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 Juste après

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MessageSujet: Juste après   Juste après EmptyMer 21 Mar 2012 - 1:52

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Il y a des jours comme ça où même si l'on a tout chez soi, on n'arrive pas à faire ce que l'on veut. Jani était dans cette fâcheuse et nauséabonde situation. Il avait un clavier, son ordinateur, beaucoup de papier à musique, un micro, un ampli, plusieurs guitares, et l'envie de composer, d'improviser et de se laisser entrer en transe. Debout dans sa chambre, il tournait sur lui-même lentement et laissait son regard se poser sur tout ce qu'il y avait de musical chez lui l'air d'y chercher une minuscule parcelle d'inspiration. Ça faisait quelques temps qu'il avait du mal à s'exprimer dans son art, et le peu qu'il chantait du bout des doigts ne lui plaisait pas assez pour qu'il s'enregistre. Ses portées étaient raturées de toutes parts, et seules ses médiocres improvisations lui permettaient de ne pas complètement perdre son niveau. Il poussa un long soupir, et s'écroula sur le siège de son bureau. Elle pivota, l'amenant à affronter ses derniers travaux. Une pièce en andante, pour piano. Douce, calme et libre, comme l'eau qui s'écoulait leste au cœur de la forêt où il l'avait écrite. Ses mains saisirent le papier pour le relever à hauteur d'œil. Le finlandais s'enfonça dans son siège. Il se souvenait parfaitement de cette journée. En plus des rares péripéties qu'elle lui fit vivre, elle avait été pleine et il n'avait pas réussi à beaucoup manger en rentrant chez lui. Oui, il s'en souvenait. Il était en compagnie d'une petite anglaise qu'il avait osé voir comme une femme alors qu'elle n'était encore qu'une enfant. Peu après, il allongeait son corps vide de vie et plein d'eau au bord du lac, et se battait pour la faire revenir dans leur monde. Une sourire ironique saisit ses lèvres : lorsque l'on l'avait contemplé et caressée, la Mort se faisait plus marquante encore.
Cette pièce avait perdu de sa valeur. Lui et Ethel étaient remontés bien que fatigués chercher leurs affaires en haut de la falaise de laquelle il s'étaient jetés. Il était heureux de ne pas avoir composé pour rien, heureux d'avoir retrouvé ces nombreuses portées symboles de ce qui lui semblait alors être un retour dans la musique ! Malheureusement, il n'arrivait plus à ressentir ce qu'il sentait lorsqu'il écrivit ce concerto. Son cœur était alors apaisé par la Nature, et non marqué par ce qu'il avait été forcé à endurer. Il lui arrivait encore de se revoir poser ses lèvres contre celles de la jeune fille non plus pour l'embrasser, mais pour lui insuffler son air. Il était un romantique, en particulier dans le sens artistique du terme : il composait avec son cœur, ses mœurs, le manque d'une âme-sœur, la retenue d'un pleur, un cri de douleur et la fuite de son heure. C'était en son art qu'il avait appris à s'exprimer au mieux de telle manière que l'auditoire discernait une part de son émotion dans ses instrumentations. Les instruments nous disaient ce qui n'avait pas de mot. Nous avons bien plus besoin de mélodies et d'harmonies que de paroles...
Le jeune homme se souvenait aussi avoir raccompagné l'anglaise jusqu'à l'académie. Il avait ainsi compris qu'ils y habitaient tous les deux, et s'il aurait bien aimé marcher jusque chez elle pour s'assurer qu'elle pût tenir le coup, mais il n'osa pas lui demander. N'était-il pas en partie coupable de ce qu'il lui était arrivé plus tôt ? Même si sa présence lui avait sauvé la vie, elle l'avait aussi mise en danger à deux reprises auparavant. Ce fut la dernière fois qu'il la vit ailleurs que dans ses souvenirs, douloureux à cause de fonds marins atteints trop rapidement, heureux grâce au « lien » qui s'était tissé entre eux juste après. Une relation éphémère. Ou stérile. Elle s'était probablement endormie en vitesse, et devait rêver alors que lui rendait fièrement hommage devant son clavier à un homme en or français aux textes profondément marquants. Qu'est-ce qu'on peut bien faire après ça ? Mais qu'est-ce qu'on peut bien faire après ça ?

Ma foi ! Tout ça n'avait pas empêché Jani de vivre sa vie normalement de son côté, toujours à caresser une guitare par-ci et un corps par-là, à chanter là et à courtiser ici. Ce fut un événement difficile à supporter, très marquant, mais la vie continuait et il valait mieux la savourer. Pendant deux mois, sa créativité fut au point mort. Il fallait aussi dire qu'il avait peu dormi chez lui. Psychologiquement, sa manie était tout ce qu'il y avait de plus intrigant : il avait vécu quelque chose d'éprouvant ; il cherchait plus de réconfort que d'habitude. Il le nierait certainement, mais on avait tous besoin de chaleur humaine. Peut-être que lui en avait besoin différemment... Ou bien il se lâchait et profitait de la vie. Ah ! Les psychologues n'ont qu'à s'amuser avec ces deux propositions, qu'ils fassent leurs interprétations ! Le nordique s'étira en poussant un long soupir. 17h. Le Soleil n'allait pas tarder à faire varier les teintes du ciel, et pour l'heure ce dernier était dégagé. C'était l'occasion de profiter des derniers rayons !
Se relevant, il interrompit son mouvement à la vue d'un bout de tissu familier qui dépassait de sous son lit. Il s'en approcha, tendit le bras, puis releva la petite culotte noire en la tenant au bout du doigt. Il n'était certain que d'une chose : elle ne lui appartenait pas. Mais à qui ? Ses yeux plissèrent un instant, le temps de se rappeler que si elle manquait à sa propriétaire elle viendrait probablement la récupérer, puis il haussa les épaules avant de la balancer sous le lit comme n'importe quel autre homme à sa place. C'était toujours plus facile de faire ainsi. Ceci étant fait, il saisit sa guitare folk et la mit dans une valise à guitare qu'il s'empressa d'enfiler par-dessus son épaule. Le temps pressait, et sa compagne ne demandait qu'un rendez-vous galant, un tête-à-tête au coucher du Soleil, entre amants...

Il était presque 18h lorsqu'il arriva sur place. Les plages ! Elles étaient comme toujours bondées de monde, le climat à Keimoo étant assez agréable à vivre. Les uns bronzaient, les autres jouaient, et certains même s'entraînaient à la dure, courant sur le sable fin. Jani n'était pas très attaché à ce genre d'endroits, et sans être ochlophobe il considérait qu'il y avait bien trop de monde et refusait l'idée même de s'y aventurer. Non, il était un peu plus futé, et avait appris avec Ivanna que même dans les endroits les plus publics, il y avait des recoins très intimes, à l'abri de tous regards et offrant bien souvent des panoramas très rares... La guitare dans son dos, il longea l'étendue de sable pendant une bonne vingtaine de minutes à bonne allure. Destination atteinte. Au sommet d'une petite falaise, entourée d'arbres, il faisait face à l'étendue aqueuse qui s'exposait devant lui. Elle lui semblait sans fin. Personne ne venait jamais ici, c'était petit, et il n'y avait qu'en fin de journée que c'était éclairé. En effet, le Soleil se coucherait juste en face de lui... Il ouvrit sa chemise blanche, libéra ses cheveux blonds de leur vilain élastique, et sortit son instrument de sa valise. Après tout, il était loin d'être un garçon égoïste... Il se devait de partager de ce genre de moments, de plaisirs, avec une des plus belles voix qu'il connaissait. S'adossa à un tronc en face de l'océan, il posa son instrument sur sa cuisse droite et lui adressa un sourire aussi sincère qu'aguicheur. Sa main caressa sa caisse de satin noir, ce bois d'épicéa. Ses doigts glissèrent doucement sur les cordes en bronze encore brillantes de sa dernière caresse. Le finlandais passait beaucoup de temps en compagnie de ses instruments, autant pour en jouer que pour en prendre soin.

« Ça faisait longtemps que t'étais pas venue, hein, Éva ! s'exclama-t-il en tapotant la caisse de la guitare comme elle l'aimait. La dernière fois remonte à quoi... Six mois ? Ah ! Ça va te faire du bien, à toi et à ta voix... »

Ses yeux se fermèrent et sans plus attendre, il se laissa bercer par la mélodie que ses doigts arpégeaient. Des accords riches de quatre sons, sur un rythme à cinq temps. Quand bien même elle ne sonnait pas très complexe, le jeu avait une certaine vie et s'alliait assez bien avec les vagues qui dominaient toujours la voix de l'instrument.

© Jani Lumisielu


Dernière édition par Jani Lumisielu le Mer 6 Juin 2012 - 2:57, édité 2 fois
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Ethel Dawkins
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Ethel Dawkins


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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 21 Mar 2012 - 13:33

Juste Après
« Jani & Ethel»



Il y a des jours comme ça où une simple chambre d’internat ne peut desservir entièrement un esprit et ne parvient plus à inspirer autant qu’on le souhaiterait. Allongé sur son lit, la tête tournée vers le plafond gris, la rouquine observait avec une grande attention une petite mouche qui serpentait sur le faux plafond. Les yeux ennuyés, elle bailla. Son pinceau était propre et sa feuille blanche. Elle voulait dessiner mais ne trouvait pas le sujet, les quatre murs qui la cernait l’enfermait plus qu’ils ne l’aidaient. Soupirant, elle se releva et ajusta sa jupe jaune. Souriant, elle caressa le tissu, perdue dans ses pensées. Se levant et allant jusqu’à son bureau, qui était dans un fouillis assez colossal, la fillette entreprit de faire un peu de rangement. Ranger les feutres dans la bonne boite, les carreaux d’aquarelle dans la palette et jeter les tubes usagés. Soulevant un cahier d’aquarelle, elle le fit tomber et il s’ouvrit sur une qu’elle avait faite il y a maintenant deux mois. Illisible et incompréhensible pour la plupart des gens, voir la totalité, la jeune fille comprenait parfaitement son aquarelle. Des tons clairs, mélangeant du vert et du bleu, très liquide, elle l’avait fait sur papier humide, chose qu’elle faisait rarement. Habituellement, elle utilisait du papier sec, parce qu’elle n’attachait jamais assez le papier humide sur la planche et il finissait par se gondoler. Elle avait été soigneuse pour ce dessin-là, et le rendu était bien plus proche de ce qu’elle attendait qu’elle n’aurait pu avoir avec du papier sec. Indescriptible. Quelques évocations d’une flore, des courbes sinueuses pouvant représenter une rivière, le dessin était surtout rythmé par un cheminement qui amenait un être non formé vers une autre forme tout aussi étrange. Le dessin était clair, mais on pouvait sentir dans certaines lignes une force plus sombre, elle avait côtoyé la mort et atteint les étoiles.

Enfilant un poncho malachite et un collant écossais à motifs rouge et orange, elle décida de sortir faire un tour. Ce dessin lui avait donné envie d’aller se promener, peindre ou croquer, ailleurs qu’entre les murs sombres de cette pièce. Le seul problème quand on peignait, c’est qu’il était pratiquement impossible de voyager léger, surtout pour Ethel. Quand elle se mettait en tête l’idée d’aller peindre, elle ne savait jamais par avance où elle allait atterrir. Et la lumière, le lieu, l’heure, tout influençait la technique qu’elle voulait utiliser. Fourrant un set de gouache dans son sac en toile rouge, elle mit également une palette d’aquarelle, une trousse de pinceau, une boite de Faber-Castell, une plume et de l’encre de chine, des fusains, des mines graphites et sa boite à fouillis, qui contenait à peu près tout ce qui ne lui servait jamais, sauf quand elle ne l’avait pas. Rajoutant un pinceau à pointe biseautée et une brosse Jax-Hair Cryl. Ils étaient tous en poil de martre rouge, que la jeune fille trouvait plus doux et plus maniable. Son carnet de croquis et son tableau à aquarelle au fond du sac, elle était assez chargée pour s’estimer digne de partir.

Tressant ses cheveux et laissant la natte flotter sur sa poitrine, elle mit un béret bordeaux et prit son sac, traversant l’Académie en direction de… Ce qu’elle trouverait. Il devait être environ 15 heures, le soleil encore haut de printemps donnait une atmosphère lisse et crue, faisant ressortir la couleur des arbustes. S’éloignant peu à peu de la ville, la jeune fille marcha pendant une bonne heure dans les collines. Elle aurait pu aller dans la forêt, mais son carnet était plein d’esquisses des bois, elle voulait changer un peu. Au bout de quelques kilomètres, elle tomba sur un petit chemin de terre qui serpentait parmi les buissons et les arbres bas. Marchant quelques centaines de mètres, elle tomba sur un minuscule édifice de pierre, qui se dressait sous un cèdre. S’asseyant sur une pierre en face, elle l’observa. Habituellement, c’est le genre d’autel que les japonais mettaient dans un jardin, et pas au milieu d’une colline, loin de la civilisation. Le genre de découverte qu’elle aimait faire. Posant sur ses genoux en tailleur un bloc de feuille aquarelle sèche, elle sortit la palette et son pinceau à réservoir. Mélangeant les couleurs, elle traça quelques traits préalables, sachant qu’elle pouvait les modifier tant que l’eau n’avait pas séchée. Puis doucement, elle remplit les buissons d’un vert assez lisse, édifia la pierre d’un gris brut, modifiant légèrement le cèdre pour le faire plus orangé. Le ciel suivit cet exemple, et le bleu légèrement nuageux devint un orange tanné, très clair.

En une heure, son dessin était terminé (clic ?). Posant la feuille sur le sol, elle le laissa sécher quelques instants, observant la nature environnante. Surement attiré par la présence de la jeune fille, un petit merle chanteur s’était posé sur une branche du cèdre, chantant en bougeant son cou de haut en bas. Lui souriant, elle se retourna et s’accroupit face au petit ruisseau qui coulait dans son dos. Lavant son pinceau et rinçant le couvercle de son aquarelle – qui lui servait de palette – elle rangea le tout dans son sac, gardant son carnet d’esquisse à la main pour laisser sécher le dessin. Le soleil était encore assez haut pour qu’elle continue à marcher, le temps de trouver un autre sujet à peindre. Marchant d’un bon pas, elle perdit rapidement l’édifice de vue, ne se retournant même pas. Elle cherchait un lieu moins vert, ne sachant pas si elle allait le trouver.

Au bout d’un moment, le bruit des oiseaux fut remplacé par un chant plus régulier, qui venait et revenait avec une incessante beauté. La jeune fille avait atteint la mer. Pas tout à fait, mais elle pouvait déjà l’entendre, ce qui suffisait à l’apaiser. Un paysage maritime, une vue de l’océan sous le soleil couchant. C’était parfait, et elle n’était pas si loin de Keimoo, elle pourrait rentrer avant la nuit. Dans toute son intelligence et sa prévention, elle avait pris une lampe de poche, mais qui ne marchait plus faute de pile depuis bientôt un an, et qui trainait au fond de son sac. Fermant les yeux, elle écouta le bruit des vagues, les paupières apaisées.
Avec un peu d’attention, la musique des vagues était bercée par une autre, plus instrumentale, plus humaine. Souriant, elle chercha d’où venait la musique. Marchant jusqu’à une petite falaise qui surplombait la mer, elle reconnut immédiatement, même de dos, le musicien. S’approchant sans un bruit, elle posa son sac tout à côté de lui, calant son carnet de croquis sur le sol.

« De l’eau, toujours de l’eau. Décidément. »

Et sans autre mot, elle s’assit à côté de lui, regardant les flots calmes de la mer et savourant la mélodie des vagues.




Dernière édition par Ethel Dawkins le Mar 12 Juin 2012 - 16:02, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyJeu 22 Mar 2012 - 17:06

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Les yeux clos, la tête tournée vers le ciel encore bien bleu, le finlandais savouraient chaque note de sa musique. Éva avait une très belle voix, c'était indéniable. Ses cordes en bronze produisaient un son coloré et brillant, riche en harmoniques. Les vibrations étaient douces et claires, il arrivait assez aisément à nuancer son jeu. Son pouce frappait les basses avec plus ou moins de forces. Tout allait en sinusoïde : le volume montait crescendo, puis descendait decrescendo, il en était de même pour le tempo de son interprétation. Cette courte mélodie sortait naturellement de sa pensée et reflétait la profonde transe dans laquelle il était. Accompagné de sa guitare, il ne faisait plus qu'un avec la nature. Le vent portait ses mélodies à l'océan, ses vagues s'emparaient des harmonies pour les emmener dans les profondeur et les immortaliser... Le bois d'épicéa, un arbre du grand Nord qu'il avait côtoyé pendant bien des années et dont il connaissait nombre de formes apportait à l'instrument un son qui lui rappelait son pays. Il faisait bon, le printemps était arrivé, et même si à côte de la Finlande c'était un temps caniculaire, il put un instant se sentir chez lui, près du lac Inari, aux côtés de sa sœur. Plus la musique évoluait, plus il s'emportait.
C'est le bruit d'un objet posé dans l'herbe derrière lui qui lui indiqua que quelqu'un s'approchait. Il entreprit alors de terminer sa mélodie, mais il lui fallait trouver le bon moment, mais il se hâta vers une cadence parfaite. Il fallait tout clore correctement, sans quoi il ferait honte à la musique. Pour lui, c'était comparable à un rapport sans orgasme : c'était décevant. Et Éva méritait bien ce genre d'attention... Ré9 ; Si11/Fa# ; Ré9 ; Si11/Fa# ; Mi7/Sol ; Si11/Fa# ; Mi7/Sol ; La5 ; descente en harmoniques naturelles sur un Ré. L'accord n'apparaissant pas, on restait en suspend, sans réponse. C'était simplement parfait...

« De l'eau, toujours de l'eau. Décidément. »

Un sourire s'esquissa sur les lèvres de Jani. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas entendu cette voix mielleuse, et en bon musicien qu'il était, il était capable de reconnaître ce timbre entre milles. Elle était rousses, avec des yeux révol-verts, le regard qui tue. Elle n'était pas encore du genre à tirer la première, mais nombre de fois l'avait touché. La seule différence avec la chanson était que lui n'était pas encore foutu. Les artistes étaient à l'épreuve des balles car il ne vivaient plus dans leur corps, mais dans leur art. Un peintre pouvait renaître dans ses couleurs sans même chercher à faire d'autoportrait. Fallait-il être narcissique pour goûter à l'éternité ? Vivaldi, Bach, Haendel, Mozart, Beethoven, Berlioz, Liszt, Sibelius, tous respiraient à travers leur musique et chantaient une langue que très peu de gens pouvaient comprendre dans leurs orchestres. Le finlandais n'osait pas prétendre distinguer chacun de leurs mots, hélas ! Mais il en saisissait le sens général, et c'était déjà beaucoup. Cet arbre contre lequel il était adossé se souviendrait de lui pour la sérénade qu'il venait de lui offrir. Ses paupières s'ouvrirent doucement. Il savait très bien qui était désormais assise à ses côtés. Il rabaissa lentement la tête en poussant un soupir de détente.

