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 Hollow like my soul

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Cammy Logan
♦ Civil - {Pluri-emploi} Itinérante
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Cammy Logan


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MessageSujet: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyLun 5 Oct 2015 - 23:18

Spoiler:

Une journée, en suit une autre. Puis une autre. Le sourire étiré à la fenêtre, elle regarde le corbeau sur le toit d'en face. Vil charognard à la haute prestance et à la couleur de la nuit, il ne la remarque pas.

- Je t'ai fait du thé, ma chérie.

Elle rit de la banalité de la phrase et de l'inquiétude de sa mère éplorée, expression qu'elle ne voit plus.

- Merci. En reste-t-il encore pour lui ?

Wade Logan regarde à son tour par la fenêtre comme pour tenter de comprendre les divagations de sa fille. Elle ne se surprend pas de n'apercevoir personne. Aucun vis-à-vis de là où elle se trouve hormis quelque volatile de mauvais augure. Elle a compris depuis longtemps que les propos de Cammy n'ont plus la moindre cohérence depuis que ce camion a percuté le taxi dans lequel, pour une raison que la quiquagénaire n'explique pas, sa princesse s'était engouffrée. Alors, elle se contente encore une fois de s'installer auprès d'elle, sur le fauteuil à bascule.

- De qui parles-tu ? De ton voisin ?



WHERE'S MY SECOND CHAPTER
Or will the first also be my last?


Un ange passe. La mère de la jeune femme a pris place depuis le retour de sa fille dans le studio d'en face de celui de Cammy afin d'assurer les soins de cette dernière vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Une convalescence qui se compte en mois désormais. En plus de l'ablation de la rate, conséquence de l'embrochage de l'organe par une côte brisée, ce qui inquiète les parents de la jeune fille sont les troubles psychologiques résultant du traumatisme crânien subi, tout en sachant que le précédent avait déjà causé de lourdes conséquences.  Aussi, l'évocation d'un voisin n'a pas fait réagir plus que ça la petite Logan, toutefois, elle a grandement étiré les lèvres avant de pousser un énième rire.

- Mais non ! Je te parle d'Ebène, enfin Maman ! Quelle idée de vouloir apporter du thé au voisin !

Le rire la fait grimacer.

- Mais dis-moi... tu as réussi à recoudre ma robe ? Il n'a suffit que d'un seul coup de patte de l'ours pour qu'elle soit déchirée. C'est Yun-Jin qui me l'a offerte à Noël. Je n'ai pu la porter qu'une fois, c'est pas juste.

Wade s'est alors imposé pour mission de retrouver la même robe. Parce que l'originale a fini par être détruite. Elle était de toute façon irrécupérable, souillée qu'elle était par le sang.

- Je m'en occupe, ma chérie. Il y a beaucoup de travail à faire dessus, tu sais.
- Je veux retourner à la Forêt.
- Tout ce que tu voudras.
- Je veux revoir Six, Thor et Paradoxe.
- ...
- Et Jin.

WHEN MY BODY SUFFERS
When to breathe is pain



D'autres semaines passent, les souvenirs reviennent peu à peu avec difficulté jusqu'au jour où Cammy, après maintes et maintes séances de rééducation, ose franchir la barrière de sa terreur profonde pour sortir. Elle ne va pas loin. Le parc s'offre alors à elle tandis que le crépuscule dévore le bleu du ciel. L'automne dévoile son tapis d'or, la bruyère semble avoir remplacé les fleurs que le paysagiste qu'elle ne sera plus jamais avait planté là pour l'été. Il manque quelque chose. Elle hume l'air, il n'a pas plu. La nature après la pluie a cette fragrance délicieuse qu'elle ne retrouve pas en cet instant. Toutefois, le froid est présent et cette fois, elle porte un long gilet de laine ainsi qu'une écharpe verte, criarde. Elle cherche et s'épuise. Chez elle, Wade Logan est en panique, hurlant après elle. Cammy le sait, le sent, d'une certaine façon. L'été n'est plus, les fleurs ne sont plus, le jour n'est plus, mais le pont rouge, lui, est toujours là. De même que ce banc.

- De quoi parlais-tu ? Que devions nous voir ?

Elle ne sait pas à qui elle s'adresse, elle ne sait même pas de quoi elle parle. Mais il y a cette voix dans sa tête qui lui intime des mots, comme depuis toujours.
La nuit tombe, la brume s'élève. Elle s'allonge sur le banc et voit les étoiles au travers de quelques branches. Sa poitrine lui fait mal, elle peine à respirer. Ses râles sont audibles et pourtant elle ne songe à rien d'autre qu'à créer de nouvelles constellations du bout des doigts.


- Je veux l'Impossible, Maman. Tu ne peux pas m'apporter ça. Je sais que la robe est fichue et que Jin n'est plus. Je le sais parfaitement.

Des bruits de pas, légers. Cammy se redresse et observe la silhouette non loin du réverbère. Elle se lève avec difficulté et s'approche de la personne afin de voir son visage. Après l'avoir reconnu, elle étire un sourire tendre et lève la main jusqu'à sa joue. Elle tressaille un peu au contact de ses phalanges sur la peau de l'intrus. Elle ramène ses doigts vers elle tout en penchant la tête sur le côté. A nouveau, elle l'examine, ravie de ne pas le voir s'envoler.

- Ne dis pas à ma mère que je suis ici. Je n'en peux plus d'être enfermée avec elle. C'est une menteuse. Je n'ai pas besoin de ça.

Elle tourne les talons en riant, marchant vers les feuilles dorées qui masquent le sol et le ruisseau sous le petit pont puis s'en revient vers son banc sur lequelle elle s'allonge, encore. Les étoiles sont toujours là, fidèles.

- Tu ne m'as jamais dit comment tu t'appelles.

Des voix prononcent son nom. Elle se raidit et se rue derrière un cerisier. Le souffle court, sa poitrine lui fait mal, une fois de plus. C'était trop tôt pour une escapade, mais elle ne la regrette pas. Amusée, elle regarde la panique habiter les visages parfois inconnus, parfois pas, des passants qui la recherchent. Toutefois, elle ne résiste pas à ces petits yeux qui la fixent non loin d'elle, au ras du sol. Elle tente de s'accroupir pour tendre une main dans sa direction mais se retrouve sur les fesses, provocant ainsi la fuite du rat. Incapable de se relever, elle attend que la voie soit libre.

- Tu es toujours là ? Je suis tombée et je n'arrive pas à me relever, c'est fou non ?

Contrairement à sa demande, elle se laisse aller en arrière, couchant son corps entre terre, feuilles mortes et racines. Les étoiles y sont plus belles encore.


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Dernière édition par Cammy Logan le Dim 10 Jan 2016 - 15:38, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyLun 12 Oct 2015 - 0:20

Portrait de patient d'Eliane (suite)
J'avais fini par m'assoupir après avoir retourné les cours de la journées dans ma tête, de long en large puis de travers -et peut être même à l'envers. J'ai toujours eu un sommeil perturbé, trop destructible et prêt à se briser au moindre désordre. Une fois de plus ce soir là, ma somnolence n'a pas duré très longtemps avant de se retrouver rappelée dare dare à la réalité. Il a suffi que la porte de ma chambre cliquette pour s'ouvrir lentement dans ce que je m'imaginais être la pénombre nocturne à travers mes paupières fermées. Je connaissais ce frôlement des pieds sur le parquet, je connaissais l'identité qui venait vérifier si je dormais et quand bien même je la connaissais que je n'ouvrais pas les yeux. Ces derniers temps, j'en avais après Eliane. (...)

Je n'ai pas le souvenir d'avoir dormi aussi profondément de ma vie, ni d'avoir eu cette envie de me rendormir sitôt m'être réveillé. Il semblait qu'un trou noir de sommeil aspirait tout mon être et que j'étais incapable de me sortir de cette torpeur tout seul. Pire, quand on m'en sortait de force, tous mes membres rechignaient à reprendre de l'activité, me laissant dans une impression de douleur pataude, comme celui d'être resté ankylosé trop longtemps. Ça me prenait depuis le fond de la gorge, mes bras se sentaient affublés de plusieurs kilos supplémentaires d'un coup et mes jambes restaient paralysés. Je n'aimais pas beaucoup ces réveils là.

Cet été là, la notion de régularité devient la plus difficile à tenir, ses journées d'absence inexpliquées au salon, ses oublis, des perspectives effacées, des instants de passages à vide. Des nuits déphasées accoudé au bar au rythme des basses surfaites, des ruelles défilant sous ses pieds de manières aléatoires, du vin, de l'oubli, du vin, du déni. Verleugnung. D'incomplet, il se rétrograde au rang d'inexistant, et tandis que déambule le goudron au sol sous ses pas, les phares l'esquivent, les klaxons pestent, des coups de freins crissent. Il ne se rappelle pas d'avoir été ébloui, il ne se rappelle pas d'avoir descendu sa bouteille, il ne sait plus où est son portefeuille pour en acheter un autre abrutissant d'esprit, ne sait plus où sont partis ses papiers. Il ne sait pas de quoi on l'accuse ni pourquoi des barreaux l'enferment, il parle de cobaye, de Thor, de Paradoxe. La vie de Valentine prends des aspects kaléidoscopiques, doté d'un illogisme sans pareil. Au final, seul Théo parvient à le ramener chez lui, silencieusement navré derrière les fragments de vie qui restent de son jumeau. Eliott est effroyable à regarder, la fatigue qui tirent son visage aujourd'hui lucide est traîtresse de ses antécédents pitoyables.

Cling.

La cuillère résonne contre la paroi de sa tasse. Un dopio expresso sans sucre. Le goût est fort, amer, presque violent -et presque appréciable. Théo n'est pas des plus à l'aise dans ce bout de continent mais il surprend Eliott totalement immergé dedans comme s'il y avait toujours vécu.

-Tu vas t'arrêter quand ?

La question qu'il n'a pas encore posée finit par arriver. Il se reçoit alors en réponse le gris acier du regard de son frère.

Il cligne, il fixe.
Puis détourne le regard. En face d'eux, la vitrine du café où ils se trouvent. L'attention de Valentine aimerait rester juchée au dessus de la tête de chaque passant plutôt que de se retrouver percutée contre la paroi de la vitre qui lui projette à demi son reflet.

-Tu pars quand?


Théo soupire.

-Demain.

Un silence. Théo décide de continuer.

-J'ai croisé ton ancienne voisine ce matin.

Aucune réaction.

Théo vient d'aider à déménager Valentine dont la location se terminait quelques jours auparavant. Eliane aura également insisté pour qu'Eliott reparte avec de nouvelles bases comme si ça pouvait changer quelque chose.

(...) Du temps passe.




Hollow souls

Les enchaînements se lient mal, Valentine ne cherche plus de transition. Des feuilles crissent sous ses pas et il longe l'automne au gré de son instabilité. Il s'arrête parfois pour s'accouder quelque part, observer un monde qui semble ne plus lui appartenir, ces âmes qui vivent bruyamment toutes les unes  sur les autres, les unes plus criardes que les autres. Cette autre âme qui s'enterre sous les feuilles rentre également dans le champ de sa vision et il s'arrête, depuis son point de vue, sans chercher à l'interrompre. De toute façon, il est bien trop loin. Et puisqu'elle fait face au ciel nocturne, il lève lui aussi un instant le regard, pour une nouvelle source de distraction. Juste un instant.

Portrait de patient d'Eliane (suite)
Il y a eu un fracas, un bruit sourd et horripilant de celui d'un corps qui heurte quelque chose avant de s'écrouler sur du parquet. Dans ma tête, ça résonne si fort que même la lampe de chevet qui explose en même temps reste un bruit de fond comparé au choc qui paralyse ma tête.

-Tu ne peux pas m'aimer comme ça, tu ne peux pas!

Eliane qui se battait contre elle même, Eliane qui oubliait l'essence même de sa personne. Elle, dont le regard avait changé au fil des jours et que je surprenais parfois posé sur moi. Elle encore, qui punissait son corps à chaque fois qu'elle me voyait avec une autre, puis encore elle, qui venait chercher à se battre pour s'accaparer à jamais de mon attention. Ses pieds nus sur le sol sont comme si je me voyais moi-même approcher de ce lit à la silhouette endormie, elle s'approche, et son poids qui soudain s'écrase sur mon ventre me coupe le souffle, sans que je ne parvienne à deviner davantage ses intentions. Je connais Eliane comme personne, je connais ses failles et ses forces, mais ce soir là, c'est un lien qui s'est rompu. C'est un lien que j'ai brisé de mes deux mains et aujourd'hui, je décrirai ça comme l'effet de devoir renoncer à une partie de son corps. Je n'avais pas prévu de la découvrir à demi nue, je n'avais pas prévu à ce qu'elle sombre ainsi, juste à ma façon de l'ignorer ces derniers temps, parce qu'elle avait fait foiré mon coup avec une des filles de l'autre classe, sur qui il ne m'aurait pas déplu d'en connaître davantage. Et tandis qu'Eliane enlace mon visage à deux mains et que je sens son souffle au dessus de mon visage, je réalise qu'il est trop tard. Il est trop tard quand je comprends son regard douloureux que j'ai déjà surpris posé sur moi. Trop tard quand j'assimile cette passion qui embrume son esprit; beaucoup trop tard, pendant qu'elle oublie, -s'oubliait comme si elle effaçait sa vie à grand coups de larmes et de rires. Et de plaies. Son corps gisait mollement au sol, là sous mes yeux, et je ne pouvais réaliser que je venais de l'écarter de mon existence ainsi, et je ne pouvais accepter que je venais de provoquer autant de brutalité sur un corps aussi mutilé. Eliane était amoureuse et il avait fallu que son destin la twiste avec le mien pour pouvoir violemment dévier de mon chemin. Mes mains ont attrapé ses hanches et je l'ai balancé sur le côté pour me dégager de sa folie, mais en la basculant un peu trop fort...
En nous basculant trop fort... je l'ai poussé à se cogner la tête sur le rebord de ma table de chevet. Elle a perdu l'équilibre et en cherchant à se rattraper, j'ai vu son crâne faire un bruit sec contre l'arrête du meuble. Il avait fallu que la vie de ma jumelle se retrouve axée pile sur cette trajectoire là, il avait fallu que j'assiste à sa déchéance devenue mienne, à la voir me regarder avec un regard hébété, puis s'effondrer inanimé au sol pour me laisser ensuite découvrir un corps victime de sa propre maltraitance. Je lui avait murmuré juste avant, crachoté à moitié dessus comme un serpent, qu'elle n'avait pas le droit de m'aimer comme ça, tout sauf comme ça.
Tout ça parce que j'ai eu réellement peur d'Eliane pour la première fois.

Quand il regarde le ciel, c'est une scène avec elle -après s'être battu comme deux vauriens, qui jaillit dans sa mémoire intacte. Et c'est dans un étrange sentiment de culpabilité que Valentine se dit qu'Eliane a choisi toutes les routes qui ne lui étaient pas destinées. Quand il regarde un peu trop ce ciel, ça a tendance à être plutôt douloureux dans le fond.  Alors il détourne inlassablement le regard, jusqu'à tomber sur deux yeux marrons qui semblent maintenant l'observer.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyLun 12 Oct 2015 - 18:06

    Wer zu Lebzeit gut auf Erden
    Wird nach dem Tod ein Engel werden
    Den Blick gen Himmel fragst du dann
    Warum man sie nicht sehen kann


Ce n'était qu'une énième illusion, née d'une imagination trop fertile. Les larmes d'une mère ne suffisent pas à les évaporer. Un jour, il y a eu des bruits, du mouvement et un visage inconnu. Le lendemain, l'immeuble résonnait du vide complet dans les étages inférieurs. Cammy a eu alors cette impression, depuis le dernier étage qu'elle occupait encore, qu'elle régnait depuis les cieux mais qu'aucun regard ne désirait plus percer jusqu'à elle. Oubliée des autres, rongée par la solitude que la présence intruse de sa mère accentuait, elle a alors pris peur. Chacun des objets de son intérieur, chaque livre, chaque meuble, chaque mur ont alors pris les couleurs de l'inutilité comme chaque parcelle de son existence en ces lieux. Un jour parmi tant d'autre, elle a attrapé la bouteille d'alcool à brûler, la renversant sur le parquet et les rideaux et a laissé le gaz s'échapper de la cuisinière avec une impression de déjà vu. Elle a violemment toqué à la porte du studio d'à côté, puis a craqué une allumette dans un petit rire.

GOTT WEIß ICH WILL
kein Engel sein


Elle se redresse difficilement en imaginant cet autre ciel brûler par sa main. Mais cette voûte sombre est encore bien trop hors d'atteinte, elle qui est si minuscule. La cendre à la cendre, la poussière à la poussière. Elle voit encore une silhouette. Elle ressemble beaucoup à la vision qu'elle a eu quelques minutes plus tôt. Soupir de lassitude. Elle l'imagine quitter son observation de l'immensité étoilée pour accaparer son attention. A peine cette pensée la traverse que l'homme pose les yeux sur elle. Définitivement, son imagination prend des proportions faramineuses. La silhouette a une allure plus transie que précédemment, statue de givre dépourvue de la moindre émotion. Une figure ratée, laide. Un échec cuisant dépourvu du moindre pigment. Et donc fatalament, criard dans cet univers de couleurs qui entoure la jeune femme. Elle oublie la douleur de son corps en se levant, elle ignore les sirènes assourdissantes et les girophares aveuglants des camions de pompiers qui fusent vers le building Kairakô. Elle se contente de sourire en sortant la pochette d'allumettes. Est-ce que cette illusion là s'effondrera à l'état liquide, s'il lui vient l'idée excitante de vouloir l'enflammer ? Elle incline la tête, pousse un rire bref et se détourne de cette icône imaginaire. Cette fois, elle évitera toute communication et donc, toute frustration de ne pas obtenir de réponse. Et ainsi est venue l'envie du thé en même temps que la peur envolée.

