₪ Académie Keimoo ₪ In a decade, will you be there ? |
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| Rencontre à Trois Temps | |
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Invité Invité
| Sujet: Rencontre à Trois Temps Dim 10 Jan 2010 - 0:10 | |
| Récemment, l’université venait d’ouvrir, en annexe à l’académie. A moins qu’elle n’existe déjà depuis longtemps et que Valentine ait été trop concentré sur ses activités, ce qui n’était pas une solution à écarter. Alors naturellement, l’envie d’aller y mettre le pied avait poussé le psy à se rendre là bas. Après tout, il se prenait bien le loisir d’aménager les heures à sa convenance alors oui, il pouvait bien se permettre pleine de petite chose, tant que ses supérieurs ne lui en faisait pas le reproche. Il faisait son boulot auprès des élèves après tout. Ce n’est pas comme s’il n’en foutait pas une ; là oui, c’aurait été illégitime. Et, avec un tordu tel qu’il est, quel est le genre d’endroit là où il ne pourrait pas se trouver. On reconnaissait désormais son visage à l’académie : difficile d’y passer totalement inaperçu. Alors dans les bâtiments de l’université, il aurait le petit plaisir d’y traînailler sans que l’étiquette de M. Valentine, Psychologue lui flotte sans répit au dessus de la tête. Quand même, ce qualificatif de Monsieur lui donnait un sacré coup de vieux et ce tordu aimait à se croire parfaitement dans la fleur de l’âge. Si bien qu’il en venait parfois à avoir la nostalgie des cours... des heures passées à gribouiller inutilement sur les restes d’arbres triturés pour de belles feuilles. Pauvre Nature-mère. Mais la nature a beau être généreuse que Yui, lui, ne l’est assurément pas, ce sale égoïste bourgeois. En même temps, son boulot de psy aussi, l’amenait à gratouiller du bout de son stylo sur une pauvre victime de feuille. Mais l’ambiance n’était pas la même que dans une salle de classe. Où on prend toujours le malin plaisir de se moquer du cours que déblatère un enseignant, où on fait davantage attention à la conversation du camarade de classe qu’autre chose. Où on se prend de vieilles heures de colles pour les démodés. Voire un devoir supplémentaire. Jusqu’au menaçant 0 tout rond dans un bulletin. Ah le stress des élèves. Celui des étudiants aussi… Nostalgie du passé, quand tu nous tiens. Le français traversa tranquillement le couloir, entre deux groupes changeant d’amphithéâtre, ou de TD, dans un joyeux brouhaha. Il s'y mêle, s'y détache, sans distinction à part peut être quelques coup d'oeil étonné. C’était en somme, un peu l’académie à plus grande échelle. Etrange de voir que lorsqu’on a grandit trop vite, on se retrouve avec pratiquement des gens du même âge dans divers milieu. Certaines salles d’études aux portes entrouvertes, dissimulaient les plus ardus. Il fut un temps où Valentine travaillait d’arrache-pied, comme ça. Jour et nuit. Enfin, il fut un temps de plein de choses aussi. Le temps a passé, le temps est passé, et continue à s’écouler, inlassablement. Mais Yui, lui, s’immobilisa, brusquement. Là bas, dans la salle d’étude, près de la fenêtre ; une silhouette vient d’attirer son attention. De long cheveux châtain mais qui paraissent plus sombre vu à contre jour. Elle est de dos. Dans cette contemplation momentanée, Yui se rapproche silencieusement de la porte entrouverte et épie. Comme un adolescent en train de se permettre un tout nouveau magazine libertin. Non, pour être plus franc, Yui attarde son regard sur cette charmante silhouette. Et en se rapprochant, dans un silence involontaire, il s’aperçoit que ses cheveux sont en fait châtain clairs, longs et détachés. Cette fille de dos, lui rappelle une certaine autre, par son passé. Eliane. Sa paire. Camarade de jeux, complice de sales tours. Complice et jumelle. Au fil des années, il a du être frappé d’un sister complex ou un truc dans le genre, vu la fixation qu’il en a fait après son accident. Enfin, c’est une histoire passée, elle est enterrée. Mais comment peut-elle se trouver là, ici. C’est un rêve. Ce ne peut être autre chose. Mais c’est loin d’être désagréable ; et elle n’a plus fait aucune apparition dans son sommeil depuis trop de temps. Valentine ne lui avait jamais dit ; il n’en n’avait pas eu l’occasion. Celle de lui dire qu’elle lui avait manqué. Eli’ l’avait simplement effacé de sa mémoire, contre toute attente. Mais ça aussi, c’était une histoire passée. Parce qu’elle est là, maintenant, devant lui. L’envie de saisir une mèche de cheveux. La même couleur que la sienne avant qu’elle ne prenne des couleurs les plus artificielles. Finalement, il a plus envie de la retenir contre lui. Alors il la sert dans ses bras. Subtil petit bonheur. Mais c’est un rêve qui a semblé trop réel pendant un moment. Ce n’est pas Eliane. Celle qu’il sert contre lui est toujours de dos, et il la reconnait. Il la reconnait sans pour autant lui coller un prénom dessus. C’est l’adolescente de la salle commune de la dernière fois. Que fait-elle à l’université ? Car assurément, elle est encore élève à l’académie. Tant pis, Valentine aura encore eu recours à la salutation calamar, comme avec Kazuki. Le psy ne se dégagea pas pour autant et posa momentanément la tête au dessus de celle de la jeune fille. Pour ne pas atterrir trop brutalement face à la réalité. Au risque d’un geste brusque de l’adolescente. Tant pis. Autant s’y accommoder du mieux possible. -…Bonjour, déclare-t-il de bout en blanc, comme si c’était là la façon la plus naturelle de saluer l’inconnue. Comme si elle n’était justement pas inconnue. Comme si elle était sienne. Mais elle ne l’était pas. Il eut un sourire amusé. -Curieux hasard. Après la salle commune, nous retrouverons nous enfermé dans une salle d’étude universitaire ? A l’aise comme jamais, -Valentine est souvent à l’aise- voire même sans gêne, il laissa son regard se perdre derrière les carreaux de la fenêtre. Curieuse impression de déjà-vu, de déjà-vécu dans cette posture là, avec cette même jeunette. Le hasard fait de drôles de choses. |
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| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Mer 13 Jan 2010 - 13:20 | |
| Normalement, elle n’avait pas le droit. Mais Promise se trouvait bien à l’université. C’était un endroit réservé aux classes plus élevées. Seuls les universitaires pouvaient aller au lycée. Mais pas l’inverse. Mais quelques mais d’ici l’avait aidé à rentrer tranquillement. La voilà donc en salle d’étude. De toute façon, elle préférait cette salle à celle de son quartier. Tout y était plus calme. Les élèves étaient plus sérieux, donc le travail y était plus bénéfique. Elle leva le nez de son livre et regarda par la fenêtre. Elle soupira et jeta un coup d’œil aux fenêtres du dortoir. Ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas vu Etienne. Ils leur arrivaient de ne pas se donner de nouvelles pendant un période plus ou moins longue, mais ça finissait toujours pas la tarauder. Elle aimait beaucoup ce garçon. Ce devait être réciproque. Son regard dériva vers l’autre salle d’étude où elle vit quelques étudiants bavasser, quand d’autres essayaient de se pencher sur les leçons. Puis elle finit par poser ses yeux sur celle du bureau de ce psychologue qu’elle avait croisé à la salle commune du lycée, il y a plusieurs jours. Elle soupira et posa son menton dans sa paume, son coude appuyé sur la table. Elle avait finit par trouver son nom : Yui. Yui Valentine. C’était particulier comme prénom. Tout comme le sien. Elle sourit, commençant à jouer avec son stylo, de son autre main. Elle le fit tourner plusieurs fois entre ses doigts, puis se décida enfin à reporter son attention sur ce qu’elle lisait. C’était un bouquin sur la France. Un professeur leur avait donné un travail à faire en un mois, sur le sujet qu’il voulait, suivant certaines contraintes. Par solution de facilité, et ayant une attirance farouche pour ce pays, la jeune femme n’avait pas hésité une seconde à traiter ce sujet.
Son téléphone sonna. Quand on parle du loup, on en voit la queue : c’était ledit Etienne. Elle coupa la sonnerie soufflant une excuse aux regards qui se tournèrent vers elle. Quand le portable arrêta de vibrer dans le creux de sa main, elle envoya n message à son correspondant, lui expliquant la situation et lui promettant de le rappeler dès qu’elle le pourrait. En réponse immédiate, elle eut le droit à un reproche sur joué du garçon, qui la taquinait. Elle ne répondit rien et se concentra sur son travail. Elle lut une dizaine de pages, prenant des notes, puis elle n’y tint plus. Elle jeta à nouveau un coup d’œil au bureau de Yui. Il était éteint. Il ne travaillait pas ? Elle se demanda ce qu’il pouvait bien faire et se mordit la lèvre. Non, vraiment, il fallait qu’elle bosse. Elle n’était pas venue ici, au risque de se faire réprimander, pour mater une fenêtre. Elle resta les yeux rivés dessus encore un peu, pourtant. Quand elle posa les yeux sur son livre, elle sentit quelqu’un la prendre dans ses bras. Elle ne put réprimer un petit cri de surprise, mais ne chercha pas à se dégager.
Elle connaissait ce contact. C’était un homme. Et des garçons, peu l’avait prise dans leurs bras de cette façon. Il y avait Terry, Etienne, un autre ami et ce psychologue. Par élimination, elle ne put garder que le dernier. Mais elle ne conclut pas trop vite. Il se pouvait que ce soit quelqu’un d’autres, qu’elle ne connaissait pas beaucoup et qui avait aussi cette façon aussi audacieuse, que tendre, d’enlacer les autres. Enfin, c’était surtout qu’elle ne voyait pas pourquoi ce type le prendrait comme ça. Elle le savait un peu subtil, dur à cerner… Complexe, en somme. Mais elle ne voyait vraiment aucune raison pour lui de faire ça. Il lui avait dit qu’il ne voyait pas l’intérêt de faire ça, la première fois. Alors, quoi ? Promise sentit une pression s’exercer doucement sur le haut de son crane. Non, là, c’était certain : c’était Yui. Elle sourit, essayant de le dissimuler à l’intrus. Il la salua. Elle se contenta se poser ses mains sur les siennes.
"Je ne nous ai pas encore enfermés, comme la dernière fois."
Elle sourit en repensant à cette entrevue dans cette salle. Mais il l’avait aussi laissée en plan. Elle essaya de prendre une moue boudeuse, mais n’y parvint pas. Décidément, elle n’était pas faite pour en vouloir au autres, encore moins pour des détails si futiles. Elle rentra sa tête dans ses épaules, se décollant du menton de l’homme et s’écarta un peu sur le côté, ne l’obligeant pas pour autant à relâcher son emprise sur elle. Promise lui offrit un sourire ravissant et noya ses yeux dans les siens.
"Tu sais qu’il y a d’autres élèves dans cette salle. Ils risquent de se poser des questions, non ?"