« Oui mais c'est bien près de l'eau qu'on se sent le plus chez soi, non ? Nous autres, qui avons grandi de l'autre côté... »

Il n'était jamais allé en Angleterre, mais il se doutait sans soucis que le climat était très différent de celui du Japon. Les températures ne devaient pas voler bien haut, les plantes devaient y être d'un vert bien plus profond parce que plus arrosé... Pour lui, qui avait grandi dans le Nord de la Finlande, près de la Suède mais aussi de la Norvège, tout avait changé. Voyez cet océan qui s'étendait sous leurs yeux ébahis. L'eau aurait des teintes plus sombres chez lui. Il verrait peut-être un navire de pêche, et probablement de la glace à la surface. Au Japon, tout semblait plus chaud et doux, autant dans les couleurs que dans le climat. Le tranchant de la main posé contre les cordes, l'instrument s'était tût.

« Je n'imaginais pas que nos chemins se recroiseraient, et après tout ce temps, je commençais à perdre espoir... Tu t'en sors comment, depuis... Il s'arrêta, ne sachant comment aborder la chose. En fait, il n'aurait pas dû commencer sa phrase ainsi, il lui était maintenant inévitable de mentionner la fois où elle avait caressé la Mort. ... Ça ? »

Il daigna enfin tourner la tête vers la jeune fille. Elle était toujours aussi belle, et semblait toujours aussi jeune. Il aurait été surprenant à vrai dire qu'elle vieillisse assez en deux mois pour qu'il le remarque... C'était dans la tonalité de sa voix, dans ses paroles et probablement dans ses gestes qu'il verrait si elle avait grandi. Son couvre-chef, un béret ornant une chevelure de feu en tresse, lui donnait des airs plus français qu'anglais. Son poncho aux teintes semblables à celles du malachite était comme un mélange entre les couleurs de leurs yeux. Un bleu azuré, variant entre les couleurs d'un saphir raffiné et celles du ciel le plus dégagé de la journée polaire, mêlé à un vert pur, entre celui d'une émeraude fine et celui des feuilles des arbres au printemps. Ah ! L'idée qu'elle ait pu penser à lui ne lui effleura cependant pas l'esprit. À sa propre surprise, il ne sentit pas tout de suite l'envie de baisser les yeux vers ses jambes. Son regard resta accroché à son minois ingénu.

« Ça faisait longtemps, Ethel. » lâcha-t-il enfin dans un murmure calme et tendre à la fois.

Jani se sentait différent. Peut-être était-ce parce qu'il avait passé deux mois assez actifs, mais il ne ressentait plus beaucoup de désir pour le corps de la jeune fille depuis qu'il s'était battu contre son destin. Il se sentait aujourd'hui encore en partie coupable de ce qu'il s'était passé ce jour-là, et c'était dû à ses instincts de Don Juan. Vouloir le corps était une chose qu'il maîtrisait, mais pour certaines, ça ne pouvait marcher, car elles ne connaissaient pas ce genre de plaisirs. Il leur fallait du cœur, assez pour que leurs peurs s'en aillent. Il avait joué cette carte bien des fois dans sa vie de séducteur, mais il était trop conscient de ses conséquences sur ses proies pour vouloir recommencer avec celle qu'il avait sortie morte de l'eau. Elle vivait. Son cœur s'était déjà arrêté de battre une fois. Il n'y en aurait pas de seconde.
© Jani Lumisielu
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyJeu 22 Mar 2012 - 18:05

Juste Après
« Jani & Ethel»



L’élément aquatique devenait donc leur seul lieu de réunion ? Comme si l’onde maligne les réunissait à chaque fois, faisant jouer le hasard. Elle se souvenait d’un conte que sa mère lui lisait quand elle était petite, « Le Prince Blub et la Sirène. » Le Prince était fou amoureux d’une sirène, mais ils ne pouvaient se retrouver qu’en présence d’un liquide. La rouquine ne se souvenait plus de l’histoire et de la fin, mais avait retenu cela. Le seul élément qui lui revenait précisément était lorsque la sirène était faite prisonnière par le roi qui la détestait, et qu’on essayait de lui couper la queue, elle repoussait à chaque fois d’une couleur différente, et le poissonnier finissait par abandonner.

Qu’importe, c’était après tout le plus beau cadre pour se retrouver. L’eau dans son entièreté et sous toutes ses formes étaient magnifiques. Même l’eau des étangs, et leur magnifique couleur glauque. Trop souvent associée à des choses morbides, laides, le glauque était pourtant une couleur splendide. Un vert aux nuances de bleu et de gris léger. Selon les grecs, Athena avait d’ailleurs les yeux glauques. La valeur péjorative qu’on lui donnait à présent rendait Ethel légèrement triste. Le glauque était la couleur des yeux d’une déesse, la couleur de l’eau et de la lune, également, rappelant l’eau de mer avant une tempête. Apollinaire avait d’ailleurs écrit un très beau vers qui rendait bien la beauté de cette couleur « La mer nous regardait de son œil tendre et glauque ».


Si même l’eau des étangs était empreinte de beauté, et d’un qualificatif aussi merveilleux, c’était bien la preuve de la perfection de cet élément.
Mais l’eau ne se pressait pas, elle creusait lentement son chemin année après année, pierre après pierre. Il ne fallait pas être pressé, pour bien suivre son courant, il était nécessaire de s’armer de patience. Remonter un cours entier pouvait être long, mais jamais inutile. Attendre qu’elle creuse son chemin pour arriver là où la terre la mènerait pouvait prendre des années, mais jamais elle ne faiblissait ou rebroussait chemin.

« Je n'imaginais pas que nos chemins se recroiseraient, et après tout ce temps, je commençais à perdre espoir... Tu t'en sors comment, depuis... Ça ? »

Elle rigola légèrement. Faisait-il allusion à son petit voyage chez les morts ? L’hésitation avant le ça ne laissait guère le choix de réponse. Elle aurait pu rester craintive, elle aurait pu développer une phobie de l’eau, phobie de la mort ou de tout autre chose qui pouvait y ressembler. Bien au contraire, elle n’appréciait que plus la nature, peut être légèrement toquée, elle appréciait d’autant plus l’eau, que ce soit dans un verre, une baignoire ou la nature.

« Je savais bien qu’on finirait par se recroiser, il me restait quelque chose à faire, que je n’ai pas eu la réelle force de prononcer la dernière fois. Mais sinon, on peut dire que tout va pour le mieux depuis cet après-midi. J’ai pris conscience de certaines choses je dirais, et réussit à évoluer dans mon art. »

L’évolution s’était faite petit à petit. Mais elle était moins fataliste, et b aissait les bras bien moins vite. Auparavant, lorsqu’elle ne parvenait pas à faire un dessin, ou qu’on lui demandait de dessiner quelque chose qu’elle ne savait faire, elle renonçait, s’arrangeait, tombait dans une abstraction sordide. Mais maintenant, elle s’appliquait à apprendre, elle cherchait plus loin, passait par la représentation exacte pour basculer dans l’original. Ses peintures s’étaient faites plus précises peut-être, plus maîtrisée. Toujours aussi folles, mais avec une meilleure qualité plastique.

« Ça faisait longtemps, Ethel. »

Elle se tourna vers lui et lui fit un adorable sourire. Ca faisait longtemps, oui. Lui avait-il manqué ? Surement. Elle avait fini par ne plus y penser, rangeant cela dans un coin de sa tête. Depuis, elle avait fait nombre de choses, elle était rentrée en Angleterre, également, juste après leur rencontre. A peine une semaine, mais qui l’avait ressourcée comme jamais. Revoir sa grand-mère, les paysages verdoyants et humide, son canton natal, les prairies où elle avait grandie. La cuisine sombre et surchargée d’objets, poussiéreuse et obscure. Lorsqu’elle était petite, et qu’elle passait ses week-ends où des jours de la semaine chez sa grand-mère, quand ses parents travaillaient trop tard, elle aimait s’asseoir sur une des chaises en bois, et regarder les nombreux souvenirs de voyage de sa grand-mère. Grande amatrice d’expédition, elle ramenait des souvenirs du monde entier. La cuisine était un des seuls lieux qu’elle appréciait vraiment chez sa grand-mère. Le reste de la maison était trop grand, trop vide. Il ne restait que cette petite alcôve où elle avait tracé ses premiers traits, et mangé les meilleurs desserts de sa vie.

Elle avait donc quelque chose à lui dire, au jeune finlandais. Quelque chose qui lui trottait dans la tête depuis maintenant deux mois, comme une saveur d’inachevé, comme un regret pour ce qu’elle n’avait pensé à prononcer distinctement. Elle lui avait dit, en fait, juste à son réveil. Mais ce n’était pas assez, pas assez pour la mesure du geste qu’il avait fait pour elle. La jeune fille lui devait surement la vie, il avait été prompt à réagir, et surtout avait su user des bons gestes.

« Ca faisait longtemps oui. Et par rapport à la dernière fois justement… Je voulais te remercier, te remercier mille fois. Tu m’as sauvé la vie. »

Posant une main au sol et se penchant vers le finlandais, elle déposa un baiser furtif sur sa joue, comme remerciement, et revint dans sa position initiale, les jambes contre sa poitrine, encerclée de ses mains. Le sourire aux lèvres, elle contempla l’immensité aquatique, fermant les yeux pour écouter paisiblement le bruit des vagues. Dans son Ipod, il y avait une piste qui durait pratiquement une heure. Juste le son des vagues, qui allait et revenait doucement au rythme de la nature. Quelques chants de mouettes qui passaient par-là, le bruit doux d’un bateau fendant l’onde. Lorsqu’elle était énervée, stressée ou triste, écouter cela lui permettait toujours de s’endormir apaisée, sans que rien ne puisse déranger un profond sommeil réparateur. Les vagues avaient un incroyable pouvoir sur elle, capable de lui faire passer la pire des crises, qu’importe le motif. Lorsqu’elle s’énervait face à quelqu’un, plaquait tout en refusant de lui parler, quelque fut la raison, la mer réussissait à calmer ses émois, à la faire réfléchir de manière constructive et à repartir du bon pied.

« C’était beau, ce que tu jouais il y a une minute. »

Et elle était sincère. Si elle ne s’était pas réellement arrêtée pour écouter, elle avait été saisie par les notes, qui s’accordaient magnifiquement bien à la berceuse de l’océan. La jeune fille avait toujours légèrement regretté de ne pas jouer d’instrument. N’en trouvant jamais un qui avait la sonorité qui lui plaisait, un instrument dans lequel elle pourrait mettre autant d’émotion et d’elle-même que dans la peinture. Alors elle s’était tenue à l’art visuel, réussissant tout de même à exprimer ce qui serpentait dans son esprit. Mais pouvoir jouer aurait été quelque chose de très agréable, si elle avait trouvé le temps, le bon moment, le professeur ou l’instrument. Qu’importe, elle savait ce qu’elle voulait faire de sa vie, elle savait comment exprimer ce qu’elle voulait.



Dernière édition par Ethel Dawkins le Mar 12 Juin 2012 - 16:02, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyLun 26 Mar 2012 - 22:07

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Jani sourit. La jeune fille semblait s'être remise de son voyage dans l'autre monde sans trop de soucis. Elle était à côté de lui, heureuse, souriante, et selon elle les choses allaient encore mieux qu'avant. Les êtres faibles d'esprit avaient tendance à penser qu'un monde sans mal serait un monde parfait, or ils oubliaient que sans les larmes nous serions incapable d'apprécier un sourire à sa juste valeur. Sans la Mort, que serait la vie, si ce n'est un long fleuve tranquille ? Il fallait de tout pour faire un monde. Des hommes idéalistes croyant en la paix mais dans l'incapacité de l'apporter, d'autres voulant imposer leur philosophie ou leur religion à leurs voisins, d'autres un peu trop hautains dont le devoir serait de sauver le monde de la guerre pour que règne la paix. Ah ! Ces occidentaux, ces américains, toutes ces grandes nations dotées d'un passé plus ou moins glorieux... Parce qu'ils avaient accompli de grandes choses, parce qu'ils avaient vaincu l'Allemagne nazie, ils se voyaient tous comme des super puissances mondiales. Mais où était leur mérite ? Les anglais avaient toujours étés protégés de l'envahisseur par l'océan, les français n'avaient fait que se réfugier chez leurs voisins. Leur ennemi commun n'était pas un grand pays, il était un vaincu trente ans plus tôt, et pourtant il les faisait trembler de peur... Le jeune homme était fier d'être finlandais. Son pays était jeune, et son histoire n'était pas aussi remplie que celle de la France. Et ils avaient protégé leurs terres contre l'armée rouge, contre un pays quarante-sept fois plus peuplé, soixante-six fois plus grand ! Oui, il y avait de quoi être fier, et patriote... Et les grands ne savaient probablement plus ce qu'était le véritable amour de la patrie.

Ethel le tira de ses pensées en se tournant vers lui pour lui offrir un de ses radieux sourires. Ça faisait vraiment longtemps qu'ils ne s'étaient pas vus, et même s'ils ne s'étaient rencontrés que deux fois et complètement par hasard, quelque chose les rapprochait indirectement. Lui avait-elle manqué ? Sûrement, oui. Bien qu'occupé à côtoyer d'autres personnes bien moins ingénues, il lui était arrivé à plusieurs reprises de se demander ce qu'elle devenait. Ce qu'il s'était passé l'avait beaucoup marqué, et il cherchait encore comment le mettre en musique. Les idées étaient là, mais il lui manquait encore un début de partition. Une symphonie comportait en général quatre ou cinq mouvements ; ce n'était que leur troisième rencontre ; « Les meilleures choses ont besoin de patience » disait Jean Anglade.

« Ça faisait longtemps oui. Et par rapport à la dernière fois justement... Je voulais te remercier, te remercier mille fois. Tu m'as sauvée la vie.
- Il ne faut p... »


Interrompu par un baiser furtif et futile qui caressa sa joue avec autant d'ardeur que les plus vives flammes, le finlandais sourit, se décidant à accepter ses remerciements à son insu. Il avait fait ce qu'il avait fallut faire, tout simplement, et il n'estimait pas mériter cette attention ; le simple fait qu'elle vive était déjà beaucoup. Il fallait vraiment être avare pour demander plus ! Leur proximité devint distance de sécurité. Elle revint à sa position initiale, relevant ses genoux contre sa poitrine et enroulant autour de ses jambes ses petits bras. Lorsque ses yeux se fermèrent il comprit qu'elle se concentrait sur les vagues qui venait s'écraser contre la falaise à contrebas. Ils ne les voyaient pas, mais ils pouvaient s'imaginer de petits rouleaux se fracasser contre la roche. L'écume devait y rester un peu plus longtemps que l'eau, mais impossible de le vérifier. Il sourit. Une fois encore, la Nature posait sa main sur leurs âmes, et caressait directement leur cœur. Les vagues arrivaient irrégulièrement, tantôt piano, tantôt fortissimo. Ses paupières se rapprochèrent doucement, bercé par les mélodies que leur chantait l'Omnisciente...

« C'était beau, ce que tu jouais il y a une minute... »

Eh bien ! Il eut peu de répit ! Rouvrant les yeux avec lenteur, il ne sut s'empêcher de secouer la tête comme pour se réveiller plus vite. Quelques secondes, et il rêvait déjà. Sans l'anglaise, il aurait manqué le coucher de Soleil. Sa main caressa machinalement la caisse d'Éva, qui restait silencieuse, allongée sur ses genoux. Il n'émit qu'un soupir à la tendresse de son geste, mais il se dissipa rapidement dans le vent qui faisait danser ses mèches blondes. Jusqu'à l'arrivée d'Ethel, il ne prêtait pas grande attention aux accords qu'il jouait, répétant les mêmes mesures pour se détendre et laisser la voix de son instrument se mêler à celle de la Reine. Puis il avait noté quels étaient ces fameux accords qui le faisaient planer, avaient identifié la tonalité, s'était laissé guidé vers une cadence parfaite. Ce n'était pas une mélodie très complexe, mais il en était assez fier ; alors il lui murmura un « Merci... » en souriant, sincèrement touché. Son regard se posa alors sur la tête de sa guitare, lui demandant dans un profond silence si elle était heureuse du compliment que leur faisait la jeune fille. Fou ? Pas le moins du monde. Cet instrument de musique venait du bois d'un arbre, et donc d'un être vivant. C'était ses mémoires qui vivaient en lui, son vécu qui se mêlait à la mélancolie ou à la joie de ses notes. Un artiste ne pouvait considérer le son comme une vulgaire vibration...

« C'est vrai, tu as une très belle voix... s'adressant à Éva, il caressa tendrement le bois de sa caisse, laissant le frottement exprimer le plaisir de sa partenaire. Il pouffa de rire puis releva la tête vers Ethel. Je te présente Éva, une de mes maîtresses préférées. »

Vous souvenez-vous, à l'aquarium ? L'adolescente était celle qui passait pour une folle. Dans la forêt, ils avaient semblé sur la même longueur d'onde et la même folie. C'était aujourd'hui, sous le Soleil, au bord de l'océan, que le finlandais révélait cette partie de lui. Seules Inari, Ivanna, et les membres de Revolution connaissaient le lien qui l'unissait à ses instruments. Qu'il s'agisse d'une guitare, d'un clavier, d'une batterie, d'une flûte, tous méritaient un nom, et il leur parlait comme un jardinier communique avec ses fleurs. Ses instruments étaient les amies qu'il n'aurait jamais. Décochant un sourire amusé à l'adolescente, il lui tendit Éva.

« Prends ! Tu vas te sentir toute différente ! »
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMar 27 Mar 2012 - 17:08

Juste Après
« Jani & Ethel»



L’espace d’un instant, il avait semblé gêné, près à refuser ses remerciements. Mais il s’était ravisé, la gratifiant d’un seul sourire qui lui suffit amplement. Elle était extrêmement sincère. Avant de manquer de perdre une chose, on ne peut que difficilement saisir sa valeur. Elle avait toujours joué avec la vie comme on peut jouer avec une personne qu’on aime. Sans la mettre réellement en danger, elle l’alimentait d’une insouciance telle que nombre de fois, elle était passée à côté de la catastrophe. La dernière tension aurait pu être fatale. Un émerveillement passable de mort, une condamnation par la beauté des choses. La rouquine prêtait bien trop attention aux choses qui ne devaient pas avoir d’importance, du moins pour le commun des mortels, et se fichaient de ce qui crevait les yeux et qui faisait lever la tête à un pays entier.

Il parla à sa guitare, ce qui fit sourire la jeune fille. Ainsi donc, il semblait attaché à son instrument. Ce n’était donc pas forcément le musicien qui connaissait trois accords et deux rythmes, les utilisant au coin d’une plage pour impressionner les vacancières en été. Quoi que, il pouvait tout de même se servir de son instrument pour séduire les filles, cela marchait pour beaucoup, quel que soit le talent du musicien. C’était peut être juste la preuve de son attachement à son art. Il lui avait donné un nom, et la personnifiait donc. Etait-ce un mal ? Surement pas, on donnait bien des noms à des hamsters ou des lapins. Et on faisait difficilement plus con qu’un lapin.