    Sie leben hinterm Sonnenschein
    Getrennt von uns unendlich weit
    Sie müssen sich an Sterne krallen
    Damit sie nicht vom Himmel fallen


Elle entend un grognement puis un feulement. Un cri puis un grondement. Au détour du sentier sur lequel elle marche, elle croise un vagabond qui se rue vers elle. Avant même qu'il ne l'atteigne, elle amorce un pas en arrière. Pas d'effroi, mais de dégoût. Il sent mauvais, ses dents sont pourries, ses vêtements sont des loques.

- Hey princesse, tu pourrais tenir tes sales clébards en laisse ! J'ai cru qu'ils allaient me sauter à la gorge ! Alors si tu veux pas que je t'arrange le portrait, dégage les d'ici !
La surprise habille légèrement de la rouquine, mais c'est l'incompréhension qui marque clairement ses traits.

- Vous faites erreur.
- Quoi ???
- Je ne suis pas une princesse. Et je n'ai pas de chien. Puis-je passer maintenant ?
- Hey mais t'as un grain !

Le hère porte un regard médusé à l'endroit de l'Australienne qui passe devant lui sans tressaillir, ni ciller. Pas même un regard gêné, mais juste... du vague. Baragouinant dans sa barbe des propos nébuleux sur la jeune femme, cette dernière se stoppe quelques mètres plus loin en apercevant une forme sombre allongée sur le sol tandis que les objets de l'effroi du rôdeur détournent leur regard sombre de leur proie, pour le porter sur elle. La langue pendante, ils restent là à la fixer. Cammy détaille le gisant au sol et ne tarde pas à le reconnaitre au grondement qu'il pousse. Le félin, repas improvisé des deux molosses en état de divagation, a la respiration haletante, bien trop rapide. Cammy a oublié que son coeur pouvait battre aussi vite. Elle amorce un pas dans la direction des bêtes. L'un recule, l'autre avance, un filet de bave s'extirpant de ses babines qui se retroussent. Elle stoppe alors tout mouvement, laissant ses bras pendre. Elle n'a pas à se forcer à se relaxer, elle est déjà détendue. Les deux canidés ne sont pas responsables de l'inquiétude qui anime la demoiselle. Aussi elle laisse celui qui l'approche lui renifler la main avant qu'il ne prenne brusquement la fuite avec son comparse. Elle glisse lentement vers la victime et s'agenouille à ses côtés. Ses yeux se posent sur le ventre vulnérable et souple, grossièrement maculé de la bave de ces clabauds qui comptaient faire de cette noiraude enceinte, leur dîner. L'australienne est intervenue avant qu'ils ne l'éviscèrent, mais l'état de l'animal est préoccupant. Des coussinets déchirés, de nombreuses plaies aux pattes et à la tête témoignent que la petite femelle a lutté courageusement pour sa survie. Cammy pose alors sa main sur le dessus du crâne de l'animal qui grogne par réflexe. Malgré les nombreuses gouttes de sang sur le bitume de l'allée, c'est la respiration excessive de la petite chatte qui inquiète la rouquine depuis l'instant où elle a posé ses yeux sur elle la toute première fois. Elle retire alors son épais gilet de laine pour le poser à même le sol souillé, laissant ainsi le froid d'automne mordre sa peau pâle. Elle ignore les faibles grognements de la bête et parvient à la porter dans cette petite couverture improvisée.

- Reste avec moi, Dinah.

Nom offert sur l'instant, ondulant pour elle ne sait quelle raison dans sa mémoire défaillante. Un livre, possiblement. Il lui semble entendre le tic-tac d'une horloge résonner, elle s'arrête et regarde autour d'elle. C'est un rythme irrégulier, vif, des secondes s'écoulent à une vitesse qui n'est pas celle de d'habitude. Cammy regarde alors devant elle, aperçoit à nouveau cette silhouette illusoire, sépulcrale. Il n'y a pas d'horloge dans l'allée. Ce sont les râles de l'animal qui imitent le temps qui s'écoule, rappelant que chaque seconde compte. Chaque seconde de toute vie terrestre. Et cette forme là, devant elle, lui évoque un autre souvenir à l'état liquide. Un fleuve, un ruisseau, une averse. Un thé, un café, et du sang. Beaucoup de sang. C'est ainsi qu'elle se noie dans les souvenirs de cet homme qui lui fait face.

- She's dying.

C'est une vie qui s'éteint, mais elle ne part pas seule. Dans ses bras, le félin remue, dans une ultime tentative de fuite. Les secondes s'accélèrent encore dans le linceul de laine.

- Please... Help.

Tandis qu'au 20 boulevard Hikari, l'incendie ravage tous les biens de Cammy Logan, ses livres, ses diplômes et autres souvenirs provenant notamment d'une capitale européenne, la trotteuse féline se stoppe alors.

    Lorsque les nuages vont se coucher
    On peut nous voir dans le ciel
    Nous avons peur et nous sommes seuls


    Dieu sait que je ne veux pas être un ange.


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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyMar 20 Oct 2015 - 9:46

Le feu a soudain embrasé le bâtiment en face de ma chambre. Depuis ma fenêtre je voyais le feu se propager sous une épaisse fumée noire et alors que l'air s'alourdit jusqu'ici ... je sens la peur me gagner. Ce feu m'effraie. Il ne me veut pas du bien. J'ai peur qu'il arrive jusqu'à moi et qu'il me fasse du mal. Je ne comprends pas pourquoi ces flammes sont là si près -ni pourquoi elles sont en train d'empiéter sur l'ancien étage d'Eliott. Je voulais voir la fille aux cheveux oranges. Je voulais lui parler mais je n'osais pas et jamais je ne croisais sa route. Je me décide de sortir de ma chambre mais au moment où il faut que je pose la main sur la poignée je me rends compte avec effroi que je ne sais plus quel est le mode d'emploi pour marcher. Je sens mon intérieur fondre d'un coup mon cœur se resserre encore plus fort et je me rattrape contre le mur. Le contact dur contre la paroi me fait sortir un hoquet de stupeur et lorsque ma main se tend pour ouvrir la porte... Je sens que ça ne va plus. Je respire la bouche ouverte mais je n'arrive pas à ingérer la bonne quantité d'air je ne sais plus comment ouvrir cette porte alors que je suis certaine de l'avoir fait tout à l'heure. J'ai peur du feu j'ai peur d'avoir encore oublié quelque chose. Ne pas oublier ne pas oubliernepasoublier. Je panique je panique il faut que j'arrive à me contrôler mais la cadence de mon propre corps m'emporte et je me recroqueville au coin de la porte. Peut être que d'ici j'aurais moins peur. Les coins de murs sont rassurants. Pense à autre chose pense à autre chose. Je pars demain avec Théo et je dois finir ma valise mais le feu de la voisine... Ça recommence.

Des mains d'inconnus relèvent cette femme terrorisée, les alertes au feu provoquées par la fumée retentissent, on descend tous dans le même sens par les sorties de secours. Tranquillement. Arrivés dans la rue, les gens appellent, prennent des photos de la catastrophe puis s'éparpillent plus loin, en sécurité. La jeune femme reprends petit à petit contenance, elle cesse de trembler de manière visible et se redresse tant bien que mal au milieu de ces inconnus qui cherchent à l'aider. Et soudain un visage familier perce ce néant il y a la voisine d'Eliott, je la reconnais, je fixe son visage les yeux grands ouverts et je tends la main vers elle mais je me sens ramenée en arrière et Théo me retrouve avant même que je ne la rejoigne. Elle est si jolie. (...)



TRAUMA

Feu au building kaikaro - est le titre d'un des articles où le doigt de Valentine s'arrête un instant, là, posé sur l'écran qui défile à mesure de sa lecture portable. L'environnement de la photographie lui dit vaguement quelque chose, comme toutes ces choses qui depuis quelques jours sont des effluves de déjà-vus qui se superposent à sa conception du monde. Confusion; un pan de passé s'effondre, des souvenirs s'effritent.

-Du thé aux fruits rouges, Yui.

Ah. C'était ce matin.
Cette photo lui trotte encore en mémoire alors qu'un sourire s'étire sur son visage.

-Naturellement.


Un silence passe, un univers de vide où même Yui Valentine ne se retrouve plus. Le contact de Sonoko le fait alors revenir une réalité plus tangible. Il sent cette main insistante posée sur son avant bras, son regard se détache lentement de la fenêtre et il fixe ces phalanges qui l'empêchent de voguer trop loin.

-Du thé rouge, tu te souviens ?

Un léger tressaillement des sourcils et Yui a figé son regard sur la couleur du thé qui fume délicatement devant Sonoko. Il sent sa conscience dégringoler jusqu'à sous ses pieds lorsqu'il réalise que sa propre réalité le dévore petit à petit. Un oubli par ci, une inattention par là, et c'est le chaos qui flotte désormais au travers de son silence perturbé. Le thé aux fruits rouges est un des classiques souvent préférés par sa clientèle féminine, dont Sonoko en est l'adepte. Un léger pli de contrariété vient s'installer sur son visage mais il n'a pas le temps de remédier davantage à la question que les deux mains de la jeune femme emprisonne son visage. Elle était assise en face de lui, de l'autre côté de l'étroite table basse. Elle l'était.

-Arrête de réfléchir. Ce n'est pas grave.

Ça l'est.
Pour Yui, c'est son être qui s'effondre à chaque fois que ce sont les autres qui lui rappellent le monde. Le sien. Il déglutît et fixe les lèvres magenta du visage en face de lui qui prononce distinctement chacun des mots par leur syllabe, et qui malgré tout peinent à atteindre sa compréhension. Il se recule lentement, son sourire disparaît et il se lève vers les étagères à thé. Du thé rouge, Valentine. Pas du thé macha. Rouge.

Le salon est vide aujourd'hui, fermé pour une semaine de vacances. Et tandis qu'il ne reste plus que les poissons pour veiller sur l'accalmie apaisante de ces lieux, c'est ici que Valentine se décide à passer le clair de son temps, pour retourner ses pensées dans tous les sens, loin du monde.
Ici, c'est plus familier que l'étage étouffé entre deux bâtiments à Hebi.

-Je vais te refaire un thé. Murmuré sur le bout des lèvres, il a fixé d'un regard morne la japonaise venue à son encontre. De cliente, Sonoko s'est révélée aide soignante, troquant alors ses services contre ceux de Valentine. Du thé, des conversations en échange de soin; des conversations où c'est étrangement elle qui parle le plus. Ce faisant, elle ramène sa conscience où elle devrait être, elle tire à la force de ses mots magenta l'attention de Valentine en permanence entraînée par une Thémis inexistante autrement que par ses illusions. Il n'en parle jamais, mais son corps est absent de cette énergie vitale dont elle avait l'habitude de lui voir. Un jour Yui Valentine a cessé de venir dans le café; puis un jour, il est revenu sans aucune explication, l'esprit à mille lieux de son corps comme s'il avait traversé trop d'espace temps. Mais ce n'est pas là qu'elle l'a croisé la première fois après des mois d'absence.
C'était sur son lieu de travail, à l'hôpital.

Ses doigts survolent les boîtes de thé alignées côte à côte puis se figent au ralenti aux dessus de celle recherchée. Il se retourne que lorsque Sonoko lui intime de ramener son attention en lui posant une main sur l'épaule.

-Tu ne sers plus de thé, n'est ce pas?

Immobilisés au dessus de sa cible, Valentine sent ses doigts oublier une nouvelle fois son objectif et laisse retomber son bras pour faire face à la femme. Il la fixe un moment puis finit par renoncer à poursuivre sa réflexion.

-Quoi Yui? Qu'as tu pensé ?

Valentine recule et contourne la jeune femme pour retourner près de la fenêtre. Son regard se grise et il observe cet extérieur comme s'il ne lui était pas donné d'y accéder.

-Tu joues encore avec moi.

-C'est faux.

La voix de la japonaise a donné plus fort que prévu, plus près que ce qu'il aurait imaginé. Quand ses yeux reviennent vers elle, elle se tient encore à côté de lui.

-Arrête de fixer cette fenêtre comme si tu voulais passer au travers. Est ce que tu sais ce qu'il y a au moins derrière ?

Le silence lui a rendu sa réponse.


Archives: Portrait de Patients Portrait de Patients EFFET PAPILLON

Elle.


Une note jamais vraiment commencée, jamais vraiment terminée. Après que Sonoko soit partie, il feuillette ces cahiers de notes de ci et de ça. Entre des calculs de comptes, de commandes, de reminder et des notes éparses, il tombe sur des billets dont il se souvient vaguement d'avoir écrit. A-t-il réellement rencontré tous ces gens un jour ? Sans doute. Demain il encadrera ces feuillets de toutes tailles et les laisseraient innover les murs du Salon. Des fragments d'âmes, des morceaux de temps à jamais imprimés sur ces murs sobres. Satisfait, Valentine laisse alors ses pas le perdre dans la rue.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyMar 3 Nov 2015 - 21:21

Un soubresaut entre ses bras, mais ce ne sont que des secousses nerveuses. Il est trop tard. La jeune femme bifurque de l'allée, s'agenouille pour poser le corps sans vie de l'animal sur le sol. Entre réalité et fantaisie, Cammy ne sait où se situer. Elle ne pouvait rien faire d'autre, le sort est ainsi fait. Derrière un buisson, ses doigts pénètrent alors la terre qui glisse sous ses ongles, arrachant ainsi sans violence quelques racines nouvelles. Elle creuse, creuse et creuse encore, extirpant de ses mains nues, parfumées par Mother Nature, quelques lombrics de leur habitat, par toutes petites poignées. Il fait frais et humide là dessous. Les genoux s'égratignent de même que ses phalanges ; rien n'est de trop pour une sépulture.

Puis vient le miaulement. Agréable, amusé, presque espiègle. Il ne provient pas du linceul, mais de derrière elle. Médusée, Cammy examine la féline intruse puis son gilet à même le sol. Est-ce que tout est à ce point similaire aux portes de la mort ? Les deux bêtes font la même taille, ont la même couleur de pelage et quasiment la même corpulence. Pourtant, la petite chatte noire, celle que Cammy connait pour lui avoir offert régulièrement des friandises sur le chemin qu'elle empruntait pendant quelques temps en allant travailler au musée, se tient désormais près d'elle. La tristesse qui l'avait envahi sans qu'elle ne le sache, s'envole et c'est un sourire inespéré qui habille désormais les traits de l'Australienne. Elle est soulagée, heureuse probablement, mais c'est aussi un dérivé de culpabilité éhontée qui se fraye un chemin dans ses veines en regardant la forme qui gît à côté d'elle. C'est pourquoi elle reprend son office en plantant ses mains dans le sol, sa compagnie inespérée s'amusant avec les vers délogés. Enfin, elle place le corps encore chaud enveloppé de son gilet dans la fosse ainsi créée, tout en se fichant éperdument de savoir si elle est assez profonde ; il est évident que non mais elle l'est suffisamment pour recouvrir convenablement la petite dépouille. Un signe de croix, une prière.

PSAUME
vingt-trois


Lorsque je regarde la terre retournée, tout en caressant négligemment les flancs d'une Dinah qui ronronne, me revient alors en mémoire l'image de champs labourés, d'un tablier blanc que je revêtais par dessus cette robe aux couleurs de l'espoir, la tenue d'une paysanne. Je sens encore l'odeur naturelle des vaches ou des moutons, des chiens qui les guidaient dans la vallée, vers les hautes montagnes dressées, de la fraîcheur pure de l'air mais surtout des nuances de cette nature munificente. L'herbe était si verte, le ciel si bleu que parsemaient de gros nuages de coton immaculés. J'avais des bottes aux pieds et je me plaisait à sauter dans la gadoue avec les deux Border Collie, Heckle & Jeckle. Dans cette tenue, j'oubliais plus que d'habitude. Je n'étais plus personne, mais je me sentais plus vivante que jamais. Une fois le labeur effectué dans l'allégresse et les rires, je me baignais dans le courant de la rivière de la Forêt Eternelle et je ne me contentais plus que d'une toge pour masquer ma chaste nudité. De simples petites sandales qui laçaient mes chevilles protégeaient la plante de mes pieds des ronces et autres racines sauvages de ses bois. J'entrais encore en communion avec ma nouvelle Mère jusqu'à ce que la faim ainsi que la fatigue ne m'amènent dans ma maisonnette en lisière.

    - L'Éternel est mon berger: je ne manquerai de rien.
    Il me fait reposer dans de verts pâturages, Il me dirige près des eaux paisibles.
    Il restaure mon âme, Il me conduit dans les sentiers de la justice, à cause de Son nom.
    Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort,
    Je ne crains aucun mal, car Tu es avec moi: ta houlette et ton bâton me rassurent.
    Tu dresses devant moi une table, en face de mes adversaires;
    Tu oins d'huile ma tête, et ma coupe déborde.
    Oui, le bonheur et la grâce m'accompagneront tous les jours de ma vie, et j'habiterai dans la maison de l'Éternel jusqu'à la fin de mes jours.


Cammy se redresse lentement, paumes et genoux couverts de terre. Dinah sur ses talons, elle avance le long de l'allée du parc. Elle s'étonne de ne pas avoir versé de larmes pour cette boule de poils inconnue qu'elle vient d'inhumer. Peut-être est-elle en train de s'endurcir, ou bien est-elle tout simplement blasée. Les souvenirs de ciel bleu, de verts pâturages et de nuages blancs lui défilent en tête. Le regard parcourant les ombres qui l'entourent, les flammes léchant au loin les racines du firmament, elle n'a pas le moindre doute quant à l'endroit où elle se trouve. Et elle est seule. Ou presque.

- Tu as faim ?