Elle n’en savait rien s’il était connu ou pas, ici. Peut-être que c’était un autre psychologue qui travaillait pour l’aile universitaire. Aucune idée. Elle n’arrêta pas de sourire pour autant. D’un autre côté, il devait y avoir quatre autres personnes, en plus d’eux, dans la pièce, et ils étaient tous profondément absorbés par leur étude. Mais le risque était grand. Les rumeurs risquaient de courir et Yui aurait du souci à se faire. Elle n’était pas majeure. Il risquait gros si on essayait de lui nuire. Elle finit par se dégager de ses bras, lui offrant, cette fois-ci, un sourire désolé. Elle lui montra une chaise du doigt, l’invitant à s’assoir, pour lui tenir compagnie. Cela lui donnait aussi une excuse de faire une pause. L’idée de demander pourquoi est-ce qu’il l’avait prise dans ses bras ne lui vint même pas à l’esprit. Elle savait qu’elle aurait une réponse tordue, sur laquelle elle devrait s’étendre pour lui cracher le morceau. Ou alors, il lui répondrait de bout en blanc, sans laisser aucun suspens.
"Tu as de quoi enrichir la dernière conversation, Yui ?"
Lui dire son nom ne devrait pas l’étonner, puisqu’il était facile à trouver. Mais elle ne chercha&it pas l’étonner là-dessus. Elle se doutait qu’il n’avait toujours pas pris connaissance de son nom à elle, et qu’elle avait une petite longueur d’avance. Automatiquement, elle redevenait provocante. Juste par taquinerie. C’était instinctif et encore plus avec certaines personnes. Yui en faisait partie. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Ven 15 Jan 2010 - 21:57 | |
| Et bien. Fallait croire que les lubies éveillées de Yui le rendait un peu crétin sur les bords. Dans cette salle d’étude, il n’avait vu qu’une personne. Les autres n’avaient visiblement pas percuté son attention. Mais… qu’ils soient là ou non ne le dérangeait en rien après tout. Le psychologue eut presque comme un rictus amusé et c’est dans son rôle de touriste prétendu étudiant, qu’il prit place à côté de la jeune fille. Qui visiblement connaissait son prénom, pour le coup. -Et quel genre de questions ? Quel genre de question qui pourrait nuire, à lui, grand égocentrique ? Quel genre de question qui pourrait empêcher d’agir un tordu ? Il aimerait bien le savoir, oui. Qu’ils s’en posent des questions, qu’ils s’en reposent et qu’à cela ne tienne : Yui ne prendrait probablement jamais le temps de penser à leur répondre. Plongée dans son bouquin, une étudiante soupira bruyamment, prenant à peine le temps de relever la tête. Un bref coup d’œil agacé vers Valentine qui lui rendit un sourire, tranquillement. Amusé à la perspective de passer pour un être discret, c'est-à-dire ce qu’il n’était pas. Mais pourquoi ne pas jouer le jeu. Le psychologue est libre de ses actes, plus libre que libre, et dangereusement libre. En fin de compte, c’est une liberté qu’il s’est déjà accordée même restant au sein de l’école. On n’a qu’une vie, autant faire des conneries. Autant en faire plein à craquer, puis assumer, juste pour le plaisir de recommencer encore. C’est un truc qui s’accumule et qui à force devient une expérience. Presque un art à part entière. Quel genre de question, que toi, provocatrice, pourrais tant redouter ? Quant à la question de s’il avait quelque chose pour enrichir la conversation, Yui avait simplement haussé des épaules, parce que le silence vaut mieux parfois, que de parler pour combler le vide. Alors il avait laissé la jeune fille s’affairer à ses devoirs, sans piper mot. S’adossant sur la chaise, Valentine fit jouer un stylo entre ses doigts, et jeta un coup d’œil sur les affaires disposées sur la table. Livre, cahier, stylo… était-il venu empêcher la jeune fille de travailler ? Non au début, oui, au final. Souvenir de la vie d’étudiant, rebelote. A regarder en arrière, Yui n’avait pas pris le temps de savoir profiter de la glorieuse période qu’est celle de l’étudiant. Plongé dans les livres avec un seul et unique but tellement idiot : devenir médecin. C’est un beau rêve dit comme ça, mais Valentine, il voulait juste devenir le médecin de sa sœur. Celui qui la sortirait de son sommeil profond. Un objectif dérisoire qu’il savait naïf, mais à vouloir s’accrocher, il s’était raccroché à tout et n’importe quoi. Parce qu’au final, c’était une histoire révolue et plus jamais Eliane ne serait là, pour reformer la paire indétrônable qu’ils étaient avant. Au téléphone, elle ne reconnaissait plus la voix de Valentine, pas plus qu’elle était capable de se souvenir de son visage. Au souvenir de ces 4, 5 ou même 6 ans en arrière, le psy eut quand même un sourire narquois sur les lèvres. Parce que sourire donne l’impression de mieux faire passer les choses et que c’est un tic simple à faire. Il saisit un bouquin parmi les quelques un sortis sur la table et le feuilleta un moment. Distrait. Peux-tu ? Peux-tu me voir comme un inconnu et non « le psy de l’école » ? Parfaitement à l’aise, et parce que Yui est sûrement un de ces gens qu’on appelle les sans-gênes, il s’était rapproché de la jeune fille, l’air de se pencher pour voir ce qu’elle révisait. Mais il avait simplement griffonné rapidement un autre bout de phrase, de son écriture anguleuse et longiligne. Hors des enceintes de l’académie, le règlement n’a plus de valeur. Nous ne sommes que deux individus parmi d’autres inconnus. Yui s’accouda sur la table. Remarque, elle n’était pas plus dure, sa vie aujourd’hui. Pourtant, il s’aime bien dans la peau d’un élève. Enfin bon, même si rares sont les fois où cet égocentrique ne s’apprécie pas. Au fond, la vie d’élève lui rappelle celle qui a passé avec elle, des années dans l’insouciance. Des années de folie pure. Assis sur cette table, il les voit repasser, défiler sous ses yeux. Son regard s’attarde momentanément sur sa voisine sans vraiment la voir, puis il laisse ses yeux s’habituer sur ses longs cheveux clairvoyants encore un moment, avant de lui repiquer un bout de cahier.
Passons une journée ensemble. Me l’accorderas-tu ? En fait, que ce soit oui, que ce soit non, peu importe. Yui a décidé, et Yui fera en sorte que ça tienne la route. Une journée étudiante, une journée qui pour lui, est révolue depuis quelques années. Remonter le temps pour le ramener au présent, pour quelques heures dérobées à la volée. La journée typique d’un élève, d’une élève, peu importe. Que la journée soit fade, banale, ou extraordinaire, peu importe. Révision, sortie en ville, journée en cours, activité extrascolaire, peu importe encore. C’est le plaisir de la passer dans le rôle d’un adolescent. A ce moment, le portable sur la table vibra. Haussant des épaules, le français jeta un coup d’œil à sa montre et inscrivit, cette fois sur le dos de la main de la jeune fille : 24h00 – 1 24 heures moins une minute. Pour tout et n’importe quoi. Peut être aussi pour creuser la personnalité de cette fille qu’il ne connaît pas, mais qui d’une autre manière lui semble terriblement familière. Une journée, à Promise Marley dont il ignore tout jusqu’au prénom… à quoi ressemble-t-elle. De quoi aurait-elle envie. Il lui adressa un regard étrangement amusé, le portable vibrant encore sur la table. Que filent les minutes ...et que s’écoule le temps.
24 heures moins deux minutes. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Jeu 11 Fév 2010 - 22:11 | |
| Elle l’observait. Comme si c’était la première fois qu’elle le voyait ou la dernière fois, au contraire, qu’elle pourrait le voir. Non pas qu’il la choquait. Quelque part, c’était une sorte de fascination qui s’emparait d’elle. Promise n’avait pas eu cette impression dans la salle commune. Peut-être parce qu’elle était dans un moment d’euphorie, alors qu’ici et maintenant, elle était un peu plus sérieuse. Allez savoir. Quel genre de questions ? Peut-être le genre de questions que l’on peut se poser quand on voit un membre du personnel encadrant prendre chaleureusement dans ses bras une élève qui ne se trouve même pas dans le bon secteur. Le genre de questions perverses qui peuvent effleurer les esprits sur le type de relation que peuvent bien entretenir ces deux personnes. Ce genre de questions. Mais la jeune femme ne répondit pas. Elle se contenta de lui sourire. Elle se doutait qu’il avait parfaitement compris où elle voulait en venir. Ou alors, il était niais et descendait un peu dans son estime. Juste un peu.
Lentement, elle baissa les yeux sur le bout de papier que Yui lui donnait. Enclin d’une grande générosité de ne pas déranger les autres étudiants, il s’était lancé dans une conversation écrite, en toute discrétion. Promise lu le papier et hausse les sourcils. Alors il ne se doutait pas du tout du genre de questions que les autres pourraient se poser en les voyant ? Oh. Ou alors, il faisait exprès de ne rien y comprendre. Mais, très vite, la jeune femme finit par froncer les sourcils. Au fait, sa question à lui était plus judicieusement posée. Il ne parlait pas de ce qui pouvait se tramer dans l’esprit d’autrui. Non. Mais bel et bien dans celui de sa voisine. De Promise. Quelles questions elle pourrait redouter ? Aucune idée. A vrai dire, elle n’y avait jamais vraiment pensé. Et puis, elle répondrait à cette question lorsqu’elle serait confronter à une autre qui la piégerait. Peut-être une question sur Terry ? Ou sur un domaine tabou ? Mais elle n’en avait pas beaucoup. Alors il faudrait creuser.
La jeune femme s’était doucement relancée dans ses devoirs. Discrètement, elle jetait des regards en biais sur le psychologue, pour suivre ses faits et gestes. Elle le vit glisser un autre bout de papier vers elle. Au fur et à mesure que ses yeux parcouraient rapidement l’écriture fluide de son voisin, elle sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. Elle ouvrit la bouche, prête à répondre. Mais se ravisa. Elle n’avait pas de réponse à apporter à cela. Elle ne savait absolument pas si elle en serait capable ou non. Comment oublier la majeure partie de l’identité de quelqu’un alors que l’on sait à quoi elle voue une grande partie de sa vie ? C’est comme omettre volontairement une partie de soi. Elle leva vers lui un regard désolé. Déjà, il s’était rapproché d’elle. Elle le regarda griffonner à nouveau sur un bout de papier. Ça lui rappelait vaguement la conversation qu’ils avaient entretenue sur les limites que l’on s’impose et les limites que l’on nous impose, dans la salle commune. Elle sourit faiblement. Elle était toujours obsédée par la question précédente…
Une nouvelle phrase. Il lui demandait de passer un jour avec elle. Oui. Mais elle devrait sécher les cours. Tant mieux. Elle en avait besoin. Son père lui ferait un mot pour excuser son absence, comme d’habitude. Il lui faisait entièrement confiance, surtout au sujet de ses études. Elle en oublia presque la question de Yui qui lui turlupinait l’esprit depuis plusieurs minutes. Elle jubilait même, en essayant de cacher son état. Ce que ça lui plairait de passer une journée entière avec lui ! Elle lui offrit un grand sourire ravi. Ce qui signifiait à lui-seul qu’elle était parfaitement d’accord avec sa proposition. Elle jeta un regard au portable qui vibrait sur la table et en coupa le mode. Elle égara un regard d’excuse à la table voisine. Déjà deux étudiants avaient quitté la salle. Elle était désolée de les déranger, mais elle trouvait que Yui était une raison tout à fait valable de tout ce dérangement. Alors, là, elle se foutait un peu des autres. Elle reporta subitement son attention sur le psy quand elle le sentit s’emparer de sa main. Elle fronça les sourcils.