Enlevant son béret, elle le posa juste à côté de ses aquarelles, déliant ses cheveux et les laissant flotter au vent. La brise légère qui se levait lui donnait des envies de liberté, de voler au-dessus de l’onde, rigolant avec les mouettes et dansant avec les nuages. Mais elle était sur terre, et le savait. Sauter d’une falaise lui avait réussi une fois, mais elle préférait ne pas réitérer ce qui pourrait peut-être cette fois lui couter la vie. Sa noyade ne lui avait pas donné peur de l’eau, mais elle prenait conscience de la mort, et de sa présence qui. Une accolade avec cette triste amie pourrait lui être fatale, et elle voulait trop découvrir pour mettre sa vie en danger maintenant. Elle avait tout à découvrir, tout à apprendre et voir. Son rêve était de pouvoir parcourir le monde, et peindre ses des feuilles les plus beaux paysages qu’on pouvait trouver, discuter avec des gens différents, comprendre et apprendre des autres.

« Prends ! Tu vas te sentir toute différente ! »

Clignant des yeux, elle regarda un instant l’instrument noir d’un air interdit. Elle, le prendre ? Elle savait jouer quelques mélodies, les plus basiques. Son père lui avait appris « Manish boy ». Il l’avait reprise en version plus rock un soir, alors que la petite faisait ses devoirs. La voix rauque de son père, le feu qui crépitaient, firent qu’elle tomba amoureuse de cette chanson. Suppliant son père de lui apprendre à jouer, ne serait-ce que cela, elle sauta de joie quand il accepta. Voir sa fille jouer de la guitare était tout ce qui voulait, mais elle avait préféré le dessin. Elle avait mis un petit bout de temps à le jouer correctement, n’ayant jamais auparavant tenu de guitare, mais aimait le résultat.
Comprenant l’importance de « Eva » pour Jani, la jeune fille prit l’instrument religieusement.

« Je ne sais pas jouer, moi… »

Essayant de tenir correctement l’instrument, elle le regarda avec des yeux tout aussi grands. Il était vrai que cela pouvait sembler évident pour certain. Elle demeurerait pantoise si elle tendait un pinceau à quelqu’un et qu’on lui disait « je ne sais pas dessiner ». Pour elle, cela coulait de source, mais c’était peut-être de l’égoïsme. Jouant donc le seul rythme qu’elle connaissait, elle s’arrêta et éclata de rire. Différente, peut-être pas, mais en tout cas elle voyait bien à quel point Jani aimait cette Eva. Avec la peinture, le rapport à l’objet était différent. Le pinceau s’usait rapidement, le tube se vidait tout aussi vide. On ne sacralisait rien vraiment, les mains seules pouvaient servir avec n’importe quoi. Avec un instrument aussi, mais les musiciens avaient forcément « leur » instrument. Bien que la jeune fille savait que certains artistes avaient un pinceau porte-bonheur ou autre chose, elle n’était elle-même pas du tout matérielle, ne s’intéressant pas à ce genre de choses.

« Tu devrais la reprendre, je crois qu’elle préfère tes caresses. »

Aucun double sens dans ses paroles, la jeune fille en était bien incapable. Mais la musique qu’avait jouée le blondinet lui avait légèrement fait penser à une caresse, un souffle doux. Aucune violence dans sa musique, rien qui ne pourrait s’apprêter à quelque chose de brusque. Et forcément, elle préférait les caresses de celui qui savait y faire, pas d’une jeune fille qui connaissait timidement quelques accords et les répétaient depuis des années dès qu’une guitare lui tombaient sous la main. Mais c’était moins connu et répété que Smoke on the water. Et elle aimait bien chanter Manish Boy.
Hésitant un instant, elle regarda Jani dans les yeux, avant de lui rendre sa guitare.

« Enfin, ça dépend… Si je la garde, tu ne me jetteras peut-être pas du haut de la falaise cette fois ? »

Elle accompagna cette phrase d’un petit rire cristallin, n’étant nullement dans le reproche. Ce n’était pas le saut de la falaise qui avait engendré la noyade, bien au contraire. Elle ne faisait aucun lien entre les deux. Personne n’était responsable sauf elle. Et son esprit s’était déjà tout pardonné.




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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyVen 30 Mar 2012 - 20:16

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Heureusement qu'au bord de l'océan, l'Aquilin se faisait assez présent pour calmer les flammes plutôt que de les raviver. La joue de Jani brûlait ardemment d'une discrétion effarante : le baiser d'Ethel avec été très réconfortant et ça valait bien plus que le « merci » qu'elle ne fit que sous-entendre ; mais sa peau restait pâle. Le vent l'y aidait très certainement. Un sourire à la fois léger et sincère s'était esquissé sur les lèvres du jeune homme, mais lorsqu'elle retira son bonnet pour libérer ses cheveux, le visiteur de Musée des Femmes s'immobilisa, admiratif face à tant de beauté. Elle était plus naturelle ; sa tenue aussi était moins excentrique, quoique très colorée. Il la fixa quelques instants comme on fixe le Toréador Hallucinogène de Dali : il avait d'abord vu une jeune femme, mais il découvrait à force d'observation ce qui façonnait cet être. Une âme d'artiste, un amour profond pour la Nature, de la folie, un cœur de jeune fille ingénue, un vécu incomparable. Il n'y avait jamais pensé, mais peut-être était-ce là ce que le peintre espagnol avait cherché à montrer au travers de son œuvre : ce que l'on voit n'est pas toujours ce qu'on croit. De loin, on voyait la silhouette d'un jeune homme, mais en se rapprochant, par curiosité, on découvrait que ce n'étaient que des statues de la Venus de Milo, des mouches, un taureau, des tissus. « Sapere Aude ».
Mais son admiration s'orienta vers son glorieux instrument, qu'il caressa chaleureusement en lui parlant avec douceur. À ses souvenirs, il ne s'était jamais adressé aussi doux et respectueux à une femme, pas même à Ivanna. Il savait mentir, bien entendu, mais en musicien, il percevait lui-même les changements dans sa voix, et pour peu qu'il sache très peu en faisaient autant. Éva, Ethel... Toutes les deux participaient à son bonheur et à son aise de la même manière, et le milieu dans lequel ils étaient installés rendait la scène paradisiaque. Le ciel n'était pas encore teinté d'orange ou de violet, mais la grande étoile ne tarderait plus trop à se coucher. L'attendre dans le silence ? Il aurait pu le faire, s'il n'avait pas été en compagnie de sa guitare. Mais elle était bien là, posée sur sa cuisse tout contre lui. Elle se laissait caresser en soupirant de plaisir ; il voulait la faire vibrer... Et laisser l'anglaise seule dans son coin ? À quoi bon être en la compagnie de quelqu'un si c'était pour ne pas en profiter ? Dans un élan de générosité et d'ingéniosité, il lui tendit son instrument, l'invitant à le saisir et à jouer quelques notes. Elle sembla tout d'abord réticente à cette idée ; elle devait avoir compris qu'Éva était sacrée ; mais elle la saisit finalement et la prit sur ses genoux.

« Je ne sais pas jouer moi... »

Se voulant rassurant il lui sourit. Il se doutait bien qu'elle ne savait pas en jouer comme lui ou comme une professionnelle, et elle n'avait pas besoin d'avoir ce niveau pour savourer le toucher d'une guitare. Fretter ces cordes en bronze, les sentir s'enfoncer dans ses doigts, c'était tout ce qu'il y avait de plus agréable dans ce bas monde. Puis elle joua un riff que tout le monde connaissait, bien qu'il eût du mal à se rappeler du morceau d'où il était tiré. Elle s'en sortait bien, pour quelqu'un qui ne savait pas jouer de la guitare ! Mais elle s'arrêta, lui conseillant de la reprendre sous prétexte qu'elle préférerait ses caresses. Le finlandais rit. Bien sûr qu'elle préférait ses caresses...

« Ce n'est pas tous les jours qu'elle peut sentir d'autres doigts que les miens ! »

Peu après, elle voulut lui rendre Éva. Secouant la tête, Jani lui fit signe de la garder et se releva. Se dirigeant vers elle, il lui certifia qu'ils ne sauteraient pas cette fois, qu'ils ne prendraient pas le moindre risque. Après tout, ils en avaient déjà assez profité, il était temps de se calmer un peu et de profiter d'un coucher de Soleil comme il se doit. Il alla enfin s'asseoir derrière elle, et la cala contre lui. Une fois encore, on aurait dit deux amants, or ce n'était pas du tout son intention. Certes, elle était mignonne, particulièrement attirante, mais quelque chose en elle le retenait fortement : à l'intérieur de ce splendide corps de femme résidait l'âme d'une fille juvénile et innocente, qui n'avait aucune idée de ce que « charnel » pouvait signifier. Il respectait profondément cette virginité et cette pureté, et il avait admis lorsqu'elle avait fuit son baiser qu'il ne pouvait se permettre d'être le premier homme à la toucher. Si elle devait offrir cette pureté et ce corps à quelqu'un, ce serait à celui qu'elle aime. Il n'était pas cette personne, c'était certain.

« Tu t'en sors plutôt bien, mais ce serait mieux si tu la tenais différemment et si tu replaçais tes doigts comme ça... »

Tout contre elle, il amena à son tour ses mains sur l'instrument pour le faire pivoter légèrement. Elle l'avait trop calée contre elle et ça rendait la jeu assez inconfortable. De plus, si elle avait voulu monter dans les aiguës, elle n'aurait pas pu. Il en profita aussi pour indiquer à la jeune fille qu'il était plus confortable de jouer lorsque l'on reposait son avant-bras sur la caisse. Son autre mains suivit son bras gauche et en saisit le poignet pour l'abaisser légèrement.

« Voilà ! C'est mieux non ? » dit-il enfin en esquissant un sourire satisfait.

La tête par-dessus son épaule, les lèvres près de son oreille, il faisait attention à ne pas parler trop fort. Sa voix s'exprimait dans un murmure soufflé avec légèreté et douceur, comme la brise, mais en plus chaud. Ses yeux se levèrent instinctivement vers le ciel pour admirer l'étendue bleu qui se reflétait dans l'océan et pourquoi pas dans ses perles de saphir.

« Tu veux que je t'apprennes quelques arpèges, en attendant que le ciel change de couleur ? »
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptySam 31 Mar 2012 - 13:20

Juste Après
« Jani & Ethel»



Le soleil couchant illuminait la blondeur de Jani, faisant sourire la jeune fille. Ainsi, le jeune homme semblait réellement baigné d’une innocence certaine. Pourtant, elle avait commencé à comprendre qui il était réellement. Qui pouvait se prétendre aussi ingénu qu’elle ? Depuis ces deux mois, depuis qu’elle s’était en quelques sortes réveillée, les autres paraissaient autrement à ses yeux. Elle voyait avec plus d’attention et de précision des mouvements ou des mots qui auparavant serait passé dans son esprit sans qu’elle y prête attention. Si elle ne saisissait pas toujours tout, les rires que certaines phrases engendraient et qui lui avaient semblés anodines, elle évoluait doucement, plusieurs pierres de son mur étant tombées en deux mois. Le plus dur était de tenter de passer de l’autre côté sans se rompre de son innocence, qu’elle ne voulait pas perdre.

Jani avait refusé d’un signe de main de reprendre sa guitare, surprise, la jeune fille la reprit sur ses genoux. Au moins, il lui certifia qu’ils ne sauteraient pas. Riant doucement, elle regarda l’horizon. S’aurait été dommage de sauter cette fois-ci, refaire quelque chose de déjà tenté, alors qu’ils pouvaient rester dans ce lieu où personne ne les dérangeraient vraiment mise à part le vent et les animaux. Alors qu’elle regardait le soleil, qui commençait à descendre doucement mais surement vers l’onde, la jeune fille sentit Jani s’asseoir derrière elle. Cette fois-ci, au contact du jeune homme, elle ne sursauta pas, bien qu’elle fût surprise de ne pas l’avoir senti arriver. Elle se sentait plus en confiance que la dernière fois. Mais elle avait encore était perdue dans ses pensée, et n’avait pas fait attention à ce qui se passait autour d’elle.

Corrigeant sa position, le jeune homme s’appliqua à lui montrer une autre manière de jouer, plus confortable. En partant il y a quelques heures, aquarelles et peintures sur le dos, la jeune fille était loin de se douter que cela allait se transformer en leçon improvisée. Deux mois qu’elle ne l’avait pas revu, pratiquement. Et cela semblait assez naturel pour ne pas la faire trembler de surprise, elle qui l’était habituellement pour un rien. Etait-ce un signe de confiance ? Il y a deux mois, elle avait tremblé en le voyant simplement près d’elle. Mais le temps avait passé, depuis la cabane végétale qu’ils avaient partagés, le temps avait filé.

« Tu veux que je t'apprennes quelques arpèges, en attendant que le ciel change de couleur ? »

Elle tourna la tête pour regarder Jani dans les yeux. Regardant ensuite le soleil, elle sourit au ciel. L’heure qu’elle préférait commençait à pointer son nez. L’instant fébrile et éphémère où le ciel se colorait de milliers de teintes. Le violet était sa couleur préférée, parce qu’il n’y avait qu’à cette heure-ci qu’on pouvait la trouver dans le ciel. Mais contrairement à d’autres couleurs ou certains paysages, les changements de teintes du firmament étaient universelles. Dans chaque pays, il y avait un coucher de soleil, mais si dans certaines contrées il fallait attendre 6 mois pour l’avoir. En fait, la véritable réponse à la question « quelle est ta couleur préférée » serait pour Ethel la couleur du ciel qui se couche. Toutes ces teintes la laissaient sans voix, à la hauteur des plus beaux tableaux de Turner, qui avait su marier les couleurs chaudes et froides avec une harmonie sans précédent. Lorsque la jeune fille était encore en Angleterre, et que ses parents allaient à Londres, elle passait obligatoirement par les musées, surtout le British Museum, qui abritait certaines des plus magistrales œuvres du peintre. Et elle restait toute la journée à les contempler, en proie à l’émerveillement.

« Oui, je veux bien ! »


Après tout, elle ne connaissait rien en guitare, mais cela ne pouvait venir que compléter ses connaissances, et lui apporter quelque chose qu’elle n’avait pas. N’est-ce pas à cela que sert les connaissances des autres ? Si elle se bornait uniquement à ce qu’elle savait faire, jamais elle ne s’améliorerait dans aucune discipline ! Comme ceux qui apprenaient à dessiner, puis ne touchaient plus jamais un pinceau, partant du principe qu’ils savaient faire et n’avaient plus besoin de s’entraîner. Quelle était alors l’utilité d’avoir appris à dessiner ? Juste se pavaner en disant qu’on avait pris des cours ? N’importe quoi.

Il ne restait plus beaucoup de temps avant que le ciel ne se colore, et que la nuit tombe. Qu’importe, ce soir la lune était pleine, et les étoiles du début de printemps avaient toujours brillé assez pour éclairer la route des jeunes gens. Aussi enfantine soit-elle, Ethel n’avait pas peur du noir, l’affectionnant même. La nuit était sa plus chère amie lorsqu’elle voulait que la raison guide ses pas, et que ses tracas quittent son esprit. Elle voulait juste que le soleil se couche, pour profiter de cet instant qu’elle aimait tant, de ces couleurs qui ravissaient ses yeux. Même si elle était venue les peindre, elle pouvait revenir ultérieurement, et profiter de cela avec le blondinet.



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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptySam 31 Mar 2012 - 23:34

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Suite à sa question, elle tourna la tête pour plonger son regard dans le sien par-dessus son épaule. Fidèle à ses habitudes, le jeune homme soutint son regard en se demandant ce à quoi elle pensait. Sa proposition n'était visiblement pas aussi vulgaire qu'il se l'imaginait puisqu'elle l'avait amenée à se retourner. Était-ce dû à leur proximité, qui serait considérée comme dangereuse par n'importe quel regard extérieur, ou à sa remarque sur le ciel ? Qu'elle se retourne rapidement pour faire face à ce dernier rendit cette seconde solution plus probable. Ainsi donc elle serait aussi venue admirer les cieux changer de teinture ? Ça leur faisait un point commun, même s'il était presque certain qu'elle voyait dans ce ciel bleu autre chose que lui, non pas seulement par le fait qu'ils étaient des êtres ayant grandi dans des périodes et climats différents, mais plus parce qu'il savait qu'elle dessinait. Si en musique il percevait des différences de timbre que d'autres étaient incapables d'entendre, il se devait de considérer la possibilité qu'elle pouvait voir là-haut autre chose qu'un bleu azuré. Qui sait ! Peut-être qu'elle y décelait même des petites particules orangées, comme des fragments de Soleil se dissipant dans l'horizon !

« Oui je veux bien. »

Bien sûr qu'elle acceptait. Après tout, elle n'avait rien d'autre à faire si ce n'était regarder le ciel. Elle avait sûrement raisonné comme lui, à se dire qu'ils étaient deux en ce lieu et qu'il serait donc assez idiot de faire les choses seul, chacun de son côté. Bien sûr, Jani aurait pu reprendre son instrument et lui montrer à quel point il savait bien jouer, mais il était persuadé qu'elle finirait par s'ennuyer à l'écouter. Puis, ce n'était pas son genre de se vanter de ses capacités ; il ne se considérait pas comme particulièrement talentueux et les gens étaient facilement impressionnables. En effet, du moment que l'on jouait vite ou que l'on faisait un peu de Tapping, ils se disaient qu'on était un Guitar Hero. Le finlandais - qui était un musicien, un auteur, un compositeur et donc qui connaissait beaucoup en musique - n'était pas de cet avis. Pour lui, un virtuose n'était pas forcement un Homme qui jouait rapidement ou qui impressionnait son auditoire ; mais un Homme qui connaissait presque parfaitement son art et qui réussissait à s'y exprimer. Parfois il en était un, d'autres, il n'était qu'un simple musicien. Et c'est en tant que tel qu'il se décida de revêtir de l'habit du professeur pour introduire l'anglaise à son art.

« On va arpéger une suite d'accords assez simples à placer sur le manche... Tu permets ? »

Spécialiste des questions qui n'attendaient pas de réponse, il se serra un peu plus contre Ethel, la coinçant entre lui et la guitare, et plaça ses mains sur l'instrument. Sa tête se passa sur l'épaule de la jeune fille ; il commença à jouer, fermant les yeux, se laissant aller à des arpèges basiques et pourtant bien expressifs...