Dinah se frotte contre ses bas comme pour acquiescer. Les deux demoiselles s'avancent alors sur ce méandre en direction d'une sortie secondaire peu éclairée autant qu'empruntée.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptySam 7 Nov 2015 - 10:30

Et un jour,
les chemins se croisent.


Sans chercher à comprendre le douteux message de Théo, sans  chercher à s'échapper de la nuit qui le dévore petit à petit, Valentine laisse  ses pas l'amener alors que s'effrite les finitions de sa mémoire. Il ne se rappelle de toute façon plus du départ des jumeaux. Des lampadaires, un coin de rue sombre, un lampadaire, un morceau de rue, un autre, une autre. Sa vue semble avoir pris un tournant mécanique et le schéma continue ainsi longtemps.

Eliott, tu devrais aller voir Cammy. Cammy Logan.
Théo

Quand est ce qu'il a reçu ça déjà...? Le temps qu'il écrase se distord, élastique malmené, réalité abîmée. Un lampadaire, carré de terre et une fois de plus, il a regardé dans voir: parce qu'en fin de compte, c'est souvent quand il lève la tête pour voir qu'il réalise qu'il n'a pas vu. Il a encore accidentellement égaré ses pas. C'était Hebi, Valentine. Un jardin, un parc. Où es tu encore allé. Sa propre réalité lui échappe, inlassablement, elle s'évapore là où il aurait dû savoir parfaitement la manier.

-Vous savez où se trouve la station ...


L'ombre d'une hésitation, puis l'hésitation en personne. Il ne se souvient plus de la station et s'il y en a toujours eu une d'ailleurs. Valentine a recouvert cet instant en un haussement imperceptible des épaules et son regard s'excuse, une main balayant d'un trait cette question sans fin.

-Finalement j'ai trouvé ce que je cherchais,
reprend-t-il paisiblement.

Foutaises. Tu n'admettrais pas que tu ne te rappelles même plus du nom de ta rue autrement que visuellement et encore ! Tu te fous de toi. Hm.
Un instant de rancœur envers lui même et il salue poliment son interlocutrice éphémère puis la contourne tranquillement, cette apparence posée derrière un environnement définitivement torturé. Le chat qui talonne la jeune femme attire son attention un instant, le faisant se retourner futilement pour remonter sur la silhouette qui l'accompagne. Valentine se dit qu'il a oublié Éloquence, qu'il n'a pas vu depuis un temps qu'il ne détermine pas. Se retournant pour reprendre -retrouver un semblant de direction, il finira par cesser sa bataille interne en se posant non loin de là, sur ce qu'il lui semble être un banc. Il ne sait jamais trop quand sa réalité se déforme mais quand elle le fait, il n'a pas d'autre solution que d'y plonger la tête en premier. L'espace et le temps se sont mis à tourner chacun dans une direction asynchrones et désordonnées.

Un psy qui va voir un psy est totalement hors-propos. Oui Valentine, tu t'es toujours foutu du monde mais cette fois, tu te fous de toi.


Dernière édition par Yui Valentine le Sam 14 Nov 2015 - 11:08, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyDim 8 Nov 2015 - 22:14

Un arrêt entre deux lampadaires, Dinah s'écarte pour se rapprocher d'un buisson. Elle ne se cache pas tout à fait et n'est pas vraiment attirée par les feuilles mortes. La rouquine suppose qu'il s'agit là du sixième sens animal, l'instinct qui pousse son petit corps à s'éloigner du sentier. Elle l'observe en souriant puis porte à nouveau son regard devant elle, simplement. Le sourire s'effondre alors, la lassitude s'empare d'elle. Les illusions, ça va pendant un temps mais là, elle aimerait juste continuer son chemin. Or cette fois, il y a de l'inédit : l'illusion prend la parole. Elle reste interdite un instant, le temps d'apprécier ce que son esprit ose lui envoyer. Il s'agit là d'une chimère trop attrayante, tellement proche de cette réalité qu'elle a connue que l'Australienne se laisserait bien une fois de plus à tenter d'agacer son toucher au risque de se voir plus déçue que jamais. Au lieu de ça, elle incline la tête dans un sens, mimant l'incompréhension en attendant de voir de quelle manière la douce vision va s'évaporer. C'est une autre phrase qui s'élève faisant ainsi pencher la tête de Cammy dans l'autre sens. Au travers des yeux noisette noyés dans le vague et la confusion, se fraye un semblant de clairvoyance, un petit quelque chose intimant à la demoiselle que l'expression visuelle de l'illusion, cette hésitation qui a pris forme humaine, est un peu trop pragmatique pour être ne serait-ce qu'imaginée. Mais ce mirage là, en tant que tel, qui ne semble pas la reconnaitre ne peut être "réel" dans le sens où elle l'entend, pour cette personne en particulier. Elle le laisse la contourner, l'ignorer et cette fois, elle fait de même. Le bruit des pas de Dinah la ramène plus ou moins sur terre, lui faisant rendant ainsi le sourire qu'elle avait précédemment égaré. La jeune femme reprend alors sa marche, franchissant un de ces petits portails à l'extérieur.

- Cammy !!!

Une voix trop familière, celle de sa mère, l'interpelle sans la voir. La rouquine revient sur ses pas, s'enfuyant à nouveau dans le dédale du parc. Fugitive le temps d'une nuit, elle se décide à grimper dans un arbre, ignorant que quelques mois plus tôt, l'idée de ne pas avoir les pieds sur le sol ferme lui était insupportable. Elle se débarasse de ses sandalettes et se meut de branche en branche dans les hauteurs du vaste espace vert du centre ville. C'est une version de Keimoo qu'elle n'aurait pu imaginer : vue de haut. Elle ferme les yeux, quelques instants pour se reposer.

VERTIGES D'EN HAUT
rencontre de la perfection


Je ne l'ai jamais vu. Il n’est pas d’ici. J'étire un sourire, ravie à l’idée de voir un visage différent pour casser mon ennui. De toute façon, je me suis trop bien cachée, ce qui fait de moi normalement la gagnante du jeu en solitaire entamé quatre heures plutôt. L’arbre qui m’a accueillie n’est pas très haut, mais une branche touffue bien placée m’empêche d’être vue de tout individu passant de près ou de loin. Il me suffit de l’orienter d’une certaine façon pour être à découvert. Et si c’est ce que je m’emploie à faire là maintenant, ce n’est pas pour admirer la vue comme habituellement, mais pour observer cet homme, allongé là, non loin de moi en contrebas. Il semble tellement paisible, que je refuse de me faire remarquer, même si ainsi, je loupe potentiellement la possibilité de faire une nouvelle rencontre. Je note alors son attitude, ses gestes, ses déplacements. Peu avant, pour m'occuper, je m’étais amusée à deviner l’identité des montagnards qui s’en retournaient au village, ou des paysans qui emmenaient leur bétail dans les pâturages un peu plus loin dans la vallée. J'avais aussi reconnu les formes massives de quelques mineurs sur le chemin du retour mais aussi de celles qui se lassaient de ces même bourrus sans élégance, exhalant la nature de leur brave labeur par les pores de leur peau. Je les ai entendues, quelques jours plus tôt, rêver à des températures plus chaudes, à des étoffes plus soyeuses et parfumées, à vouloir rire, chanter et danser jusqu’à la tombée de la nuit. Elles n’ont pas su ouvrir leurs sens aux merveilles que le Nord offrait au quotidien par ses fleurs sauvages, les neiges innocentes des Monts Brumeux, la musique de la faune aérienne qui me berce d’ailleurs par la présence non loin d’un merle à quelque distance au dessus de cette large branche sur laquelle je repose.

"Six", âme vagabonde. Allégorie : la Perfection. Orfèvre de Libra.

Un craquement et l'inconnu a fini par sentir ma présence. Quel gâchis. Avec ses cheveux noirs si bien disciplinés, et l'harmonie symétrique de cette pilosité sur le menton, il était une de ces oeuvres d'art complète comme on en voit sur certaines peintures. La perfection n'est pas ce que je préfère, toutefois elle m'intrigue. Il s'est tourné vers moi avec de l'exaspération visible, lisible même, sur ses traits. Sur mon perchoir, je me mets à faire la moue, anticipant d'avance la réprimande. J'ouvre la bouche et, prenant la parole, je le supplie de ne pas me gronder. La branche sur laquelle je me trouve finit par craquer plus violemment que précédemment, jusqu'à céder. Je me vois fondre sur l'inconnu, bras en avant, une main tenant le branchage cassé.  


Un miaulement non loin d'elle lui fait ouvrir les yeux. Dinah l'a suivi sur les hauteurs, faisant ainsi honneur à sa nature féline. Il n'y a plus d'arbre voisin, plus de voix criant son prénom ; elle redescend. Son chemisier est égratigné, sali, des feuilles brunes se sont aisément invitées dans la chevelure devenue indisciplinée par la chevauchée intrépide sur les écorces citadines dans ce coin de nature refaçonnée par l'homme moderne. Tôt ou tard, la Nature reprendra ses droits, évinçant tout artifice bétonné. Voilà désormais Cammy qui sillone entre les fins troncs et autres arbustes, tandis que Dinah passe devant elle en poussant quelques gloussements. Derrière un banc, elle se roule sur le sol. Sur ce banc, une forme, un être, un homme peut-être. Point d'inquiétude de la part de la petite chatte, Cammy avance donc mais accorde toutefois un regard en direction de l'occupant du siège public. Ses épaules s'affaissent, elle lève la tête au ciel, détaille la ceinture d'Orion le Chasseur, puis pousse un soupir. Ne pas céder à ses fantaisies ne change rien à la donne, elles reviennent toujours. Surtout que ce banc est le dernier sur lequels ils se sont retrouvés tous les deux, avant qu'elle ne fasse le plus merveilleux des voyages. Cammy finit donc par s'assoir à son tour, préférant la compagnie d'une illusion, au chagrin de lui résister.

- Vous m'avez fait renoncer à l'Eden, docteur Valentine. Lorsque je ne vis plus, vous êtes là pour me ramener. Vous savez comment vous y prendre. Psychologue des âmes perdues, des sujets d'analyses à foison. Mais au final, je n'étais qu'une patiente de plus parce que...

L'animation des sapeurs-pompiers est toujours audible, ils luttent pour que les logements alentours ne soit pas victimes de la tornade brûlante qu'elle a provoqué d'un battement d'ailes. Le Host-Club devra subir d'importantes rénovations.

- Tu es parti, toi aussi.

Un tremblement des lèvres, une larme qu'elle refoule. Ce n'est pas le moment de se laisser aller. Elle a conscience d'avoir presque tout perdu, mais visiblement, ça ne lui semble pas encore assez.

- C'est comme je l'avais prédit. C'est tellement... agaçant, d'avoir raison ! Qu'est-ce que je dois faire, hein ? Faut-il que je tente de mettre fin à mes jours pour que tu reviennes ? J'ai l'impression d'avoir plus de vies qu'un chat. A quoi bon revenir, si c'est pour souffrir encore ? Tu me l'avais interdit, mais finalement...

Deux yeux luminescents se braquent vers elle, lui coupant la parole. Dinah semble avoir trouvé de quoi se nourrir. Cammy étire les lèvres et se lève avant de se diriger vers sa compagne à quatre pattes, comme si elle n'avait jamais dressé de monologue.

- Oh Dinah, tu ne vas pas manger ça, c'est dégoûtant !

Six était un individu particulier qui n'a pas hésité à me faire mordre la poussière parce que j'avais commis l'impudence de toucher sa petite barbiche, véritable joyaux de sa parfaite personne. Dans ce Paradis qui était le mien, la perfection n'avait pas sa place. Même si ce garçon avait de l'or dans les doigts, même ce qu'il faisait était magnifique autant que délicat, rien ne lui semblait assez parfait à ses yeux. Il recherchait des talents, je n'en avais pas. Oh bien sûr, je savais cuisiner, coudre, broder, jardiner, lire, écrire et je connaissais de nombreuses histoires, mythes et légendes... Mais il se fichait de tout cela. La seule chose qui faisait qu'on était devenus amis, c'était mon obstination à ne pas devenir comme lui. Le fait de rester sur mes positions et clamer que l'imperfection, l'impression que chaque âme était une oeuvre inachevée, incomplète, tout cela.... me rendait presque parfaite à ses yeux. J'avais mon "presque" il avait son "parfaite", et ça nous convenait. Et puis.... il est reparti à Libra. Et je ne voulais quitter Rhode pour rien au monde. Mais encore une fois, j'aimerais avoir l'occasion de toucher sa barbiche à nouveau, pour le faire grogner, et ainsi en rire.

Rire....était ce que je préférais, lorsque j'étais morte.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptySam 14 Nov 2015 - 11:07

Ouvre les yeux, ferme les yeux. Une nouvelle présence.

Yui se tourne vers cette autre arrivée là, sur le banc. Elle n'était pas là avant, n'est ce pas? Sa mâchoire se crispe, il observe, il entend; est ce que c'est très différent que de voir et d'écouter ? Elle parle, il la trouve incohérente, et c'est dans une expression désorientée qu'elle l'abandonne là, soudain partie à la recherche de son chat. Les séquences changent sans transition, et elles sont souvent trop rapides pour avoir pu être douloureuses. Ou peut être que parfois, il ne les comprend pas, parce qu'elles dépassent le stade de la douleur.

Le docteur Valentine...?


Ici,
Là-bas



-Attendez !

Il se lève avec la curieuse impression d'être doté d'une consistance spectrale, tandis que ses certitudes basculent une nouvelle fois vers une perspective où, les autres semblent lui connaître une vie que lui même n'a jamais vécu. Ces derniers temps, son existence a tout de même pris un étrange tournant, tellement singulier que le silence vaut bien ce qui peut subsister de sa crédibilité. Se retrouver brûlé dans le sable du Désert Ocre était peut être le plus marquant. Il avait sans doute perdu la raison en se retrouvant à Libra avec le cadavre de Paradoxe dans les bras. Ou en sondant Éric, -ça oui, c'était marquant aussi. Alors Psychologue de ses âmes ...pourquoi pas ? Les vies, il ne les comptait plus: qui peut bien s'amuser à le faire, il se le demande.

Une brise douce et ses sensations le détournent de son environnement, l'air frais sur son visage, puis bientôt, c'est la rue qui s'éclaire de ses milliers de lampadaires, comme un jardin nocturne qui n'existera jamais. Le sommet de Libra, un point de chute, et quand il se réveille, c'est juste au moment où il n'a plus pied avec le sol. L'air, ce vent, le claquement des tissus contre sa peau. Il chute, il tombe, mais jamais ne se sera senti aussi léger. Un frisson parcourt son échine, il tressaillit: et ce que Kara Sakki a senti la même chose sur les rebords du toit de l'académie ?
Est ce que la fille étrange des bois va aussi se laisser tenter par le suicide ?

- Vous voyez bien que personne n'est parti, nous sommes là, non ...?


Il badine, il hasarde.
Il faut tisser avec les instants du moment, jusqu'à ce que tout s'écroule à nouveau. Et il a beau l'observer attentivement, le visage de cette patiente ne lui reviendra pas.

Alors ne flanche pas Valentine.

-Vous...

Quoi. Vous quoi ?
Invente, invente. Et si elle attentait à sa vie?

-Vous vous êtes fait mal!

Il a pointé de l'index les multiples égratignures. Sous les lumières des lampadaires, il remarque finalement ces feuilles emmêlés à ses cheveux, cette allure qui laisse à croire qu'elle s'est roulée au sol. Elle lui semble sortie d'un peu nulle part de la nature, un peu sauvage et à la fois étrange. Il a envie de lui en faire la remarque mais se retient d'outrepasser les mœurs, comme s'il l'avait toujours fait.

Cammy !!!

Une voix résonne au loin et Valentine lève un instant la tête, distrait. Le message de Théo est déjà loin dans sa mémoire diffuse, et la lumière nocturne le surprend davantage parce qu'il ne se souvient plus du déroulement de sa journée. Il revient alors sur la seule âme qui vive dans ces parages -autre que ce félin furtif qui l'observe tranquillement, assis au sol. Éloquence...? Consternation. Eloquence est blanc, Valentine. Sonoko...? C'est bien sa voix. Il ne lui a jamais dit combien elle l'agace à l'approcher sournoisement comme si elle en savait plus sur lui. Mais toi Valentine, tu sais quoi au juste.

Il a souri à la jeune femme. Son regard balaye une nouvelle fois les lieux, il se rappelle vaguement qu'il a commencé une conversation.

-Est ce que tout va bien ? Le quartier Bougu n'est pas loin, vous ne devriez pas y traîner seule, le soir.

Oui mais Valentine, vois-tu, ce n'est pas Bougu.

Son âme vacille.

-Par hasard... Vous sauriez par où je peux retrouver une station de métro la plus proche ?

Il lui faut rentrer, les étoiles sont éteintes.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyVen 20 Nov 2015 - 11:35

Accroupie, elle tente de retirer de la gueule de Dinah - qui manifeste en grognant sa résistance - le pigeon à moitié décharné et en partie décomposé, à en juger par la présence non négligeable d'asticots dans les chairs du volatile nauséabond.

- Come on, give it to me ! I won't let reapers take you, not now !

Mais Dinah parvient à s'enfuir avec son dîner empoisonné. Observant le buisson par lequel la féline s'est extirpée, elle l'imagine s'embraser sans se consumer. Les flammes qu'elle seule voit jaillir entre les branchages dégagent une beauté mystique qui caresse sa rétine, réchauffant l'intérieur de son corps pendant quelques instants avant qu'une voix l'extirpe de la version de cet extrait de la Génèse qui lui a été adressée. Ses pieds nus depuis sa balade dans les semi-hauteurs du parc ont oublié l'inconfort. Hors du sentier, en communion avec une terre partiellement humide, les orteils se mouvent, se contractent et poussent la demoiselle à faire volte face. Le même individu que précédemment est là, des expressions surjouées se lisent sur son visage. Son apparence, dans son entièreté, semble froide mais elle ne l'est pas. Elle est juste creuse. Pas assez pour être vide, mais loin d'être remplie. Ce réceptacle bichromique semble être une bouteille à la mer cachant un message qui ne demande qu'à être découvert pour exister. Un message sans mots.