Promise comprenait maintenant. Il voulait peut-être revivre une de ces journées d’étudiants, comme avant. Mais elle ne pourrait pas tout à fait lui offrir ça. Elle ne pourrait pas aller en cours avec lui. Tous les professeurs du lycée le connaissaient. Donc cette option était à rayer d’avance. Elle pouvait, par contre, lui faire passer une journée d’adolescent. Mais il ne fallait pas qu’il s’attende à quelque chose de merveilleux. S’il suivait la jeune femme, il allait faire des choses banales ou bizarres, ça dépend de quel point de vue on prend le truc. Genre, passer près d’une heure allonger dans l’herbe, rentrer dans une boutique de musique et tester le piano qui nous attire le plus, manger une glace, en même temps que l’on se balance sur une balançoire… Enfin, des tas d’actes tout aussi dérisoires et triviaux les uns que les autres.
La jeune femme rangea ses affaires rapidement. En réalité, elle fourra tout à l’arrache dans son sac. Elle mit son portable dans sa poche, après avoir vu que le message était d’une amie du lycée. Elle devait certainement lui demander où elle était encore passée. Elle haussa les sourcils et se leva. Elle attrapa la main de Yui et le traina en dehors de la pièce. En même temps qu’elle refermait la porte derrière eux, elle souffle un mot d’excuse pour le bruit et le mouvement aux élèves restants. Elle jeta un coup d’œil autour d’elle, étonnée de ne voir absolument personne dans les couloirs. Puis, elle reporta son attention sur l’homme, dont elle tenait toujours la main serrée dans la sienne.
"C’est parti. Plus que vingt-trois heures et cinquante-six minutes. Allons-y !"
Elle entraina son acolyte dans les couloirs, déambulant agilement, tant elle les connaissait. Ils atteignirent rapidement la passerelle et elle commença à diriger ses pas vers les dortoirs. Il fallait qu’elle pose tout ça et qu’elle prenne plein d’autres choses. Elle marchait d’un pas joyeux, sautillant quelques fois. Elle ne lâchait toujours pas la main du psy. Saluant plusieurs élèves au passage, elle arriva dans le couloir du dortoir des filles. Ce ne fut qu’à cet instant qu’elle s’arrêta et qu’elle se posta juste en face de Yui.
"De A à Z, ces vingt-quatre heures ?"
Elle leva un sourcil. Toujours, toujours tous les deux ? Elle ne verrait pas Etienne ce soir. Mais, étrangement, elle ne fut absolument pas déçue.
"Si c’est ça, il va falloir que tu suives mon rythme…"
Elle lui offrit un sourire provocateur, voulant signifier qu’il n’en serait peut-être pas à la hauteur. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Mer 17 Mar 2010 - 15:33 | |
| Mains entrelacées, ils ne sont que deux jeunes parmi d’autres, deux jeunes qui se fondent dans la masse. Tant mieux, Valentine aime bien passer des journées un tant soit peu différentes aussi. Ça le change, au final. Du moins, de son quotidien en sens dessus-dessous. Yui est d’une humeur à passer une journée pas au bureau, comme il y est obligé –la plupart du temps- depuis son entrée à Keimoo. Et cette fille… elle lui offre ce loisir. Le loisir de revenir en arrière, comme au temps d’Eliane. Un petit moment de plaisir et 23 heures et 54 minutes à passer, en bon adolescent, comme un adolescent. On a tous des envies saugrenues un jour ou l’autre. Valentine le premier. C’est un curieux, curieux de son monde, et le montre à sa façon. Il y a toujours des choses à apprendre, qu’elles soient futiles ou primordiale. -De A à Z, confirme-t-il sans ciller. Amusé. Méfie-moi, méfie-toi. Sa provocation lui tira un sourire dans les mêmes tons. Mais au final, que peut donc craindre un psy. -Et si tu penses que je ne suivrai pas ton rythme, c’est que tu n’auras pas réussi à me l’imposer !Yui talonne la jeune fille, dans l’insouciance difficilement plus complète. Ignorant les regards étonnés des adolescentes qui les regardent passer. Ignorant le fait qu’il arrive dans le dortoir du dortoir des filles. Ignorant aussi, ce nouveau règlement étrange qui s’est mis en place, il y a si peu longtemps. 1.5. Aucun lycéen n'aura le droit de sortir de l'académie après 18h00. 8.1. Interdiction aux garçons et aux filles de s'approcher à plus de vingt centimètres. 8.2. Interdiction de s'embrasser, de se câliner. Pas de batifolage. […] Ignorant encore une fois tous les bâtons dans les roues qu’on peut lui proposer, Valentine répond simplement à la provocation de la tentatrice. On répond à la provocation par la provocation, dans le jeu de voir cet engrenage se perpétuer. Il lui relève le visage du bout du doigt, un sourire presque sournois au coin des lèvres. Et, ignorant le tout au tout, Yui se prend le loisir de s’amuser, aujourd’hui. C’est moi qui te suis, alors à toi d’innover. -…Je veux du nouveau, juste du nouveau, et je te suis. 11. Aucun rapport amitié, amoureux ou sexuel ne peut se faire entre un élève et un professeur. Des lèvres sournoises contre des lèvres provocatrices, pour un baiser moins chaste que la dernière fois où ils se sont vus. Un règlement n’est pas sensé être implicite et Yui n’est pas un professeur. Peut-il donc passer au travers des limites posées ? On ne se pose plus vraiment de question, ni chez l’un, ni chez l’autre, on agit. Au gré de nos envies. C’est une part qui est appréciable chez cette fille. Et voilà, comment en une seule action, on viole au moins une quinzaine de règlements. Et cette sensation de ne pas l’avoir respecté, donne un glorieux sentiment d’avoir bien accompli quelque chose. Dommage qu’il n’y ait pas le temps d’apprécier la chose à peine plus longtemps... -Hé là ! Vous deux ! s’écrie une voix furax, de l’autre bout du couloir. Diantre, c’est la concierge. Ah la concierge… encore elle. Mais qu’est ce qu’elle fout encore ici ? Yui se sentirait parfois épié et suivi par cette mégère. –Qu’est ce que j’ai vu !Et voilà qu’elle crise. Quelle plaie. La concierge est jolie, mais son comportement la rend moche. –Monsieur Valentine! Que faites-vous si loin de votre bureau! aboie-t-elle encore. –Mademoiselle Elise, mais quel déplaisir de vous voir de même si loin de votre bureau ! répond tranquillement Yui, passant un bras autour des épaules de l’adolescente, la Tentatrice. C’est une provocation qui fait évidemment, réagir Miss Elise au quart de tour. –Je suis dans le cadre de mes fonctions, contrairement à vous deux ! Si j’en touche deux mots au nouveau directeur, soyez certains que… –Allez-y, allez donc rapporter tout ce que vous voudrez, miss Elise, ne vous gênez donc pas, allons… Le regard de mademoiselle Elise se charge d’éclairs. Qu’est ce qu’elle est belle, cette demoiselle. Mais son caractère la rend vraiment moins belle. Assurément, Valentine ne l’aime pas beaucoup. Pendant ce temps, il dépêche l’adolescente à aller chercher ses affaires dans sa chambre, après que la concierge l’ait presque agressé pour avoir son identité. Une concierge qui ne connait même pas le nom de ses élèves, si c’est digne d’une véritable concierge… –De toute façon, disait-elle encore, alors que Valentine, adossé on ne peut plus tranquillement au mur, attendait la Tentatrice. –Voilà trop longtemps que vous avez dépassé le cadre de vos fonctions ! Et quand cela se saura, figurez vous que… Donnez-moi, donnez-moi de quoi me boucher les oreilles. Cette femme est insupportable. Alors Valentine lui tourne le dos, puis rentre dans la chambre où est rentrée l’adolescente tout à l’heure. Pour la refermer sur le nez de l’autre. La fermer à clef. Comme ça, c’est fait. –Prête ? demande Valentine, avisant finalement la jeune fille, comme si de rien n’était. La concierge est bien une concierge, elle se mêle absolument de tout, de trop de choses. Il ne faut pas y porter grande attention, pour ne pas se noyer dans son engrenage. Quant à l’issue… il restait probablement celle de la fenêtre, sait-on jamais. Ou pas. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Mer 24 Mar 2010 - 14:21 | |
| Qu’elle ne réussira pas à lui imposer son rythme ? Elle ne comptait pas le faire, c’était certain. Cet homme était majeur et vacciné, alors pourquoi vouloir le commander ? Non, elle le laisserait entièrement libre de partir quand bon lui chante. Que ce soit au bout de vingt-quatre heures ou même au bout de trois heures. Il était libre. Et c’était ce que Promise pouvait le plus sentir en ce garçon : son besoin de ne pas être attaché. Enfin, c’était ce qu’il lui semblait. Elle prit donc la résolution de na rien répondre, se contentant de lui sourire. Elle ne l’obligerait à rien. Mais ce sourire fut rapidement remplacé par des joues empourprées. Le psychologue lui releva le visage par un simple contact du doigt. Sans se dérober, elle posa d’abord son regard sur ses lèvres, s’étirant en un sourire qu’elle jugea malicieux. A quoi pensait-il maintenant ? C’était aussi son côté imprévisible qui séduisait la demoiselle. Puis, ses yeux se noyèrent dans les siens. Du nouveau ? La petite blonde ne le connaissait pas. Comment pouvait-elle savoir ce qui allait être nouveau ou pas, pour lui ? Elle haussa les sourcils. Tant pis, s’il la suivait, et tant qu’il la suivait, c’est qu’elle lui offrirait ce qu’il attend. Elle décida de se lancer à corps perdu dans ce nouveau jeu. Car, pour elle, c’était belle et bien un jeu. Il ne se jouait qu’à deux et voilà les deux héros.
Promise sentit les lèvres froides de l’homme venir se poser sur les siennes. Comme par réflexe, elle ferma les yeux, se laissant entièrement faire et répondant même à ce baiser. Il était différent de ceux qu’ils avaient échangés dans la salle commune. Elle se sentait au fond d’elle. Mais elle ne saurait dire vraiment pour quoi. Moins distants ? Ou alors, avec une idée derrière la tête ? Elle n’en savait rien, mais elle en profita. Ce garçon l’attirait. Pas sexuellement parlant, non. C’était comme une sorte d’aiment. Ou une drogue. Elle avait eu besoin de sa dose, de la même façon qu’un junkie a besoin de son rail de coke. Et il la lui donnait. Parfait, que demander de plus ? Si ce n’est que, secrètement, elle voulait quand même plus… Le baiser fut rompu. La magie qu’il exerçait se brisa dans le même coup. Une voix criarde de mégère en furie s’éleva dans le couloir. Lourde et sévère. Mon dieu ! Une pensée pour le nouveau règlement effleura son esprit. Instinctivement, sa tête rentra dans ses épaules et elle serra les dents. Quand elle tourna son regard vers la femme qui les avait interpelés, un frisson parcourut son échine. Elle n’avait pas peur de la sanction qu’elle risquait. Elle avait surtout la trouille de la sanction que lui risquait. Perdre son boulot ? Être muté ? Être renvoyé pour faute professionnelle ?