Il conclut par un « Voilà. ». Rouvrant les yeux, relevant la tête, il la tourna vers elle et lui adressa un sourire rassurant. La sonorité de ces accords pouvait être, à cause de leur complexité sur la partition, intimidante. Mais il ne fallait pas avoir peur : en musique, nombreux étaient les titres qui paraissaient difficiles mais qui n'étaient autres que des plans répétés à différentes hauteurs. En bon professeur, il commença par lui faire fretter les accords avec sa main gauche doigt après doigt, note après note, en prenant bien soin de lui expliquer ce qu'elle jouait : un arpège de fa majeur quarte et sixte ; un autre de sol majeur cinquième ; un la mineur neuvième ; un do majeur cinquième. C'était un point sur lequel il avait toujours été insistant : il était inutile d'apprendre une musique sans la comprendre. Certes, elle n'avait pas le savoir du nordique, mais elle savait au moins quels accords elle jouait. À part ces noms, il évita d'employer un vocabulaire trop technique de façon à ne pas trop la déstabiliser.

« Ta main gauche a juste à enchaîner ces quatre doigtés, d'ac' ? Maintenant, la droite... »

Là, les choses se compliquaient légèrement. Le travail de la man droite n'avait jamais été quelque chose de négligeable : avec un plectre, il fallait essayer différentes positions, différentes tenues, différentes inclinaisons, pour trouver celle qui permettait de jouer rapidement, proprement, et sans trop s'épuiser ; concernant le jeu aux doigts, c'est à dire celui auquel était confronté Ethel, il fallait attribuer un doigt à une cordes, et chercher la bonne inclinaison pour faire sonner toutes les notes sans trop de parasites. Ici, il insista sur l'ordre des doigtés. Dans un premier temps : pouce ; index ; annulaire ; index ; majeur. Dans un second temps : pouce ; index ; majeur ; index ; annulaire. C'était bien la seule difficulté de ces courts arpèges, et pour l'aider à la surmonter il la fit répéter les doigtés quelques fois à mi-tempo, et la fit placer correctement sa main. Et encore ! Elle avait de la chance. Contrairement à lui, elle avec des ongles un petit peu longs, ce qui lui permettait d'obtenir un son plus brillant et de jouer avec précision sans trop de difficulté.

« Tu n'as plus qu'à travailler ça, Ethel... » déclara-t-il finalement, satisfait des progrès qu'elle faisait.

Elle était une jeune artiste ; elle avait encore beaucoup à apprendre et plus encore dans la musique qui n'était pas son domaine de prédilection. Mais elle partait d'un bon pied, même d'un très bon pied. De l'intérieur, Jani était persuadé qu'elle ne se lancerait pas sur ce terrain avec autant de sérieux que lui. Son cœur battait pour la peinture, pour ces chefs d'œuvre colorés harmonisant couleurs chaudes et froides, et non pour un orchestre ou une guitare. C'était la triste et dure réalité de la vie : ils étaient différents. Ses yeux se rouvrirent et se levèrent vers le ciel, qui semblait avoir commencé à se violacer. Dans un élan de tendresse, il déposa un baiser sur la joue de la jeune fille et amena ses lèvres à son oreille pour s'adresser à elle d'une voix suave, murmurée avec assez de légèreté pour paraître soufflée.

« Que de belles couleurs... »
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyDim 1 Avr 2012 - 16:18

Juste Après
« Jani & Ethel»



La nature était d’un généreux inégalable. Comme une mère bienveillante, elle offrait à chaque fois aux deux jeunes gens ses plus belles merveilles. Des poissons aux couleurs chatoyantes, qui se mouvaient dans le plus bel élément qu’elle ait pu créer. La beauté sauvage et surprenante d’une cascade perdue au fond d’un bois, d’une caverne vierge baignée d’une lumière dansante. Et à présent, le coucher de soleil d’un début de printemps, qui se perdait dans le reflet des flots et dansait aux rythmes des vagues libres. La liberté était le plus bel apprentissage de la nature. Ses paysages étaient dans leur liberté sauvage et insaisissable, la plus belle chose qu’il peut être donné à un homme de voir. Mais dans toute sa vénalité, l’homme s’approprie ce qu’il aime, enferme ce qu’il trouve beau, pour le garder à ses seuls yeux. La jalousie de voir l’immensité d’une telle beauté partagée au monde entier ? Lorsque l’homme cherchait à garder la nature, il l’étouffait, il lui faisait perdre sa pureté originelle. Ainsi, la splendeur des animaux de la savane se transformait en lionceaux grassouillets dans les zoos. Les plantes grimpantes et fières étaient cloitrées entre quatre murs. Le feu qui brulait dans les astres n’était plus qu’une triste flamme sur une bougie. Et l’eau, l’élément le plus pur et le plus brillant, se transformait en petit bassin misérable, une flaque d’eau sur un balcon entouré de bêton.

Ethel aurait souvent aimé que les hommes se rendent compte que ce qu’ils aiment, ce qu’ils affectionnent, ne puise sa beauté et sa force que dans la liberté, et qu’il faut la sauvegarder pour préserver l’équilibre fragile, pour continuer à côtoyer ce monde qu’il nous est offert de partager. Mais même elle, souvent, se laisser prendre à la faiblesse humaine, même elle voulait la nature pour elle toute seule. Une plante verte poussait dans un pot sur son bureau, elle élevait des bassins en pierres au fond du jardin de ses parents, elle aimait à aller caresser son chat, qui pourtant aurait été d’une sauvagerie magnifique s’il avait été libre. Chaque homme est assez faible pour ne vouloir garder jalousement pour lui ce qu’il aime. Etait-elle pardonnable ?
Ce qui lui était donné en cet instant, pur moment de liberté pure, d’émerveillement à l’état brut, devait être prit comme un présent, et le partager avec le jeune finlandais, qui semblait connaitre la liberté et l’affectionner justement, était un embellissement encore plus conséquent.

Ecoutant avec attention Jani jouer, elle esquissa un sourire. Pour lui, tout cela avait l’air d’une évidence sans faille, il se déplaçait librement sur le manche, ses doigts courant agilement. Le rythme n’était pas des plus durs, elle avait vu certains musiciens au sommet de leur art, interprétant une mélodie qui donnait autant d’incrédulité aux oreilles qu’aux yeux. Pourtant, c’est encore la musique simple qui atteignait le cœur de la jeune fille. Celle qui pouvait transporter une âme en quelques accords, sans se soucier d’une interprétation nécessitant une pratique irréprochable. Juste un cœur mit à nu sur une partition, et une composition faite pour rêver. Appliquée, elle le laissa guider ses mains, essayant de mémoriser les emplacements. Elle savait bien que le plus dur n’était pas de positionner ses doigts, qui étaient au final plutôt souple, mais de les enchainer après à un rythme régulier.

Il lâcha les rênes, la laissant faire. Décontenancée pendant un quart de seconde, elle regarda le manche de l’instrument, se remémorant ce qu’il venait de lui apprendre. Glissant ses doigts sur les cordes, elle se trompa, pesta en silence, recommença, se trompa encore une fois, et recommença. Ce n’était pas par fierté qu’elle voulait réussir, ou pour impression le blondinet derrière elle. Juste que lorsqu’elle essayait quelque chose, elle se devait en elle-même de le mener à bien. Une couleur ou une forme était trop délicate à représenter ? Elle s’y attardait pendant des heures, exploitant la moindre teinte, le moindre ombrage et la moindre ligne. A la fin, cela n’avait jamais le résultat escompté, parce qu’elle était allé plus loin que la forme initiale, mais elle était satisfaite.

« Que de belles couleurs... »

Elle leva la tête, venant de réussir plus ou moins à enchainer de manière crédible les accords. Ses yeux touchant le ciel, son cœur s’arrêta de battre. L’instant ésotérique. Fragment ineffable. Le sourire sur ses lèvres s’élargit. Ils étaient arrivés au moment où la nature déployait ses plus belles couleurs, comme un paon farouche et fier. Elle murmura un « merci » qui s’adressait à la nature. Pour ce qu’elle lui donnait depuis toujours, pour les couleurs avec lesquelles elle emplissait son âme, pour les douceurs qu’elle lui avait permis de toucher. Appuyant sa tête sur l’épaule de Jani, elle contempla sans un mot le ciel, son cœur recommençant peu à peu à battre, dans une symphonie émerveillée de cette beauté libre.

« Nous devrions prendre exemple plus souvent sur la nature. »


Dit ainsi, sans explication autre, peu de personnes pourraient comprendre. Mais si elle n’avait pas partagé plus de sa pensée, elle demeurait sure que le jeune finnois comprendrait ses paroles. Si non, tant pis, elle n’aurait qu’à considérer qu’elle avait parlé à ceux qui pourrait comprendre, que ça soit le vent ou les vagues. Regardant l’instrument de Jani, elle en caressa l’extrémité de la fleur de ses doigts, avec douceur. Il semblait représenter énormément pour lui. Tournant la tête légèrement, elle le regarda.

« Pourquoi avoir choisi la guitare ? Pour une raison précise ? »

Elle revenait au sujet précédent, mais la réponse l’intriguait légèrement. Sa motivation était-elle guidée par la simple praticité de l’instrument ? Ou pas un autre dessin plus profond ? La jeune fille préférait l’aquarelle, mais ce n’était pas parce que c’était la forme la plus facile à utiliser – ce qui d’ailleurs était faux – C’était parce que l’aquarelle donnait au dessin une poésie qui ondulait sur les grains de la feuilles, un sentiment de fluidité qu’on ne pouvait retrouver dans la peinture à l’huile ou le fusain. Les traits étaient plus clairs, les couleurs plus rêveuses.




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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 4 Avr 2012 - 20:32

Juste aprèsFeat: Ethel Dawkins
Elle y arrivait. Ethel réussit enfin à placer ces quatre arpèges en limitant les erreurs basiques qui nuisaient à la guitare. Bien sûr, elle n'avait pas son expérience, sa force, ou sa dextérité, mais elle parvenait à contenir la frise des cordes dans les dernières notes de chaque accord, les posant avec assez de fermeté pour que les notes de basse sonnent dans une ondulation perpétuelle. C'était probablement la principale difficulté des arpèges à la guitare : il fallait que toutes les notes sonnent ensembles mais qu'elles soient jouées séparément. Sa réussite le satisfit fortement. Elle était la preuve que nous n'avions pas besoin de talent particulier pour achever dans l'art ; seule l'expérience comptait. Depuis qu'il vivait au Japon, le jeune homme avait donne quelques cours de guitare par-ci et par-là et c'était un point sur lequel il avait beaucoup insisté. Il disait toujours qu'il n'avait pas de talent contrairement à ce que certains pensaient, mais qu'il était passionné par ce qu'il faisait et qu'il s'y consacrait pleinement ; ainsi il se démarquait de la majorité.
Puis il avait levé la tête, constatant avec émerveillement que les teintes du ciel commençaient à changer. Ses lèvres s'étaient déposées sur sa joue dans un élan de tendresse et n'importe quel être minutieux aurait noté le changement de sa voix, plus suave sans être moins amicale. L'anglaise ne semblait pas y avoir prêté grande attention et avait juste relevé la tête pour admirer à son tour ces nouvelles couleurs. Combien de fois avait-elle essayé de les reproduire avec sa peinture ? Cela ne devait plus être nombrable ; alors combien de fois y était-elle parvenue ? Si seulement elle avait pu le faire une simple fois, il tomberait d'admiration pour sa virtuosité. Il prit une inspiration, ouvrant la bouche pour poser sa question, mais fut interrompu par le remerciement d'Ethel. Pourtant, un baiser non-désiré ne le méritait pas, et si c'était pour la musique qu'elle venait d'achever elle était la seule à féliciter. À défaut de ne pas savoir, il haussa les épaules et lâcha un « Bah, pas de quoi. » relativement nonchalant. Posant sa tête sur son épaule, elle demeura silencieuse quelques instants. Jani ne le voyait pas mais il imaginait parfaitement son regard perdu dans cette infinité violacée qui semblait étinceler à la surface du liquide sur lequel elle était allongée. L'union du ciel noble et doux qui se reflétait dans l'océan sauvagement animé était fascinante...

« Nous devrions prendre exemple plus souvent sur la nature.
- Plantons-nous ici, cessons de bouger, laissons la pluie nous arroser et grandissons...
lâcha-t-il avec ironie, montrant avec amusement sa désapprobation avec les paroles de l'anglaise. Non, nous devrions apprendre à l'écouter et à vivre avec elle. »

À quoi bon prendre la Nature comme exemple ? Nous autres êtres humains étions des créatures bien différentes des autres. Jamais le finlandais n'avait accepté que l'on considère l'Homme comme supérieur aux autres animaux, mais jamais il ne pourrait accepter l'idée que la Nature leur apportait le modèle de vie idéal. Thomas d'Aquin avait déjà suggéré cette idée pour que l'on sache quel était notre but en tant que vivants. Il suivait le raisonnement d'Aristote et considérait que tout avec une cause et une raison d'être. Ainsi donc notre langue nous servait à parler, nos cordes vocales à émettre des sons, mais qu'en était-il de nos doigts ? Les mains peuvent servir à effectuer des tâches manuelles, bien sûr, mais ce n'est pas assez spécifique. Et comme tous les croyants qui ont eu l'audace de se frotter à l'éthique, Thomas d'Aquin perdait toute crédibilité lorsque l'on en venait aux partie génitales. Si tout a un rôle, à quoi sert le clitoris, si ce n'est procurer du plaisir ? Ça va en parfaite contradiction avec le rôle reproducteur qu'il donnait à ces parties. Et au delà du but de notre espèce, n'y a-t-il pas le but personnel ?

Si nous prenions exemple sur la Nature uniquement, nous nous contenterions d'observer que les animaux couchent ensembles uniquement pour se reproduire. Nous observons, nous interprétons, mais comprenons-nous ?

Un léger bruit de frottement le tira de ses pensées, bruit qu'il ne connaissait que trop car il s'agissait d'une main qui effleurait la caisse de sa maîtresse. Son regard se posa sur son magnifique instrument qui semblait bien heureux dans les bras de la jeune fille, puis sur elle, qui venait de lui demander pourquoi il avait choisi de jouer de la guitare et pas d'un autre instrument. Il rit.

« Quand j'étais encore un tout jeune garçon, mon père m'a fait écouter une musique vraiment magnifique : Still Loving You. Et depuis que j'ai écouté ce morceau, je suis tombé amoureux du Hard Rock. J'admirais ces mecs sur scène qui jouaient des solos aussi magnifiques ! Alors un beau jour, j'ai voulu faire comme eux, et j'ai eu une guitare. Puis c'est marrant, tous les effets qu'on peut ajouter à son son ! »

Il esquissa un sourire quelque peu embarrassé. Et non ! Il n'était pas l'archétype du musicien romantique et talentueux qui a choisi cet instrument pour des raisons marquantes et très personnelles. Bien sûr, la guitare était maintenant son instrument de prédilection, celui avec lequel il avait le plus vécu et aussi avec lequel il s'exprimait le mieux. Et il n'y avait nul besoin d'être pianiste pour composer pour un orchestre. La preuve : Hector Berlioz, un des plus grands compositeurs romantiques français qui a beaucoup contribué aux progrès de l'instrumentation et de l'orchestration, ne savait pas en jouer. Il était de ceux qui considéraient que l'orchestre était un instrument à part.

« Bien sûr, je n'ai plus les mêmes ambitions maintenant... Et ma petite sœur m'a appris à jouer du piano. Je sais aussi jouer d'autres instruments mais ce n'est pas ce que je préfère. Ce n'est pas assez pour dire ce que j'ai sur le cœur. Alors je compose, et c'est bien sur la portée que je suis le plus à l'aise. »
© Jani Lumisielu
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyJeu 5 Avr 2012 - 18:07

Juste Après
« Jani & Ethel»



Encore une fois, il désapprouvait ses dires. Avec un sourire nullement vexé, elle se souvint de la dernière fois où ils s’étaient rencontrés. La tension légère du départ, alors qu’ils se croyaient foncièrement différent, ne partageant qu’une vision de la nature totalement opposée. La rouquine savait leurs différences de jugements, mais elle restait malgré tout sur sa position. Pour elle, l’homme devait s’inspirer plus de la nature. Sa force était sans faille, et pourtant elle possédait des faiblesses étranges. Elle avait créée elle-même sa propre destruction, la terre pouvait être détruite par le feu, et tout cela, c’était elle qui l’avait créée. Et pourtant, elle était toujours là, fière et tempétueuse, faisant de ses faiblesses une force pour regagner les territoires que les hommes lui prenaient jalousement. Ethel admirait cette force, et en tirait un apprentissage.

« L’écouter, n’est-ce pas apprendre d’elle, pour en prendre exemple ? C’est la même chose pour ce qui est de vivre à ses côtés. Nous devons pour cela en tirer un certain enseignement, sinon la cohabitation ne se fera jamais. »


Bien sûr, il serait étrange qu’il se range à son propos, surtout que son argumentation était plutôt bancale. Mais elle avait du mal à exprimer en cet instant ce qu’elle pensait. Pour elle, cela était d’une évidence première, et le fait que Jani montre ainsi sa désapprobation la déstabilisait légèrement. Il était le seul avec qui elle n’ait jamais parlé de la nature, et le premier à contredire sa pensée donc. C’était à la fois désagréable de se voir contredite ainsi, mais cela lui permettait d’aller plus loin dans sa pensée. Les phrases qu’elle se contentait de dire parce qu’elle les pensait dans l’instant se révélaient plus lourde de sens, et discutable.

« Il ne s’agit pas de prendre le côté primaire de la nature, mais je pense que les hommes devraient arrêter de ne vivre que pour eux, et chercher à écouter et comprendre son enseignement. Les hommes sont pleins de préjugés. »


Les animaux ne pensent pas, ne ressentent rien. Elle se souvenait avoir entendu cette phrase de la bouche d’un homme, et cela l’avait révulsée. Sous prétexte que les animaux ont un système de pensée différent du nôtre, qu’ils n’ont pas un moyen de parole aussi perceptible, ils n’agiraient que pour leurs instincts premiers ? C’était placer l’humain trop haut, comme seul être suprême, et ce n’était tout simplement pas concevable. Encore une fois, elle ne disait pas réellement ce qu’elle pensait. Mais elle n’avait habituellement personne à qui parler réellement. Castiel avait été la seule personne avec qui elle est pu parler d’autres sujets que de choses futiles. Et elle s’écrasait à chaque débat, et ne cherchait pas à réfléchir, se contentant de répondre rapidement pour ne pas se faire dévisager et traiter d’idiote. Elle devait donc en quelque sorte apprendre à parler.

Ecoutant Jani, elle sourit à sa réponse. Ce n’était certes pas l’histoire qu’on peut voir dans les films, ou celles qu’inventent les dragueurs. C’était une vérité simple, un amour pour l’art qui était né de quelques notes. Somme toute bien plus réel et présent que quelqu’un qui a commencé à cause d’une histoire bien trop compliqué, dont on ne saisit pas la vérité. Se détachant de lui, elle posa délicatement la guitare sur le côté et se retourna, lui faisant face en se tenant à quelques dizaines de centimètres de lui, ses pieds touchant les siens. Un grand sourire sur les lèvres, elle posa sa tête sur ses genoux, lissant sa jupe.