S.O.S.
Save Our S....


#Saladdays.

Ce jour là, quelqu'un a frappé à la porte de ma petite maisonnette. Oh, c'est une chose plutôt courante et il n'y avait que la partie inférieure de ma porte en chêne qui était fermée. Mon intérieur est plutôt chaleureux, même si mon logis n'est pas très grand. Malgré tout, j'aime laisser la porte à demi ouverte pour profiter de la lumière, de la brise, et de façon générale, de la forêt qui chante. Mais également pour ne pas que quelque résident de cette même forêt ne s'incruste chez moi pour me libérer de quelques victuailles se trouvant à proximité de leur gosier.
Ce jour là, un individu d'une haute taille, très large, très impressionnant et aux cheveux d'or est venu à moi. Il est de ceux qui aiment voyager lorsqu'ils en ont l'occasion, pour se détendre - on appelle cela "des vacances" je crois - et à en juger par ses manières il était évident qu'il venait de très loin. De "là-bas". De la ville. Il était courtois, avec de la sévérité dans le regard mais également sur ses gardes, comme si il était poursuivi par un monstre des marais. Je l'ai donc invité à entrer pour se détendre, délaissant ainsi le nettoyage de mes pommes de terre. J'ai fait du thé, que j'ai parfumé de quelques fleurs de jasmin, séchée de mes mains. Ce thé m'avait été offert par l'épouse d'un berger de Rhode trois jours plus tôt en échange du service que je lui avais rendu en retaillant son gilet. Je ne fais pas souvent de thé, seulement lorsque j'ai des invités. Et j'adore avoir de la visite. Surtout lorsqu'ils viennent de loin.
Ce jour là, cet homme qui portait le nom d'un dieu sans le savoir, allait passer de divinité imposante à la délicatesse d'une simple âme dans toute sa simplicité.


Thor, âme damnée. Tribut payé : la Haine. Lieutenant de la garde Impartiale de Thémis.

Je lui ai donc offert le logis, malgré l'exiguité de ma maison. Thor a protesté un peu, mais il a cédé. Les nuits de Rhode sont aussi froides que les journées sont douces. Il a insisté pour que j'accepte quelque or, en vain. Je n'aime pas le principe d'argent, de monnayer les choses avec du métal froid et dur. La fortune sépare les êtres, elle les rend violents, cupides, avides de tout ce qui ne leur appartient pas. Alors Thor m'a coupé du bois, de belles bûches comme rarement j'ai pu en avoir. Il faut dire aussi qu'avec mes bras chétifs, je ne me contente que de minces branchages en général. Et puis...il m'a aussi donné deux pommes. Lisses, brillantes, quasi parfaites, mûre à point pour une succulente tarte. Quel merveilleux présent. Nous les avons préparées tous les deux, ainsi j'ai pu constater son aisance avec le fil d'une épée. Mon couteau à la lame émoussée n'aurait jamais pu offrir d'aussi belles tranches de ce fruit que j'aime particulièrement. Pour le reste, c'était plutôt une catastrophe pour lui et je n'ai pu retenir un rire en constatant la farine masquer son visage.
Nous avons passé une journée de plus ensemble, mais je me suis fait gronder par le paysan que je devais aider ce jour là. Il est venu me chercher directement et j'ai été surprise de voir Thor se joindre à nous pour rattraper le retard causé par mon absence. Ce qui correspond à quelques heures de labeur pour moi, n'a pris que quelques instants que je ne saurais calculer dans ce monde ou le Temps n'est que mythe et où les mythes sont réels. De retour à la maison et après un copieux diner agrémenté d'une part de notre fameuse tarte aux pommes, le géant aux cheveux d'or s'est endormi sur le fauteuil. Cette fois, il était complètement détendu, les traits à peine marqués par la fatigue, mais certainement par la satisfaction du travail accompli. Cet être à qui Thémis avait ôté toute haine dormait...du sommeil du juste.


Cammy penche la tête sur le côté sans comprendre le sens des mots qui viennent à ses oreilles. Elle cherche sur ses bras, ses jambes quelques signes de douleur, mais elle ne sent rien. Non, elle n'a pas mal. Les égratignures sont loins d'atteindre le niveau des blessures passées. Elle n'a pas oublié, elle. Malgré le mur dressé à l'intérieur de son crâne, solide comme un roc, elle se souvient. Mais cette illusion ressemble trop à l'original, et encore une fois, il la torture. Elle ne s'est pas fait mal, mais lui, il lui fait du mal. Cammy tourne alors le dos, comme il l'avait fait lui-même à l'époque, il y a quelques siècles. Elle se dirige vers la sortie du parc, un peu trop proche de l'incendie, mais qui se trouve également la plus proche de la station de métro. Elle lève le bras, désignant ainsi une direction à suivre.

- A 200 mètres. Elle ne vous sera d'aucune utilité, le service est fermé depuis... une demi-heure je suppose.

Elle montre alors une autre direction, telle une girouette se laissant guider par un vent léger tandis que les flammes semblent prendre congé.

- Il y a le quartier des hôtels à quelques blocks d'ici, près du musée. Le plus proche étant le capsule-hôtel, à mi-chemin entre les bars et l'hôpital.

Hiryuu, quartier que Cammy connait sur le bout des ongles pour en avoir été guide touristique durant les saisons froides. Aujourd'hui, elle ne demande qu'à le quitter pour fuir ces souvenir que lui est parvenu à éradiquer. Elle tourne les talons, et s'apprête à nouveau à se fondre dans les profondeurs du parc.

- Avant de partir, dites-moi... Etes-vous réel ?


Save our story. Save our space. Save our second. Save our spirit.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyJeu 26 Nov 2015 - 8:25

Une odeur brûlée, de la fumée au loin. Des éléments tantôt qui disparaissent puis réapparaissent sans raison dans son champ des perceptions. Valentine est troublé de remarquer un feu là, alors qu'il est certain de ne pas l'avoir vu tout à l'heure. Il a rentré ses mains dans les poches de sa veste et a dégluti silencieusement. Le sol, malgré sa stabilité, s'est mis à s'effriter sous ses pieds. Le décor s'effondre, les repères s'effacent, il y a ce vide étrange qui guette vicieusement chacun de ses faux pas, et qui sait comment le hanter des heures durant. Ce tourment, un calvaire, un autre, encore un autre, Sud devient Nord qui lui même dépend Ouest. L'Est se voudrait Nord mais l'Ouest... Au final Valentine. Est ce que tout ça est réel. Est ce que ça l'est ?

Valentine a eu un regard peiné qui s'est voilé derrière un sourire apaisant. Il a semblé hésitant, et a ravalé une première réponse monotone pour la retravailler. Finalement il a sorti les mains de ses poches pour les ouvrir en signe d'innocence.

-En ce moment...? Je me le demande.

Il a eu un rire sans joie mais a gardé cet air posé.

-Je me dis que oui maintenant et je vous dirai que non tout à l'heure, a-t-il simplement rajouté, sans réellement donner de tonalité à cette conversation étrange comme si une suite n'était pas nécessaire.

-Vous partez dans la même direction ?

Attendez, ne partez pas. Oui Valentine tu es bien incapable de te situer, alors que tu as l'impression de savoir, tu ne sais vraiment rien. Une capsule ... Hotel ? Il n'a aucune idée de quoi elle parle.

-Est ce que je peux vous proposer quelque chose ? a-t-il lancé en hésitant. Après tout ce pourrait être très mal interprété. -Quitte à rejoindre la ville, est ce que et bien. Nous pourrions faire un bout de chemin ensemble? Je me dirige vers Hébi.

Ne le prenez pas mal, je suis étranger à ces lieux encore. Personne ne s'en est rendu compte, mais il y a des choses asynchrones qui ne se concordent plus mutuellement.

-Et vous pourriez me dire dans quelques minutes si j'existe vraiment.

Un sourire à peine plus large est apparu, éphémère. Questionnements et remise en cause. D'étranges personnalités ont commencé à lui tourner autour, un étrange Rônin aux bonbons multicolores, une fillette aux orbites vides contenant la tristesse des univers, un paradoxe dans ses bras, Thor. Coda. Thémis. Thémis... Thémis. A côté, même Otagame lui paraît la plus raisonnée. On lui a dit qu'il revenait de loin comme s'il avait un jour cessé d'exister et depuis, sa propre réalité n'a cessé de se fondre dans des eaux troubles.

-Et vous, l'êtes vous ? s'est il entendu dire, calmement, se forçant à la concentration.

Il remarque encore les égratignures superficielles sur les bras de la demoiselle. Il remarque ce regard posé sur lui, exactement comme s'il avait cessé d'être, un jour. Ses remarques internes s'arrêtent à l'approche d'une voix. D'une nouvelle présence.

-Vous...
-Cammy mais enfin !!!

Une voix forte, une voix empreinte d'émotions. On accourt vers eux. Valentine, surpris, laisse passer cette femme qui se jette presque sur la rouquine. Dans un sourire plat et factice, Valentine s'est tourné pour se diriger dans le sens qui lui a été indiquer d'aller. Il se passe vraiment des choses auxquels sa compréhension ne raccroche plus. Oui voilà. L'hôpital, il pense savoir où situer ça par rapport à chez lui.

Dans le fond peut être que ça a toujours été ainsi.

De E. Valentine:
Bien évidemment.

Parce qu'il était trop orgueilleux pour admettre qu'il ne détenait plus sa propre vie; pour admettre qu'il n'avait plus de traces de tous ces éléments qu'on lui liait en permanence.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyLun 30 Nov 2015 - 0:55

Et c’est une demi-réponse qui lui est renvoyée. Une réponse qui a l’allure d’une question, une réponse à la Valentine. La demoiselle étirera alors un petit rictus sarcastique. Les formes changent mais le fond reste et quand bien même ce Yui là ne serait pas réel que Cammy prendrait bien le risque d’aller au delà de ce qu’elle imagine. Le fait est qu’elle devine toujours les réponses. Or ici, elle est presque surprise. “Presque” parce qu’elle ne parvient pas à l’être totalement. Il est trop ressemblant, et ce rire qu’il manifeste est trop douloureux à l'instar de ce vouvoiement qui la déchire de part en part. Ce n’est pas le petit jeu d’un psychologue à sa fausse patiente. Elle n’est pour lui qu’une inconnue. Définitivement, elle n’a jamais connue cette version de l’illusion.

Et puis, vient la question tandis qu’elle s’éloigne pour ne pas s’infliger plus de peine. Puis la proposition. Elle cesse alors sa marche, se sentant étrangement vivante pour le coup. Cela faisait des jours, des semaines, des mois. Une éternité qu’elle n’avait plus senti son coeur battre. Elle avait oublié ce que ça faisait. Elle glisse sa main contre sa poitrine, puis ferme les yeux. Boum boum, boum boum, boum boum. Elle se revoit alors devant une porte simpliste, peinant à y toquer, un plateau sur lequel un service à thé et une statuette sont posés. Un parfum d’agrume flotte dans l’air, mais le miel est manquant. Il manque toujours quelque chose.

PERCEPTIONS DECALEES
illusions lucides



Les souvenirs remontent ainsi le cours du temps jusqu’à cette rencontre, jour de chaleur, de soleil après la pluie et d’échantillon de mort. Un thé vert, une véranda, l’absentéisme de l’un contre le retour récent de l’autre. Cammy Logan a l’habitude de disparaitre quand les choses la dépassent, lorsqu’elle ne maitrise plus rien. Ni sa personne, ni sa perception des autres, pas même celle du monde. En ce moment, elle ignore si elle vit, si elle y est restée, dans ce taxi. La présence d’une Psychê dans son être la pousse à sourire, à rire, à grimper dans les hauteurs, à marcher puis courir à pieds nus, à tendre la main vers quiconque nécessite de l’aide. Mémoires de tornades, de bâtiments écroulés, de paysages dévastés, de l’habitacle d’un véhicule qui la dévore, de villes trop éloignées, tout….tout est mélangé.

Fêlure. Trouble. Tout comme d’être près de cette jeune fille, petite brunette étrangère aux cheveux mi-longs et à la cicatrice en forme de croix lui traversant le corps.

Tout le monde a remarqué son arrivée mais personne n’a osé l’approcher parce qu’elle même n’a approché personne. J’ai donc été missionnée pour le faire. J’ai ainsi découvert la silhouette longiligne d’une fille plus grande que moi. Nous ne nous ressemblons pas. Elle est née du néant, un big bang à elle toute seule et elle brûle mes perceptions par la fragilité de son existence. Elle vagabonde, mais est cultivée. Nous partageons la même passion pour la quête de connaissance. C’est grace à ce petit point que nous avons en commun que j’ai réussi à l'aborder. Elle me pousse à battre des ailes déclenchant ainsi toute une kyrielle d’évènements connus de nous seules. Elle qui est issue de rien, provoque en ma présence une infinité de possibilités que j’aime à développer à l’aide de questions et de réponses. J’aime la solitude, elle en est terrifiée mais fascinée. Nous n’avons pas forcément besoin de mots pour communiquer. Des gestes, des objets, de simples regards nous conviennent.

“Paradoxe”, âme vagabonde. Allégorie: Le trouble. Bibliothécaire de Libra.

Rose délicate au coeur d’un océan de ronces. Elle parle par énigmes que je résouds. Elle est le battement de cils du regard que je porte sur la nature, ses bienfaits. C’est parce qu’elle semble ne pas y accorder d’importance que je trouve justifiée l’existence chaque millimètre de chaque parcelle de ce monde. Elle m’a fait découvrir l’errance, je lui offre la destination, le but. Je comprenais les fonds et non les formes, et elle l’inverse. A nous deux, nous avons donné un sens au monde. Je suis Psychê, je suis l’âme, je suis l’esprit. Paradoxe est le corps, la déchirure, la fêlure. Elle existait sans vivre. Mais moi, bien moins que ça, sans les autres, sans elle...je n’existe même pas. Je songe, je rêve, j’imagine une vie que je n’ai pas. C’est quoi “vivre” d’ailleurs ? Je veux errer aussi et exister.


“Et vous, l’êtes vous ? “


Elle s’apprête à le rejoindre, déjà elle amorce quelques pas. Des questions identiques, des questions intérieures que l’on se pose, une identité que l’on recherche. Qui sommes-nous, au fond ? Le fond, la forme...plus n’a d’importance. L’histoire est en passe de se recréer, c’est un film qui se rembobine. La salle obscure de deux existences, dans ce petit cinéma de quartier, celui d’un Temps qui s’écoule et qui se fiche de tout...cette salle pourrait-elle diffuser une nouvelle histoire ? Et si le scénariste, là haut, n’avait tout simplement pas aimé le nouveau tournant de l’histoire et avait tout simplement décidé de tout réécrire ? Pourquoi dans ce cas, Cammy doit-elle être là seule à se souvenir ? Ou bien, pourquoi a-t-il fallu que Yui Valentine oublie ? Elle s’approche alors, elle veut marcher à ses côtés, comme il l’a proposé, jusqu’à Hebi peu importe, elle le suivrait au bout du monde. Ne l’a-t-elle pas déjà fait ?


“Vous…”


Il y a quelque chose. Un doute, une émotion. Peu importe laquelle, mais en cet instant, l’illusion éclate. La porte de l’appartement s’ouvre, elle avance mais le couloir se déforme et surgit alors un visage familier.

- Cammy mais enfin !

Des cheveux courts, roux, une femme d’une cinquantaine d’année fait barrage à son avancée. L’homme n’est plus dans son champs de vision et le regard noisette de Cammy Logan s’efface peu à peu à mesure que sa mère lui arrache la vision de son bonheur, qui disparait alors.

- Nous te cherchions partout, ça fait une heure qu’on hurle après toi dans le quartier…

Elle s’égosille mais bientôt, Cammy ne l’entend plus. Elle s’écarte et regarde la silhouette d’un mirage qui s’apprete à disparaitre. Sa mère est aux bords des larmes, et la jeune femme n’entendra que ses derniers propos murmurés.

- Reviens nous mon enfant… Il ne sait plus qui tu es, c’est ainsi. Laisse le partir…
- Wade !!

Seth Logan intervient, furibond et prend son épouse à part. Pour Cammy, c’est une autre machinerie qui se met en route, elle entreprend alors de se mettre à la poursuite de Yui Valentine, elle veut être sûre.

- So you choose…him over your own parents ?!
- Wade, stop ! C’est trop tôt, elle n’est pas prête à l’entendre !

Cammy se retourne, un sourire aux lèvres.

- Maman, Papa. Vous le voyez aussi, n’est-ce pas ? Je me fiche du reste. Ne me cherchez pas cette fois, je vous contacterai quand je pourrais.
- Mais que vas-tu devenir ? Tu n’as plus de toit, plus de travail, plus aucun bien…
- Ne t’inquiète pas Maman ce n'est que matériel et puis, Dieu... me protège. Il faut que j’y aille. Je vous aime.

Elle embrasse ses parents, et sans se préoccuper plus des lamentations de sa mère, elle foule le sol hâtivement, courant un grand sourire aux lèvres et ainsi jusqu’à atteindre cet homme dont elle ne supporte plus de voir le dos.

- Attendez ! Ne partez pas !