Elle ne voulait pas. Comment elle ferait pour passer ses journées sans son narcotique ? Sans s’en rendre réellement compte, Promise lança un regard noir à la concierge. Elle allait rétorquer une réplique tranchante, mais son chevalier servant prit cette initiative avant elle. Tandis qu’il bavassait avec cette femme, elle en profita pour vider le chargeur du révolver de ses prunelles. Yui provoqua la vielle fille en passant un bras autour des épaules de la pianiste. Cette dernière ne quittant toujours pas du regard la peau de vache. Qu’est-ce qu’elle foutait là ? Elle ne la voyait jamais lorsque l’on avait besoin d’elle, mais elle débarquait pour un simple baiser ?! Ben voyons ! A cette pensée, la petite blonde lança un regard en biais au psychologue. Elle aurait préféré qu’ils ne soient pas interrompus. Elle n’imaginait aucune suite… Enfin, pas dans l’immédiat. Mais elle voulait encore les lèvres de cet homme contre les siennes. Elle fut arrachée de ses pensées quand elle sentit que le ton montait rudement et que le jeune homme lui fit comprendre qu’elle devait se dépêcher. Elle ouvrit la porte de la chambre et y entra rapidement. Une fois à l’intérieur, elle ferma les yeux, lâchant un profond soupir. Même si cette concierge ne connaissait pas son nom – comme elle venait de le montrer – elle pouvait très bien noter le numéro de la chambre pour le retrouver. Enfin bon…
Promise jeta un coup d’œil derrière elle, par-dessus son épaule. Encore une chose à laquelle elle ne s’attendait pas de la part de cet adulte si égocentrique : son côté protecteur. Peut-être qu’il n’avait pas réalisé. Peut-être qu’il ne faisait que provoquer. Mais le fait de passer son bras autour des épaules d’un plus jeune signifie quand même qu’on veut un peu le protéger, non ? Surtout quand le bourreau qui le harcèle peut tout balancer d’un claquement de doigt. Et puis, le fait qu’il lui fasse comprendre de rentrer dans la chambre et qu’il resta donc seul avec ledit bourreau. La jeune femme se mordit la lèvre inférieure, avant de secouer lentement la tête de gauche à droite. Elle se faisait des films. Elle se hâta enfin en jetant son sac sur son lit. Elle ouvrit son armoire et en sortit un autre. Fouillant encore un peu partout dans sa chambre, elle y mit son portefeuille, un bloc de dessin et un crayon avec une gomme, des gâteaux, une bouteille d’eau, du déodorant et un T-shirt de rechange, et ainsi de suite… Des objets les plus nécessaires, à ceux les plus triviaux.
Voilà trop longtemps qu’il avait dépassé le cadre de ses fonctions ? Promise eu comme un bug de système en attendant la concierge menacer le psychologue. Rapidement, elle se fit un petit scénario : cette femme les avait vus s’embrasser… Et elle disait cela ensuite. Si on rapproche le tout… Combien d’étudiante ce mec embrasse-t-il par jour ? Fronçant les sourcils, l’artiste observa les deux adultes dans le couloir. Comment est-ce qu’elle pouvait interpréter cela ? Elle serra les poings et se laisse tomber sur le lit. Allons ! Mais qu’est-ce qu’il lui prenait ? Yui ne lui appartenait aucunement. Il était libre. Juste quelques temps plus tôt, elle s’était promis de ne pas l’enfermer et voilà que maintenant, elle fulminait. Etait-elle jalouse ? Un frisson parcourut ses bras, jusqu’à sa nuque, puis elle soupira. Non, cet homme n’était pas à elle. Ils n’étaient que divertissement l’un envers l’autre. D’ailleurs, c’était bien ce qu’elle allait lui faire faire aujourd’hui, non ? Elle allait le divertir, en essayant de le sortir un peu de son train-train quotidien. Son regard se perdit par la fenêtre.
Puis le jeune homme rentra dans la pièce, fermant la porte au nez de la bonne femme et la verrouillant. Prête ? Oui, elle l’était. Plus que jamais. Il ne lui en fallait pas beaucoup pour se ressaisir. De toute façon, elle pourrait toujours entrer dans le vif du sujet durant ces vingt-quatre heures. Ou plus tard. Si Yui ne se faisait pas renvoyer. Elle lui sourit, opinant du menton. Elle regarda tour à tour la porte, puis la fenêtre. Ils n’étaient pas très haut, il était donc très simple de se faire la malle pour la vitre. Mais, pourquoi ne pas attendre un peu que la vieille pie se calme et sortir quand elle aura déserté ? On l’entendait encore fulminer dans le couloir, mais elle commençait à se fatiguer. Ils perdaient du temps, mais tant pis, ils le rattraperaient cette nuit. Promise ne bougea pas de son lit. Elle s’assit en tailleur et tapota le matelas à côté d’elle, invitant l’homme à l’y rejoindre s’il le voulait.
"Tu te souviens de notre première rencontre ? Je t’avais dit qu’un visage comme le tien ne pouvait pas s’oublier… Je crois que j’avais raison. Tu es exactement comme dans mes souvenirs."
Même si cette première rencontre ne remontait pas à si longtemps que cela, elle aurait pu oublier certains détails de son visage. Mais non, elle s’en souvenait parfaitement. Elle ferma les yeux décontractant ses épaules. Et enchaîna :
"Tu m’as aussi dit que tu attendrais d’être enchanté pour te présenter… Tu le ferais maintenant ?"
Elle ouvrit un œil, fronçant le nez, pour poser son regard borgne sur l’homme. Elle finit par ouvrir les deux yeux et un sourire éclaira son visage. Certes, il n’avait plus besoin de dire son nom, puisqu’elle le connaissait. Mais on pouvait se présenter de bien des manières et elle se demandait ce qu’il trouverait à inventer. Elle le savait original, mais il était aussi merveilleusement surprenant. En y repensant, il ne connaissait toujours pas l’identité de cette fille, tout comme la concierge…
Promise se leva soudainement, comme pris d’un sursaut. Elle fit le tour de la pièce, pour voir si elle n’avait rien oublié qui pourrait lui servir. Pour elle-même, elle opina du chef et regarda son acolyte. Elle se dirigea vers la porte, y collant son oreille. La mégère ne semblait plus camper devant. Prudemment, elle tourna le verrou et ouvrit la porte, passant sa tête dans l’encadrement. Elle se tourna vers Yui et dans un rire d’enfant heureux, elle plaisanta :
"Cerbère ne veille plus la porte, on peut y aller…"
En imaginant cette femme, qui avouons-le était jolie, caricaturée en molosse, elle n’avait pu retenir son rire. Elle sortit de sa chambre en se calmant, mon un sourire joyeux continuait d’ourler ses lèvres. Elle tendit la main au psychologue, attendant qu’il la prenne. Plongeant ses yeux dans les siens, elle lui offrit un clin d’œil complice.
"D’abord, commençons par quitter cette académie…" |
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| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Sam 24 Avr 2010 - 21:14 | |
| Sans aucun doute, Yui Valentine avait déjà outrepassé le cadre de ses fonctions depuis que cette fille les avait enfermés tous les dans la salle commune, la dernière fois. Il n’était pas censé y être. Et outre cette tentatrice, il avait déjà joué avec la patience de l’administration, omettant de signer des papiers, falsifiant des documents pour quelques un de ses patients, passant son temps à chercher des noises à Mademoiselle Elise –tout comme elle lui en cherchait-, se porter mystérieusement absent, travailler à temps partiel au luXure’s Café, etc. etc. etc. On ne les compte plus ses folies, à Monsieur Valentine. Pour autant, le dirlo ne l’a pas encore renvoyé… Pas encore. C’était à se demander pourquoi. Et pendant ce temps, l’autre pie jacasse, jacasse encore sans relâche. Des pies comme ça, on en fait pas deux, -et heureusement encore-, parce qu’à elle seule, c’est une véritable plaie. Yui en a plus qu’assez et vient s’assoir mollement sur le lit, avisant la porte, d’un regard exaspéré. Quelle plaie, vraiment. C’est dur d’être un psy, diantre oui. A l’entendre penser ainsi, on s’y laisserait avoir… -Notre première rencontre ? répète Valentine, pensif. A quand remonte-t-elle ; à des jours, des semaines, si ce ne sont des mois entiers. L’impression de l’avoir vu la veille pourtant, semble vouloir contredire le temps. –Et bien… peu de gens changent en l’espace de si peu de temps. Yui adopte alors un air amusé : comment cette adolescente se souvient de lui, c’est intéressant à savoir. On ne considère jamais une personne de façon identique : chacun la perçoit à sa propre manière. Et lui alors, comment perçoit-il cette inconnue ? Cette inconnue pas si inconnue que ça… Et justement, Valentine ne le sait pas. Alors si lui ne le sait pas, qui d’autre ? Mais nous ne sommes pas là pour se tourner ce genre de questions sans fin. Et la demoiselle soulève un autre point. Ah oui, se présenter. Se présenter comme je m’appelle Valentine, je suis le plus jeune psychologue de la terre, et je m’adule. Ça va ? Haha. Que valent quelques piètres et vulgaires mots face à des moments vécus? Pas grand-chose, au final. La dernière fois, il était sur le point de le faire, avant de se raviser. Sortant d’un coup statique de la situation statique… situation qui d’ailleurs, ne lui avait pas vraiment donné l’occasion d’y songer. -La dernière fois… tu te souviens de tous ces détails ? s’amuse Valentine, qui lui non plus, n’a pas oublié. C’est vrai, la dernière fois, Yui était d’humeur à bavasser sur tout et n’importe quoi, avant de se rebuter sur le jeu de la tentatrice. Un jeu qu’il avait fini par s’approprier aussi. Attrape-moi, attrape-toi, on ne sait plus bien qui du pêcheur ou du poisson se fait attraper mais au fond, ce sont des rôles qui s’inversent et reviennent à la normale eux. Entre Valentine et… et ? Le temps n’est pas aux questions, et voilà qu’elle se relève prestement, à rassembler ses affaires puis à aller filer vers la porte, où le cerbère ne s’y trouve visiblement plus. En même temps, ça ne l’étonne pas, au jeune homme : il la sait impatiente et bornée, cette concierge. Le psychologue se relève et la rejoint, jetant un droite-gauche dans le couloir, pour confirmer les dires de la jeune fille. Cette note d’enthousiasme mêlée à une certaine insouciance chez cette jeunette, enthousiasme Valentine. - Accompagnant l’élève, Yui reste un moment pensif. Avant de se lancer dans ce qu’il considère, comme une présentation. -C’est drôle. Tu sais que je m’appelle Valentine. Yui Valentine. Et que je suis psychologue. Donc plus vieux que toi. -Et aussi que je n’aime pas la concierge. Ce n’est pas important, peut être. Ça l’est pour les concernés. Ils ne peuvent pas se voir. Se blairer. C’est devenu une haine « physique ». Entre