« C’est une jolie histoire, je trouve. On sent que c’est ta passion ! »


Commentaire plat. Mais le sourire qui l’accompagnait montrait qu’elle croyait totalement ce qu’elle disait. Après tout, l’art était une passion, non ? Elle avait commencé à peindre parce qu’elle avait ressenti le besoin d’exprimer ce qui explosait à l’intérieur de son cœur. La musique était en cet instant trop statique. Si on pouvait tout exprimer sur un instrument, elle avait besoin de bouger, de courir et de se jeter sur quelque chose. Mettant cela dans la peinture. Ses premiers essais se rapprochaient donc de l’action painting, à l’égal de Jackson Pollock ou Willem De Kooning. Au fur et à mesure, alors qu’elle tendait des grandes toiles puis jetait la peinture, ou alors se jetait dessus, elle avait appris à se calmer, a avait tenté de faire des motifs, de travailler les jetés. Puis lorsque sa chambre n’était qu’un champ de bataille, elle avait réduit de format, apprit les traits humains et naturels, avait tenté de représenter plus calmement ce qu’elle ressentait intérieurement.

Riant légèrement, elle se coucha et écarta les bras, regardant le ciel d’un air béat. Il était parfait ce soir, juste d’une perfection sans nom. Observant chaque nuance dans le firmament, elle énuméra en murmurant les couleurs, les teintes. Elle s’amusait au même jeu avec les nuages. Certains les disaient blancs, mais ils ne les avaient jamais regardés. Les nuages de jour étaient fantastiques dans la nuance de leur teinte. Du bleu, du jaune, du gris, se mélangeant des fois à d’autres couleurs, mais donnant toujours cette essence pure et immaculée.






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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyVen 18 Mai 2012 - 19:00

Reductio ad absurdum. S'il n'avait pas senti son léger malaise dans l'intonation de sa voix, il n'y aurait pas repensé et ses mots se seraient dissipés dans la brume du passé. Cependant, ça n'avait pas été le cas : sa thèse avec beau être facilement réfutable, Jani ne voulait pas la vexer. L'anglaise tenta de s'expliquer à nouveau, remplaçant l'idée d'apprendre par la Nature par une critique de l'individualisme des Hommes. Ce n'était plus laisser le Naturel guider nos vies, mais apprendre à vivre en tant que constituant de cette Nature. Un court silence se posa entre eux, silence pendant lequel il réfléchit à tout ça. Elle venait plus ou moins de rejoindre sa position. Il prit finalement la parole.

« Je suis presque d'accord avec toi. Il marqua une courte pause, cherchant comment poser la suite de son raisonnement. Mais par exemple, je peux écouter le message de quelqu'un sans prendre exemple sur lui ! Admettons. Un homme veut assurer la paix dans le monde, mais face aux résistances de certains peuples qui n'adhèrent pas à sa politique, il décide de leur faire la guerre pour l'imposer. La raison de son geste est juste : il veut la paix. Et je suis d'accord avec cette raison. Mais si on suivait son exemple, on déclarerait tous la guerre à ceux qui ne sont pas d'accord avec nous. Personnellement, je n'irai pas jusque là. C'est là que j'entends la nuance entre écouter et prendre exemple sur quelque chose ! »

Il ne prit pas soin de répondre à la suite directement, préférant tout d'abord voir s'il avait été trop dur ou non avec elle. Comparé à sa réduction à l'absurde, ces paroles la considéraient plus et le rendaient moins méchant. Fier de sa rapide changement de comportement, le finnois esquissa un sourire léger. À son histoire sur son lien avec la musique, Ethel eut une réaction aussi simple que brève, et ne s'y intéressa guère plus. Elle ne lâcha qu'un rapide compliment sur la beauté de son passé et la légitimité de sa passion. Quelque peu gêné, Jani ne chercha pas plus loin. Aussi embêtant que ça puisse être, le monde ne pouvait pas autant s'intéresser au quatrième art que lui et il comprenait parfaitement ceux qu'il avait beaucoup ennuyé avec son amour pour la Musique. Beaucoup de ses conquêtes avaient du mal à le suivre dans son raisonnement, et certains musiciens aussi avaient reconnu ne pas s'intéresser autant que lui à tout ça. À part Ivanna et Inari, au fond, personne ne le comprenait. Ses chansons étaient belles, les paroles leur disait quelque chose, et la musique appuyait bien ses mots. Il était seul dans son romantisme. Seul dans un mouvement artistique mort un siècle plus tôt.

Poussant un soupir, esquissant un sourire, il la regarde s'allonger à côté de lui. Le ciel importait bien plus qu'eux, c'était certain. Après s'être interrogé un instant sur la suite des événements, le Lunaire s'allongea à son tour. Faisant désormais face à un ciel teinté d'orange et de violet dont il ne pourrait certainement jamais nommé les nuances, il comprit d'une certaine manière pourquoi son compliment avait été si concis. Du moins, il préférait se dire qu'elle était plus intéressée par autre chose plutôt que nonchalante à ses amours mélomanes.

« Quelle harmonie... » laissa-t-il s'échapper dans un souffle imbibé d'admiration.

Absorbé par la vue de l'étendue colorée qui lui était offerte, le finlandais n'avait plus prêté la moindre attention à ce qui l'entourait. Son regard s'adoucit. Se laissait-il aller à la découverte d'un nouveau genre de transe ? Il avait pour habitude dans des moments semblables de stimuler ses mélodies, de se délecter de la musique et des bruits environnants bien plus que du paysage que la vie lui avait donné de voir. Il se sentait partir, mais un son le retint. Juste un mot. Un souffle. Une pierre. Une fleur. Une couleur ? Plus touché par ce qu'il entendait que parce qu'il pouvait voir, il tint l'oreille à la jeune fille, sur sa gauche. Elle énumérait apparemment tout ce qu'elle voyait, dans un murmure particulièrement doux. Il prêta une attention particulière au timbre léger de sa voix, un timbre trop doux pour être celui d'une contralto. Elle n'avait pas une voix aussi chaude, mais bien fluide. Douce. Un souffle dont l'air venait caresser ses tympans dans une mélodie agréable quoique dissonante et irrégulière. Elle était hors du mouvement, hors des conventions. Elle était libre.

« Comment peux-tu connaître autant de couleurs ? » finit-il par s'enquérir.
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 6 Juin 2012 - 13:08

Juste Après
« Jani & Ethel»



Le jour se couchait sur le monde. Inaccessible horizon qui s’entêtait à demeurer au loin, se mourant dans une apothéose colorée. Si l’aube était teinte de reflets magnifiques, le crépuscule demeurait sans hésitation l’instant préféré d’Ethel. Lorsqu’elle s’était imprégnée entièrement des couleurs que ses yeux côtoyaient, elle n’avait qu’à fermer les paupières un fragment d’instant. En les rouvrant, elle redécouvrait à nouveau un monde nouveau, des couleurs éphémères mais nouvelles. Découverte incessante d’un monde qu’elle ne tentait plus de comprendre. Le crépuscule est l’heure préférée de ceux qui aiment fermer les yeux et s’y perdent. La découverte de cette petite enclave face à l’océan rendait ce coucher-ci encore plus beau. Le soleil se couchait lentement, déjà fatigué du lendemain. Mais il laissait place à une lune resplendissante qui allait irradier une eau dormante. Les étoiles dansant sans bruit autour de cet astre maitresse, la mer serait parée de ses plus beaux atouts. Vêtue du plus beau manteau de nuit, voguant sur l’étendue la plus calme. Si la tempête se levait, elle ne ferait qu’accroitre la majesté de minuit, aucune vague n’ayant encore décroché le ciel.

Lorsque ses yeux étaient ouverts au paysage, la petite rouquine ne faisait pas toujours attention à la frontière entre son esprit et sa bouche. Ambre, Nankin, Vénitien, Mandarine, Abricot, Parme, Lie de Vin, même quelque nuance d’Evêque ou de Colombin. Sans oublier l’Incarnadin ou le Cuisse de Nymphe. Avait-elle réellement énuméré toutes ces couleurs à demi-mot ? Mordant sa lèvre d’un air ennuyé, elle regarda le ciel à nouveau. Il avait parlé d’harmonie. Touchant le mot exact, il réussit à parler au cœur d’Ethel. Oui, c’était une harmonie, une harmonie que seul le ciel savait si bien créer. Au plus profond de l’ouragan, pleurant la misère du monde ou inondant la terre de ses joies, le firmament était bien la seule chose qui savait être d’une harmonie qui forçait l’admiration de ceux qui savaient regarder. Et Ethel était loin d’en saisir toutes les teintes, malheureusement.

« Comment peux-tu connaître autant de couleurs ? »

Surprise, elle se redressa légèrement, alternant en une fraction de seconde entre le ciel et Jani. Autant de couleurs ? Cherchant dans son esprit, elle abandonna immédiatement. Lorsqu’elle entrait en contemplation et qu’elle sortait de cette sorte de transe, il lui était impossible de se souvenir ce qu’elle avait pu penser ou évoquer. Son esprit était définitivement absent pendant cette courte période. Une peu comme si elle vivait un rêve éveillé, mais en étant en parfaite conscience de ses capacités pendant qu’elle le rêvait. Impossible donc de se souvenir du nombre de couleur qu’elle avait pu énumérer, ni même de celle qu’elle avait précisément cité. Clignant des yeux, elle les plongea dans ceux de Jani.

« Un jour, en regardant le ciel, j’ai été terriblement frustrée de ne pouvoir nommer la couleur que je voyais. Rose orange ou bleu, cela ne suffisait plus, tu vois ? Au fur et à mesure que j’essayais de mettre des noms sur ce que je voyais, leur signification m’a fascinée. Tu savais qu’une teinte de rose s’appelle Cuisse de Nymphe ? Pour moi, savoir leur nom donne aussi sa signification à la teinte. »

Elle n’était surement pas très claire. A vrai dire, peu de gens l’avait réellement comprise lorsqu’elle parlait de cela. La plupart rigolaient, d’autre hochait la tête en faisant semblant, et certains lui jetaient juste un regard incrédule qui la blessait profondément. Etait-elle si peu compréhensible ? Il lui semblait pourtant qu’elle se comprenait elle-même lorsqu’elle parlait. Alors quelle barrière était créée dans les esprits pour empêcher les gens de se comprendre entre eux ? Surement un singe un peu trop rieur qui voulait voir cette race aussi pataude que les humains s’empêtrer dans la seule chose qu’ils aient su développer : le langage. Qu’importe, elle se comprenait en elle-même, et si personne d’autre n’en était capable, elle n’avait plus à s’en soucier.

« Au final, c’est comme la musique je dirais. Un musicien n’est-il pas frustré de ne pouvoir mettre le doigt sur une note qu’il entend ? »

C’était différent, bien sûr. Chaque art avait des différences flagrantes. Sinon, quel aurait été l’intérêt d’explorer chaque sens en créant des arts différents ? La rouquine savait bien qu’elle ne comprenait pas la musique, mais que pouvait-elle comprendre véritablement ? Elle avait commencé à réussir à exprimer ce qu’elle pensait quand elle avait enfin saisit que l’art ne se comprend pas, il se ressent.
Toujours les yeux longuement plongés dans ceux de Jani, la jeune fille finit par sursauter, et se détourner en tremblant légèrement. Il y a quelques mois, elle aurait pu mourir. Comme la mort vient vite. Un fragment d’instant et le cœur s’est tut. Les sourcils plus tristes, Ethel regardait le ciel un instant, repensant à ces quelques semaines précédentes. Quelle entité pouvait bien permettre cette violence ? Alors que le cœur à déjà battu si fort, que la vie a déjà pu vibrer de manière si intense. En un instant, la machine cesse, l’âme enfin se tait. Tous ces rires et ces pleures, tous les sourds tremblements qui ont parcouru les membres au fil du temps, tout cela passe aux oubliettes d’un sombre donjon. Voilà bien ce qui avait changé depuis sa chute au cœur des rochers et de l’eau fuyante. Ethel avait pris conscience que la mort n’était pas qu’un mot sourd chuchoté entre les cœurs négatifs. Elle était réelle. Et lui faisait peur.




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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyJeu 7 Juin 2012 - 20:20

Jani ne s'était jamais imaginé qu'il pouvait y avoir autant de nuance dans le nom des couleurs, et encore moins qu'une anglaise les connaissait toutes dans une langue qui n'était pas celle qui lui avait été parlée à son plus jeune âge. Ayant seulement distingué quelques couleurs, quelques pierres, quelques fleurs, au sein de son énumération, il avait supposé juste. Il aurait été incapable, même en finnois, d'autant nuancer ses propos. Il fallait aussi dire que la peinture était loin d'être son domaine de prédilection : le peu d'art graphique qu'il avait fait n'était que de clichés au crayon ! La voyant se redresser à côté de lui, il tourna la tête pour lui faire face. Leurs regards se plongèrent l'un dans l'autre avec autant de surprise que d'amusement. Ils étaient heureux en ce lieu, et leur ciel semblait déverser sur leur peau des rayons de bonheur et de bien-être. L'anglaise s'adonna après un instant d'hésitation à une explication : ainsi, c'était sa frustration de ne pouvoir trouver les mots justes qui l'avait amenée à les chercher. Puis leur sens l'avait fascinée. C'étaient des choses qu'il comprenait parfaitement d'un point de vue artistique, et il se contenta de hocher lentement la tête pour lui signifier son acquiescement.

« Et elle serait comment, cette Cuisse de Nymphe ? Douce ? Chaude ? il se redressa sur ses avant-bras, amusé. ... Aguicheuse ? »

Loin de lui l'idée de passer pour plus pervers qu'il est, il aimait jouer sur les mots, rebondir, s'amuser, rire, et partager son humeur. Toutefois, il ne se faisait pas trop d'illusions : Ethel était chaste, et il était fort probable qu'elle ne saisisse pas ses sous-entendus et donc qu'il se sente incroyablement seul. L'ingénue en arriva à mentionner la musique, essayant avec tant de bien que de mal de se mettre dans la peau d'un musicien cherchant les notes qu'il entend.

« Ce n'est pas vraiment la même chose... En musique, les notes, seules, n'ont pas de sens. C'est le tout qui en a un, c'est la place de la note dans la musique par rapport à la mélodie ou à l'accord qui la précède ou qui la suit. Savoir qu'un do est un do ne nous aide pas beaucoup, mais savoir qu'un do est le cinquième degré de la gamme nous donne beaucoup plus d'informations sur son sens et sur son utilité. »

Prononcées sur un ton plus doux et poli qu'hautain et instructif, le Lunaire avait voulu lui donner un avant-goût de la différence selon lui entre le quatrième art et le troisième. Et encore, il ne lui avait pas parlé de l'idée de mouvement qui, si elle pouvait être représentée partout, ne pouvait être réellement exprimée qu'au travers la Musique. Il avait déjà osé prétendre que son art était supérieur à tous les autres, mais il s'était remis en question en voyant les tableaux de Salvador Dali. L'illusion n'existait pas vraiment dans le son. Et il avait été obligé d'admettre que les compositeurs étaient incapables de peindre ce qu'ils voyaient sur une portée ; ils ne pouvaient que peindre l'abstrait. Telle était la particularité de la Musique à ses yeux.

« Mais je suis d'accord avec toi. Je pense que vous choisissez vos couleurs comme nous choisissons nos modes... Je crois qu'on cherche toujours le meilleur moyen d'exprimer ce que l'on vit ou l'on ressent, ou de peindre du mieux que l'on peut ce qu'on voit et comment on l'a perçu. »

Son regard, toujours plongé dans le sien, en arriva à s'adoucir. Juvénile, innocente, et belle. Il avait comme l'impression de s'être envolé aux cieux en compagnie d'un ange, être immaculé et pur qui l'aurait expié de ses péchés. Ces mêmes péchés qui avaient autrefois ruiné son couple, causant tant de souffrance autour de lui, meurtrissant au plus profond sa dulcinée. Pour l'heure, il n'éprouvait aucun désir envers elle. Leur passé l'en empêchait, et plus il côtoyait son cœur d'enfant, plus il la considérait comme intouchable. Son déni aurait sa peau, il le savait... Mais il ne voulait rien y changer. Il était heureux. Aurait-il été pardonné s'il avait été aussi chaste que durant ces doux instants dans le passé ? Le malin ne brûlait pas encore en son corps. Il se sentait plus sain. Plus jeune.
Violemment projeté dans le monde des vivants par le sursaut de l'anglaise, Jani revint dans le monde des vivants. Voyant les tremblements et le soudain malaise d'Ethel, la panique traversa son esprit comme l'éclair. Que lui arrivait-il ? Que faire ? Ce ne pouvait être aussi grave que lors de leur dernière rencontre. Il se souvenait encore de tout ce qu'il y avait senti. Cette peine, cette douleur, cette culpabilité... Ces sentiments si lourds à porter... Tout se fit ressentir l'espace d'une seconde. Et comme il l'avait déjà fait pour elle, il remit son masque de chevalier servant et se rapprocha d'elle pour poser sa main sur la sienne.

« Ça va aller. » souffla-t-il lentement, assuré et calmé.

Le finlandais n'avait pas le droit de flancher. Encore moins lorsqu'il était une épaule sur laquelle pouvait se reposer quelqu'un dans le besoin. Il se devait de pouvoir être présent pour elle, et ce même s'il ne la connaissait pas parfaitement. Elle restait une « amie » à ses yeux, une être chère avec laquelle il avait vécu plus en quelques heures qu'en de nombreuses nuits avec tant d'autres...
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyDim 10 Juin 2012 - 14:25

Juste Après
« Jani & Ethel»



Et elle oubliait tant de couleurs, il manquait tellement de mots aux langues pour pouvoir exprimer le ressenti que lui procurait chaque teinte, l’essence même qui habitait ce rose-là, dans le ciel, ou ce léger violet un peu plus bas. Mais si les mots faisaient défauts, son esprit palliait ce manque avec un esprit prêt immédiatement à retenir cette teinte et se l’approprier. Chaque coucher de soleil était un immense tableau noir sur lequel on y inscrivait son apprentissage visuel. Comme elle aurait aimé être dotée d’une mémoire plus infaillible et pouvoir imprimer dans son esprit toutes ces teintes qui chaque soir s’ajoutait au tableau… Passé une époque, elle prenait chaque soir le ciel en photo. Mais en mettant les photos sur son ordinateur, elle subissait une grande frustration en voyant le décalage entre l’image et ses souvenirs. Elle avait préféré oublié et se souvenir chaque jour de la beauté du ciel plutôt que d’en avoir une représentation erronée. Le jeune homme à ses côtés avait réagi au nom de la couleur qu’elle avait énoncé, pourtant totalement au hasard.