Essouflée mais ravie, elle se stoppe devant lui, débraillée de partout, les textiles de sa robe rose pâle lui arrivant au genoux, salis et voletant au grès du vent qui se lève. Elle essaie de reprendre sa respiration, l’effort physique n’étant pas sa spécialité, encore moins depuis que la rate lui a été retirée. Plus fragile qu’elle n’était avant, elle ignore le mal qu’elle inflige à son corps car elle ne le ressent pas comme il faudrait. L’insouciance est une nouveauté. Quand on perd tout, tout n’est que nouveauté. Une nouvelle vie qui nait de cendres. D’un pas grand chose, une infinité de choix. Le paradoxe de Cammy Logan.

- Peu importe que l’on soit réel ou pas… “Ne bougez surtout pas…”

Dit-elle entre deux fortes inspirations. Une impulsion soudaine, elle tend la main vers l’homme. La trotteuse remonte le cours du temps dans le sens inverse, à toute vitesse. L’espace ne bouge pas, il n’y a pas d’académie, pas de véranda, juste une personne qui sait qui est l’autre, mais pas réciproquement. Quel est l’effet de reconnaître une personne qui ne vous connait pas. Tout dépend de la profondeur de la “connaissance”, mais en fin de compte, peu importe. Il suffit juste de recommencer. Il ne sert à rien de lutter pour faire revenir un souvenir. Il reviendra de lui même. Ou pas. Mais ce qui n’est plus n’est pas forcément perdu. C’est ainsi qu’elle pensait, là bas, à Rhode. C’est ainsi qu’elle parvenait à garder le moral alors qu’elle n’avait plus le moindre souvenir de sa vie passée. Sauf que désormais, Cammy les a récupérés, et elle doit vivre avec, sans personne pour partager avec elle le meilleur.
La main qu’elle tendait timidement initialement vers le bras - tandis que l’écho des paroles que Yui Valentine lui avait renvoyés à une époque lointaine vient de frôler ses lèvres - remonte lentement pour se poser sur sa joue. Toujours, l’illusion se dissipait peu après ce geste. Quelques vers lui échappent naturellement. Souvenir du songe...d'un soir d'été.

    Si nous, les ombres que nous sommes,
    Vous avons un peu outragé,
    Dites-vous pour tout arranger
    Que vous venez de faire un somme
    Avec des rêves partagés.
    Ce thème faible et qui s’allonge
    N’a d’autre rendement qu’un songe.



Sauf que cette fois, le mirage demeure. Les moeurs occidentales ou orientales disparaissent, plus aucune ne subsiste.

- Vous êtes ?

Inversion des rôles, elle lui ôte la réplique qu’il lui avait lancée le soir de leur rencontre, et elle la lui renvoit en étirant tendrement le coin des lèvres.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyJeu 3 Déc 2015 - 1:26

C'est une scène de famille qu'il délaisse pour poursuivre son chemin. Quoiqu'il ait pu se passer, les parents ont retrouvé leur fille, bien qu'elle ne lui soit pas semblé si éperdue. Sans chercher à comprendre davantage, Valentine recentre son attention sur les notifications de son portable. Un appel manqué.

Attendez.

Il se retourne alors qu'il s'apprête à rappeler Eliane. Ces derniers temps, cette dernière vient souvent lui rendre visite pour une raison obscure qu'il n'élucide pas. Elle et son frère, comme s'il était parti puis revenu de quelque part d'inaccessible. Comme si, comme si. Leurs regards à son égard ont changé, le sien à leur égard tout autant.

Comment vous sentez vous Monsieur Ro... Valentine ?

Il n'avait cessé de répondre par la positive jusqu'à ce que cette récurrence le lasse au point de ne plus y donner de suite.

-


L'essoufflement de la demoiselle inquiète, autant que sa présence à nouveau devant lui. Surpris, il la laisse venir; cette impression d'avoir disparu ou de sembler disparaître, voilà qu'elle revenait lui coller à la peau comme si tout avait changé. Pourtant, il avait toujours été là et son histoire ne s'était jamais arrêtée, bien que ponctuée de mondes oniriques un peu trop réels pour pouvoir prétendre à une imagination débordante. Dans la réalité de Yui Valentine, ces frontières là avaient sauté et il le taisait pour éviter de devoir à s'expliquer. Un psychologue avec ce genre de tare, ce n'est plus très crédible, Valentine. Et alors, ça le rendait fou.

Il s'est tu.

Devant lui, cette jeune femme lui paraît étrangère à ce monde, décalée, déphasée d'un contexte urbain. Elle s'approche encore, il ne sait pas très bien s'il a envie de savoir ce qui va se passer, il n'a pas très envie de rencontrer une autre étrangeté comme Opium, parce que ça le fascine un peu trop au point d'en oublier sa raison. Les choses qui l'absorbent, l'éloignent de la réalité, déforment ses visions. Mais de toute façon, il n'en a plus vraiment le choix parce qu'elle arrive jusqu'à lui poser une main sur la joue. Ses mains, ses avant-bras, ses bras sont striés par ci par là de manière inexplicable et cet essoufflement entre ses lèvres comme si elle avait couru plusieurs kilomètres...  
Et puis quelques vers accompagnés d'un sourire lent, un regard insistant qui s'attendrit.

Yui a rendu un sourire posé, bien que ça n'ait pas duré.

-N'allez vous pas inquiéter vos parents?


Mais elle lui répond par une question et le déstabilise une fois encore. Il ne sait plus combien de fois elle le lui a été posée sous tous les angles tel qu'on s'adresse à un esprit éméché ou à un fou.

-Et bien... Valentine.

Et Yui. Et Eliott. Mais il ne se souvient plus vraiment en quelles circonstances ça c'est fait. Il a gardé cet air paisible et a fixé la jeune femme.

-Mais cela vous le saviez déjà, n'est ce pas. Alors comme ça, finalement nous sommes réels, vous comme moi.

A quelle époque l'a-t-il eu en tant que patiente, sa mémoire, disque rayé, ne trouve plus le bon filon pour remonter à la source. Le vent se levant lui rappelant leur entourage, Valentine a doucement défait le contact de la demoiselle et a jeté un œil sur son accoutrement. Elle s'appelle Cammy, et a été activement recherchée par ses parents ces dernières heures malgré son âge apparaissant comme étant capable de pouvoir se débrouiller seule. A moins que justement non.
Il n'en sait rien et ne pas savoir l'énerve au plus haut point sans qu'il n'y ait rien d'autre qu'il puisse faire contre lui même.

Finalement, il décide que le cas Cammy l'inquiète car elle pourrait avoir été maltraitée pour x-y et ou z raisons. Il se fait sombre et Valentine se pense être correcte pour savoir qu'elle ne risque pas grand chose en restant avec lui. S'il avait su quelques temps auparavant qu'il avait causé à leur perte, il penserait aujourd'hui plus la même chose. De toutes façons, il n'est plus apte à être le psy de quelqu'un, pas plus de lui même, non? C'est bien la raison pour laquelle il n'exerce plus, n'est ce pas ? A quoi bon se poser ce genre de question, Valentine. Il n'y a plus de détails dont tu te souviennes pour comprendre les tournants de ta vie.



Le vent se lève.



-Vous lisez donc du Shakespear en ce moment?

Il retire sa veste et la pose sur les épaules de la jeune femme. Au final, tout pourrait être la cause-conséquence de tout. Il secoue imperceptiblement tout en continuant de marcher. Il se demande comment il est arrivé dans ce parc, à quelle jonction de sa vie il a commencé à rater ses propres transitions. Bruissement des arbres, chant des feuilles murmurés dans une cantate inconnue, le vent se lève.

Illusions brouillées, il se rappelle pourtant avoir vu une créature rose disparaître dans les haies. Avec Odoshi. Il fronce les sourcils et ferme les yeux un instant pour laisser un paysage apocalyptique prendre petit à petit effet dans leur monde. Les cheveux de la jeune femme volent et sa robe abîmée lui donne la sensation d'une folie sauvage qui va bien avec la nature du moment.
Certes. Mais cesse tes conneries, Valentine.

-Est ce que je vous raccompagne quelque part ?

L'hôpital. L'hôpital pour retrouver son chemin.





-Bonjour Cammy... Je m'appelle Théo Rochefort, je suis le frère de Valentine.

Il avait dévisagé cette jeune femme si faible et encore alitée. Il avait appris qu'elle se trouvait avec Eliott dans ce taxi et n'avait jamais pu la voir alors qu'il gardait le contact avec ses parents depuis l'accident qui devaient les mener vers un nouveau revirement.  

-Eliane m'a parlé de vous.

Il a attrapé une chaise et est venue se poser à côté d'elle. Il ne pouvait pas ignorer cette fille qu'Eliott avait invité à Paris, ni ce prénom qui lui avait été rapporté alors qu'on les extirpait des décombres et qu'il hurlait aux réveils des douleurs de son corps. Avant ce qu'il était devenu. Avant ses regards vides de toute réalité, avant sa traversée hors du monde.

Alors oui, il lui fallait rencontrer Cammy Logan.




Cammy
Ce jour là Valentine abritera cette créature des bois dans son appartement à Hebi, retrouvé depuis le chemin vers l'hôpital. Contre la tempête se levant et l'attitude elfique? -comment donner une meilleure description à cela, il n'avait pas pu se résoudre à la délaisser sur son sort sous ce temps infernal. Ce jour-là...? Non Valentine. Hier. Juste hier.

À l'intérieur, ce sont des meubles disposés par Eliane et Théo, un quelque chose qui ressemble au final plus à un intérieur d'hôtel qu'autre chose mais Yui n'a pas la foi de réagencer les éléments comme bon lui semble. Ils n'ont jamais eu les mêmes goûts et un sentiment éphémère flotte à travers toutes les pièces équipées: il ne resterait sans doute pas très longtemps ici. Ça lui fout des sautes d'humeurs colériques et des palpitations au cœur à chaque fois que son regard tombe sur tout cet encombrement censé faire office de décor. Ça lui rappelle qu'il déteste les hôtels de son frère et qu'il faudrait qu'il change malgré ces années d'agacement passés sous silence à vivre dans ce maudit coin bling bling de Hébi.

Tu attends quoi pour changer? Dis que tu ne le sais pas. Dis qu'il y a quelque chose qui te retiens et que tu n'avoueras jamais parce que tu ne sais même pas ce qui te retient ainsi. Tu délires à chaque fois que tu ne fermes pas l'œil de la nuit et en plus d'oublier tu as peur de savoir ce qui s'est passé avec Paradoxe dans l'autre appartement. Oui, celui à Libra.

Valentine s'est assis d'un bond comme si la mort lui sautait au visage. Il a entendu du bruit dans la pièce à côté qu'il a laissé à la fille.  Et chacun de ses pas frôlés au sol est un nouvel élément qu'il tente de recadrer entre la disposition des meubles qu'il commence à s'approprier. C'est angoissant. Il s'est nerveusement gratté la cicatrice qui longe son avant bras parmi toutes les autres qui ont commencé à s'installer sur son corps, puis s'est levé pour faire mine d'aller se chercher un verre d'eau. Mais il n'a absolument pas soif.

D'un air posé s'est dirigé vers la cuisine sans jamais croiser personne.

Quand son cerveau partait en fumée ainsi, il lui fallait trouver autre chose à faire, autre chose à se préoccuper. Il a saisi un feuille de bloc note posé là ...? Théo ? sa main saisit vivement le stylo et raye la seule note qu'il lit malgré lui.

Voir Cammy Logan.
De: Théo.

Non.

Voir Cammy Logan.
De: Théo.

Il rature parce que Théo veut l'obliger à voir une fille dont il ne se souvient de rien. Il rature méchamment et commence à griffonner nerveusement son plan de la tête.

Parler à Paradoxe, se confesser à Thor, éviter de se faire shooter dedans, ne plus aller sur les bords du toit de la citadelle, ne plus boire d'alcool, éviter Opium. Brume, Coda, Odoshi. Tous les éviter, ces esprits sortis de ta tête. Ne pas écouter Lacrymosa, ne pas fréquenter les déserts ocres, tuer Thémis.

Tuer Thémis.
Éviter les dieux dans son genre.

Il faut revoir Thor.

C'est le seul qui a la tête suffisamment sur ses épaules dans ce monde de fous.
Valentine se mordille nerveusement l'intérieur de la joue, sa main froisse d'un coup la  liasse de papiers, emportant dans la brusquerie de son geste d'autres carrés de feuilles vierges. Et alors qu'il a très envie de balancer tout ça loin de sa portée, il retient son geste au dernier moment en sentant la nouvelle présence non loin de là.

Il cille et laisse tomber mollement sur le sol stylos et folies, s'infligeant un brusque retour à la réalité avec un pouls qui s'accélère comme s'il venait de se sortir d'un mauvais rêve. Il n'est pas seul.

-Tout va bien ? a-t-il doucement demandé.

Elle l'inquiète parce que quoi qu'elle ait, il n'est pas en mesure de la soigner hors de ses multiples égratignures superficielles déjà revues hier soir. Il est alors 3h56 du matin et la tempête fait rage.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyJeu 3 Déc 2015 - 22:49

C’est une impasse dans laquelle elle s’est engouffrée, et le mur qui lui fait face ne peut que la forcer à faire demi-tour. Elle n’a pas les capacités pour escalader le mur. Trop petite, trop faible. Elle s’imaginait certainement trouver là une petite issue, une porte dérobée, un trou de souris au travers duquel elle aurait éventuellement pu s’immiscer mais le mur n’est pas fait de briques. Il est en béton armé. Shakespeare n’a eu aucun effet. Valentine connait l’auteur, pourtant ses vers ne lui rappellent rien. C’était juste un chemin rempli d’espoir que Cammy se voit contrainte d’abandonner en rebroussant chemin face à un pragmatisme trop enraciné dans le sol.

Leur regards s’étaient échangés, et rien n'était resssorti du gris de celui de l’homme. Ce n’est pas que le souvenir qui lui manque. C’est bien plus que cela. “Ca, vous le saviez déjà.” Trop froid, trop impersonnel. Poli, formel. Le sourire de la rouquine perdure, tandis que le regard se déshabille de sa tendresse pour se draper de trouble. Une autre fêlure craquelle l’abîme de Cammy Logan la poussant à détourner le regard avant qu'il ne se brise, alors que Valentine la force durement, mais avec délicatesse, à se détacher de lui. Elle enregistre le toucher glacé, avant la séparation. Pour ne pas oublier. Elle sait désormais qu’il n’y aura plus de tel contact. Le froid de Yui Valentine était son plus ardent souvenir tactile. L’homme qu’elle a connu, dorénavant n’est plus. Elle prend le courage de poser ses noisettes sur lui une dernière fois, comme avant l’impact.


- Peut-être sommes-nous réels, et que rien de ce qui nous entoure ne l’est.


Un “au revoir”.
Et le mirage a fini par disparaitre.



LE VENT SE LEVE
il faut tenter de vivre


- Enchantée, Valentine.

Elle se décale de lui et se met à marcher, sans but particulier, à ses côtés. Disons que c'est plutôt elle qui le raccompagne. Ainsi vont les premiers pas de l’errance. Yui aurait laissé la demoiselle là que le résultat aurait été le même. Le parc change alors de couleur : Cammy voit se dessiner au sol quelques paillettes, reflets des lampadaires sur les graviers. Elle tourne la tête vers les buissons et étire un sourire espiègle en reconnaissant la silhouette camouflée d’une boule de poils sombre qui la suit. C'est à se demander qui d'elle-même ou de Dinah a adopté l'autre.

- Pour répondre à votre question de tout à l’heure, disons qu'il y a quelques citations qui m'échappent, parfois.

Cammy n’ose dire qu’il y a plus court que le chemin qui passe par l’hôpital pour se rendre à Hebi, qui se résume à poursuivre le sentier du parc, ce dernier couvrant plusieurs quartiers de la ville. Elle désire toutefois laisser Yui maître de la situation et se contente d’avancer jusqu’à ce qu’il décide poursuivre seul son chemin. Hors, cela ne se fait pas et au final, elle découvrira la nouvelle adresse de l’homme. Un quartier qui respire la fortune, les hautes classes, toute la superficialité et l’hypocrisie qui ne s’accordent en rien à la personnalité qu’elle a connu de cet homme. Beaucoup de trop, de superflu, le quartier Hebi est à la ville ce que les “Populaires” sont à l’académie. C’est beau, mais c’est fade, et creux. Elle ne se fond pas un seul instant dans le décor, avec ses pieds nus et les quelques feuilles sèches qui doivent encore orner sa tignasse dépeignée. Elle n’est pas à l’aise lorsqu’elle foule le marbre d’un immeuble où plantes, verreries et autres détails que le 20b bld Hikari n’a jamais eu. Ici, pas de colimaçon ou de bois qui craque. Des arabesques, mosaiques et ornements divers et faits-main témoignent d’un savoir-faire certain, mais indignes de figurer au milieu de personnes incapables de les admirer comme il se doit. Du bout de l’index, Cammy touche ce qui attise son intérêt, jusqu’à se lasser. Un noeud dans une pièce de bois aura plus de valeur à ses yeux qu’une trace de peinture d’une qualité contestable. Ce qui l’incommode le plus, c’est l’odeur. Rien de naturel, tout est trop surfait. Même une simple odeur de cuisson aurait été la bienvenue, mais rien de tout cela. C’était comme si ce bâtiment était dépourvu d’âme.