chat et rat. En traversant la rue, l’entrée de l’école disparait, derrière eux. Aujourd’hui, c’est le hasard qui conduit les pas de Valentine. Et le hasard, c’est cette fille. Dit comme ça, ça sonne comme si c’était un coup de foudre. Imaginons deux hommes dans un café. L’un d’entre eux dit à l’autre : « Et le hasard, c’est cette fille. C’est cette fille, et pas une autre. » Tourné sur un ton un peu à la old-french, ça sonne vraiment comme le coup de foudre. Haha. Ça ne l’est pas. -Tu sais que aussi que j’enfreins les règles de l’école quand nous y sommes. Que nous apprécions l’anticonformisme, poursuit-il tranquillement. Et que la manière dont j’agis avec toi, semble la même que si nous étions proche. Assez proche, relativement proche. De l’extérieur, on n’y verrait que du feu : un couple. Il s’arrête un instant pour jeter un coup d’œil à l’élève. -Mais on sait que ce n’est pas le cas. A qui incombe la faute ? La bonne question, c’est plutôt : faut-il déjà crier coupable. De toute façon, Valentine serait surement le coupable, et l’accusé dans l’histoire. Mais il continuera d’avoir ce penchant pour les choses douteuses. Perverses ? Non. Enfin, peut être oui et non. Douteuses, pour ce qui est tordu. Original. Excentrique. Sa façon de vivre déplait. Mais lui, il s’y retrouve bien. Qui est cette adolescente ? Il ne sait pas. Il verra. Tous deux ne se connaissent pas. Guère plus que la dernière fois. –Sous certains angles, tu ressembles à Eliane. D’apparence. Dans ce monde, quelque part dans sa nouvelle vie, que fait-elle? C’est aussi complexe que de répondre à où mènent ses pas à présent. –Eliane, c’est ma jumelle. Mais elle ne se rappelles plus de moi depuis quelques années.Une jumelle qui ne me ressemble pas. Nous ne nous ressemblons pas. Un rire étrange et bref s’échappe dans les airs. –Et voilà, maintenant tu sais aussi que tu ressembles à une autre.Ça fait déjà beaucoup d’informations. Peut être pas assez. Et une brise passe sur les visages. |
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| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Dim 2 Mai 2010 - 21:36 | |
| Une certaine fierté s’empara d’elle. Il fallait avouer que le fait de sortir avec Yui pendant vingt-quatre heures l’angoissait. Et si sa vie, vécue de cette fois, à ses côtés, ne plaisait pas à l’homme ? Et si elle l’ennuyait ? Et s’il changeait complètement d’avis sur son compte ? Quoi que… Quel était son avis sur son compte ? Elle n’en savait rien, après tout. Ce flot de question la rendit évasive l’espace de quelques secondes, juste le temps de fermer la porte de sa chambre à clé et de parcourir quelques mètres. Finalement, un sourire vola ses lèvres. Elle était idiote de s’inquiéter pour tout cela. Certes, elle appréciait beaucoup la compagnie du psychologue, mais si lui ne l’appréciait plus, suite à cette expérience, c’était que leur relation n’aurait pas pu fonctionner. D’ailleurs, quel genre de relation entretenaient-ils ? Il n’était ni amis, ni amants, ni psy/patient, ni… Rien, au final. Promise se serait attendue à ce que son acolyte remarque son égarement, mais apparemment il n’en fut rien, puisqu’il devait lui-même être perdu dans ses pensées. Elle le nota quand elle tourna la tête vers lui, souriant gaiement. Après tout, il n’était plus l’heure de se turlupiner intérieurement. Elle s’était déjà lancée dans leur journée. Il n’était pas question qu’elle en laisse filer un seul moment en pensant à tout ce à quoi elle pourrait penser plus tard. Quand la voix du psychologue s’éleva, elle tendit l’oreille. Elle ne le regardait plus maintenant, se concentrant sur le chemin qu’ils devaient parcourir pour sortir de l’enceinte de l’académie. Elle n’en était plus sûre, mais il lui sembla avoir lu dans le nouveau règlement que les élèves n’avaient pas le droit de quitter l’établissement. Mais, après tout, elle, tout comme lui, avait déjà enfreint une bonne dizaine de règles rien qu’en se parlant. Elle ouvrit la dernière porte qui les séparait de l’extérieur, laissant Yui passer avant de la laisser retomber, mais ce geste était exercé en toute mécanique, puisque son attention entière était centrée sur les dires de son partenaire. Ils traversèrent enfin la rue. Une fois arrivée sur le trottoir d’en face, Promise jeta un coup d’œil au-dessus de son épaule, pour voir une dernière fois l’académie. Tout y semblait calme, mais elle savait l’énergie bouillonnante que pouvaient contenir en eux tant d’adolescents et de jeunes adultes. Elle sourit, pour elle-même, comme mélancolique. Elle écoutait toujours ce que lui disait son conjoint. Pendant un instant, il resta silencieux. Elle ouvrit la bouche pour lui répondre que, même si elles pouvaient connaître tout ça, ces détails, qui pouvaient être plus que des détails lorsque l’on savait apprécier tout ce qui comptait, mais aussi tout ce qui paraissait trivial, elle ne le connaissait pas. Et même si elle était de ceux qui apprécient tout ce qu’on pouvait leur donner avec sincérité, enthousiasme, envie de partage… Elle ne le connaissait pas. Son sourire s’atténua un peu quand il la compara à une inconnue pour elle. Une nouvelle fois, elle s’apprêtait à prendre la parole pour lui demander qui elle était. Qui était donc cette Eliane ? Mais il répondit avant qu’elle n’ait pu dire quoi que ce soit. Elle fronça les sourcils et, alors que, jusqu’à maintenant, elle regardait devant elle pour savoir à peu près où ils allaient, elle tourna lentement la tête vers lui. Son sourire avait quitté ses lèvres, son air était plus grave. Elle savait écouter les autres. Elle l’entendit rire, mais c’était comme si tout cela paraissait loin. Son pas ralentit petit à petit, jusqu’à ce qu’elle s’arrête complètement. D’instinct, elle tendit le bras, pour frôler la main de son complice. Quand ses doigts passèrent sur les siens, elle les agrippa doucement, comme pour ne pas briser une délicate œuvre d’art. Et c’était ce qu’était cet homme : une œuvre d’art à lui-seul. C’était ça. Et c’était aussi pour cela qu’elle l’aimait. Elle aimait sa compagnie, son esprit, ses idées, son égocentrisme et son corps. Et peut-être plus encore, mais c’était déjà pas mal pour leurs débuts. Peu à peu, alors qu’elle le détaillait en silence, comme si elle essayait de lire en lui, un nouveau sourire chassa cet air sombre qui couvrait son visage. Elle s’avança vers lui et, de sa main libre, elle lui caressa la joue. Oui, vu comme ça, ils avaient tout l’air d’un couple. Et cette idée la fit sourire davantage. Non pas que c’était ce qu’elle voulait, mais savoir qu’il devait être beaucoup plus vieux qu’elle et qu’ils semblaient se comporter d’égal à égal lui était plaisant. Arrogant comme il pouvait l’être de par le fait qu’il s’aime un peu trop, il lui sembla que jamais il ne l’avait regardée avec condescendance. Certes, elle n’était pas dépourvue de maturité, mais elle n’était rien d’autre qu’une gamine pour lui. Une gamine parmi tant d’autres gamins dans cette université. Rien de plus, rien de moins. Elle finit par noyer ses yeux dans les siens, après les avoir laisser vagabonder sur la ligne de son nez, le tracé de sa bouche, la générosité de ses pommettes… "Dis-moi qui elle est."Par-là, elle n’entendait pas de savoir comment elle était physiquement. Peut-être pas non plus savoir quel état son caractère. Mais savoir ce qui, en elle, pouvait faire sourire, faire rire, faire pleurer, vexer, énerver, blesser, plaire, dégoûter… Enfin ce qui, en elle, pouvait faire vivre cet homme. Après tout, on dit que les faux-jumeaux ne se ressemblent pas. Mais, on a beau dire, si l’un d’eux s’éteint, d’une façon ou d’une autre, le second en pâti. C’est bien connu. Ils sont liés à jamais. Elle ne le quitta pas des yeux, attendant simplement qu’il réponde. Promise sentit brutalement son cœur se soulever dans sa poitrine. Sans se poser de questions, et parce qu’il n’y avait rien à se demander, elle se hissa d’un geste fluide sur la pointe des pieds et déposa un baiser furtif à la commissure des lèvres du psychologue. Elle voulait, elle espérait qu’il réponde à sa question. Mais ce geste signifiait aussi que s’il ne voulait pas le faire, elle ne lui en tiendrait absolument pas rigueur. Elle se recula alors un peu, mais ne lâcha pas la main de l’homme, qu’elle tenait toujours serrée dans la sienne. Elle lui offrit un sourire radieux, penchant la tête légèrement sur le côté. Elle finit par reprendre sa route, entrainant l’adonis sur ses pas. Muette, mais toujours souriante, elle fit quelques mètres. Un frisson parcourut son corps lorsqu’une nouvelle brise passa son sa peau. Par ce léger spasme, ses doigts se contractèrent un peu plus sur la main qu’elle tenait toujours. Ils tournèrent à un angle et elle aperçu le petit café qu’elle avait découvert par hasard un jour de forte pluie. Elle était venue s’y abriter, ne passant pas consommer quelque chose, puisqu’elle n’avait pas d’argent sur elle. La voyant trempée et transis de froid, le patron lui avait gentiment offert un chocolat chaud, après l’avoir installée à une table à côté d’un radiateur. Depuis, elle se faisait un devoir d’aller dans ce petit pub au moins une fois tous les quinze jours. Jusque-là, elle y était toujours allée seule. Cette fois, sa routine allait en être un peu changée. Ce qui n’était pas pour lui déplaire. Elle traversa la route et sauta sur le trottoir, saluant avec enthousiasme les serveurs qu’elle connaissait bien maintenant. "Je vous présente Yui. C’est un…""Tu nous amènes enfin ton petit-ami, Pom’ ?" C’était le gérant. Sa voix gutturale broya le calme du café. La jeune femme resta d’abord bouche bée, encore ahurie qu’il lui ait coupé la parole pour poser cette question. Finalement, elle sourit amicalement, alors que ses joues prenaient une jolie teinte rosée. Elle jeta un coup d’œil à sa main, toujours jointe à celle de Yui. Elle haussa les épaules, au même titre que les sourcils, s’excusant par ce geste enfantin. Elle laissa alors cette main lui échapper, alors que le commerçant posait sa main sur sa tête, lui ébouriffant les cheveux. Elle rit et se recoiffa rapidement. "Tu sais bien que je n’ai d’yeux que pour toi et ce bon chocolat que tu me fais."Ce fut à l’homme de rire et il lui indiqua la table la plus isolée. "Je vous laisse vous installer, les tourtereaux !" Les joues de l’étudiante ne firent que s’empourprer davantage. Elle ne l’avait pas