« A…Aguicheuse ? Non, cette couleur est plutôt pâle justement ! C’est aussi le nom d’une variété de rose… »


Regardant d’un air incrédule le jeune homme, elle réfléchit à sa phrase sur la musique. Soit elle se trompait sans le voir, soit il n’avait pas véritablement compris ce qu’elle voulait dire. Après tout, les deux arts étaient assez semblables. Même si certains musiciens avaient tendance à penser que la peinture ne pouvait autant transmettre les émotions que la musique. Cela avait le don de la froisser lorsqu’elle l’entendait. Pour elle, aucune musique ne pourrait être à la hauteur de ce qu’elle ressentait face à un Turner ou certaines autres peintures impressionnistes. Ecouter une chanson en boucle finissait par lui donner mal à la tête et perdre le message qu’elle transmettait. Rester 12 heures entières face à un tableau, elle l’avait fait plusieurs fois ! Dès qu’elle pouvait aller à Londres, la jeune fille fonçait à la National Gallery, salle 34. Les plus beaux tableaux de Turner y étaient, dont le dernier voyage du Téméraire, qui lui avait valu un émerveillement de trois jours consécutifs, où elle venait dès l’entrée et repartait tard le soir.

Hochant la tête simplement pour signifier qu’elle comprenait ce qu’il disait, Ethel lui fit un sourire très doux et calme. Même s’il n’appartenait pas au même art qu’elle, Jani était un des seuls avec qui elle avait réellement discuté de cela, même de manière très courte. Elle pouvait sentir son avis, qui différait surement du sien, mais qui était bien plus constructif que ceux qui prétendaient aimer l’art pour se faire bien voir. Oh, elle en avait vu, des groupes passant dans les musées avec le menton haut en sortant des phrases dignes des plus grands analystes. Des phrases creuses et sans fond, juste des grands mots qui faisait hocher la tête à tous les autres. Ceux qui disaient parvenir à expliquer l’art n’étaient que des charlatans à ses yeux. Car c’était pour elle la plus grande beauté de l’art : Il ne peut s’expliquer entièrement. On peut faire des suppositions, tirer les ficelles en cherchant une vérité. Mais le ressenti restera sans mots, comme ce ciel face à eux.

Puis sans prévenir, ce souffle était revenu. Comme souvent lorsqu’elle repensait à ce qui s’était passé il y a quelques mois, ses côtes se contractaient comme pour entourer son cœur, et l’empêchait de respirer. Mettant simplement sa main sur son cœur, elle réprima la douleur, comme tant de fois. Cette douleur qui la réveillait la nuit, qui l’empêchait de marcher et la faisait même s’écrouler de temps en temps. Cette douleur qui laissait pantois les médecins, qui l’associait simplement à du stress ou de l’anxiété. Quels secrets le monde lui cachait-il pour qu’elle se sente en proie à une terreur si grande et sourde que son corps lui signifiait par des douleurs inhumaines ? Réveille-toi Ethel, semblait dire son cœur défaillant. Mais se réveiller pour quoi ? Pour saisir du regard ce qu’elle n’avait jamais voulu voir ? Elle n’en avait pas encore la force.

Se rendant compte que le finlandais avait saisi son malaise, la rouquine s’obligea à sourire et à reposer sa main, ignorant la douleur qui lançait encore sa poitrine. Tant qu’elle n’était pas prête à chercher la cause de ces douleurs, elle se refusait à le faire subir aux autres. C’était à elle seule de les supporter. Levant ses yeux vers ceux de Jani, ses sourcils tremblèrent l’espace d’une seconde, et elle tenta de se ressaisir.
Il ne fallait pas qu’elle pense aux choses qui déclenchaient cela. Il fallait qu’elle reste calme et sereine. Puisant de la force dans le regard du jeune homme, elle tenta de faire abstraction de la douleur. D’oublier que son cœur semblait mourir et revivre à chaque battement tant il lui faisait mal. Depuis ces dernières années, elle avait perdu le compte du nombre de fois où son âme s’était tordue en écho avec son cœur. Par douleur et peur. Son excuse était donc pour avoir fait subit au blondinet une douleur qu’il n’avait pas à connaitre. Car elle finissait toujours par s’estomper et disparaître, ne revenant le jour d’après qu’avec plus d’assurance, entretenant la terreur que son cœur ne la supporte plus la fois d’après.

Enfin, la douleur commença à s’en aller, ses côtes se desserrèrent et son cœur battit à une allure normale. Elle ne parvenait toujours pas à respirer normalement, son souffle se bloquant à la moitié, mais elle savait que dans une dizaine de minutes, cela aurait disparu aussi. Il suffisait qu’elle fasse semblant de respirer normalement, et tout irait bien. Souriant plus franchement à Jani, elle posa sa deuxième main sur la sienne comme un remerciement, ses lèvres s’étirant en un grand sourire.

« Ça ira, oui. Je suis désolée Jani. »





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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyLun 11 Juin 2012 - 19:04

Ethel ne rit pas, manifestement gênée par les propos du finlandais qui le firent se sentir instantanément seul. Elle avait hésité, et ne le comprenait pas. Était-elle limitée, trop enfantine pour saisir le second degré ? Aucun des deux protagonistes ne s'attarda sur ce moment et Jani répondit à ses paroles sur la musique. Le simple sourire de l'anglaise suffit à lui faire comprendre encore une fois qu'ils ne vivaient pas dans le même monde, et que leurs arts étaient tout aussi différent qu'ils l'étaient. Et c'était bien sur ce point qu'elle différait de sa sœur. Sans se faire d'illusion et sans se vanter, le Lunaire savait qu'il avait inspiré Inari, qu'elle l'avait suivi dans son art et qu'elle adoptait plus ou moins ses positions. Ils avaient grandi dans le même univers ; il avait été un modèle pour elle, aussi inapproprié soit le terme. Elle, elle était une anglaise. Il avait connu la glace ; elle devait avoir connu la pluie. Il était né dans un pays jeune ; elle dans un pays dont l'histoire doit être aussi glorieuse que celle de la Suède. La musique jouait déjà un rôle important dans les rituels Saamis ; les peintres anglais, Reynolds, Turner, Lawrence, étaient très réputés. Leurs compositeurs n'étaient pas aussi réputés que Sibelius.
Encore une fois, tout les opposait.

Tout les opposait, sauf le présent qui leur demandait de se rapprocher malgré leurs différences. La main posée sur la sienne, Jani s'ouvrait à elle comme il l'avait fait dans la forêt. Peu importe leur façon de voir les choses, peu importe leur origine, peu importe ce qu'ils étaient ou ce qu'ils faisaient. Il les voyait comme deux êtres humains, et en toute humanité le finlandais s'était décidé d'être prêt à aider son prochain. Devinant son malaise, ses propos n'étaient pas une interrogation : il voulait lui signifier qu'il la comprenait et qu'en ami, il serait là pour elle en cas de besoin. Maintenant. La jeune fille plongea son regard dans le sien, se nourrissant peut-être de sa bienveillance, puis finit par lui dire qu'elle allait bien. Puis elle s'excusa.

Ignorant la faiblesse de sa voix, le jeune blond rit. Il savait pertinemment que le bonheur était contagieux et c'était le genre de maladie que la rousse méritait de contracter. Se glissant à côté d'elle, il lâcha un « Come here. » et l'entoura de son bras pour la serrer contre lui. Préférant la fixer pour s'assurer que tout allait aussi bien qu'elle le prétendait plutôt que de regarder le ciel qui changeait de teinte sous leurs yeux, il nota quelque chose d'anormal dans sa respiration, qu'il rattacha aussitôt à ce qu'il avait perçu dans sa voix plus tôt. Sans se séparer de son sourire, il inclina légèrement la tête vers elle et lui tint à peu près ce langage :

« Tu sais que je suis musicien ? Compositeur ? Chanteur ? demanda-t-il, nonchalant, avant de reprendre. You may know many colours, but my ears are good enough to perceive the restraint in your voice. Then breathe! »

Accompagnées d'un sourire radieux, ses paroles ne sonnaient plus tellement comme un ordre. Sa main, baladeuse, descendit pour une fois se poser sur sa hanche, puis son ventre, pour vérifier le naturel de sa respiration, dont il put sentir la faiblesse, comme si elle essayait de souffler le plus fin filet d'air que possible aussi longtemps qu'elle le pouvait. Ça ne pouvait pas être un grand mal, sans quoi elle n'aurait certainement pas été assez idiote pour faire comme si de rien n'était. Elle avait déjà frôlé la Mort une fois, elle ne pouvait pas vouloir la côtoyer à nouveau. De ce qu'il avait cru comprendre, ceux qui avaient déjà rendu visite à la Mort ne voulaient absolument pas y retourner, comme si elle était de mauvaise compagnie. Peut-être que son thé et son café manquaient de vie...
Le Lunaire posa son autre main contre la joue d'Ethel et lui tourna la tête pour la forcer à le regarder, lui, son sourire, son regard, son assurance. Alors qu'il voulait juste l'amener à s'imprégner de sa bonne humeur, il se retrouva pris à son propre piège. Différente, opposée, mais n'était-elle pas belle, avec sa chevelure enflammée et ses perles d'émeraude ? Il avait déjà vu son corps, il l'avait massé, porté. Il avait caressé ses lèvres, puis les avait goûtées. Certes, ça avait été beaucoup moins joyeux qu'un baiser. Mais...

« Breathe... répéta-t-il, doucement, en caressant d'une main sa joue et de l'autre en pressant légèrement contre son ventre pour aider l'air à passer dans sa gorge. ... Ethel... »

Son visage, déjà proche du sien, s'en rapprocha un peu plus, à peine assez pour que leurs lèvres se frôlent. Cadence restant sur le ton de la dominante, inachevée.
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyLun 11 Juin 2012 - 20:58

Juste Après
« Jani & Ethel»



Hello,
Is there anybody in there
Just nod if you can hear me
Is there anyone at home
Come on
Now


Lentement, une mouette descendit sur l’horizon, fendant l’air avec grâce et remontant en un instant, poisson frétillant dans le bec. Le soleil déclinait toujours plus surement, le noir commençant à grignoter l’espace, ne laissant qu’une trainée de poudre dorée autour de l’astre plus mince qu’un fil sur l’étendue aquatique. Et à mesure que son souffle s’amoindrissait, le soleil se couchait. A mesure que son souffle revenait, le soleil finissait de disparaître. Fermant les yeux un instant, elle ne les rouvrit que parce qu’elle sentit l’aura de Jani, non loin de la sienne. En levant les paupières d’un geste lent, la rouquine fut frappée par son sourire. L’air s’infiltra en elle, lui laissant le temps de prier en un fragment d’instant pour que ses poumons ne se bloquent pas à nouveau. Elle put respirer entièrement, s’abreuvant du sourire du jeune homme.
Ethel, comme tu connais peu le monde, comme tu cherches à ignorer l’évidence en enfouissant ta carapace sous ces murs inviolables. Trop de protections qui ferme ton monde, et t’empêche d’en sortir quand le chaos sombre en ces lieux. La petite coquille devient exigüe, et le pantin laissé à l’abandon sur un coin du banc te supplie de passer de l’autre côté.

I hear you're feeling down
I can ease your pain
And get you on your feet again
Relax
I'll need some information first
Just the basic facts
Can you show me where it hurts



Elle pouvait encore saisir du bout du cœur et de l’âme cette petite cachette où elle séjournait depuis tant d’années. L’ours en peluche qu’elle serrait contre son cœur lorsqu’elle était triste avait perdu de sa splendeur, et son poil ne brillait plus autant. Même le cheval à bascule dans le fond grinçait en se balançant frénétiquement. Pourtant, elle se sentait bien dans cet univers, à compter les écueils du passé et s’enfermer sous sa couette quand venait le mauvais temps. Mais petit à petit, le mur du fond, celui qu’elle avait enseveli sous les jouets et les souvenirs, commençait à s’effriter. Pierre par pierre il s’écroulait, et la simple façade sombre du bout de sa grotte se transformait en un paysage vierge et neuf, aussi immense que des yeux d’enfants. Mais elle avait trop peur encore, et le passage qui illuminait sa pièce tranquille ne faisait que la faire foncer de plus en plus loin dans son microcosme, dans sa couette douillette et se petite balançoire en bois. En cet instant, un rire avait surgit dans son univers, mais loin d’être celui du clown neurasthénique ou du singe railleur, il appartenait à un être de l’autre côté. Ce n’était pas un pantin du bas-côté, qu’elle avait laissé là en pensant l’oublier dans cet espace clos. C’était un être du lointain, qui l’appelait dans la lumière lunaire qu’il semblait irradier.

There is no pain, you are receding
A distant ship's smoke on the horizon
You are only coming through in waves
Your lips move but I can't hear what you're saying


Alors la rouquine, timidement, tenta un regard vers l’ouverture dans le mur. En posant simplement ses mains, quelques pierres s’écroulèrent à ses pieds, la faisant sursauter. Roulant le long de ses chaussures, ils allèrent se loger dans les aspérités du sol, disparaissant sans qu’elle ne puisse le voir. Mais elle était toujours trop petite pour pouvoir apercevoir plus qu’un filet de lumière et une once du paysage du dehors. Elle se savait encore trop faible pour tenter une escalade.

Son cœur et son corps frémirent à l’unisson lorsqu’il toucha son ventre. Le dernier contact de ce genre, elle l’avait repoussé sans que son esprit s’en rende compte. Mais il ne s’agissait là que de capter l’essence d’un problème, non ? C’est pourtant son cœur qui s’emballait, alors que ses poumons étaient meurtris. Le souffle à nouveau manqua, et elle ferma les yeux un instant pour tenter de respirer. Toujours ce sourire qui la ramenait à la réalité. Que lui arrivait-il ? Etait-elle malade ? A force de rester dehors, elle avait peut-être prit froid ! Plongeant dans son regard une lueur interrogative, les sourcils de la jeune anglaise grandirent tandis qu’elle observait le jeune blond. C’était une impression, où il ne manquait que les violons pour se croire dans la parfaite scène d’un film romantique typiquement américain ? C’est ce qu’aurait pu se dire la jeune fille, si jamais elle avait regardé des films comme Dear John ou N’oublie jamais. Parfaite romance à faire pleurer les petites filles.

I caught a fleeting glimpse
Out of the corner of my eye
I turned to look but it was gone
I cannot put my finger on it now
The child is grown , the dream is gone
And I have become… comfortably numb.


Qui était-il, derrière ce sourire et cette force apparente ? Voilà qui était une question qu’elle pouvait autrement se penser. Cette fois-ci, elle ne recula pas en sentant la main du jeune homme contre sa joue. La dernière fois, son corps avait eu le réflexe de se dérober, trop effrayé par cela. Mais il n’était plus un inconnu. Il était celui qui l’avait emmenée sous les flots puis sauvée. Et elle était habillée, qui plus est. Ça avait forcément son importance. Il lui demanda de respirer, pourtant son regard lui volait le souffle. Sagement, elle tenta d’obéir, en fermant les yeux pour ce faire. Respirer était une entreprise assez couteuse pour qu’elle ne puisse pas s’y plonger entièrement. Quand elle les rouvrit, rassurée par la voix de Jani, elle le sentit bien plus près d’elle qu’elle ne l’avait jamais été. Certes, elle avait oublié l’instant où elle avait été failli monter sur la barque de Charon, mais tout de même.
Sa main trembla tout d’abord, puis se calma, ignorant totalement ce qui semblait se passer, et surtout ce qu’elle était censée faire, la jeune fille décida de faire ce qu’elle avait envie de faire en cet instant.

O.K.
Just a little pin prick
There'll be no more…
But you may feel a little sick
Can you stand up?
I do belive it's working, good
That'll keep you going through the show
Come on it's time to go.


Posant ses doigts sur la main de Jani, qui se tenait toujours sur son ventre, la rouquine approcha un peu plus son visage, frissonnant en sentant leurs lèvres se toucher, l’embrassant doucement et furtivement. Puis comme si le miroir la rappelait, et son monde la happait à nouveau, elle cligna de ses grands yeux malachite et le regarda. Sa main à nouveau trembla, et elle recula son visage pour mieux contempler ses yeux d’un bleu d’océan, sans savoir quoi ajouter ni quoi faire. Elle était perdue.




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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyLun 11 Juin 2012 - 22:53

Jani ne fit que rapprocher ses lèvres de sa proie, que frôler les siennes, et elle s'en empara dans un baiser tout aussi futile que timide, mais suffisant. Quoique court, il s'en délecta comme une abeille butinerait une fleur, ou comme un loup finirait sa proie. Une proie ? Avait-il eu des vues sur elle la première fois ? Il s'en souvenait très bien. Une adolescente dans un aquarium, fascinée par les mêmes poissons. Multicolores, ils dansaient en harmonie comme ces femmes victoriennes qu'il s'imaginait virevolter sur les ballets de Tchaïkovsky. Alors qu'il avait approché beaucoup de femmes pour jouer la relation comme sur un échiquier, dans l'unique but de conquérir, puis de délaisser, il s'était avancé vers Ethel par simple curiosité, par une envie d'aider le temps à passer plus vite. Il n'avait pas cherché à garder contact avec elle. Il fallait dire qu'elle l'avait un peu effrayé par sa folie bien que son talent était indéniable...
Ils prirent des chemins différents, certainement opposés, mais ils se réunirent par hasard dans la forêt. Une flèche manquant de le tuer ; une eau manquant de la noyer. Tous les deux avaient d'une certaine manière approché la Mort, mais la fin avait été évitée de grâce. Ils avaient constaté ce jour-là leurs différences, tant dans leur perception du monde que dans leur façon d'y vivre. Elle. L'adolescente jeune et ingénue, chaste et pure, loin du mâle. Lui. Don Giovanni. Traître, exécrable manipulateur, maître de la nuisance, prince des ténèbres dont la majesté ne reposait que sur des cœurs brisés, et dont la froideur hérita d'un cœur perdu. Autrefois bercé d'un amour ardent ; beaucoup trop ! Assez pour la consumer. Ivanna. Avait-il changé depuis ? Qu'était-il devenu ? Qu'avait-il fait, pendant tout ce temps ? Il avait approché l'ange ; elle s'était rendue. N'était-ce pas suffisant ? Pourquoi tant de questions ?

Alors qu'elle plongea son regard farouchement doux dans son océan de mensonge non dits. Son instinct lui disait déjà de penser à la suite. En lui, les pièces venaient tout juste de se placer sur l'échiquier, et les premiers pions avaient été joués. Un sourire s'empara de ses lèvres, léger, assuré, taquin, légèrement amusé, mais surtout, satisfait. En lui, il était profondément étonné. Qui aurait pu croire qu'Ethel, cette anglaise si chaste qui ne saisissait aucun sous-entendu plus ou moins pervers, pourrait en arriver à embrasser le mal ? Et qui pourrait croire que Jani, ce finlandais tant à l'aise dans ces jeux-là, hésiterait à jouer son jeu ?

Quelque chose le paralysait, et son temps s'écoulait. Au tréfonds de son âme, il n'avait pas le droit d'aller plus loin, de jouer comme avec les autres. Elle lui rappelait l'innocence d'Inari. Jamais il n'aurait pu faire le moindre mal à sa petite sœur, il préférerait perdre sa vie plutôt que d'en arriver là.

Mais tu n'es pas elle...