Cammy remarque enfin que ses épaules ne sont plus nues. Quand est-ce que cette veste a atterri sur son dos ? Voilà un geste de galanterie dont elle se serait bien passé. L’amertume ruisselle dans ses veines aussi elle se retient de rire. A quoi bon jouer les gentlemen quand on vous arrache lentement le coeur avec une petite cuillère ?
Un claquement extérieur, une tempête approche. Ce n’est plus la période des typhons or, c’est à croire que la nature se plait à la provoquer. A chaque fois, elle arrive à éviter le pire. Quelque minutes plus tard, et ce sont de nouveaux murs, d’autres plafonds qu’elle découvre. Un intérieur chargé, des blancs manquants, aucune chance de faire chanter la moindre résonnance dans ce lieu. C’est grand, et à l’image de l’immeuble. Aussitôt, c’est la Rue du Faubourg Saint Honoré qui lui revient en tête, le style de cette chambre d’hôtel où elle a résidé pendant plus d’un mois, presque deux ans plus tôt. Fly Away. Elle avait préféré la baignoire au lit moelleux sûrement rempli de bactéries en tout genre. Cammy avait détesté cet endroit et il en va de même pour cet appartement.

Ce Valentine là est un imposteur. Elle doit cesser de comparer ce qui est de ce qui n’est plus. De ce qui ne sera jamais plus.

- Votre intérieur est très travaillé.

Elle ment sans vraiment mentir. Elle aimerait faire plaisir en évoquant un charme ambiant qui s’avère en fait ne pas exister, et elle ne peut pas non plus se montrer trop honnête en dénotant l’exubérance du mobilier. Finalement, elle se contente de s’approcher d’une fenêtre et de tourner le dos à tout ce faste déplaisant, et par là même, elle tourne le dos à Valentine. Peut-être que si elle ferme les yeux et qu’elle y pense très fort, elle les rouvrira dans le parc et rien de tout cela ne sera arrivé. Cammy agrippe la seule chose qui lui semble correcte dans ce logement, un simple rideau blanc. Elle le fait glisser légèrement et regarde vers l’extérieur, mais tout ce qu’elle voit c’est son propre reflet et celui de toutes ces horribles choses derrière elle. Cette simple veste sur son dos et qui ne lui appartient pas est probablement le vêtement le plus lourd qu’elle ait porté, aussi, elle la laisse glisser jusqu’au sol. Elle prend enfin une grosse inspiration comme si ses poumons se libéraient d’un poids. N’y tenant plus, Cammy ouvre la fenêtre, laissant le vent violent lancer sa tornade dans l’immensité de cette pièce étouffante. Le sourire aux lèvres, elle se sent revivre et bientôt elle aperçoit plus bas une forme en boule, trop familière. Dinah l’a suivie jusqu’ici ?

Une fois de plus, les évènements la dépassent. L’australienne entend nettement Valentine et cette facilité qu’il a de l’ignorer comme si elle n’existait pas. Elle ne réfléchit pas un instant de plus et rejoint la porte d’entrée sans se donner la peine de refermer la fenêtre derrière elle, ni la porte d’ailleurs. Un courant d’air se faufile dans l’appartement, faisant voler ce qui ne peut lutter contre le vent. Papiers, voilages, et autre bibelots ridicules. Il lui semble entendre la voix de l’homme derrière elle, mais elle a déjà franchit le seuil et amorce sa descente dans les escaliers froids. Elle semble glisser sur le sol, l’épuisement prend possession de son corps. Le hall enfin atteint, et les vitres de la double porte vibrant sous les assauts de Mère Nature, Cammy les ouvre tout de même, laissant ainsi la silhouette de son ombre se répandre sur le perron. Moins que 15 secondes plus tard, la petite Dinah se faufile par l’embrasure et pénètre le bâtiment : elle est enfin à l’abri. Un grand sourire aux lèvres, la jeune femme coulera jusqu’aux marches, invitant de ce fait son amie à la rejoindre. Les ronronnements l’amusent et un rire léger s’échappe. Du soulagement, un contraste certain. Un courant d’air et une véritable présence chaleureuse suffisent à redonner un peu de sens à une vie qui lentement prend le chemin de l’exil.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptySam 5 Déc 2015 - 18:41

Quelques jours plus tard.


Valentine s'est mis à fouiller de fond en comble son appartement, à rechercher sans répit jusqu'à ce qu'il oublie ce qu'il cherche. Il a laissé son portable en haut parleur pour se libérer les mains, laissant déblatérer son frère et sa sœur de Paris, parfois entrecoupés par les rares commentaires de son père. Des fois il se demande pourquoi on l'appelle si c'est pour finir en débat ou son frère s'approprie clairement le temps de parole. Le son de l'ordinateur en arrière plan, il s'est momentanément arrêté dans sa fouille en laissant son attention captée par ce feu dans la ville.

-...N'est ce pas Eliott ?

-Hm.

Une réponse distraite en cette soirée inscrite dans la lignée de toutes les autres. Valentine pense avoir entendu quelque part cette actualité puisqu'il la connaît déjà mais il ne sait pourquoi cette fois, sa répétition doit le faire se figer sur l'écran.

-...Ce n'est pas Hiryuu.
-Pardon?

Il n'y a jamais eu de tempête hors celle qui s'est installée dans sa tête mais c'est sans faire plus attention il a délaissé le reste pour se précipiter dehors. Une angoisse lui monte jusqu'à dans les amygdales et lui tire une douleur à la gorge: Libra est en feu. La tour principale a pris feu, mais pourquoi ne s'en est-il pas rendu compte plus tôt ??? Il y a quelque chose qui ne tourne plus rond dans cette histoire et surtout il ne raccroche plus les faits entre eux.

Rappelle toi Valentine. Il y a eu la parc, le chat, l'étrange fée du parc. Tu ne sais pas comment mais tu es rentré. Et ensuite? Et ensuite... bordel. Tu t'étais promis de te rappeler. La demoiselle en robe c'est Cammy et la suite..., la suite c'est maintenant. Libra en feu. Dans tes pièces détachées, il manque quelque chose. Ou est Éloquence? Ou est Sonoko?


Eliott. C'était la énième fois que son prénom résonnait ainsi dans le avide bousculé de son crâne. Il est vidé de toute énergie motrice et finira par répondre d'un regard las qui se pose sur Théo.

-Je t'entends.

Il voudrait être privé de parole, privé des couleurs du monde. Il y a quelque chose qui a cessé de fonctionné et jamais il n'aurait imaginé que la ponction de son âme puisse être aussi douloureuse. Tel était le tribu à payer, à vouloir narguer de trop près la Mort.

Il s'est mis à tousser, une bulle d'air coincée dans sa gorge et il s'est mis a cracher Rouge. Mais dans les faits ça ne s'est pas passé comme ça. Il ferme les yeux, ses globes oculaires sont douloureux et il se concentre sur le regard paniqué de son jumeau.  Théo non plus n'aime pas trop le sang.




Lorsqu'il arrive devant le bâtiment calciné sans même connaître les ruelles qu'il vient de traverser, Yui sent son univers s'affaisser d'un coup sur ses épaules. La citadelle de Libra, sa tour la plus haute et point de repère de ses pensées, est désormais calcinée, noire et vide. Dans sa tête, c'est une capitale entière qui disparaît du jour au lendemain avec une incompréhension générale qui l'envahit. Des rubans de balisage interdissent l'accès à l'immeuble et il reste figé ainsi, secoué, face au carnage de ses souvenirs.

- Monsieur, vous ne pouvez pas passer.

Spectre qui avance en flottant au dessus des esprits, Valentine passe au travers des interdits, ignorant les avertissements extérieurs.

-Qu'est ce que vous faites !

Hors des pièces désormais vides, il n'y a plus rien qu'il ne reconnaisse, plus de trace de ce qu'à pu être cet édifice avant. Valentine a grimpé les marches une à une et a parcouru lentement le premier étage dévasté. Une odeur de brûlée reste et il monte encore jusqu'au dernier étage accessible, partie la plus abîmée de la tour. Le feu a emporté avec lui, les autres étages supérieurs. Sur ce palier là, les murs sont devenus trop sombres.

-Sortez de là monsieur c'est une zone balisée! Vous entendez?

Des bras l'attrapent soudain pour stopper sa progression hasardeuse, et Valentine ne pense même plus à se débattre, son esprit juché beaucoup trop loin de ce genre de détails futiles.

-Monsieur, vous comprenez? Il n'est pas possible de rentrer ici! Qui êtes vous?
- Tout va bien.

Un murmure.

-Je travaillais ici.
-Ne dites pas n'importe quoi, le feu a eu lieu il y a une semaine et tout le monde a pu évacuer leurs affaires. Écartez vous maintenant ou je vous fais embarquer !


-


Une silhouette à contre s'est dessinée dans le couloir, et Sonoko l'a de suite reconnue. Elle lui est inhabituelle en ces lieux, parce qu'elle sait que Yui Valentine n'aurait jamais mis les pieds ici par simple envie de venir la voir.

-Bonjour Valentine ?
-Je pars de cette ville.

Sonoko l'a regardé, surprise et a rangé de côté le fauteuil vide qu'elle était en train d'amener à sa patiente.

- Tu sais ou tu vas?
- Évidemment.
- Où ça?
- Loin.

Il l'a fixé sans ciller. La colère, c'est ce qu'elle lit dans ce regard gris qu'elle n'a pas réussi à s'approprier. Il lui est difficile de comprendre ce qu'il a en tête ni même les rares passages de sa vie qu'il a bien voulu lâcher à ses heures. Pendant sa convalescence.

Sonoko a eu un pincement des lèvres.

-Libra a brûlé...
-Valentine. Il faut que tu ailles voir un psy.
-Passe une bonne soirée Sonoko.
-Et ton salon ?
-Libra a brûlé et c'est tout ce que tu trouves à penser ?

Yui s'écarte de Sonoko, il sait qu'elle pince chaque côté de son poignet pour le faire revenir à la réalité à chaque fois qu'il divague.
Yui l'évite cette fois et lui tourne le dos pour repartir sur les chemins sinueux de ses délires.

-Valentine !



-



Ses pas là le perdront du côté d'Amani, Amani de son nouveau nom, Rhode dans son ancienne appellation. Un jour, Thor lui avait dit d'aller se promener de ce côté là. Un frisson parcourt son échine en réalisant combien ses expériences de rêves partagés dans les portes de téléportation de Libra ont altéré ses perceptions. Avant, Rhode s'étendait depuis la forêt jusqu'aux bords des plages. Il ne sait pas vraiment pourquoi il a choisi l'automne et ses brises pré-hivernales pour se décider à y mettre le pied.

Sans doute parce que c'est la dernière destination qui t'a été donné d'aller et dont tu te sens capable d'aller sans te perdre comme un imbécile.

Valentine aimerait que sa raison se la ferme une bonne fois pour tous, il a conscience qu'il n'a rien à faire au milieu de cette verdure qu'il n'affectionne pas plus que ça. Ces troncs d'arbres centenaires l'oppressent plus qu'autre chose et il n'a rien d'un randonneur occasionnel venu profiter de la nature. Yui s'apprête à faire demi tour avec le sentiment de n'avoir pas trouvé ce qu'il recherchait une fois encore, quand un élément mouvant attire son attention. Il a alors aperçu un chat noir aux traits similaires qu'Eloquence. Dans sa vie, il n'aura jamais tellement affectionné les chats, -...à part ce chat blanc là. Il n'aura pourtant pas non plus, passé du temps à faire des patpats à ce chat, maintenant habitué à traîner entre les pieds de Tanaka ou de Féa.


Observé par l'animal à quelques pas de lui, il s'est accroupi à son encontre, sans jamais chercher à le toucher.

-Je t'ai vu la dernière fois.

Tiens. Tu t'y mets toi aussi.

À rappeler aux autres que tu les as vu 'la dernière fois'.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyDim 6 Déc 2015 - 23:42

Il n’y a plus de garde-chasse à Keimoo depuis un bon moment maintenant, ce qui arrange bien la jeune fille. Ce matin là, elle a fait son parcours quotidien : thermes, temple, église. Elle est restée un long moment à prier pour l’âme de Jin Mashimoto et Ryosuke Saitô et s’est vue offrir une paire de souliers ainsi qu’un nécessaire à couture. Peu à peu, elle se reconstruit un petit trousseau qu’elle camoufle sous des lames de bois dans la maisonnette un peu délabrée du garde chasse. Dans un village voisin, elle s’est rendue au centre ville, là où le marché s’est achevé. Quelques jours plus tôt elle avait avoué à quelques primeurs ne pas avoir de monnaie, elle leur avait alors proposé la seule chose précieuse qui lui restait en échange à savoir, les deux petites perles d’Akoya blanc-rosé qu’elle porte aux oreilles depuis sa plus tendre enfance et qu’elle ne retirait que pour les nettoyer. Deux d’entre eux, Seishiro - 29 ans et Takumi - 34 ans, frères,  l’ont prise en pitié et lui ont remis quelques denrées invendables sans rien demander en échange. “Un geste de bonté comme un autre”, ont-ils déclaré. Ca ne leur coûte rien, mais représente beaucoup pour la jeune femme. Elle leur a d’ailleurs proposé quelques services, de l’aide pour remballer, pour vendre même, mais ils ont décliné. Ce jour là, l’aide a été la bienvenue et c’est derrière un étal que Cammy s’est retrouvée à aider Takumi, en grande difficulté causée par l’absence de son frère grippé. Entre les conseils culinaires et dégustation proposée par la demoiselle, les villageois ont commencer à affluer pour le plus grand plaisir du primeur. Les recettes ont été moins catastrophiques que prévue, et au final, Cammy passera la journée avec l’homme, se rendra au chevet de son frère et malgré son refus catégorique, s’est vue obtenir quelques billets en plus d’une caisse importante de fruits, de légumes mais aussi d’un petit bonus, si Dinah se montre ce soir.


LA BOHEME
vivre de l’air du temps


Elle avance lentement, le sourire jusqu’aux oreilles de cette journée magnifiquement passée aux côtés des deux hommes dont la grandeur de leur bonté n’a d’égale que la profondeur de la solitude de la jeune femme tandis que tombe le soir sur ses fines épaules. Ils lui ont demandé de raconter son histoire mais elle n’a rien trouvé à dire à part qu’elle avait fait le choix de ne vivre que de peu. Elle a attisé l’inquiétude par l’hiver approchant à grand pas. Seishiro et Takumi vont bientôt s’autoriser leurs vacances annuelles et ne seront pas de retour avant le début de l’année suivante. Où Cammy trouvera ses vivres, elle ne se pose même pas la question. Elle a fait le choix de ne plus s’en poser, de vivre au jour le jour, sans faire le moindre projet. Alea jacta est. Alors, pourquoi se pas se contenter de sourire en profitant du moment présent ? Mieux que ça, elle se met à rire et à chantonner. Définitivement, le jour a été bon et Cammy s’est vraiment bien amusée, une véritable découverte.

La forêt en vue, la voilà qui rentre au bercail. Il est loin le temps où elle ne s’y rendait que pour trouver la quiétude. C’est dans une clairière qu’elle a fait la connaissance de Shiro Kuchiki. Les conditions étaient différentes, tellement différentes. C’était une autre vie, trop loin derrière elle. Et en même temps, ça fait 5 ans à peine. Dans 5 ans, ce sera encore une autre histoire, encore faut-il qu'elle survive à celle là toutefois...elle préfère ne pas penser de cette façon. L’avenir est toujours plein de surprises, quelles soient bonnes ou mauvaises. Tout ce qu’il faut, c’est avancer en se contentant du minimum. Cammy a déjà changé et elle le sait. Certains nuages qui obscurcissaient son existence se dissipent déjà. Ce n’est pas terminé.
Elle franchit l’entrée périphérique de la ville en pénétrant le quartier Amani, munie de son lourd chargement qu’elle traine sur un chariot porte-bagage qu’elle a emprunté à la gare voisine. Elle le restituera le lendemain lorsqu’elle ira aux thermes d’Hiryuu. Elle s’arrête un instant et divague. De là où elle se trouve, elle voit au loin le quartier Hebi et ses plages. Elle ne cesse de fuir depuis plusieurs jours et pourtant la même idée la taraude. C’est décidé, elle s’y rendra ce soir et observera de loin cet immeuble si chic et laid. En levant les yeux vers l’étage concerné, peut-être l’apercevra-t-elle.
La maisonnette a eu de la visite apparemment : un carreau brisé en plus. Il n’y fait déjà pas très chaud. Un craquement s’élève alors. Ce n’est pas inhabituel d’entendre du bois craquer dans une forêt, mais pas à cette heure avancée du soir. Elle laisse choir son lourd chargement qu’elle a porté depuis le bord du sentier, au niveau de la porte d’entrée et s’empare de la lanterne à l’intérieur de laquelle sa dernière bougie est à moitié consommée.

- Dinah ? Viens ma belle, j’ai une surprise pour toi à la maison…

Elle continue son avancée entre les arbres, fait à son tour craquer une branche ou deux, et poursuit son appel.

- La journée a été fructueuse aujourd’hui et j’ai gagné quelque chose que tu vas adorer…

Un miaulement se fait alors entendre, mais pas un de ceux qu’elle a l’habitude d’écouter. Il semble plus réservé, plus timide jusqu’à ce que la boule de poil noir vienne à elle en émettant des sortes de piaillements. Absolument adorable.

- Qu’est-ce qui suscite à ce point ton attention, hein ?

Quelque pas plus loin, Cammy trouve la réponse d’elle-même. Les traits enjoués s’effondrent, et le rythme cardiaque monte d’un bloc en finissant par un hoquet de stupeur. Un essoufflement bref, elle pose la main sous sa poitrine. Elle retrace les souvenirs de quelques jours plus tôt, et se remémore sa décision.

- Vous ! Vous vous êtes trompé de route ? Hébi c’est vers le sud, vous ne trouverez nul métro ni confort ici.

Elle fronce les sourcils et lui tourne le dos. Elle reprend sa marche en intimant à Dinah de la suivre. Elle s’arrête aussitôt, le remord l’envahit déjà. Ce n’est pas la bonne marche à suivre pour une guérison. Elle souffle un coup puis s’en revient auprès de l’homme.

- Je...je suis désolée. Je n’aime pas être surprise de la sorte. Il ne fait pas très chaud aussi… voudriez vous un peu de thé ?

