeoise. Cependant, il eut la désagréable surprise d'apprendre qu'une rumeur en engendrait une autre, et il fit face aux rires lorsqu'on lui apprit que la demoiselle avec qui il avait couché avait déjà eu dans son lit nombre d'autres garçons. Sa fierté était sérieusement atteinte à cet instant, et ce souvenir remontait apparemment au mauvais moment pour Kimmy.

« Et toi, dis-moi que t'assumes tes envies de nympho', hein Kim' ? »

Autant Tsumi avait su ne pas être dégoûté du corps de Kimmy en la touchant, en la pénétrant, autant en y repensant, il y voyait quelque chose d'ahurissant dans cet acte. Peut-être le fait qu'il n'avait jamais couché plus d'une fois avec la même fille avait permis à la racaille d'oublier leurs formes un instant, ou de les apprécier sous l'effet de l'adrénaline, mais maintenant qu'il revoyait la française et l'imaginait nue, un frisson désagréable lui parcouru la nuque. Et il crut que ce ressenti n'était valable que pour la jeune fille habillée en sorcière ce soir-là. This is Halloween. Alors que certains se cachaient sous des apparences repoussantes, d'autres révélaient leur immondice à jour.

Regardant d'un air vague Kimmy, l'entendre éclater de rire le fit échapper à ses réflexions, et il fronça encore les yeux. Se relevant du banc, il l'ignora à demi en fouillant dans les poches de son pantalon, éventuellement à la recherche d'une petite clope. Il en trouva effectivement une de cette envergure, brisée en deux. Décidément, il fallait qu'il arrête de taxer des cigarettes sans paquet sur lui, il n'était pas assez tranquille pour les garder intact dans son jeans.

« Te quoi ? »

Prendre dans ses bras ; ce qu'elle fit, les larmes aux yeux. Se crispant, Tsumi baissa les yeux sur elle, bras écartés. Il sentait des gouttes traverser son T-shirt pour se réfugier sur sa peau, ce qui ne pouvait pas vraiment arranger son humeur. Plus de joint, plus de cigarettes, un T-shirt en cours d'arrosage et une fillette larmoyante au bras ; elle est pas belle la vie ? Se sentant plus que nullement concerné par cette crise de larmes, Tsumi adopta une expression lassée, tapotant la tête de la française de sa main gauche.

« Bon, c'est fini ? »

Elle se retira, séchant ses larmes, et l'ancien anorexique se pencha sur les tâches mouillés en plein milieu de son haut.

« Déjà, arrête de t'excuser ; trois fois d'affilée c'est quand même pas mal. Ensuite, si, j'en ai absolument rien à cirer de ce qu'on peut penser de moi. Si je le faisais, je serais déjà loin à l'université, la coupe au bol et le nez dans les bouquins, comme ces rats de bibliothèque qui pullulent. De toute façon, ça ne te regarde pas, ce sont mes affaires. Et si c'est pour un des tes nombreux et chers jardiniers cultivant ton petit jardin que tu chiales, je te rappelle que c'est pas à la bonne personne que tu t'adresses pour être consolée avec compassion et tout le tralala qui va de pair. »

Mensonge dès la deuxième phrase. Évidemment qu'il s'en foutait pas de ce que les autres pensent, c'était à cause d'eux qu'il est devenu ce qu'il prétend être. Agacé, lassé, Tsumi s'éloigna un peu plus loin de Kimmy, un petit rire moqueur filtrant de ses lèvres.