Retrouvailles... mouvementées ? [ PV Alamasonthe ]

Alamasonthe était là. Assise à la terasse d’un café. Elle s’était levée assez tôt, encore bouleversée par le décalage horaire. Elle venait de finir un café, censé lui redonner de l’énergie. Elle tendit un billet au serveur, et celui-ci dut repartir vers l’intérieur du café. Mais il semblait que ce fut à contre coeur, car il lanca un long regard à sa cliente si spéciale, s’attardant sur son corps, de ses cheveux roux à ses pieds nus dans ses sandales. Puis il s’engouffra à travers la double porte. En attendant, Alamasonthe demanda une cigarette à son voisin, qui faillit perdre la sienne en remarquant la créature qui lui parlait. Elle prit la cigarette avec un sourire aimable, laissant le voisin hébété fixé son croissant avec des yeux vides. Le serveur revint et lui tendit la monnaie. Elle se leva, laissant un joli pourboire. Mais elle n’eut pas le temps de faire un pas, que le serveur courut vers elle. Il avait les yeux brillants, et semblait être prêt à risquer sa vie. En réalité il venait juste de prendre une grande décision. Il lui tendit une carte.

Qu’est ce que..?

Alamasonthe ne finit pas, un coup d’oeil à la carte lui avait permis de comprendre. Un numéro de téléphone était griffoné dessus. Elle changea son sourire en une moue méprisante et s’adressa au jeune homme, pas du tout inquiète de ses difficultés avec le japonais.

Un numéro de téléphone ?

Son regard se fit dur. Le serveur regarda soudain ses chaussures et balbutia “oui je..” Il s’arrêta, lancant des regards frutifs aux clients qui observaient la scène. Alamasonthe sourit. Son but n’était pas de donner envie au serveur de disparaître de la surface de la terre. Alors elle abrégea :

Vraiment, je risque de ne jamais appeler, je ne suis pas du genre de celles qui courent derrière les hommes. Par contre..

Elle haussa le ton, car elle savait que les clients étaient prêts à sa moquer du serveur, et ce n’était pas ce qu’elle voulait. Il était trop mignon pour cela. Une musculature qui promettait d’être désirable.. Alors, un sourire charmeur et envoutant aux lèvres, elle continua :

par contre tu peux toujours courir, voilà le mien.

Elle revint à sa table, griffona quelque chose sur la serviette en papier, puis haussa un sourcil en direction du serveur. Il ne regardait plus ses chaussures. Oh non, il rayonnait de fierté et apparemment ne croyait pas ce qu’il venait de voir. Il serrait convulsivement le bout de papier dans sa main, risquant de le broyer à jamais et de le rendre illisible.. Mais cela est déjà une autre histoire, car Alamasonthe tourna les talons, désireuse de quitter au plus vite la scène où elle venait de jouer la comédie.

Elle marcha un peu plus, puis s’arreta pour écraser sous son pied la cigarette commencée. Décidément fumer n’était pas vraiment son truc. Alors elle tourna la tête, et le vit.

Ce fut comme une apparition. Elle ne l’avait pas vu arriver vers elle, il était simplementl là. Comme si de ses pensées il s’était transféré dans la réalité. Car elle pensait justement à son petit frère. Son petit Leandro à elle, le sien. Alamasonthe entrouvrit les lèvres, de surprise. Il avait tellement changé. C’était lui, sans hésitation. C’était son nez, sa peau, ses lèvres ourlées, et ses yeux qu’elle aurait reconnu entre mille.. Mais ces vêtements, ces gens qui le regardaient et semblaient lui vouer une grande admiration.. Ce sac qui trainait là bas.. Tout ça, était-ce Leandro ? Son petit Leandro ? Il était là, comme s’il avait toujours été là. Ses doigts fins étaient sur le bras de Alamsonthe. Le contact l’électrisa et la fit revenir immédiatement à la réalité.

Leandro, mi corazon !!!

