Prendre la vie du bon côté!

Situé dans le quartier Hiryuu, l'immeuble Sakura est une demeure paisible... autant que peu l'être un édifice dont la plupart des occupants sont des étudiants. Shin ne s'en plaint pas bien au contraire, côtoyer un peu plus de monde le fait s'épanouir. Être seulement au contact de Myle n'était pas bon pour lui. Ses sentiments viraient doucement à l'obsession pure et dure... chose qu'il ne voulait en aucun cas. Il s'est repris en main en allant chez un psychologue et en s'éloignant afin de prendre un nouveau départ. C'est ainsi qu'il s'est retrouvé ici.

Le jeune homme est propriétaire d'un appartement dans cette résidence, le 11 plus exactement. Il aurait pu le prendre en location mais comme il comptait rester à plus ou moins long terme autant l'acheter et s'installer convenablement. L'étudiant avait, tout d'abord, fait abattre le mur qui séparait la cuisine de la salle à manger et du salon pour agrandir l'espace et le rendre plus convivial. La partie salon contenait un canapé-lit ainsi qu'un fauteuil confortable en face de l'écran plat que l'on pouvait voir de la table à manger de six personnes. Une petite table près du sol servait de dépotoir pour des objets divers et variés comme le cendrier, le téléphone fixe ou le magasine télé. Sur le côté se trouvait une grande bibliothèque contenant tous ses ouvrages les plus précieux. À l'opposé, il y avait la cuisine. Lavabo, plan de travail, plaque chauffante, cuiseur, micro-onde, four... en fait, tout ce qui fait le bonheur d'un bon ménager. Sans oublier, une petite pièce rajoutée, on était le frigidaire et la machine à laver... le séchoir étant sur la terrasse.

Ensuite, le couloir donnait sur les toilettes et la salle de bain à droite. Sur la gauche, c'était la chambre de Shin, celle qui a la plus grande superficie et, en face de l'entrée, c'était la chambre d'ami. Les deux pièces étaient équipés d'une manière équivalente: une armoire pour ranger ses affaires, un bureau se situant près des fenêtres ainsi qu'une table de chevet près des lits. Le gothique avait une petite bibliothèque en plus où se trouvait ses cd's et ses livres de cours. Tout était dans les tons noirs, gris et blancs. Sa basse était installée contre le mur, son amplificateur était rangé bien à l'abri sous son bureau et son ordinateur trônait dessus parmi les cours de la faculté. Cet espace pouvait paraître froid mais il s'y sentait bien surtout avec sa fenêtre qui donnait plein Est. Il se levait le matin avec l'aube. La lumière diffusait sa chaleur dans la pièce... Il ne lui en fallait pas plus pour être heureux. La chambre d'amie, quand à elle, était plutôt sobre mais accueillante. Les tons dominants étant le blanc cassé -faudrait pas se croire dans un hôpital, non plus-, l'orange et le jaune -pas celui qui pique les yeux-. On pouvait voir quelques affaires traînées à droite, à gauche... la plupart appartenant à Jin. Le reste était soit à des amis, des connaissances ou de simples réfugiés qui ne savent pas où aller et à qui il donne un coup de main.

Shin a, enfin, son « chez lui » -ben oui, il aurait pu l'avoir plutôt mais il a préféré l'internat-. La vie n'est pas toute rose mais au moins, il est tranquille dans son havre de paix… sauf quand la sonnette retentit. Le gothique se leva du canapé et reposa sa manette de playstation 3. Qui pouvait bien venir à cette heure-ci ? (il était vingt-deux heures passées.) Bien qu’il s’en doutait, c’était étonnant. D’habitude, quand il venait pour dormir ici, il débarquait bien plutôt. Rapidement, il enfila un bas de survêtement avant d’aller ouvrir la porte parce que, franchement, se présenter devant quelqu’un en caleçon, ça le faisait pas. Pas du tout… de son point de vue. C’est donc torse nu, complètement hagard, décoiffé et déconnecté qu’il ouvrit la porte à… -roulement de tambour-

« Jin ? »

Miracle ! Ses neurones se sont reconnectés après un moment d’intense observation –le genre de regard qui vous donne des frissons dans le dos dont on ne sait jamais si on les apprécie ou si on les trouve désagréable- et, par la même occasion, il se décala pour le laisser entrer avec un petit sourire d’excuse pour ce moment d’absentéisme.  

