Nicotine quand tu nous tiens...

Gin tira une bouffé de sa cigarette avant de libérer doucement un nuage de fumée mortelle. Enfin un peu de calme. Certes, le festival organisé par le Comité des élèves s’était déroulé sans encombre et assez paisiblement, l’événement n’avait cependant pas été de tout repos. Durant le déroulement des activités proposées, Gin, en tant qu’autoproclamé gendarme/agent de sécurité/surveillant, n’avait eu que peu d’occasions d’intervenir et encore moins d’utiliser la force pour punir les déviants à son grand regret. Mais si le festival en soi n’avait pas été éreintant, ça n’avait pas été le cas de toute l’organisation préalable qui avait fait suer à grosses gouttes les membres du Comité plus qu’il n’aurait jamais pu l’imaginer. Avec un soupir las, il sortit ces récents événements de sa tête. Le festival était terminé depuis quelques jours et la vie avait repris son cours.

Malgré le froid ambiant et la morsure du vent hivernal, Gin ne portait qu’une veste noire assez légère par-dessus une simple chemise blanche. Nous étions en fin de matinée, peu avant la pause de midi et le campus était presque déserte mis à part quelques étudiants qui séchaient leurs cours ou qui, comme Gin, avaient un creux dans leur horaire. Après ses deux premières heures d’économie, jeune homme avait hésité à rentrer chez lui avant de revenir pour ses cours de l’après-midi mais il avait finalement décidé de rester. Après ses années de lycée, Gin avait migré du dortoir de Keimoo vers un appartement spacieux du quartier le plus chic de la ville dans lequel il vivait seul. C’était un endroit calme et paisible non loin de la mer, assez grand pour y placer un tout nouveau piano à queue dont il avait fait l’acquisition quelques jours à peine après son installation. Étonnant, n’est-ce pas ? Un piano pour une racaille qui, selon toute vraisemblance, devait davantage entendre le doux son des cris d’agonie de ses victimes plutôt que les notes plaisantes d’un piano (ce qui était le cas en réalité). Mais Gin n’était pas n’importe quelle racaille, il était à la fois unique et mille fois pire que la moyenne.

À part cet instrument imposant, le reste de l’appartement était plutôt vide, et l’absence de colocataire rendait l’endroit bien silencieux… mais Gin aimait cette solitude, parfois comblée lorsqu’il ramenait l’un ou l’autre partenaire pour réchauffer son lit, et adorait encore plus les grands espaces… et puisque sa famille avait largement les moyens de lui payer ce luxe grâce aux affaires florissantes et pour la plupart illégales de son père, il ne s’en privait pas.

Assis sur un banc de la cours, il ne regrettait pas d’être resté sur le campus. Certes son appartement était agréable, mais il avait aujourd’hui mieux à faire que de trainasser… comme par exemple, partir en quête d’une victime potentielle à ajouter à son tableau de chasse, faire souffrir de vieilles connaissances, tyranniser ses souffre-douleur favoris ou encore terroriser quelques nouveaux élèves…

Il termina sa cigarette et écrasa son mégot contre le banc sur lequel il était affalé, laissant une marque noirâtre sur le bois peint. Il chercha son paquet de clope d’une main, lançant son mégot de l’autre vers une poubelle qu’il manqua pathétiquement, avant de se rappeler qu’il venait de griller sa dernière cigarette. Poussant un juron, il balaya la cours d’un regard et trouva rapidement sa prochaine victime vers laquelle il se dirigea à grand pas. S’arrêtant devant sa proie, il retira la cigarette qu’elle avait au bec d’un geste sec et autoritaire.

- Interdiction de fumer dans l’enceinte du campus, mentit Gin d’une voix menaçante. En tant que Président du Comité des élèves, je me vois donc dans l’obligation de te délester de ton paquet de clopes immédiatement, à moins que tu préfères rendre visite au directeur et risquer l’expulsion ?

Certain de se faire obéir, que ce soit par crainte de la sanction, par son statut de Président du Comité des élèves, ou par la terreur qu’inspirait sa propre personne, il tendit la main d’un geste impatient et planta le reste de la cigarette entamée à ses lèvres en fusillant sa victime du regard. Après avoir inspiré une profonde bouffée de fumée empoisonnée, il recracha une volute de nicotine au visage de sa victime et afficha un air profond de satisfaction cruelle.

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