contredit. Elle se rendit soudainement compte qu’elle n’avait pas nié être en couple avec le psy. Elle secoua doucement la tête de gauche à droite, commençant à se diriger vers la table qu’il lui avait indiqué. Elle s’assit et fit un sourire à son acolyte pour qu’il fasse de même. Elle noya ses yeux dans les siens. "Il prend les choses un peu hâtivement, mais il n’est vraiment pas méchant."Elle jeta un coup d’œil au bar, avant de croiser ses mains sur la table et de se pencher un peu, comme pour faire une confidence à son voisin. "Ceci dit, la prochaine fois, il va me demander pourquoi je ne suis pas avec toi."Elle rit encore. Un serveur vint prendre leur commande. Il ne prit même pas la peine de demander à la jeune femme ce qu’elle prenait. Toujours la même chose : un chocolat liégeois. On ne change pas les bonnes habitudes hein. Quand il fut parti, elle sortit son paquet de cigarettes et en alluma une, avant de poser l’étui sur la table. Elle l’alluma et tira une latte, prenant soin de ne pas expirer dans la direction de son vis-à-vis. Elle s’étira sur sa chaise et bailla. Quand elle se remit dans une position correcte, elle admira encore Yui. Elle fit une moue à la façon de ma sorcière bien-aimée avec son nez et aspira une nouvelle fois sur sa clope. "Yui ? Je ne pense pas que tu sois si égocentrique que tu le prétends…"Elle marqua un temps de pause, prenant un air un peu plus sérieux. "Je ne peux pas en être sûre, je ne te connais pas, mais… Pourquoi être psy, pour de petits adultes mal dans leur peau, pourquoi me suivre, moi, gamine comme une autre ? Tu observes aussi très bien : la comparaison d’une inconnue, moi-même, avec Eliane, ta propre jumelle ?"Un nouveau temps de pause, une nouvelle taffe. "Serait-ce une façon de te protéger ?" |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Dim 16 Mai 2010 - 23:22 | |
| Brise fraîche, brise de midi. Promise ressemble à Eliane ; sous un certain angle, elle lui ressemble. Physiquement. Et qui est Eliane, c’est une bonne question, parce qu’Eliane a changé. Le monde évolue avec le temps mais Valentine a pris son temps pour supporter un tel changement. Il s’arrête brièvement lorsqu’elle s’attarde sur lui, puis reprends bientôt la marche, non sans lui avoir ébouriffé la tête. -Qui elle est ? Hm. Ce n’est qu’une idiote, commence-t-il, un sourire plus franc aux commissures des lèvres. -Une idiote qui savait ce qu’elle voulait… Je dirai qu’elle était ce que je n’étais pas. C’est étrange d’imaginer Eliane sous un autre caractère. Comme celui de l’adolescente qu’il accompagne. Eliane, il y en aurait des quantités à en dire, durant des heures à ne plus finir si bien qu’en fin de compte, Valentine ne sait pas comment il pourrait synthétiser en de simples mots. Et alors que l’adolescente va de l’avant, Yui finit par retrouver un semblant de sourire amusé, un sourire bien moins sournois comme il laisse entrevoir la plupart du temps. Eliane le tire en arrière pendant que Promise l’amène à basculer en avant, Promise comme il n’en connaîtra pas encore l’identité. Il est temps de tourner la page. - Je vous présente Yui, et c’est un psychologue. Qu’y a-t-il d’autre à dévoiler, pas grand-chose en réalité. Petit ami ? Valentine salue silencieusement le gérant, très amusé à cette pensée. Le psychologue de Keimoo s’amouracherait d’une élève de son école, voire même d’une de ses patientes. Qui sait. Ah la belle image de tourtereaux. Après tout, on ne dit que ce qu’on voit, et Yui est le dernier à chercher à contredire tout ce qui se dit. Il ne nie pas mais laisse aller les choses. Rumeurs, rumeurs, et bruits qui courent. Pom’, c’est ainsi donc qu’on appelle cette fille. Pom’, pom’, pomme. Une pomme qui rougit comme une adolescente embarrassée. De l’embarras comme elle n’en n’aurait pas exprimé lors de leur première rencontre, dans la salle commune. -Tu m’étonnes, c’est après tout l’image qu’on renvoie à nous deux, se moque Valentine, attardant momentanément le regard sur le gérant. S’installant tranquillement sur son siège, il finit par croiser, celui plus expressif, de la Pomme : ce sont des yeux d’un vert où plongent des éclats jaunes, certains plus clairs, d’autres plus sombres. Des yeux qui cherchent à capter l’attention de leur cible, un regard qui en dit plus que ce qu’un coup d’œil anodin laisserait entendre. –Et dans ce cas, la prochaine fois… que lui répondras-tu ? Une question si abrupte pour l’once de douceur qui passe en cet instant. Yui, de son air posé, ne cille pas, plissant un moment des yeux, comme s’il scrutait une réponse dans les iris. Avant de les détourner. Pom’ est une élève, il est psy et ne serait-ce que pour cette raison, que l’adolescente devrait se dissuader de le dévisager ainsi. Celles qui l’ont fait auparavant, n’en n’ont jamais trouvé leur bonheur. Ni ne l’ont partagé. La voix de la jeune fille le ramène au bon lieu. Elle a le rire facile. -Si moi je ne suis pas égocentrique… souffle Valentine à travers la fumée qui s’échappe de sa tasse. S’il n’est pas égocentrique, alors la terre tourne à l’envers, alors une Pomme et un Psy ne se trouve dans ce pub, pas plus qu’ils ne partagent un verre ensemble. Mais les perceptions ont toujours été différentes selon les personnalités. –…Tu as le droit de penser ce que bon te semble… Pom’. –…Et fumer est mauvais pour la santé, fait machinalement Yui, levant les yeux au ciel, avant de saisir la cigarette calée entre les doigts de la fumeuse, pour en aspirer lui-même une latte avant de la lui rendre. –Oui, tu peux bien penser ce que bon te semble, mais si tu te leurres, je n’y pourrai malheureusement rien. Passe un silence qui fait peser les mots, pendant que Valentine laisse passer une gorgée de thé bien brûlante. Un sourire plus mesquin revenant se ficher sur ses lèvres. C’est une première qu’on lui pose directement ce genre de question. Qu’est ce qui, à un moment dans sa vie, l’avait poussé à se tourner vers la psychologie. Celle des autres. Les réponses à ces questions sont l’histoire de presque toute une vie. -Et bien… je m’étais engagé en médecine pour ma sœur. A l’époque, j’étais assez naïf et aveugle pour croire que c’est moi qui trouverais le remède miracle, sourit-il –plus à lui-même qu’autre chose-, riant de sa propre bêtise. Le nez dans les bouquins sans plus regarder comment le monde tournait autour de lui. - Il y avait aussi, en ce temps, une autre patiente… une jeune patiente à qui j’allais rendre visite de temps à autre, à la fin de mes cours, et de fil en aiguille, de plus en plus fréquemment. C’est une patiente avec qui j’ai eu l’audace de croire qu’elle sortirait de ce lit. Oh elle a tenu a tenu longtemps, longtemps… longtemps avant de succomber à ses traitements. Et alors, j’ai commencé à réaliser que je n’étais pas fait pour sauver la vie les gens. Première blessure narcissique : tout n’est pas possible. Eliott C. de Rochefort –de son identité d’origine- n’était pas le super héros qui envoie valdinguer la mort loin des gens. Expliquer ensuite pourquoi un type censé faire son boulot comme il faut, n’a pas réussi à maintenir une vie entre ses mains aux familles et aux proches, Valentine ne sait pas le faire. -Peu après, j’ai appris le réveil d’Eliane qu’on avait plongé dans un sommeil artificiel depuis des années, explique encore Valentine, sucrant distraitement son thé. –Il y a des choses auxquelles la médecine est impuissante, Pomme. Sinon à l’heure qu’il est, … à l’heure qu’il est, nous n’en serions pas là. On aurait fait en sorte qu’Eliane retrouve sa mémoire, qu’elle n’oublie rien de ses souvenirs d’antan. Mais ce n’est pas le cas. Le psychologue eut un sourire franc. C’était une histoire telle qu’elle était, et avec le temps, il avait appris à s’y adapter. Il n’y avait plus de quoi s’y apitoyer dessus, quand bien même certains moments nostalgiques revenaient parfois. De plus en plus rarement. C’est une page qui se tourne, et Yui est resté trop longtemps figé dessus, alors qu’il n’est pas une personnalité à faire du sur-place. Eliane est la seconde blessure narcissique de Valentine. Valentine, qui n’a jamais vraiment cherché à se cacher de quoique ce soit. Parler de lui est une chose qu’il sait le mieux faire, après tout. Et en racontant sa vie comme un vieillard à sa tasse de café, il ne fait que répondre à la question que la pomme lui pose. Simplement. –Alors pourquoi avoir choisi d’être psy, on en vient au fait. Je ne sais pas. Il y a quelque part, une certaine adolescente têtue comme une mule, qui m’y a incité. Elle s’appelle Kana, peut être aura-tu déjà entendu parler d’elle, elle est à l’académie. Kana dont il se demande où elle est. Pour une fois. … Kana, à qui il n’a jamais adressé un regard reconnaissant, pas même un merci. Rien. Kana, qu’il aurait aimé croiser au moins une fois à l’école. L’évite-t-elle, ou bien est ce lui qui la fuit. Valentine ne s’est pas posé la question. Elle est sa troisième plaie narcissique. Vraiment, l’Homme n’est pas un être invincible. Les hommes au masculin non plus. Quelle sombre constatation. –Pour vouloir être psychologue et entendre le problème des autres à longueur de journée, il faut vouloir le faire… il faut être sacrément dérangé de l’intérieur, se moque Valentine. –Mais c’est un travail qui me correspond le mieux. Pour ne pas dire moins violent que la médecine. Est-ce un boulot par dépit ? Est-ce de la lâcheté. Peut être que oui, peut être que non. A vrai dire, Yui s’en fiche royalement. Il a fini par s’y plaire, d’une manière ou d’une autre, et puis c’est tout. On pourra toujours aller lui chercher d’autres explications, lui connaît ses raisons mieux qu’un autre. Explications faites, il se permet une autre bouffée de cigarette empruntée à la main d’une pomme. Ronds de fumée, s’échappent vers le plafond. –Cela dit, je n’ai pas besoin d’être égocentrique de me protéger, chère Pom’. Tu serais sidérée d’apprendre que je suis bien plus odieux que l’ange que tu me donnes l’impression d’être. Souviens-toi, aujourd’hui, je passe la journée avec toi. Et si aujourd’hui je suis là, demain… c’est un autre jour. Aujourd’hui, ange. Demain, démon. Sans crier gare, Yui attrape la Pomme par la main pour la tirer vers lui, effleurant ses lèvres de son pouce. –Alors je t’en prie, ne te laisse pas avoir par ce jeu. Puis il la relâche, comme si de rien n’était. Le thé fume, les passants passent, le gérant sifflote. –S’il te plait.