21h00.
Taro Nakamura, dit « Big Bro » – un voyou de piètre envergure se prenant pour un caïd local – patrouillait en compagnie de trois de ses sbires. Lesquels sbires étaient ce soir particulièrement nerveux : cela se voyait comme le nez au milieu de la figure, leur chef s’ennuyait ferme. En fait, il aurait carrément fallu être bouché pour ne pas remarquer qu’il se faisait royalement chier. Et s’il y a bien un truc que Big Bro n’aime pas, c’est se faire chier. D’où le problème. Longuement persécuté durant son enfance en raison de sa forte corpulence, il avait pris l’habitude de régler à peu près tous ses problèmes à coups de poing. Et dans les cas où il n’avait personne à cogner, il finissait toujours, immanquablement, par se retourner contre l’un de ses subalternes. D’où la nervosité de ces derniers. Ils n’eurent cependant pas à se ronger les sangs bien longtemps : plus bas sur la rue, adossé contre un mur, clairement éclairé par la lune quasiment pleine, se détachait la silhouette d’un jeune homme fumant calmement une cigarette. L’un des sous-fifres se permit un sourire narquois. Qui qu’il soit, ce mec était un inconscient – ou un imbécile. Un chose que Big Bro détestait encore plus que s’ennuyer, c’était les mecs qui se permettaient de fumer nonchalamment une clope adossés à un mur de sa rue. Celui-là, c’est clair, ça allait être sa fête ! D’ailleurs, déjà le chef s’était arrêté, dardant son regard porcin sur l’intrus, sa graisse tremblotante de la colère qui l’agitait. Il redressa les épaules, et s’ébranla en direction du jeune homme d’une démarche pachydermique en fulminant de toutes parts, offrant un spectacle dont on ignorait s’il fallait le juger effrayant ou comique au possible. Comme à leur habitude, les trois sbires le suivirent en abordant un air menaçant.

- Hé !

La silhouette releva la tête, lâchant une volute de fumée, et observa les quatre voyous approcher sans broncher.

- J’te parle, connard !

L’inconnu porta sa clope à ses lèvres.

- ‘Tain, t’es bouché, je-te-parle ! Tu sais qui suis, hein ?

L’autre, dont les traits étaient désormais visible, esquissa un sourire narquois.

- Ouais.

Il expulsa une nouvelle volute de fumée.

- T’es un gros porc qui se prend pour un mafieux.

* * *

- Aïe…

Jin esquissa un mouvement d’épaule. Douloureux. Rien de grave. C’était pas déboîté. Mais ça faisait mal quand même. Son visage aussi lui faisait mal. Au niveau de la pommette – le poing qu’il avait reçu avait probablement laissé une belle marque à mi-chemin entre le rouge et le violet – et au niveau de la lèvre inférieure – qui était fendue.
Il avait aussi reçu divers coups un peu partout ailleurs ; le classique coup dans l’estomac qui lui laisserait probablement un bleu, et d’autres qu’il avait la flemme de répertorier.
Certes, ce satané chef de gang était un petit joueur, mais sa force physique, elle, n’était pas usurpée. Et puis aussi, à quatre contre un, c’était pas vraiment équitable, surtout quand y’en a trois pour immobiliser et un pour cogner.
Bref.
Lui qui avait prévu d’aller en boîte et de passer la nuit chez un ou une inconnu, c’était raté. Le simple fait de s’imaginer en train de danser lui faisait un mal de chien, c’était dire ! A ce stade, c’était dur à dire, mais la seule solution revenait à aller demander de l’aide : à savoir, squatter chez Shin.
Jin passa une main sur son visage en soupirant. Il détestait avoir l’air faible, et se pointer chez un pote à une heure pas possible avec la tête d’un mec qui s’est fait passé à tabac pour demander l’hébergement, c’est tout sauf classe.

- Eh. Merde.

Il soupira derechef, avant de se mettre en route.
Arrivé devant la porte, il hésita un instant, se demandant s’il n’allait pas simplement se caler dans un coin de l’escalier et repartir à la première heure, puis se décida et frappa.
Ce fut un Shin à moitié habillé, pas coiffé et l’air un peu dans les choux qui lui ouvrit.
Gah.
Même en ayant l’air à côté de ses pompes, ce mec réussissait à être canon.
Et vas-y que j’te fixe, histoire d’aggraver mon cas, tiens !

- Jin ?
- Ouep. Jin. Pose pas d’questions. J’peux t’emprunter de la glace ? J’aimerais éviter que ma joue ressemble à un ballon de baudruche d’ici une demi-heure.

Shin s’était effacé pour le laisser entrer, aussi Jin se dirigea-t-il directement vers le congélateur et en sortit-il quelques glaçons qu’il enveloppa dans un torchon avant de les plaquer contre sa joue.
Il se tourna vers Shin.

- J’suis désolé de me pointer à cette heure, je… Hum, voilà, quoi.

Faire pitié avec des « Je savais pas où aller », non merci. Et puis, c’était pas comme si Shin n’avait pas l’habitude des excuses vaseuses à la Jin.
Ledit Jin parcourut la pièce du regard, notant au passage qu’il était peut-être temps qu’il ramasse un peu ses affaires, avant de se tourner vers Shin sans pour autant le regarder dans les yeux.

- Fais comme si j’étais pas là. Je squatte juste la chambre d’ami, je te laisse tranquille. Tu verras même pas que je suis là.

Etrangement, malgré toutes les attentions de Shin, Jin avait toujours du mal à concevoir qu’on puisse lui apporter de l’aide sans rien attendre en retour et sans en être incommodé.
Et sur ce, il se détourna et partit en direction de la chambre d’ami, sa poche de glace toujours plaquée contre son visage.

[Et hop ! C'est pas du grand art, mais j'suis un peu rouillée :p Tu m'dis si ça convient ! ♥]