Son coeur, son amour. Elle qui l’avait analysé si froidement pendant quelques secondes, sentit un tourbillon de sentiments lui arracher le coeur. Elle le serra contre elle, sans réfléchir aux gens autour. Sans remarquer que tout le monde les fixait. Tout le monde. Les “amis”, peut-être, de Leandro avaient eux aussi laché leur sac et les regardaient, la bouche ouverte. Alors petit à petit elle désarra son étreinte. Non pas gênée, mais elle avait un peu peur de la réaction de son frère. Elle avait dévoilé si vite le manque affectif qu’elle avait de lui.

Mais très vite elle se rassura. Les yeux pétillants de son fère, son sourire en coin. Il était son miroir comme elle était le sien. Elle était sublime, il était sa fierté. Alamasonthe le regarda et s’éloigna d’un pas. Son regard à elle était un peu hésitant. Elle foudroya les jeunes filles du regard qui regardaient la scène. Et sans pouvoir attendre que son frère se resaissise, elle poursuivit, sur un ton beaucoup plus doux :

Leandro.. Comment vas-tu ?

Et cette fois elle se tut, bouleversée de retrouver son petit Leandro si vite..

Alamasonthe sourit, car ses paroles avaient eu l’effet attendu. D’abord déçu, un peu moins sur de lui, son petit frère était finalement de plus en plus souriant. Elle décida d’être un peu franche, avant de poursuivre la conversation.

Je suis désolée de ne pas t’avoir prévenue de ma sortie mais.. je préférais faire un peu le point toute seule.

Puis ne voulant pas engager la conversation sur ce point trop délicat pour elle, se reconcentra sur ce qu’il avait dit. « L’infirmerie » ? Pourquoi Leandro aurait-il besoin d’aller à l’infirmerie, où évoluaient tant de belles infirmières sûrement ? Le regard de l’espagnole se durcit sensiblement. Pourquoi lui disait-il cela ? Elle tenta néanmoins de se radoucir, d’autant plus que Leandro aurait sûrement remarqué la réaction de sa sœur. *Ne pas gâcher ce moment, ne pas le gâcher.* Il parlait de baseball.. Il en faisait déjà à Salamanque, était-ce devenu sa passion ?

Elle sourit en le regardant. Et était-ce cela qui avait rendu son corps encore plus attractif ? Mais Alamasonthe chassa très vite ces pensées de sa tête. Et les profs ? Ironique, une lueur taquine dans les yeux, elle risqua une remarque de grande sœur :

Eh bien maintenant tu vas devoir t’en préoccuper..

Elle rit, mais ajouta tout de même, ce qui était vrai :

Maman m’a demandé de veiller sur toi..

Alamasonthe arrangea une mèche de cheveux et ajouta sur un ton un peu plus bas :

Veiller sur toi.. Joli programme non ?

Mais elle avait peur qu’il lise un peu trop dans ses propres pensées et essaya à nouveau de changer de sujet. Il avait cependant le temps de lui répondre. Le meilleur moyen pour la jeune femme de chasser de son esprit certaines idées un peu trop fixes était de regarder ailleurs. Elle détourna donc la tête un bref instant, et son regard rencontra celui d’une étudiante en jupe et chaussettes montantes qui passaient par là. Elle eut l’impression de se voir elle il y a quelques années. Et dire que c’étaient de telles jolies créatures que son frère, son petit frère à elle, fréquentait chaque jour. Un sportif si beau.. Comment pouvait-il être seul ? Il était sûrement entourée de..

*Ne pas y penser. Ne rien gâcher. Peut-être ne veut-il pas retrouver tout cela*

Mais elle croisa son regard, et sut que lui aussi, cela lui trottait dans la tête. Ils étaient tous les deux si semblables, et se connaissaient si bien. Elle ferma les yeux une seconde, chose qu’elle ne pouvait empêcher lorsqu’elle était troublée, ce qui était pourtant très rarement le cas. Et se reconcentra sur la réaction de son petit frère. Puis elle ajouta :

Et comment sont les gens ici ?

Une manière de le faire parler des filles ? Peut-être, peut-être pas. Alamasonthe s’était reprise en main, et ses pensées étaient désormais totalement secrètes.