Résister. Refuser. Nier. Rester. N'était-il pas heureux, ainsi ? Il pouvait avoir qui il voulait, quand il le voulait, sans plus se soucier de briser le cœur de qui que ce soit.

... Elle te manque.

« ... Ça va mieux ? » finit-il par lui demander, rompant le silence d'admiration qui s'était installé entre eux.

Sans changer ni son sourire, ni son regard, sa main contre sa joue se mit à la caresser avec tendresse. Nul, pas même lui, ne savait si elle était feinte ou sincère. Pourquoi y penser maintenant ? Il avait ce qu'il voulait. Elle. Ou du moins, elle commençait à tomber, sans qu'il ne puisse en savoir la raison. Peut-être l'idéalisait-elle pour avoir sauvé sa vie, l'autre fois ? Peut-être ce baiser n'était-il qu'une récompense un peu tardive à son acte, une récompense qu'il ne pensait pas mériter mais qu'il acceptait volontiers. Se montant toutes les théories dans sa tête, il continuait dans un perpétuel déni de rejeter l'idée qu'elle puisse être amoureuse ou qu'il lui plaise vraiment, et ce même s'il avait plu à bien des personnes avant elle.

Pourquoi ?

Aucun pièce sur l'échiquier n'avait plus avancé. Il ne jouait plus contre elle, il ne jouait plus pour l'avoir ; il jouait seul, pour se comprendre, et de ce qu'il voyait, il était en train de perdre la partie. Seule l'interrogation et l'indécision étaient ancrés dans toute sa certitude.

« Je... » murmura-t-il, le ton teint d'une pointe de morosité.

Je ne comprends pas...

Triste et dure réalité de la vie. Peu importe la manière par laquelle il abordait la chose, il ne trouvait aucune réponse à ses questions, et il n'avait pas la force de jouer avec elle comme avec les autres, de lui mentir comme il avait menti à tant de personnes uniquement pour coucher. Il ne savait même pas s'il voulait plus avec elle. Il ne savait pas s'il la voulait elle. Ces souvenirs de ce qu'il avait causé à Ivanna en étant simplement lui-même, homme qu'il n'avait cessé d'être, et cette ressemblance fatale entre Ethel et sa sœur... Rien ne jouait plus en sa faveur. Il était pris entre le sentiment d'un échec et d'une profonde cicatrice, et l'envie d'être meilleur pour sa Solaire.

« Hei, look at the sky! It's shining for you. » lâcha-t-il enfin, un large sourire aux lèvres, lui mentant autant à elle qu'à lui-même, en relevant la tête vers l'étendue rose-orangée qui ornait les cieux.
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyLun 11 Juin 2012 - 23:35

Juste Après
« Jani & Ethel»



Tu peux peut-être comprendre les souffles inachevés, mais mes yeux savent lire bien des peines. A l’instant où la rouquine reposa son regard vers quelque chose de plus tangible, elle sut que quelque chose s’était brisé. Une partie d’elle-même, un fragment de l’instant. Elle n’en pouvait plus, de ces pierres qui tombaient autour d’elle en prétendant libérer un chemin vers l’ailleurs. Son cocon lui souriait tout autant, et les seuls courants froids venaient de ce nouvel univers qu’elle ne saurait affronter. Maintenant que la nuit tombait avec plus de persévérance, que les premières étoiles naissaient et que la lune majestueuse se dressait, Ethel commença à trembler. La nuit, toujours cette entité effrayante qui effaçait les ombres et les rendaient menaçante, qui augmentait chaque son et le transformait en une chose qui glaçait le sang et les entrailles. La nuit en territoire connue était une douce extase, la nuit sur les terres inconnues plongeait Ethel dans le cauchemar.

Elle n’avait pas dit un mot depuis de longues minutes, elle qui cachait ses pensées derrière des phrases sans sens. Les mots se cachaient et se terraient au fond d’un lieu où elle n’avait plus accès. Ouvrant la bouche face à la tristesse présente du jeune homme, elle ne put rien articuler, et se voila donc d’un regard sombre. Si elle avait pu être une souris, et se glisser dans un trou. Si elle avait pu être un oiseau, et s’enfuir bien vite de ce lieu. Mais elle avait des jambes, et si sa bouche défaillait, ses jambes pouvaient encore la porter bien loin d’ici. Avisant cela, elle tourna la tête, cherchant une échappatoire. Le chemin d’arrivée semblait seule porte de sortie. Mais ses jambes tremblaient, commençaient à danser ce qu’elle ne savait contrôler.
Avec une larme qui fila le long de ses cils, Ethel recula son visage, se défaisant de la caresse de Jani, répondant ainsi silencieusement à sa question. Elle ne pouvait toujours dire mot. Calme-moi Ethel, calme-toi. Ferme les yeux, cet espace est le tien, cet espace sera toujours le tien. Elle baissa les paupières, laissant couler une autre larme. Espace bienfaiteur qui accueillait ses angoisses nocturnes. Univers apaisant qu’elle s’était construit. Plongeant dans un vieux coffre à jouet, éteignant toutes les lumières en son cœur, la rouquine tenta de se calmer, rouvrant les yeux dans ce qui n’avait duré au final qu’un instant. Une pensée, un frisson, une larme.

« Hei, look at the sky! It's shining for you. »

Regard outré.
Ame esseulée.
Le fixant sans rougir, elle jugea son sourire, qui ne savait même pas mentir et faire oublier la tension et l’hésitation des derniers moments. Le ciel ne brillait plus, il devenait noir comme cendre, d’un bleu de minuit. La seule lueur était celle des étoiles et de la lune se reflétant dans l’océan. Futile lumière qui disparaitrait bien vite, lorsqu’elle s’enfoncerait dans les terres. Lançant un signal jusqu’au plus profond de ses reins, les jambes d’Ethel lui indiquèrent que maintenant, elle était prête à courir. Ramassant son sac d’un geste hâtif, la rouquine trembla mais s’enfuit, sans oser plus regarder le blondinet encore assis. Cendrillon laissait sur les marches un soulier de verre, l’Ange déchu n’oubliait qu’un carnet de croquis et d’aquarelle. Gisant là dans le noir naissant, il ne pleura pas de l’abandon de son propriétaire. Il était incapable de pleurer.

Ethel ne courut qu’à peine une minute. Ses jambes refusèrent de la porter plus loin. S’écroulant contre un arbre, elle tendit l’oreille, satisfaite de n’entendre aucun bruit… Si ce n’est celui de la nuit. Ayant couru sans réfléchir, la jeune fille n’avait pas avisé la situation. Fine, elle avait peur du noir, et était au milieu du noir presque total. Un simple insecte courant sur une pierre pouvait la terrifier, même le souffle du vent devenait menaçant. Le jour revenait dans combien de temps, déjà ? Sa trousse à vrac. Ouvrant son sac comme elle le put, la jeune fille saisit une vieille trousse cousue à la main, fouillant dans les objets incongrus qui sautèrent à l’ouverture, elle finit par y trouver un étrange objet : ce n’était qu’une petite étoile en plastique, qui abritait une lampe. Poussant l’interrupteur sur le coin d’une branche, l’étoile scintilla dans sa main, illuminant ses phalanges et le début de ses poignets. C’était un cadeau de sa mère, qu’elle possédait depuis l’âge de 9 ans. Ne l’allumant que très rarement, elle faisait pourtant attention à l’avoir toujours sur elle. Sa mère lui avait bien dit « Les étoiles sont toujours là quand la nuit semble impénétrable. »

Une larme coula sur sa joue, puis une deuxième. Pourquoi avait-elle fait ça ? Elle l’avait vu dans ses yeux, ce n’était pas la chose à faire. Son premier baiser… Après avoir lu tant de contes, elle s’imaginait bien autre chose. Elle n’aurait pu imaginer que le premier regard qu’elle croiserait après cela serait aussi perdu que celui de Jani. Se recroquevillant contre l’arbre, l’étoile au bout de ses doigts, Ethel se cachait de la route, et se cachait de la suite, espérant que le jeune homme ne la retrouve pas. Un aussi brusque changement de sujet, comme il l’avait fait quelques minutes auparavant. Pourquoi avait-elle fait cela ? Pourquoi commencer maintenant ce dont elle s’était passé pendant 18 ans ? Pourquoi Ethel, pourquoi ?

A nouveau dans l’ombre, le singe monta sur son épaule et se mit à rire, terrifiant le cœur de la fillette. Car c’était un simple cœur de fillette qui battait dans sa poitrine. Un cœur que le singe et le clown aimait à martyriser lors des nuits tombantes. Tentant de chasser la vision du sourire pointus du petit singe, la jeune fille ne parvint qu’à le faire sauter sur ses épaules, déchirant sa peau et froissant ses muscles. Il continuait de rire, il continuait encore de rire. Et les pierres du mur du fond s’effondraient sans qu’elle ne puisse les arrêter. Les mots imprimés dessus ne demeuraient visible qu’un instant, avant de disparaître dans le néant. Ethel ne pouvait que saisir ce qui la blessait et qui se brisait, en un instant, tout cela avait disparu, et elle ne pouvait plus mettre de mots dessus.



Dernière édition par Ethel Dawkins le Mar 12 Juin 2012 - 16:05, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMar 12 Juin 2012 - 11:24

Que dire ? Que faire ? Il sentait que le malaise de la jeune fille se perpétuait et que ses paroles par rapport au ciel, dont le but était uniquement d'attirer son attention sur autre chose que lui pour qu'elle tourne enfin la tête et cesse de le menacer de lire en son regard son doute. Soudain faible, l'incertitude le scarifiait de l'intérieur en usant pour poignard de fragments de souvenirs. Craintes. Bonheurs brisés. Si seulement il avait pu se repentir, dans son église, dans sa musique, demander pardon dans les mélodies et laisser son art le bénir d'harmonies... Si seulement, si seulement... Si seulement il pouvait écrire ses sentiments, remplir ses portées des notes qui émanaient de ces larmes qui jamais ne coulaient !
« Qui sème le vent récolte la tempête. » Le finlandais avec joué avec le feu de chacune ; il avait amené Ivanna à imploser. Depuis, il était dans une période creuse qui ne l'avait encore assez travaillé pour qu'il demande seulement à changer. Il l'avait fait, avec elle. Sans succès. Cette histoire le travaillait encore, un an plus tard, et il avait fini par se contenter de l'idée qu'il était ainsi et qu'il n'avait pas à devenir un autre homme. Il n'arrivait plus à nier le plaisir qu'il prenait à conquérir à droite comme à gauche, à étendre son empire dans le cœur encore intact des innocentes. Il se jouait de leur naïveté sans scrupule, et quoiqu'il n'éprouvait rien à leur égard, il faisait de son mieux pour ne pas les briser. Nourrissant simplement le mensonge qu'il avait créé en mettant son masque de prince.
Il doutait depuis quelques semaines déjà. Inari, sa petite sœur, était désormais au Japon. Lorsqu'elle lui avait demandé de l'emmener là où il avait passé la majeure partie de son temps, il eut trop honte pour lui faire part de la vérité. La Solaire avait toujours vu en son frère un mélomane au grand cœur, bienveillant et voué à lui apporter le bonheur. Mais qu'était-il ? Un homme, musicien banal qui avait erré dans les bars. Lui qui était aussi proche de la Nature et qui y avait puisé ses plus belles mélodies, il en était arrivé à goûter au vice et à la perversion. Persuadé qu'elle n'en savait encore rien, il lui avait caché la vérité en l'emmenant simplement chez lui...

***
La nuit était tombée sous leurs yeux. Jani n'avait cessé de fuir le regard de l'anglaise tout en sentant son malaise. Il savait qu'il agissait mal, mais il n'arrivait pas à se comporter autrement, pris par toutes ses questions. C'est lorsqu'elle se releva et prit la fuite qu'il se reprit en main. Secouant la tête, prompt à réagir, le jeune homme s'était directement lancé à sa poursuite.

« Ethel, attends ! »

Tu es bien un homme, Jani...

Comme si elle allait lui répondre, comme si elle allait l'écouter ! Non, elle s'enfonça simplement dans la forêt sans se retourner, abandonna une fois encore ses affaires. À sa grande surprise, le finlandais n'hésita guère un seul instant par rapport à sa guitare. Il avait déjà failli perdre Ethel une fois à cause d'une mauvaise séparation, et il se souvenait très bien comment ça aurait pu se terminer. Jamais plus il ne vivrait cela, car jamais plus, il ne la laisserait. Un sourire ironique se dessina sur ses lèvres à cette idée. Tout ce qu'il se passait en lui était sans logique : Ethel n'était qu'une adolescente qui ressemblait un peu à sa sœur, et à qui il avait sauvé la vie à leur dernière rencontre. Il ne s'était pas imaginé une seule fois qu'il pourrait la revoir après cette histoire, alors comment pouvait-il se dire qu'il ne la laisserait pas ? C'était déjà ce qu'il avait fait, en se dissipant dans l'air tel un songe dans la poussière du désert.

Comprenant qu'elle faisait tout pour lui échapper, il ralentit légèrement le pas pour la laisser creuser l'écart entre eux. Il était certain que continuer ainsi ne ferait que raviver sa panique, ou son chagrin, en tous cas son envie de le fuir et de partir. Et plus elle courrait, plus le risque de laisser se reproduire les événements de la dernière fois grandissait. Jani se maudit intérieurement. Marchant désormais dans les bois, aux aguets pour s'assurer de toujours pouvoir entendre et localiser les pas de la jeune fille, il écrasa de toutes ses forces son poing contre un tronc d'arbre. Bien que ses os craquèrent, il n'exprima aucune douleur. La seule chose qu'il ressentait était un profond regret.

♫ It's not how long you'll live,
But what your moral says? ♫

Les pas de l'anglaise laissèrent place à des craquements à intervalles plus longs et éloignés. Il reprit sa course, décidé.

♫ I follow the moon to find a path away from the scorching sun,
I follow the stars to my abode, it's burning...
I seize in the moment to hear a story no one's telling anymore:
The worlds forgotten, the words forbidden. ♫

Le finlandais acheva enfin sa course, arrivant, essoufflé, à quelques pas d'Ethel. Il la contempla un instant dans la nuit. Son sourire, avec le temps, s'était effacé pour laisser place à un mélange d'incertitude et de regret, sentiments qu'il ressentait vraiment. Lui fallait-il vraiment ça ? Une grosse frayeur, pour comprendre qu'il se mentait, pour ouvrir les yeux, pour assumer et affronter la vérité ? Il ne les comprenait toujours pas, ni la jeune fille, ni ses pensées. Alors qu'il fit de son mieux pour la regarder droit dans les yeux, alors que quelques minutes plus tôt, il était déterminé à la rejoindre, quelque chose l'empêchait de s'approcher un peu plus d'elle. Si fier, si orgueilleux... Il inclina la tête, détourna le regard.

« … Je suis désolé. »
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMar 12 Juin 2012 - 12:20

Juste Après
« Jani & Ethel»



Triste écueil d’une pensée qui serpente, les cierges brisés gisant sous les statues de marbre. Brûle, pensée délictueuse, effondré par l’abandon de l’astre solaire. Délaissé par les couleurs qui construisent l’écho d’une vie, seul la nuit peut maintenant éclairer les cœurs. Inutile de chercher la vérité dans le fond des étoiles, quand les sourires des enfants savent si bien mentir. Qu’un rire caché sous des boucles innocentes, perdu dans de grands yeux de lumière, éclaire le mensonge du monde. Même les enfants ne savent que mentir. Même la nuit si douce ne peut qu’obstruer les couleurs et les sens. Dans un sanglot long comme les pluies d’automne, Ethel cherchait les bras rassurant du manteau de la nuit, ne trouvant en son sein que l’écho froid des ténèbres. Son cœur qui battait sourdement était bien le premier des mensonges de cet univers. Petit organe frétillant qui s’évertuait à prétendre qu’il était en vie, quand l’âme gelée de l’enfant prouvait tout le contraire. Introspection. Quels étaient les derniers évènements ? Que s’était-il passé quelques minutes auparavant ?
Respire Ethel,
Souviens-toi.
Jani.
Le blondinet des grands froids. Ses origines le servaient bien. La rouquine ignorait le mordant du vent du nord, mais elle avait pu en sentir une bouffée envahir son cœur. Avait-elle fait une erreur ? Qui était cet homme aux yeux perlés, qui semblait n’être présent qu’en compagnie de l’eau ? L’eau était un élément sournois, qui semblait cruellement calme et placide. En échange, ses tempêtes ravageait tous ceux qui se dressaient contre elle, et ne laissait pas une chance même à ceux qui fuyaient. Dans ses yeux, Ethel avait pu voir tantôt l’éclat rassurant des vagues, tantôt la tempête d’illusions et de regrets. Frappée par l’ouragan maritime, elle échouait au coin d’un arbre, épave incertaine à l’ancre rouillée. Venise s’écroulait sur les flots.

Qui pourrait la sauver en cet instant ? Morphée s’était enfuit dans les landes profondes. Charon avait coulé avec sa barque, Orphée s’était perdu dans les enfers. Le chien à trois tête dévorait son cœur, et la petite fille à l’intérieur de la caverne hurlait, hurlait, hurlait. Qui la calmait en cet instant ? Même Castiel avait disparu. Des mois sans un mot, elle en était venue à l’oublier totalement. Un autre roux anglais, perdu dans sa contrée, ayant oublié les ruines du passé. Elle n’était que Pompéi en ruine, une cité qui jadis peut-être avait brillé, lorsque la splendeur de la nouveauté l’excusait. Le volcan avait explosé, de quoi les ruines pouvaient renaître ? Elle s’emportait, la situation n’était pas aussi terrible. Il était possible qu’elle ne recroise jamais Jani de sa vie. Le hasard était leur seule réunion, et s’il faisait bien les choses pour une fois, en omettant les prochaines rencontres ? Si elle n’avait été à la hauteur d’un homme trop expérimenté surement, autant se confondre dans les flots et disparaître sous les vagues.

Perdue ainsi dans ses pensées, la rouquine entendit soudain des pas, se rapprochant dangereusement. Quoi, elle n’était pas bien cachée, à moitié étalée sur le chemin, une lampe en forme d’étoile dans la main ? Curieux. Ravalant ses larmes par la naissance d’une certaine fierté, elle ignora la rougeur de ses joues creusées par l’eau salée de ses yeux. Ramenant ses genoux à elle, ultime protection contre le serpent du jardin, elle cacha l’étoile sous ses doigts. La venue d’un être connu n’avait normalement rien de terrifiant. Mais ainsi planté dans l’ombre de la nuit, guidé par les branches millénaires des vieux conifères, le spectre de Jani la fit trembler. En un instant, il fut face à elle, le regard plongé dans le sien. Les cils tremblant, elle leva la tête vers lui, une larme coulant à nouveau sans qu’elle ne puisse savoir sa cause. Il ne s’approchait pas plus, mais elle tourna la tête pour ne plus le voir.
Si elle pouvait seulement être seule dans cette nuit de printemps. A trembler du froid naissant, attendant minuit avec l’appréhension d’un gamin sous l’orage. L’âtre brûlant, les bras de sa mère, les chansons douces qu’elle lui chantait. Pourquoi ne pouvait-elle pas se rappeler du visage de sa mère en cet instant ? Seule la silhouette lointaine d’une femme en pull rouge revenait dans son esprit. Les visages s’étaient effacés, les sons des rires connus aussi.