Les deux frères lui en ont offert justement. Le thé a meilleur goût lorsqu’il est partagé.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyLun 7 Déc 2015 - 22:44

Valentine a entendu un craquement de bois pas loin et alors qu'il lève le regard vers la jeune femme, elle sursaute et lui rétorque sèchement dessus qu'il n'est pas sur son chemin. Elle le surprend presque autant qu'elle revient finalement sur ses pas pendant qu'il se redresse, encore surpris de cette confrontation soudaine.

-Je..

Il a décortiqué l'information aussi vite que son cerveau a bien voulu. Il lui a fait peur, il connaît ce visage, on lui demande du thé. Et non il ne cherche pas de métro. Enfin... Presque ? Allez, facile non ? Yui est resté silencieux et a réalisé que la lumière décroît toujours plus vite que ce qu'il le vit en temps réel.

-Je ... Et bien. Je ne cherchais pas à vous faire peur.

C'est plus complexe de vouloir donner plusieurs réponses en un phrase et il abandonne vite la partie. Comment expliquer qu'il se trouvait à ces heures-ci, ici dans le bois, et qu'il jure de ne pas l'avoir suivie?
Ah ça va Valentine. Elle aussi elle se trouve là après tout, c'est un concours de circonstance.

-Thor m'a recommandé ces lieux mais je ne m'attendais pas à vous revoir ici Cammy, a-t-il lâché en guise de salutation.

Et puis il a doublement hésité, en réalisant qu'il ne peut pas boire du thé. Mais il fait froid et de toute façon demain rien ne l'oblige à aller quelque part. À part loin, loin de la Libra détruite. Il n'irait pas à Paris, ni ne resterait au Japon, finalement les États Unis lui semblent un bon choix. N'importe où qui lui donne l'impression d'oublier le vide que délaisse l'absence de Libra dans son âme. Elle est douloureuse parce qu'au delà de l'édifice et ses formidables hauteurs, sa disparition écrase toute son incompréhension du monde et du mystère Thémis. En y pensant, il pourrait presque développer une thèse dessus, tellement que ça l'obnubile. C'est pourquoi ça il faut partir; le temps n'attend personne. Il a finalement acquiescé d'un signe de la tête le thé qu'elle lui propose et l'a rejoint en quelques enjambées.

Le nouveau langage des bruits environnant le dépaysent un instant; pour ne rien cacher, Yui Valentine et la nature n'ont jamais fait de grands alliés. Pas voués à êtres opposés mais pas non plus compatibles. Il a levé le regard vers ces branches qui tentent de lui voiler la vue du ciel et a silencieusement accompagné la jeune femme et sa lanterne. L'idée même qu'elle puisse vivre en ces lieux ne le surprend pas ... Parce qu'elle s'inscrit naturellement dans ce contexte. Et tandis qu'il se fait peu à peu à l'étrangeté de cette nouvelle scène il a pincement douloureux quelque part entre les cavités de son cœur lorsqu'il réalise soudain qu'il ne verra plus Thor.

- ... vous auriez de la tarte aux pommes ?

Un au revoir, une dernière pensée d'adieu à un ami. Il tâcherait de ne pas se comporter comme un ivrogne dans ce monde sans Erik.

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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyMar 8 Déc 2015 - 11:14

Dans ce décor naturel, loin des ornements luxueux du quartier bourgeois, la balance de l’esprit de la demoiselle ne sait de quel côté pencher. De Yui à Valentine, de Valentine à Yui, elle ne sait quel chemin emprunter. L’accent détaché de l’homme, son hésitation, puis cette manière qu’il a de reprendre le chemin de ses mots sans exprimer la moindre émotion sur son visage parviennent à elle de cette façon qu’une mère emploierait pour consoler son enfant après un gros chagrin. La délicatesse de l’un pour la tendresse de l’autre. A cet instant, la rouquine éprouve le besoin de se rapprocher de ce mirage d’antan afin de se blottir contre sa version matérialisée sans savoir si c’est elle qui a besoin de réconfort, ou si elle désire simplement l’offrir. Probablement les deux. Elle a mimé une fausse colère causé par l’effroi pourtant elle doit se rendre compte au fond d’elle, qu’elle est ravie d’avoir de la visite, même de la part d’une personne qui ne se rend pas compte à quel point sa simple présence met la sylphide au supplice. La voix de l’homme brûle d’un ésotérisme sous-jacent, sans complexité.

Elle a alors tressailli au nom divin révélé. Elle ne connait pourtant personne portant ce nom, et personne ne sait qu’elle a fait de cette vieille bicoque, son pied-à-terre occasionnel et surtout… elle est surprise de se faire appeler “Cammy”. Dans ces conditions, après tout ce temps écoulé, elle ne se reconnait pas, de la même manière qu’on prononce un prénom dans son intégralité alors que depuis toujours, on s’est fait appeler par un diminutif, voire par un pseudo. Tant que Valentine existera, auprès de lui Cammy ne pourra exister. Désorientée, elle amorce quelques pas, à reculons tout en regardant autour d’elle. Le chant de la nuit s’élève, une chouette peut-être. Le vent siffle entre les branches ; quelques degrés vont se perdre d’ici peu. Les nuits de Rhode sont fraiches. Valentine accepte finalement sa proposition, elle n’en est pas ennuyée mais pas totalement ravie non plus. Un mélange entre inquiétude, incertitude et consolation. Finalement, elle décidera d’avaler les paroles de l’homme et de les accepter pour argent comptant. Il n’a après tout nulle raison de lui mentir. La Forêt Eternelle est après tout accessible à tous les voyageurs, qu’ils soient d’Hebi, de Libra ou d’Asgard. Valentine la rejoint, et ensemble, ils reprennent le chemin que la rouquine a emprunté précédemment, en sens inverse. Vient alors la question incongrue.

APPLE-PIE LIFE
denn du bist, was du isst


Je me rappelle qu’un jour, une prêtresse du temple de Thémis est remontée vers le Nord pour respirer l’air pur de la région pour mieux s’imprégner de tout la magnificence de la bonté de notre Déesse. Elle était toute menue, tout chétive, absolument adorable et se faisait appeler Kate. En réalité, elle portait un autre nom et j’ai compris la raison de celui-là en croisant le regard de la religieuse. Ses cheveux émeraude étaient lisses et brillants, ils lui arrivaient juste au dessus des épaules mais c’est l’immensité de ses iris qui m’avait troublée. Deux améthystes cristallines prêtes à se briser au moindre coup de tonnerre, mais qui n’avait pas son pareil pour lancer des éclairs, sans raison.

Infinity, âme sauvée. Prêtresse de Themis, temple de la Création.

Elle cherchait la pureté afin d’éradiquer à jamais les ténèbres qui obscurcissaient son âme. Elle était une âme chétive en souffrance constante, celle de souffrir continuellement de ce qu’elle faisait subir aux autres. Elle cherchait à se contrôler, mais les dérapages étaient récurrents. Le chemin vers la pénitence était son chemin de croix, tout comme celui vers l’enfer est rempli de bonnes intentions. Lorsque sa route a croisé la mienne, j’avais ressenti cette étrange sensation entre inquiétude et consolation. Je me sentais seule, on m’avait forcée à prendre du bon temps, de me reposer. En réalité, je m’ennuyais. Infinity s’est frayée un passage, et son existence s’est imposée d’elle même dans la mienne. Je lui ai donc naturellement montré comment faire une excellente tarte aux pommes. Elle était ravie, autant que maladroite. Lorsqu’elle a quitté mon logis après avoir menacé de percer mon âme de ma lame émoussée, elle m’a remerciée chaleureusement. Je lui avais offert le moyen d’amadouer le lieutenant de la garde impartiale de Thémis. Ce qui est amusant, c’est que cet homme, portant le nom d’un Dieu guerrier scandinave, frapperait un jour à ma porte. Ce que je ne savais pas en revanche, c’est qu’Infinity allait vraiment amadouer cet homme en lui offrant une tarte. Et qu’il la partagerait avec une âme égarée, au coin d’un feu de cheminée.



- De la tarte aux pommes ?

Elle s’arrête, à quelques pas de sa cahute. Elle incline la tête sur le côté, l’incompréhension masquant un instant ses traits puis c’est un grand sourire qui anime son visage.

- Non, je n’en ai pas mais… je pense que j’ai de quoi en faire. Je ne sais pas si mon four à pierre est opérationnel, alors autant en avoir le coeur net.


Elle s’approche de la caisse de vivre qu’elle avait laissé là quelques instants plus tôt et songe à Dinah qui semble avoir disparue. Constatant avec satisfaction que de belles pommes ainsi que de l’huile et de la farine figurent bien dans le contenant boisé, elle s’en saisit, ne se gêne pas pour glisser le lourd sac de poudre blanche entre les bras de Valentine avant d’entrer dans la demeure.

- Puisque vous êtes là, vous allez me donner un coup de main, d’accord ? Ca sera plus amusant si on s’y met à deux !

A l’aide d’allumettes, elle ravive d’autres chandelles parsemées à droite et à gauche et entreprend d’allumer le feu dans la cheminée. Par dessus, elle suspend un petit fait-tout qu’elle a rempli d'une eau douce provenant d’un réservoir non loin avant de se tourner vers Valentine.

- Je vais être à court de bois, pouvez vous aller en chercher ? Il y en a un peu non loin de la porte, mais je crains que ça ne suffise pas si je dois utiliser le four.

Le sourire aux lèvres, un détail la turlupine toutefois tandis qu’elle mesure la quantité suffisante d’eau, de farine, d’huile, de sel et de sucre pour la préparation de sa pâte brisée. Doit-elle poser la question ? Elle songe alors à cette haute stature et aux rires partagés de ce géant à la chevelure dorée. Elle ignore qu’elle est en train de s'éloigner du sentier de la temporalité et donc de la vie terrestre, à chaque seconde qu’elle passe auprès de cet homme pour qui elle éprouve une passion destructrice, un désir à sens unique.

- Et… comment va Thor ? Notre vaillant gardien est-il toujours aussi...rude, dans ses paroles ?


Ses mains tremblent dans la boule de pâte qui se forme, aussi elle met plus d’ardeur à l’ouvrage. Son sourire est incertain, la balance perd ses moyens.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptySam 12 Déc 2015 - 12:40

Valentine se retrouve embarqué dans une autre histoire incongrue où son chemin le fait préparer une tarte aux pommes au beau milieu de la forêt. Allez, rebelotte, ça n'a pas suffi de se mettre à courir après un lama-mouton rose avec un japonais lui ayant proposé des Jelly bean chimiques. Des choses, pas toujours toutes significatives, il y en avait eu. (...) Cammy lui a ainsi laissé un sac de farine dans les bras, ...Valentine, tu es sérieusement en train de l'avoir, ta tarte aux pommes??, et il se voit approuver d'un air surpris le fait qu'effectivement, il vaut mieux être à deux parce qu'il ne lui viendrait même pas à l'esprit de se préparer une tarte seul et encore moins à la pomme. Il observe de dos, cette demoiselle qu'il trouve si étrange commencer la pâte avec entrain, jusqu'à cette question troublante qu'elle lui renvoie.

Il y a dans l'air, ce trouble qu'elle lui renvoie derrière son silence et Valentine s'arrête au seuil de la porte, cessant de se retrousser consciencieusement les manches de sa chemise. Il a hésité à la question puis a fini par répondre:

-..... je pense qu'il va bien là où il est.


Puis il est sorti, pour éviter de croiser le regard de la jeune femme.


Valentine a soudain envie de lui raconter ces états de conscience intransmissibles qu'il a partagé avec Erik. L'envie de croire en ces existences contre la moralité sournoise qui lui susurre vicieusement dans la tête, qu'il n'a pas à en savoir davantage sur l'histoire entre le gardien de la ville et la rouquine. La moralité, comme si un jour elle avait guidé ses principes, les principes, comme si il en avait suivi depuis toujours. Et malgré ce murmure décadent qui l'astreint au silence, malgré cette interdiction formelle d'étayer cette information, il ne peut oublier l'image sublimée de cette jeune femme entre les rideaux, -photographie mentale restée en mémoire bien après les séances de téléportation supposées mentales. Erik lui avait appris qu'à force de se tuer, il perdait la mémoire de ses derniers instants et qu'il s'agissait du tribu à payer pour pouvoir rester sur Libra. Mais ce que personne ne lui avait dit et que Valentine avait assimilé trop tard, c'est qu'il n'avait pas d'autres choix que d'exister là bas, dans cet éden des âmes. Enfermé avec un début, mais sans fin.

C'était Libra.


Elle avait volé la beauté de l'éphémère et avait emprisonné tous ces esprits damnés, les laissant à leur sort face à l'éternité. L'ennui.

Le vide.

En s'écroulant sur elle même, il semblait que les habitants avaient réintégré leur monde d'origine mais aujourd'hui pourtant, Yui Valentine avait l'impression d'avoir été rappelé quelque part entre la temporalité et son opposé, si bien qu'il ne savait plus si l'existence devait encore avoir une valeur aux yeux d'une humanité rendue factice. Pire encore, Thémis ne lui avait pas rendu la sienne, effacée, tel un coup de main dans un empire de sable.




(...) Devant ses yeux, un feu de cheminée, devant ses yeux, ses lumières orangées qui aveuglent son regard. Valentine est resté accroupi là, à fixer ce que ses yeux ne voient plus, à chasser Thor de son esprit, ce type aux faux airs de rustre qui aujourd'hui ne répondait plus que de son absence.



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Ce qu'il reste de la folie

-J'ai déjà rêvé de vous, s'est il entendu dire pour se recentrer sur un autre sujet, plus tard dans la soirée. Il n'y a alors plus d'heure, plus d'indication inutile de temps, plus de course contre la montre, seule la nuit lui rappelant qu'il devrait fuir cette ville et tous ses  lieux délirants.

Il a regardé fumer le thé sans jamais être capable de le boire et la tarte aux pommes, quant à elle, s'était liguée pour lui imposer la même saveur troublante que celle qu'il s'était vue offrir chez le gardien. Yui a cru un instant sentir sa vue se troubler et un autre silence s'est imposé.

- Vous croyez à la folie, vous? , a-t-il murmuré en scrutant le visage de la jeune femme sous les lumières de la cheminée et des bougies.

Et ça recommence.
Reste assis Valentine et ne te lève surtout pas.


L'homme s'est levé et a fouillé ses poches à la recherche de ce qu'il ne trouvera pas. Il a alors attrapé la lanterne, qui s'est éteinte au moment où il entendait sortir avec et il est revenu la poser à sa place. Repoussant de côté le thé encore fumant ainsi que l'assiette vide, il a fixé le feu mourant de la cheminée et a tracé du bout du doigt un cercle à même la table.

Tais toi Valentine.

-Libra, sa citadelle.

Il a tracé les ruelles principales de la ville, ses jardins et places principales.

-Opium c'était ici, dans les jardins d'Opale. Brume, dans le bar de la rue de Libra, a-t-il enchaîné en pointant un nouveau repère dans le cercle invisible. -Odoshi, dans le Temple de Création, là. Je n'ai jamais compris pourquoi Paradoxe a été ramenée dans mes locaux de Libra, et avant ça, nous avons disparu dans le désert Ocre, ici, la Fournaise. J'ai été ici avec Salieri dans les zones de glace de la région,  les Plateaux Glacés. Je suppose que  vous vous trouviez à Rhode d'après les dires de Thor. Et Thor... Il vivait ici. Dans cette rue.

Il a effectué une ligne entre le point Thor et Rhode, agacé, d'un geste brusque.

-Je ne les ai plus recroisé, ni les uns ni les autres, alors que j'étais fliqué par Thor qui s'appelait Erik, où que j'aille. Peu importe; mais la semaine dernière j'ai appris que Libra avait brulé.

Valentine a enfin levé ses yeux de la carte imaginaire tracée sur la table pour dévisager Cammy.

-Alors comment ça se fait que la tarte de Thor soit identique à la vôtre, et que Rhode ait disparu au profit d'Amani. Comment ça se fait que personne ne voit rien du délire qui se déroule sous leurs yeux, là, quand Hiryuu brûle et détruit sa citadelle.

Il s'est redressé et a avisé le feu, pensif. Il est retourné près de ce qu'il reste de lumière, dos à Cammy, face à tous ces artifices qui ne parviennent plus à accrocher sa raison.

-Je pense croire à la folie. Et vous..., vous y étiez, dedans.

Malgré les tentatives pour préserver une chaleur intérieure, il a commencé à faire froid.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyMer 23 Déc 2015 - 11:33

Les flammes dansent leur valse éclatante que la demoiselle ravive d’un tisonnier en fer forgé. Elle y plante la pointe au coeur des braises, laissant ainsi étincelles et crépitements assouvir la soif de ses sens, tout en laissant la chaleur lécher la surface de sa peau, parfois, d’un peu trop prés. Point de brulûre mais le risque de la provoquer lui rappelle qu’elle ne ressent plus la douleur et que l’enfer n’est pas toujours celui que l’on prétend. L’enfer, c’est les autres. Ces autres qui vous oublient, ces autres qui vous fuient, ces autres qui vous informent que leur présence n’est rien, comparée à leur absence dès lors que vous avez appris à les aimer. Ce soir, Cammy Logan n'a jamais sentie aussi fort l'absence de Yui Valentine que par sa présence.

Définitivement, la douleur physique n’est rien. La rouquine commence à approcher sa main du foyer, un peu plus à chaque milliseconde. Ce feu qui l’attire, ce feu qu’elle provoque, qu’elle aggrémente, qu’elle nourrit. Brûler, brûler, jusqu’à ne plus jamais renaitre de ses cendres.
Des pas murmurent le retour de Valentine derrière la forme accroupie de la vagabonde près de la cheminée. La main recule et dans l’air, sillonne une légère odeur de brûlé, celui de ce fin duvet à peine visible sur les premières phalanges de sa main gauche. Elle actionne à nouveau le tisonnier tandis que d’autres bûches se joigne à la piste de danse infernale.