Alamasonthe le regardait toujours, elle voyait qu'il avait changé. Mais elle voyait aussi qu'elle le comprenait mieux que quiqonque. Chacune de ses phrases, chacune de ses émotions étaient très claires pour Alamasonthe, comme s'il ne cachait ou ne dissimulait rien. Il venait de dire qu'il ne causait pas trop, accaparé par le baseball. Elle eut un sourire ironique. Sa voix était assez posée, il se tenait comme quelqu'un de très sur de lui. Il avait jeté des regards alentours, et beaucoup de gens les avaient d'abord dévisagés. Et il osait lui dire qu'il n'avait pas l'occasion de faire la causette ? Alamasonthe était persuadée que son petit frère, grâce à ses propres enseignements, avait beaucoup plus de succès qu'il n'en laissait paraître. Alors elle constata simplement ironiquement, pour lui montrer qu'elle n'était pas dupe :

Oh c'est vrai ? Comme c'est étrange.. J'aurai vraiment cru que ce serait différent pour toi. Enfin je me suis trompée apparemment.

Puis leurs esprits volèrent vers cette maison qu'ils avaient partagé, leur famille. Etait-il si fier et se voulait-il si autonome qu'il n'allait pas demander des nouvelles de la famille ? Elle sourit, il était craquant à ne pas trop savoir comment réagir. Elle dit alors :

d'ailleurs, tu as le bonjour de tout le monde. Ils espèrent avoir bientôt de tes nouvelles.

Juste de quoi le rassurer, mais sûrement pas de quoi satisfaire sa curiosité. Et puis lui qui donnait des nouvelles si peu souvent allait lui faire croire qu'il était occupé seulement de baseball ? Alamasonthe tourna a tête et vit une jeune femme qui dévisageait son frère, puis qui s'en allait. Ce fut comme une décharge électrique à l'intérieur de son corps. Leandro.. Combien de femmes avaient profité de sa douceur et de sa beauté, alors qu'elle seule l'avait formé aux plaisirs de la chair ? Le regard qu'elle reposa sur lui était si rempli de désir et de chaleur qu'il dut s'en rendre compte, bien qu'elle détourna de nouveau la tête. Il lui avait dit quelque chose, pendant que son attention se focalisait sur la jeune fille. Discuter ?
Ey à nouveau, les images de l'hôpital surgirent. Les chambres blanches, les hommes avec qui elle n'avait que très peu de contact.. Et comment elle ne s'était calmé qu'au bout de longues semaines.. Elle regarda Leandro, plus tendrement. Elle ne savait pas si elle avait envie de discuter. Mais si elle devait discuter avec une seule personne au monde, il s'agissait bien de lui. Alors, où ?

Oui il vaut mieux bouger..

Mais où aller ? Automatiquement, Alamasonthe répondait un café à cette question. Toujours. Et ensuite, les hommes allaient chez elle. Jamais elle ne venait chez quelqu'un, elle ne sentait pas assez en position de force si elle ne connaissait pas les lieux. Mais avec lui.. Quel besoin de ces subterfuges ? Et le mieux n'était-il pas de suivre les conseils de sa mère ?

Puisque je dois veiller sur toi.. Autant que tu me montres comment tu es installé à l'académie non ?

Puis Alma devait s'avouer que pénétrer dans la chambre de son frère lui apporterait sûrement d'autres indices sur sa nouvelles vie.. Et ce serait tellement plus agréable, de se montrer avec lui dans son établissement. Après tout, c'était lui qui l'avait proposé. Allait-il regretter ? Peu importe. Il n'avait plus le choix, il avait accepté d'avance.
Elle s'éloigna, vers le sac de Leandro qui gisait un peu plus loin. Elle le prit et le tendit à son frère, profitant du contact inattendu. Face à lui, elle leva sa main jusqu'à son visage. Comment résister à vérifier une nouvelle fois qu'il était bien là, devant elle ? C'était presque un geste fraternel.. Presque... Excepté la sensualité et le plaisir qui se lisaient dans ses yeux.

Tu n'as pas tellement changé.

Puis elle secoua sa chevelure de feu, comme pour se changer les idées.

On s'en va ?


(topic terminé pour moi)