« Va-t’en. »

Sans même oser le regarder, la tête détournée, Ethel s’enfonça un peu plus dans l’arbre, ignorant la morsure des écorces. Si seulement elle pouvait faire comme les cailloux qui s’écroulaient dans son monde. Se fondre à l’univers, s’intégrer au sol, que toutes les déceptions ne deviennent qu’ouverture sur le monde terrifiant de l’extérieur. Au moins, elle avait retrouvé la parole, même si c’était pour se draper de solitude. Se rendant compte que sa voix avait filtré de sa bouche sans qu’elle ne la contrôle, intimant pour la première fois cet ordre, la jeune fille fondit en larmes, répétant avec frénésie ces trois mots. Perdant de la force dans l’éclat de sa voix, elle finit en murmure, secoué de sanglots. Un pinceau comme épée sur le cœur ? Les étoiles une à une commençaient à éclairer le firmament, elle ne pouvait ignorer l’ombre du jeune homme sur ses paupières, même s’il restait planté à quelques mètres de là.


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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 13 Juin 2012 - 1:48

« Va-t-en. »

Ces mots résonnèrent dans sa tête comme un écho sans fin. Ils sonnaient tout aussi sincères que vrais, tout aussi durs que sincères. Ils étaient tout aussi percutants que durs, et tout aussi douloureux que percutants. Plus tôt, elle le remerciait d'un baiser de lui avoir sauvé la vie. Peu après, ils s'embrassaient. Puis elle s'enfuit, pour lui demander enfin de s'en aller à son tour. Les yeux du finlandais s'écarquillèrent d'étonnement avant de plisser du tumulte qui se jouait en lui. Était-ce ainsi que ça allait se passer ? Était-ce tout ce qu'il pouvait faire, se laisser aller à ses désirs, parce qu'ils n'arrivaient plus à se regarder droit dans les yeux ?

♫ So is this it? Does time end here? Is this what I fought for, and what I've gained? ♫


Jani redressa la tête. Ethel recula, éclata en larmes, réitéra ses paroles. Était-ce tout ? Sa sentence, pour ce qu'il avait été et ce qu'il avait fait ? Croire naïvement qu'il avait fait le bien, mais au travers l'illusion ne répandre que le mal. De la douleur, et encore de la douleur. Cet ange dont il avait arraché les ailes dans le plus beau des gestes, cet ange... Le craignait-elle, après tout ça ? Pourquoi ? Que lui avait-il fait ? Où ? Quand ? À son incertitude s'ajoutait son incompréhension de la situation, de l'adolescente. Tout l'amenait à se dire qu'il était seul et unique coupable dans cette histoire, sans qu'il puisse pour autant mettre le moindre doigt sur ses erreurs avec elle. Il savait pertinemment ce qu'il avait fait dans le passé. Il commençait à se dire qu'il lui fallait changer, devenir autre, même s'il n'en était pas encore à en admettre la possibilité.

Tu es en train d'écrire le Requiem de ton Art, Jani.

Ce long silence était tout ce qu'il avait retenu depuis sa rupture avec Ivanna et Revolution. Il n'avait eu que quelques idées, et aucune de la poignée de pièces qu'il avait terminées ne suffisait à gratifier sa passion. Qu'Inari vienne près de lui, que l'anglaise frôle la mort... Tout cela aurait dû l'inspirer bien plus que ça ne l'avait fait. Depuis sa rupture, quelque chose clochait sur ses partitions sans qu'il puisse comprendre pourquoi, et tout ce qu'il avait fait pour les améliorer avait été de désespérément chercher ailleurs. Et s'il avait cherché à se gratifier d'une autre manière que par la Musique ? S'il avait substitué sa plume au... sexe ? Et s'il se trompait depuis le début, s'il s'était trop éloigné de qui il était pour s'exprimer en son nom ?
Toujours sans réponse, ces idées le guidèrent vers quelque chose de neuf. Jamais encore il ne s'était remis en question à ce point, et il en arrivait à se dire que peut-être quelque chose de neuf se devait d'être. Loin de vouloir devenir moine et faire vœu de chasteté, il voulait enfin mettre ses mensonges et ses manipulations en pause. Essayer un jour, une semaine, un mois, sans chercher à avoir qui que ce soit. Un break pour se ressourcer, et chercher à se dévouer à nouveau à son art. Oui, c'était certainement ce qu'il lui fallait... Ce fut suffisant pour qu'il fasse un pas vers elle.

« Non, Ethel. lui répondit-il enfin. Je ne veux pas partir. »

La jeune fille n'avait aucun ordre à lui donner et le finlandais, en sortant de ses pensées, se sentait envahi d'une soudaine force. Futile, elle ne dura que le temps qu'il lui fallut pour voir ses larmes briller au peu de rayons Lunaires que laissaient passer les feuilles. Sa détermination fit place à de la tendresse. Il fit un pas de plus. Puis un autre. Plus il se rapprochait d'elle, plus il se sentait autre. Comme s'il commençait à s’acclimater au mélange de tout ce qu'il se passait en lui depuis leur baiser. Ou comme si quelque chose d'autre venait s'y mêler en lui, pour l'empêcher de se briser.
Il n'en avait simplement pas le droit.

« … Pas sans toi. » prononça-t-il dans un murmure, en arrivant juste en face d'elle.

Les mains de Jani prirent le visage d'Ethel et le relevèrent pour qu'elle le regarde. De ses pouces, il essuya ses larmes, et se contenta de la contempler. Encore. Dans les ténèbres de la nuit, le prince Lunaire était en son antre. Maître de son Empire, qui s'était beaucoup étendu. Empereur seul qui se satisfaisait de son harem de conquêtes plus ou moins naïves et pour lesquelles il revêtait toujours un nouveau masque. Éloigné de son trône, pêcheur blâmé par sa Déesse, il s'inclina devant la majesté de l'anglaise. Posant lentement et sereinement un genoux à terre. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il ne savait rien. Et le moment lui demandait de préférer les réponses de la jeune fille à celles de son cœur. Réponses qu'il aurait certainement dû chercher à entendre plus tôt au lieu de se renfermer après leur baiser. Continuant de caresser ses joues, d'essuyer ses larmes, tâchant de la consoler, il ne parvint guère à lui sourire. Il savait quoi lui demander. Et en se soumettant, il n'avait nul droit d'esquisser la moindre joie.
Peut-être était-ce la première fois, mais il partageait les peines d'Ethel sans même les connaître.

« What have I done wrong, Ethel? How have I hurt you? »

Ses saphirs étincelèrent dans la nuit. La repentance l'envahit.
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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 13 Juin 2012 - 9:56

Juste Après
« Jani & Ethel»



Les sanglots qui secouaient ses épaules finirent par la calmer légèrement. Il ne fallait pas pleurer, il fallait cesser tout ça. Mais elle n’y parvenait pas, toute bonne volonté réduite à néant par le souvenir des yeux du jeune homme, si triste et déçu. Son cœur tremblait entièrement, l’écho rejoignant ses bras qui n’en finissaient plus. Ses bras étaient seulement vêtus d’un triste poncho vert et si elle supportait assez bien le climat anglais, elle ne s’était jamais totalement habituée aux nuits japonaises. Se calmer, oui voilà, il fallait qu’elle se calme. L’anglaise leva à nouveau les yeux vers Jani, le sentant arriver en sa direction. Lentement, il exécuta un pas, puis un autre. Serrant légèrement les genoux contre sa taille et enfonçant ses ongles dans sa peau, Ethel cligna des yeux. Toute force avait déserté ses membres, jusqu’à la moindre pointe d’adrénaline ou de courage. Si l’homme mouton revenait à cet instant et lui ordonnait de danser, danser, danser toujours, il était très probable qu’elle s’écroulerait, jambes débiles et malignes qui ne soutiendraient que le poids de l’infortune. Mais l’homme mouton avait disparu depuis bien longtemps, un autre spectre dont elle avait perdu la trace, refusant de ranger l’intérieur de sa tête.

Peut-être gisait-il sous ce tas de morceaux du monde, ou alors un peu plus loin, enfoncé dans les ressentis ? Voilà, c’était donc ça. Elle avait compris. Compris pourquoi le monde extérieur lui faisait si peur et éclairait tant. Pourquoi il paraissait si vide et si froid. Sa caverne, son monde d’enfant était bien trop désordonné et perdu pour lui permettre d’y voir clair. Elle ne pouvait pas même y retrouver un homme mouton. C’est gros pourtant, un homme-mouton, lorsqu’il se dresse et avance d’un pas feutré, dans une démarche si inhumaine qu’elle glacerait le sang de tous ceux qui ne le connaisse pas. Mais Ethel le connaissait bien, l’homme-mouton. Elle avait failli geler avec lui, s’enfoncer dans son monde. Il lui avait parlé de l’autre côté du miroir, sans pouvoir l’y guider. Etait-ce parce que la tâche de rangement incombait à elle seule ? Faire le tri, jeter ce qui ne pouvait subsister, ranger précieusement ce qui resterait dans le monde de l’enfance, et faire un bagage, qu’elle prendrait dans le nouveau monde. Il fallait qu’elle range.
En attendant, Jani s’était approché d’elle, et ses larmes s’étaient quelques peu calmées.

Un instant, son cœur avait cru qu’il obéirait à son ordre et s’en irait. Qu’aurait-elle fait en ce cas ? La dernière chose qu’elle voulait faire était bien de le laisser partir. Et se retrouver seule dans cette nuit, avec une caverne entière à ranger ? Cela l’achèverait sans aucun doute, elle n’était pas très débrouillarde. C’était à peine si la rouquine savait prendre un couteau sans se couper, a peine si elle savait comment dresser une tente. Alors survivre dans la faune sauvage et sans pitié, au plein milieu d’une nuit et des animaux sanguinaires, sans façon… Mais il n’était pas partit. Il était bien là, s’approchant encore. Le fait d’entendre tout haut qu’il ne voulait pas partir la détendit légèrement. Dans un mouvement infime, ses épaules se baissèrent, son souffle se ralentit.
« … Pas sans toi. » Ces trois mots résonnèrent dans sa tête, raisonnèrent encore. Avait-il tout simplement peur qu’elle ne noie à nouveau ? Afin de ne pas être accusé de sa mort, ou de ne pas se sentir coupable. Même s’il n’en aurait probablement rien su. Elle se serait jetée dans les flots mordants, qui l’aurait recrachée peu après, lorsqu’elle serait si déformée que personne ne pourrait la reconnaitre. « La noyée en poncho vert » Pas mal non ? Il y aurait eu un article dans le journal, mais tout cela aurait été établi comme suicide, et personne ne venant réclamer le corps, l’affaire tomberait à l’abandon.

Mais non, il y avait autre chose qu’un simple refus de voir le nom de l’anglaise en lettres capitales sur un bout de papier. Se laissant faire lorsqu’il prit son visage, elle ne trembla pas, soutint même son regard. Différent de l’instant d’avant, il n’esquissa aucun sourire, ne tenta pas de la divertir ou de la prendre pour plus naïve, pour une gosse, en attirant son attention sur autre chose. Ce genre de subterfuge marchait avec son père quand elle avait 5 ans… Bon, peut-être 10 ou 12, ok. Mais plus maintenant, du moins pas en cet instant. Et de toute manière, le ciel ne brillait plus. C’était ce qui l’avait discrédité. Il n’essaya pas de sourire, en cet instant. Il n’essayait donc plus de lui mentir, et semblait plus vrai. La souffrance exacerbée d’Ethel l’avait-il atteint ? Elle l’avait rendu triste, par sa faute le regard bleuté du jeune homme s’était voilé. Comment ne pas s’en vouloir ?

« What have I done wrong, Ethel? How have I hurt you? »

Elle inspira profondément, consciente qu’il lui parlait en anglais. Un anglais pas si mal, d’ailleurs. Mais elle ne voulait entendre sa langue maternelle en cet instant. Elle ne voulait en fait, rien entendre de plus que le souffle du vent. Pourtant, il fallait se forcer. Mais pas en Anglais, c’était la langue de trop d’émotions pour l’instant. Laissons les débris inachevés dans la grotte. De son japonais plein d’un accent encore et toujours britannique – elle ne pouvait s’en défaire – la jeune fille finit par lever la tête et répondre.

« Tu n’as rien fait de mal Jani. Pas plus de mal que les singes ou les clowns. C’est moi, je suis désolée de ce que j’ai fait. »


Pour expliquer ce qu’elle voulait dire, Ethel leva sa main, désignant le chemin par lequel ils étaient arrivés. Tout cela s’était passé il y a un instant. Instant qui lui avait semblé une telle éternité. Sursautant, elle se rendit compte qu’elle avait parlé d’une chose que le blondinet ne pourrait pas comprendre, et qu’elle n’avait absolument pas envie d’expliquer. Le singe, le clown, l’homme mouton, l’ogre… Toutes ces images qui serpentaient dans sa tête sans qu’elle n’arrive à les ôter. Si bien qu’elles galvanisaient ses mots. Il ne restait que la chance que le jeune homme ne s’y attache pas, y voyant une allusion aux moqueries et à la sournoiserie des singes, et aux clowns qui avaient le don de terrifier les enfants. Oui Jani, ne voit que cela. Il fallait qu’elle retrouve ce singe et ce clown, qui continuaient à se moquer dans l’ombre. Il fallait qu’elle les affronte, et les jettent sans regard arrière. Reprenant légèrement du poil de la bête, la jeune fille se redressa, montant jusqu’à sa joue pour caresser une des mains de Jani du bout des doigts.

« Pardonne-moi de cette réaction. J’ai été décontenancée par ton regard… Juste après… »


Regret, appréhension, hésitation, nostalgie, tristesse, remords, crainte, flottement, indécision. Voilà tout ce qui était passé dans le regard du jeune homme l’espace d’un instant. Ce qui avait conduit à sa fuite. Avait-elle réagit trop promptement ? Sans aucun doute. Mais elle avait toujours préféré fuir plutôt que de soutenir un échec, un regard. Elle avait toujours préféré fuir plutôt que de chercher la cause des choses. Elle s’excusait du résultat, et ne cherchait pas le pourquoi. Elle ne combattait pas, lâchant les armes à peine les avait-elle en main. Mais pour commencer à ranger, il fallait cesser de s’enfuir.


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MessageSujet: Re: Juste après   Juste après EmptyMer 13 Juin 2012 - 13:44

Parler en anglais n'avait manifestement pas été sa meilleure décision : Ethel lui répondit en japonais. Peut-être était-ce une manière d l'éloigner, la langue natale ne les amenant qu'à avoir une conversation plus intime, mais il n'avait pas de temps à penser. Son âme avait cessé de s'inquiéter pour ce qu'il se passait en lui ; elle portait toute son attention sur le corps en face duquel elle s'était inclinée. Quoiqu'il avait foi en sa parole, il n'arrivait pas à croire qu'il ne lui avait rien fait. Jani n'avait nul besoin d'être rassuré, et encore moins par ce qu'il prenait pour des mensonges. Sa remise en question depuis leur baiser ne le guidait que sur la voie de la repentance. Persuadé d'être l'incarnation du mal qui la rongeait, la simple vision de son passé et de ce qui avait déjà été engendré par les plaisirs qu'il s'était donné sur le bonheur des autres ne lui permettait pas de croire, comme le disaient ses lèvres, qu'il n'avait rien fait de mal.

Son expression ne changea pas. Le Lunaire était figé dans sa nuit, et le caractère sérieux de la situation l'empêcha même de rire des paroles de la jeune fille. Un singe ? Un clown ? Alors qu'il aurait pu faire une remarque salace sur la certaine joie des bonobos, il n'entendit dans ces mots et ces images que des allusions à l'univers d'Ethel. N'était-elle pas un enfant, comme il l'avait réalisé lors de leur dernière rencontre, au lac ? Il la savait chaste, juvénile. Il la voyait pure, séraphine. Dans le fond, sa vision avait évolué. À leur première rencontre, il s'était imaginé qu'elle était prise de démence. Le finlandais appréciait cette folie. La côtoyer n'était pas comme être avec une femme désillusionnée qui savait parfaitement que la vie n'était pas faite que de belles choses, et qui pourtant se laissait naïvement manipulée... Ceux qui rêvaient n'étaient pas de ce monde. Ils n'étaient pas que des vivants, ils ne respiraient pas le même air que nous. Ils ne percevaient pas la vie de la même manière que nous. Carpe Diem? Carpe Somnium.

Non, au lieu de le blâmer, elle préféra se considérer coupable d'être partie. Ils avaient tous les deux joué un rôle dans cette histoire c'était certain. Et lui bien plus qu'elle, si on considérait comme il le faisait tout le mal qu'il avait fait depuis son arrivée au Japon, deux ans plus tôt. Fervent péripatéticien, le finlandais croyait en la Causalité énoncée par Aristote. Tout a une raison. Si Ethel avait réagi de cette manière, il devait être une cause. Et cette cause est toujours externe. Son comportement,, ses mots, son apparence, quelque chose en lui avait éveillé en elle sa peine. Pour remonter plus loin, son baiser l'avait bouleversé, mais il n'y aurait eu nul baiser s'il ne s'était pas laissé aller. Souriant intérieurement, restant de marbre de l'extérieur, une petite voix lui rappelait que la logique le désignait comme unique coupable. Il l'assumerait.

Venant effleurer du bout de ses doigts une des mains de Jani, qui caressait avec attention sa joue comme s'il s'agissait d'un pétale de lys, doux et fragile, qu'il ne voulait briser, elle lui demanda pardon. Ce fut trop pour lui. Le prince des ténèbres secoua la tête et se redressa en se rapprochant de l'ange. Elle n'eut le temps que de mentionner l'effet que lui avait fait son regard, et de commencer une autre phrase. « Juste après. » Les lèvres de l'homme s'emparèrent des siennes.

Était-il trop tard pour oser faire ce geste ? Alors que plutôt, c'était elle qui s'était donnée à lui, qui avait choisi de poser ses lèvres contre les siennes pour une raison encore bien mystérieuse... Après sa réaction précédente, après ces mots, il faisait à son tour le premier pas vers elle sans plus se soucier de ce qu'il se passait ou de ce que ça pourrait entraîner. À l'évocation de son regard, il comprit que s'il pouvait distinguer presque toutes les nuances de la voix et du souffle des vivants, elle était capable de lire en le plus profond des regards comme si tous ses sentiments étaient remontés à la surface sur commande. C'était sa manière de lui faire comprendre qu'il n'avait pas de regret, qu'il n'était pas déçu.

Rompant lentement son tendre baiser, Jani se permit d'achever dans un murmure la phrase de l'anglaise.

« … Ça ? »
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