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Dim 23 Mai 2010 - 20:34 | |
| Pom’ l’écoute, buvant son chocolat, jusqu’à n’en laisser qu’un fond. Le fond symbolique.
Et merde.
Promise, les yeux écarquillés, la clope mal tenue entre ses doigts, les lèvres entrouvertes, tremblantes, les pupilles dilatées, le souffle chaud, le sang pétrifié. Ses mirettes fixent le psychologue. Ses pupilles dardent Yui. Parce que ce psy et ce type lui semblent deux personnes distinctes. Elle a peur. Une peur sans nom. Inexplicable et fascinante. Elle lui vrille le ventre et lui enserre la gorge. Mais elle ne fuit pas. Comme si elle l’aimait. Comme si elle voulait savoir ce qu’elle était. Pour ne plus la connaître et enfin la détester.
Et puis quoi ?
Reprenons en sens inverse. La voilà mise en garde par l’homme qu’elle traine. Une mise en garde proche de la menace. Peut-être inconsciente. Aucune idée. Dans sa tête, leurs moments à eux se rembobine. Les plus vieux commencent déjà à être trop flous pour êtres affirmés comme non-erronés. Les plus récents, en réalité, sont, eux aussi, plongés dans un brouillard. Brouillard qui semble vouloir s’emparer de son regard et qu’elle chasse de plusieurs battements de cils. Ses mirettes ne tentent plus de se noyer dans celles de son voisin, les voilà qui se baissent jusqu’à se figer sur la tasse de chocolat.
Et pourquoi ?
A quel jeu joue-t-il ? Si elle ne sait pas ça, comment peut-elle ne serait-ce que prétendre connaître les règles ? Comment peut-elle en connaître les pièges ? Comment peut-elle les éviter ? Comment ne pas se laisser avoir ? Elle déglutit, mais ne relève pas les yeux. La main qui tient sa clope reste en haut de son bras, levé sur son coude, mais elle ne la fume plus. Elle se consume lentement, comme par simple agonie, levant encore fièrement son foyer carbonisé, image de son pouvoir désuet, sans oser le laisser tomber, chute qui serait symbole de sa catabase.
Pourquoi pas, en fait ?
Pourquoi la chercher, là où elle ne devait pas être ? Même si ce n’était pas le but du psy de trouver Promise, c’était lui qui avait lancé tout le processus. Cette journée, ces vingt-quatre heures. Et même à leur première rencontre, c’est bien lui qui est venu vers elle. Aucune fois cela n’a été l’inverse. Pourtant, il avait été simple pour la musicienne de trouver le nom de l’encadrant. Il lui aurait été tout aussi simple de venir frapper à la porte de son cabinet. Mais elle ne l’a pas fait. Pourquoi ? Parce qu’à chaque fois que l’idée a traversé son esprit, elle s’est empressée, non pas de la chasser ou de la raisonner, mais de l’oublier. Simplement.
Et merde.
Et pourquoi tous ces gestes ambiguës ? Tromper la foule ? Se moquer de leur public ? Tant d’efforts récompensés par une sale vide et trois pauvres battements de mains, office d’applaudissements chétifs, témoins du ridicule. Encore cette main qui s’empare de la sienne et ce doigt qui effleurent ses lèvres. Elle ne nie pas, elle a aussi joué avec celles de l’homme. Pourtant, en cet instant surtout, ce qu’elle lui offrait alors, même sans arrière-pensées aucune, lui semblait avoir été beaucoup plus franc et sans vice que ce que ce type pourrait ne jamais lui donner.
Et puis quoi ?
Promise quitte sa tasse des yeux. Elle les a juste fermés. Mais, au moins, le sens de la vue étant coupé, elle peut s’offrir une connexion de moins avec le monde terrestre. Ce monde qu’elle aime tant et que son côté trop prosaïque l’empêche de quitter à l’accoutumé. Voilà qu’elle veut rompre avec lui, même si ce n’est qu’un petit moment. Elle veut juste avoir ça de moins à analyser. Trop de donnés dans un esprit trop chamboulé. Chamboulé par elle. Chamboulé pour lui. Rien ne lui échappe pourtant. Elle ne mord pas sa joue, elle ne soupire pas, elle ne sanglote pas. Tout ses muscles sont tendus. Près à bondir. Vers la porte de sortie ?
Et pourquoi ?
Kana ? Inconnue au bataillon. Une sorte de jalousie passive monte et fait germer l’idée que jamais Yui ne choisirait de faire une chose ou quelque chose de sa vie parce qu’elle l’aurait poussé à le faire. Alors, Kana, reste sage, ne te montre pas à la haine naissante que Promise commence à nourrir. Avec amour ? Jalouse ou pas. Impression d’inutilité. Elle secoue la tête, presqu’imperceptiblement. Yui n’est pas le centre de sa vie. Si elle ne peut rien pour lui, elle pourra pour les autres. Mais savoir qu’elle ne pourra pas même espérer influencer quelqu’un l’humilie. Un peu. Un peu de trop.
Pourquoi pas, en fait ?
Sauver Eliane serait vaillant et utile. Ce qu’il lui faudrait. Essayer de cracher sur une colombe, en somme. Ou d’offrir des fleurs au soleil. Le soleil de la vie de Yui ? Rêver est une chose. Une chose monstrueuse. Puisque les rêves ne restent que des rêves. Ils sont les premiers serviteurs du mal. Ceux qui nous assaillent dès l’enfance et qui nous poursuivre inlassablement jusqu’à la tombe. Certains, même : ils les y poussent. Mourir de son rêve sonne beau, sonne faux. Ça sonne morbide aux oreilles de l’artiste. Ça cingle ses tympans, ça inondent ses tempes et ça lui donne des haut-le-cœur secrets et immoraux. Elle fleurira sa tombe. Et puis, non. Les morts sont cruels : ils se combinent aux rêves pour nous hanter. Cauchemars et rêves ne sont pas des contraires. Ils sont frères, enfantés du même malin.
Et merde.
Le délire total. Sorte de vagues de conneries qui piègent l’esprit de Pom’. Un sourire faible et triste lui vole ses lèvres et elle n’a besoin que d’une seconde pour en être épuisée. Sa jumelle est une idiote. Il l’a comparée à sa sœur de lune. L’artiste est idiote. Oui. Elle le prouve. Elle le crie. Elle l’hurle en silence. La cendre finit par céder et s’écrase mollement sur la table. Elle ne relève pas la tête, elle n’ouvre pas les yeux. Elle soupire enfin, comme une libération. Une expiation de ce mal qui lui est tombée dessus sans qu’elle ne s’en aperçoive.
Fumer est mauvais. Allons bon. Elle relève la tête, presque trop vite, et fusille sa clope du regard, avant de tirer sa dernière latte, trop lourde, et de recracher la fumée, veillant – malgré elle – à ne pas indisposer son voisin. Elle ouvre lentement les yeux, barrières de leur humidité. Elle écrase le mégot dans le cendrier et se lève, décalant la table vers sa chaise, pour pouvoir s’assoir à califourchon sur les jambes du psychologue. Les fantasmes maladifs qui ont germés dans sa tête la font légèrement défaillir. Ses yeux, trompeurs de ce qu’elles cachent en elle, se dardent dans ceux de l’homme. Elle passe ses bras autour de sa nuque.
"Trop tard, Yui."
Puis un sourire. Désolé. Non pour lui. Plus pour elle. Elle se présente des excuses. Un sourire franc, puisqu’elle doit jouer franchise à deux, selon elle. Son visage se rapproche de celui du psy, ses lèvres se scellent aux siennes. Sa langue, non timide, non agressive, se glisse entre elles pour rencontrer la sienne, déjà connue. Echange d’un moment. Trop longtemps. Elle le rompt, frivole et se relève.
"Changeons d’endroit. Tu choisis le prochain."
Aucune attente de la réponse, Promise prend ses affaires, fait volte-face et avance jusqu’à la sortie. Elle prend une voix forte et affirmée pour ne rien, strictement rien laisser paraître, et annonce qu’elle payera la prochaine fois, puisqu’elle n’a pas de monnaie. Elle entend à peine le gérant dépeindre le manque de galanterie de son compagnon de ne pas avoir proposé. Elle ne sait pas s’il paye, elle sort. Dehors, elle lève le nez au ciel et renifle faiblement. La jeune femme enfonce les mains dans les poches, et commence à reprendre lentement la route, toujours en sens inverse de l’académie. Une larme coule, une main s’empresse de s’extirper et se jette sur sa joue, l’essuyant maladroitement. Pourquoi pleure-t-elle ? Parce qu’elle se fait des films et qu’elle pleure toujours devant les films. Typiquement féminin ? Allons bon. Elle traine des pieds, puis se réprimande intérieurement, avant de les lever convenablement.
Regarder les filles pleurer rend certains hommes gais. D’autres, plus chevaleresques, s’empressent de leur donner le sourire, comme des guerriers en campagne. Ils font rire les princesses. Promise n’est pas une princesse. Elle n’a pas besoin des hommes pour rire. Mais là, elle aurait bien besoin d’un chevalier. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Mer 9 Juin 2010 - 22:23 | |
| Et elle est sortie du café. Quelques minutes plus tard, la rejoindra un jeune homme aux cheveux décolorés, un soupir s’échappant de ses lèvres. Qui a payé la note, qui a râlé, est-ce vraiment important ? Balayant l’air d’un geste de la main, Yui est resté là, à côté de Pom’ fixant un point là bas, derrière le passage piéton. Il sait qu’il ne devrait pas rester là, pas plus qu’il n’aurait dû se lancer dans cette idée de passer une journée qui pour lui est révolue depuis quelques années. Oui, il sait qu’il est responsable, qu’il n’a pas à agir sur un simple coup de tête sans réfléchir, conscient que son entourage ne le suit pas toujours. Conscient qu’une adolescente est en train de taire ses larmes. Ou peut être qu’elle ne s’en cache pas. Valentine ne sait pas vraiment. Cette fois, c’est lui qui a extirpé une cigarette de son paquet pour la laisser se consumer au gré des bouffées de fumée. Il est peut-être encore temps d’arrêter. Mais au final, pour arrêter quoi, le sait-il vraiment.
Ils ont tous deux marché, côte à côte, Pom’ semblant calquer sa direction sur celle de Yui. Ce dernier ne lui aura pas vraiment adressé la parole durant leur trajet. Est-il vraiment trop tard.
Yui Valentine aime jouer avec les gens. Se jouer des gens aussi. Susciter la colère, le rire, l’agacement, la moquerie, le mépris… pourquoi pas. Même si ça déplaît aux autres, tant qu’il en trouve matière à en rire. Mais au-delà d’une simple affection…, ça ne l’amuse plus. Plus on s’attache, plus les adieux sont crèves cœur, et c’est à ne plus s’en sortir. Valentine aime bien dire qu’il affectionne le simple, il vit de manière complexe. Compliquée. De nature égocentrique, Valentine se rappelle que ceux pour qui il a eu la prétention de tenir, sont tous partis d’une façon ou d’une autre. Alors à quoi bon créer des liens autrement que superficiels ? Superficiel, telle est le mot pour qualifier cet étrange psychologue. Il n’y a rien qui est totalement vrai, ni totalement faux, et on oscille sans cesse avec les deux. Sans jamais trouver le juste équilibre. Tout cela mériterait presque un rapport complet… presque. Et Yui Valentine n’est ni un homme bon, ni mauvais. Enfin, il est plus mauvais dans l’âme que bon, c’est peut être vrai. Mais au fond, il ne fait que plaider sa cause et puis c’est tout. On le hait, on l’aime, et quoiqu’il arrive, il reste Valentine.
Une clope ça se consume vite. Trop vite. Et merde. C’est embêtant. Peut être davantage, que de penser que fumer ça bousille la santé. Yui mourra jeune, enfin c’est ce qu’il se prédit. Fataliste ? Non simple choix. Enfin… si ça relève du choix. En attendant, son amie est toujours là, elle l’a suivie alors que la seule chose qu’il lui a prodigué, c’est cette sourde peine, tout à l’heure. Sans vraiment d’autres ressentis, Valentine se dit que les gens qui pleurent pour lui sont probablement trop honnêtes, ou sont trop bienveillants à son égard. Et plus les larmes s’écrasent au sol à cause de lui, plus il se sent pourri dans l’âme.
Le pire, c’est qu’il a décidé que ça ne le dérangeait pas. Haïssable, détestable. Il y en a de plus en plus pour le ranger dans ces qualificatifs.
Deuxième cigarette ; elle devrait être la dernière. Elle devrait. Pom’ et Yui sont restés silencieux alors que gravit l’ascenseur dans les hauteurs. Et si l’adolescente a dit quelque chose, Valentine ne l’a pas entendu. Des passagers couperont à plusieurs reprises leur ascension dans la plus haute tour de la région. Là haut, tout là haut, c’est comme le toit de l’académie, mais en plus haut. Avec une vue imprenable de toute la ville, l’air frais battant les visages, le vide saillant la vue de ceux qui se penchent pour en estimer la distance du sol. La vue de nuit est plus impressionnante à voir mais ça… c’est pour les esprits un peu plus fleurs bleues. Alors pourquoi avoir choisi les hauteurs ? Pour se donner la sensation de dominer le monde ou de laisser se balader l’esprit ? Probable pour certains, improbable pour Yui.
Non, Yui n’aime pas vraiment les hauteurs, ça lui donne la migraine. Et Yui n’a jamais compté le nombre d’étages que compte cet édifice, ce building à l’américaine ; il s’en fiche. Laissant son regard balayer la ville, il a fini par se tourner vers la jeune fille. Les hauteurs… ça lui donne l’impression de perdre ses repères. Et même s’il n’aime pas cette sensation, ce n’est pas la première fois qu’il y vient. Parce qu’Eliane, elle, elle aimait les hauteurs.
-La Pom’, est ce que tu attends quelque chose de moi ?
Il pourrait se poser cette même question à contre-sens. Qu’attend-t-il de la Pom’ ? Pour être venue la chercher, comme si tout était prévu et planifié à l’avance, là dans la salle d’étude. Yui ne sait pas. Il a avisé, et de fil en aiguille, il se retrouve là, avec elle. Il ne l’explique pas.
Finalement, il l’a dévisagé d’un regard neutre, comme si de rien n’était, avant de s’appuyer contre la rambarde bordant le toit du bâtiment. Derrière et sur les côtés, des visiteurs font le tour et admirent paisiblement le paysage que leur offre la ville.
-Je peux passer du temps avec toi, t’écouter, discuter quand l’envie nous en prend. Je peux être ton ami, ton conseiller, comme ton ennemi ou un simple psychologue. Peu m’importe ce que tu as choisi, mais au-delà…
Au-delà… Quoi. Au-delà de quoi. Pensif, il a fini par se tourner vers la ville. Il n’aime pas cette vue. Yui n’aime pas le vide. -…j’aimerais ne pas avoir à froisser la Pom’. Pourquoi ? Je ne sais pas.
Yui lâche la cigarette dans le vide et le mégot disparait rapidement, dans un petit point lumineux. C’est mal de polluer. Mais ce n’est pas le souci de son auteur à cet instant.
-Si tu joues, je joue. Je vois ça comme un jeu.
Vraiment ? Dans ce cas, pourquoi n’y joues-tu pas jusqu’au bout.
-Mais ce serait vraiment dommage d’en venir jusqu’aux larmes.
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Sam 14 Aoû 2010 - 14:23 | |
| Le silence s’impose. Lourd et tendu. Mais Promise ne le brise pas. Elle n’en a absolument pas envie. Elle se contente de suivre le psychologue, ses pas calqués sur les siens. Elle renifle une fois, puis sourit. Elle sourit pour elle-même. Pourquoi est-ce qu’elle pleure au final ? Pour Yui ? Non. Certainement pour elle. Sa vie est paisible. Mais cette routine l’oppresse. Et quand on lui propose d’en sortir, comme le fait cet homme, elle perd tout bonnement ses repères. Toutes les choses qu’elle fait par habitude sont modifiées. Elle ne sait plus comment faire ce qu’elle a toujours fait. Et pourtant. C’est si simple. Finalement, elle réfléchit bien trop : elle n’a qu’à laisser son corps parler. Déconnecter son esprit. Elle sourit encore. Se concentrant sur le bruit entre ses deux oreilles, ce léger bourdonnement entêtant, elle ne réalise pas vraiment où son complice la traine. Elle passe ses paumes sur ses joues, effaçant toute trace de larmes. Elle inspire brusquement et expire tout doucement. En réalité, Pom’ ne sait pas vivre à trois. Ici, en plus du couple qu’elle forme avec sa solitude, il y a ce jeune homme. Beau et attachant. Aussi beau et attachant, qu’horrible et salaud. La pianiste relève les yeux sur lui, alors qu’ils sont dans l’ascenseur. Elle le regarde, sans le dévisager. Elle note chaque détail, chaque défaut sur lui et détourne les yeux. Ce doit être la deuxième fois qu’elle s’attarde sur le frivole, concernant ce type. Elle regarde les numéros défilés, jusqu’à ce que la sonnerie qui annonce l’arrivée au but de monsieur Valentine retentisse et brise le brouhaha dans son crâne. Sans l’attendre, elle se précipite vers le bord, se penchant sur la barrière, avec cette stupide impression de flotter au-dessus du vide de cette tour. Elle aime le vertige qui la prend soudain et qui l’oblige à redescendre de la barrière, pour poser ses deux pieds au sol. Elle sourit de nouveau, ravie. Elle se doute qu’il ne devait pas le savoir, mais Yui l’a emmené au meilleur endroit où ils pouvaient aller. Voir le monde devant nous, si petit, si insignifiant. Penser être empereur de la Terre… Pour finir par lever les yeux, regardant le ciel qui nous domine encore et perdre cette effervescence qui nous a nourrit l’espace de quelques secondes. Parce qu’en réalité, nous ne sommes rien. Elle s’accoude finalement sur la barrière. Son mutisme n’est plus sous tension, mais, par pur instinct, elle darde son regard dans celui du psy quand elle sent qu’il la regarde. Qu’attendait-elle de lui ? Elle perd progressivement son sourire. Non pas que sa joie s’évapore, c’est juste une question pertinente. A laquelle elle n’a jamais réfléchit. Elle n’a certainement même pas de réponse à cette interrogation. La seule chose qui lui vient à l’esprit est de savoir ce qu’il attend d’elle. Elle soupire brièvement. Leur relation – si on peut dire que ce qu’ils vivent peut être une quelconque relation – est un miroir du jeu du chat et de la souris. Il faut avouer quand même : qui court après qui ? Qui a lancé les paris ? Qui a renchérit ? Toutes ces espèces de doutes l’envahissent. Mais ils ne la déstabilisent plus. Elle le fixe et commence à trouver une réponse à sa question. Mais le silence reste roi et elle le laisse finir. Na pas le froisser ? N’est-ce pas déjà trop tard ? Mais elle s’en moque. Tout le monde peut blesser tout le monde. Alors à quoi bon rester sur une plaie. Elle ne cicatrisera jamais si on ne cesse de la creuser. Elle suit la cigarette des yeux, souriant à mesure qu’elle la voit disparaître. L’empereur choit, son empire s’écroule. Yui ne sait donc pas s’arrêter. Il joue, joue et joue encore. Il se joue d’elle ? Ou bien de lui-même ? Un enfant saurait quand il doit tout stopper pour se calmer et écouter ce qui l’entoure. Cet homme ne le sait probablement pas. La faute à qui ? Sûrement pas à lui. Pom’ perd une nouvelle fois son sourire et, contrairement à avant, elle le dévisage. Ca fait un bout de temps qu’elle s’est avouée vaincue. Ne le sait-il pas encore ? Bien avant les larmes, bien avant leur départ. Elle a perdu la partie quand elle a accepté de lui faire vivre son quotidien. Elle connaissait les risques. Elle a été vaincue, mais elle aura été courageuse. Véritable sosie de la chèvre de ce cher et tendre monsieur Seguin. Et ces larmes qu’il refuse d’admettre ont déjà creusé leurs sillons. Yui, tu ne perds pas le jeu. Tu te perds toi-même. Promise fronce les sourcils, le visage grave, et admire la vue. Elle a déjà regardé le ciel : elle sait qu’elle n’est impératrice de rien. Elle connait sa place. Elle inspire et garde l’air dans ses poumons, avant d’expirer pendant que sa main se glisse dans son sac pour prendre son paquet de clope. Elle en sort une jumelle et l’incendie sans attendre. Une bouffée et un regard sur son voisin, puis de nouveau le regard tourné vers le vide. "Je n’attends rien de toi. Ou je ne le sais pas." Elle tire sur sa clope, marquant un temps de pause trop court pour qu’il réponde. Elle inspire et poursuit : "J’attendais de savoir si tu étais capable de regarder le monde avec ton cœur, plutôt qu’avec ton nombril." Elle le regarde. "Je crois que j’ai la réponse : tu le fais et tu me le prouves. Maintenant…" Nouvelle latte. "Pourquoi attendrai-je quelque chose de chaque personne qui me fait sourire par un regard ?" Encore une fois, elle tire sur sa clope. Elle souffle et continue. "Qui me blesse par des comportements naturels ou qui me fait pleurer par des mots…" Murmure. Enième taffe. "Tu es déjà un confident, un ami et un bel enfoiré. Je pense que je n’ai rien à te demander de plus. Si je devais attendre quelque chose, ce serait que tu continues de me surprendre." Elle sourit. Enfin. "Et si c’était plus, tu serais dans mon lit." Son sourire devient pervers et elle tire une dernière fois sur le bâton de nicotine, qu’elle écrase ensuite sous sa chaussure, pour le jeter dans une poubelle non loin. Quand elle reporte son attention sur Yui, son sourire est redevenu plus amical, plus naturel. Elle pose sa paume sur sa joue et noie ses yeux dans les siens. "Mon nom est Promise." Ce qui peut vouloir dire beaucoup de choses. Elle retire lentement sa main et se perd dans le vide des hauteurs. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Rencontre à Trois Temps Dim 15 Aoû 2010 - 17:55 | |
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