“Il va bien, là où il est”.

Evidemment. Thor est resté là bas, mais eux, non. Là, maintenant, elle a une irrépressible envie de prier. Prier pour l’âme du gardien, prier pour toutes celles qu’elle a rencontrées. Elle aimerait prier pour la sienne, mais en a-t-elle au moins le droit ? Elle vit pour les autres désormais, son existence s’est envolée ; son forme physique - son corps - n’est plus qu’un véhicule transportant son être : elle ne le respecte pas. Elle l’avait réservé pour une personne unique qui désormais n’est plus, plus vraiment. Dans la maisonnette, peu d’objets. Le minimum vital. Un miroir ne l’est pas, aussi il n’y en a pas. Et il n’y en aura jamais. Superstitieuse, elle craint de se voir dérober son esprit si elle percute son propre reflet. La nuit, elle évite d’approcher les fines fenêtres. Certaines d’entre elles sont brisées : elle a oublié qu’elle en est responsable. Elle pense que ce ne sont que des délinquants qui se sont amusé à balancer des pierres et pourtant, nul galet s’est vu retrouvé à l’intérieur, et les débris de verre jonchent le sol, à l'extérieur.
Plus qu’une brise, c’est désormais une bourrasque glaciale qui siffle par les percées des vitres et autres brèches du logis délabré. Heureusement que le temps n’est pas à la pluie : elle n’a pas assez de récipients à glisser sous les entailles du toit.  


Finalement, la tarte aux pommes est réussie. La jeune femme s’est tout de même brûlée les doigts en glissant le mets dans un plat rouillé qu’elle a au préalable recouvert de journal. La spatule a fendu la pâte et ses quartiers de fruits. Le thé s’est trouvé reversé dans une seule tasse, et une part du dessert dans une seule assiette. Elle n’a pas d’élément en double et puis...elle n’a pas cuisiné pour elle de toute façon. De plus, elle se doit d’économiser ses vivres si elle veut survivre à l’hiver. Ce soir, elle a y puisé grandement. Une simple tarte aux pommes équivaut à une semaine de repas pour elle. En observant Valentine se régaler, elle étire un petit sourire. Ce n’est pas vraiment de la satisfaction, hormis celle d’avoir accompli une bonne action. Elle imagine que l’Eternel lui a confié une épreuve qu’elle pense avoir relevé. Quelle sera la prochaine ?


AU CONTRAIRE DE LA RAISON
la folie ne porte pas de masque
Robert Sabatier - 1991



Tandis que la demoiselle s’affaire à nettoyer le sol avec ce balai au manche cassé, diminué, plusieurs secondes puis plusieurs minutes s’écoulent. Parfois, elle ressort pour s’en aller quérir d’autres brindilles, et s’en revient avec quelques souvenirs des bourrasques qui ont soufflé ses mèches. Des feuilles sèches, une plume, de la poussière d’écorce. Tout et n’importe quoi peut accrocher sa tignasse rendue sauvage, du moins, jusqu’au lendemain. Enfin, le lendemain est déjà devenu présent. Dans quelques heures, Cammy devra se rendre aux thermes pour sa toilette. Cachée quelque part, une petite montre au cadran ébréché est là pour lui rappeler la précision sine qua non pour garder une hygiène de vie, cette même vie qu’elle réfute. Dans l’atmosphère silencieuse de paroles, la voix d’un homme lui rappelle qu’elle n’est pas seule cette nuit.

“J’ai déjà rêvé de vous”

Elle a alors interrompu tout mouvement. De Cammy à Psychê, de Psychê à Cammy, l’âme est en suspend entre les deux entités. Le balai lui échappe dans un semi-fracas en heurtant le sol. La première chose qui lui vient à l’esprit, c’est l’espoir. Si Valentine a déjà rêvé d’elle, c’est que l’oubli n’est pas total et que Yui n’est pas si loin. Elle veut en savoir plus, mais les mots se perdent entre ses pensées et ses lèvres qu’elle essaie de ne pas pincer. Reportant son regard sur l’homme, c’est encore une fêlure qui taillade sa personne. L’espoir, ça fait mal. Parce que c’est tout ce qui lui reste et qu’elle ne désire pas le perdre. Elle détourne alors ses yeux de lui lorsqu’il accroche les siens, et remarque que la tasse de thé encore pleine, fume encore un peu. “Vous croyez à la folie, vous?” Il se lève et se déplace alors vers la sortie, en emportant avec lui sa lanterne. Elle ne veut pas qu’il s’en aille, elle ne veut pas. Elle joint alors ses mains et c'est une prière silencieuse qui fuse. Cammy a peur de ce dos, sans vraiment savoir pourquoi.

La réponse de l’Eternel est immédiate : la bougie s’éteint. Le hasard n’existe pas. Il est venu à elle, au milieu de la nuit, dans cette forêt, à un moment précis. Il est trop tôt pour partir, Valentine, tu dois rester encore un peu. Il s’en revient alors à table, et tandis qu’il dessine des cercles de ses doigts sur la table, elle le rejoint. La suite… lui fait étirer un sourire. S’il y a des choses qu’elle peine à comprendre, à ce moment là, tout est limpide. Elle écoute, elle regarde, elle observe. Valentine se laisse aller comme jamais Yui ne l’a fait. Elle commence alors à apprécier ce dopplegänger qu’il est. Une sensation de déjà-vu la frappe alors ; elle ferme les yeux. Elle ne supporte plus de voir ce dos. Elle songe à le rejoindre, à caler sa joue contre l’échine de l’homme à enserrer sa taille en tentant de joindre ses mains contre son ventre. C’est un désir qu’elle se refuse à assouvir. Elle ne cèdera pas à la tentation qu’on lui sert sur un plateau. Jamais plus, elle n’ira vers lui. Jamais plus elle ne veut être rejetée. Elle se contente de s’assoir à sa droite, face au feu, à même le sol. Elle ne peut résister à l’appel des flammes et, une fois de plus, elle les laisse approcher ses doigts. L’une d’elles lèche un fragment d’ongle, mais elle se meurt.

- A chacun sa définition de la folie. Certains prétendent qu’il n’y a pas de Dieu, d’Anges, ni de vie après la mort. Que les miracles ne sont au fond que coïncidences.

Elle retire sa main et la regarde. Finalement, elle sent la brûlure.

- Nous sommes tous des croyants, peu importent nos religions ou nos principes. Certains prétendent que la science est irréfutable, qu’elle prouve que l’Homme est le fruit d’une évolution lente et que si les pommes tombent, c’est grâce à la gravité.  


Elle se redresse un peu alors et lève la tête vers Valentine.

- Je ne dirai pas qu’ils ont tort, mais ils n’ont pas raison non plus. Plutôt que de se dire “comment?”, ils en oublient les principales : “Pourquoi ? Dans quel but ?” Les pommes tombent pour être mangées. L’Homme évolue, mais il aurait pu se contenter de vivre, d’exister. Or, il se pose des questions, il doute, et enfin...il croit. C’est pourquoi son Créateur estime qu’il est Sa plus belle oeuvre. Pas seulement parce que les êtres humains sont intelligents, mais surtout parce qu’Il leur a soufflé ce qu’ils ont de plus précieux, sans le savoir : leur âme.

Le froid s’immisce dans la pièce à mesure que le feu se meurt. La cuisson de la tarte a trop puisé dans les réserves de bon bois. Celui qu’elle a ramené un peu plus tôt n’était pas assez sec pour bien prendre.

- Les miracles existent... mais vous vous égarez. Nous sommes à Keimoo, dans le quartier Amani. L’incendie de la semaine dernière, c’est moi qui l’ai provoqué. C’était à Hiryuu, le jour de nos re....  

Elle se stoppe avec un hoquet, puis un frisson la pousse à se frotter les bras. Une mise en garde ; le feu s’éteint.


- ...le jour de notre rencontre. Et si personne d’autre ne voit ce "délire", comme vous dites, c’est tout simplement parce que ces personnes manquent de foi. Peu importe en quoi, en qui, mais le manque est là. Alors oui, je crois en cette folie dont vous parlez, parce que j’ai la foi.


Et pour accentuer ses dires, elle lève tout simplement la main vers son front qu’elle effleure de sa brûlure et la laisse tracer sur son être, un signe de croix.

- Vous devriez rentrez chez vous. Il ne fait pas chaud ; vous allez attraper la Mort.

L'espace d'un instant, infime... La tendresse a orné les traits de Cammy Logan.
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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyMar 29 Déc 2015 - 21:23

Valentine s'est brusquement tourné vers Cammy, avec l'effet d'avoir reçu un coup dans l'estomac, un pli ahuri sur son front. Brûlé Hiryuu? Était ce non seulement possible? Venait elle réellement d'avouer qu'elle avait brûlé la cité, elle et ses bras trop frêles?

La conception fissurée de Yui a volé en éclat et face au feu qui s'éteint, il a senti ses yeux le brûler. Il a agrippé sèchement Cammy dans ce geste brutal en dernier repère à son orientation défaite, et c'est sous la lumière de la lune que se sont effondrés les derniers fondements de ses mirages à travers chacun de ses traits.

- Vous avez brûlé Hiryuu?

Un murmure qui ne voile plus le chagrin qui s'abat d'un coup sur ses épaules, une perdition qui se mue en une colère sourde qu'il ne se connait pas. Il ne savait pas contre qui contre qui ses élans d'effroi et de fureur mêlée devaient se retourner si ce n'est contre lui. Ses propres palpitations étreignent un coeur douloureux, les hurlements de son esprit décousu enragent ce qu'il reste de sa folie.

-Qu'elle ne me rate pas cette fois, La Mort! Qu'elle ne me relâche plus!

Son emprise sur la jeune femme s'est relâchée d'un coup et il s'est rué dehors pour aller cracher sa colère contre l'univers, et vomir ce qui peut rester de sa conscience, dans cette image mentale démentielle qu'il délaissera en partant.


-


Le temps passe.

Des journées et des semaines défilent dans la monochromie du monde de Valentine. Il avait perdu le fil entre le papillon et sa tornade ou alors, dans ses rafales il avait disséminé cet être ailé.

Il ne pouvait continuer ainsi.

-Du thé au jasmin monsieur Valentine.

Il avait senti sa conscience s'irriter alors qu'il versait doucement l'eau parfumé dans la tasse de ses clients, dans des gestes impeccablement mesuré.

Il avait souri.
Brièvement.

Il fallait qu'il revoie cette jeune femme parce qu'elle savait de quoi il lui avait parlé l'autre fois, il fallait qu'il la revoie après une soirée où il finissait avec plus d'alcool que de sang dans son organisme. Il fallait qu'il l'a revoie quand il se réveillait au beau milieu de la nuit après l'avoir vue entre les rideaux oniriques, sur escaliers dans sa robe qui ne la rendait autrement plus que séduisante, mystique, imaginaire. Elle lui faisait peur mais il fallait quand même qu'il la rencontre.

Outre cette nouvelle obsession, il y avait des morceaux qu'il ne recollait plus, et ceux qu'il avait cessé de chercher à assembler. Les mails de ses archives, les allusions de Théo. Et les pièces qui s'étaient effondrées en croisant Thornberg. Les journées de Valentine s'effilochaient et ses nuit s'effritaient comme le vieux crépi d'un mur. Eliane n'avait plus de larmes à lui offrir et avait déjà oublié pourquoi elle ne retrouvait plus la même assurance dans le reflet de son frère.

-Tu es venu avec elle à Paris Valentine, avait-elle un jour soupiré en détournant son regard.

Et Théo, Théo se taisait parce qu'il supposait sans savoir, et Valentine rageait face à ces non-dits. Dans cette famille, on ne disait plus mais on taisait, les douleurs étaient des passages à vide à ne plus mentionner une fois passées. Il avait entrevu Cammy Logan, en coup de vent, dans des lieux différents et les plus souvent lorsqu'il ne s'y attendait pas. Quelque chose s'était brisé, il avait défait ce quelque chose sans pouvoir déterminer quand ni où. Et cette colère ruminant, il se consumait de l'intérieur. Thémis lui avait volé la vie, lui offrait l'éternité et retirait Cammy de son existence. Il avait fouillé et retourné les archives de Libra, avait eu le temps de faire quelque chose de sa déchéance dans cet éden des âmes et de ces souvenirs, il avait supposé, déchiffré, recollé comme un chercheur fou en proie de finaliser une nouvelle théorie. Entre les pages de ses annotations résidaient des failles qui lui crevaient l'œil et la conscience, ces fissures qui existaient et qui ne pouvaient pas se combler d'une explication acceptable pour la laisser continuer d'exister. Et au delà de cette histoire au raisonnement incomplet, Cammy était devenue omniprésente entre ici et Libra.

Il ne trouvait aucune utilité à persévérer ainsi.

-Il va falloir que vous soignez ma conscience Cammy, lui avait-il soudain répliqué face à une de ses réponses distantes.

Il n'avait pas été correcte avec elle. Pour tout ce qu'elle pouvait représenter, il savait ne pas s'être conduit de manière égale face à elle tout comme il ne parvenait pas à le faire à chacune de leur entrevue hasardeuse. Il ne pouvait s'empêcher d'être furieux.

-Vous avez envahi mes perceptions alors pour votre bien... pour éviter que je dérape comme la dernière fois,

Oui Valentine, tu es malade.
Non.

Il avait eu un air déconcerté.

Tu es malade et tu n'acceptes pas d'entendre que ce que tu dis est faux. Tu n'acceptes pas de croire que tu es passé à côté d'un moment de ta vie et d'admettre que tu as tord.

-...accordez-moi quelques instants seulement. Je vous en prie Cammy. J'ai vu Thor la semaine dernière! Et je vous jure que ce n'était pas à Libra.


Ils s'étaient revus. Rapidement. Dans une distance trop loin pour pouvoir rattraper le temps oublié. Le temps n'attend jamais personne.

Valentine lui parlait, de tout, de rien, autant qu'elle voulait bien le lui accorder. Et ce faisant, Yui ne s'attendait pas à voir les failles béantes de la jeune femme.

(...)

Le temps passe encore, toujours.



[Décembre 2015 - Traditions japonaises]
- Venez avec moi à l'académie.

Une invitation à peine masquée, une prière. Il y a en Cammy Logan, un repère qui le relie de Libra à Keimoo, de Keimoo à Libra. Elle était la seule passerelle qui lui avait été laissée, le point de suture et jonction entre les fissures de sa mémoire.

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MessageSujet: Re: Hollow like my soul   Hollow like my soul EmptyVen 8 Jan 2016 - 9:59

Des yeux qui se font ronds, une lueur de crainte qui s’intensifie à mesure que le ton monte. Jamais Cammy Logan n’a vu la violence peindre la toile glacé des iris de l’homme. Elle n’aime pas ces couleurs, elles l’effraient. La poigne de l’homme sur son bras est forte, douloureuse et bientôt, la crainte laisse place à la terreur. Va-t-il lever la main sur elle ? Non, il est juste dépassé par l’aveu qu’elle vient de lui faire. Il est vrai que mettre le feu à un immeuble n’est pas une chose à faire...aussi, elle fuit ce regard qui la terrorise, la culpabilité s’y mèle. Que pouvait-elle faire d’autre ? Il n’était plus là, il était sorti de sa vie et les murs qu’elle côtoyaient formaient un étau qui écrasait ce qui lui restait de vie. Son corps a survécu à l’accident. Officiellement, elle est vivante. Mais sans Yui à ses côtés, Cammy Logan est tout simplement morte.

Tout semble avoir brûlé. Y compris ce livre “Secrets de Parisiens” et toutes les annotations qu’elle avait ajouté en fin de page. Elles les avait rangé dans une vielle boite à thé en métal, avec tout ce qui concernait son séjour à Paris. Des tickets de caisse, l’invitation de Yui à la rejoindre, le billet d’avion, une petite Victoire de Samothrace qu’elle avait achetée en même temps qu’une autre sculpture miniature, dont elle a oublié le nom.
Ses anciens cours, ses diplômes, et même cette veste qu’elle n’a jamais eu le temps de rendre sont partis en fumée, sauf cette robe corail, son chandail et ses chaussures qu’elle portait le soir où elle a tout plaqué. Au final, le gilet a servi de linceul à un chat inconnu, les ballerines sont restées au pied d’un arbre du parc d’Hiryuu dans lequel elle a grimpé et la robe… elle ne l’a plus jamais portée, préférant se contenter des dons de personnes généreuses.


MY EYES ARE HOLLOW LIKE MY SOUL
just don’t try run & hide



Et puis, il l’a relâchée aussi brusquement qu’il l’avait saisie avant de partir sans jamais revenir, laissant là une jeune femme désespérée. A genoux devant le feu aussi mort que sa propre existence, elle doute. La foi, oui… mais à quel point. Il a fallu d’une réaction, un emportement, impulsif certainement, pour qu’elle remette en question les paroles qu’elles a proférées quelques instants plus tôt. La voix éteinte, elle gémit, les mains jointes.

- Pourquoi me laisses-tu vivre ? Qu’est-ce que tu attends de moi ?

Elle était si bien à Rhode… Ne peut-elle tout simplement pas y retourner ? Son regard se pose sur ce couteau abîmé, la tentation est si forte. Mais elle ne peut pas se donner la mort, ce n’est pas à elle de décider. Plus jamais elle ne verrait les Monts Brumeux et les Lacs Miroirs si elle se laisse aller à la facilité. Elle n’arrive même plus à verser de larmes. Voilà donc encore une épreuve, celle de se laisser étouffer par la douleur sans jamais pouvoir l’évacuer.

- C’est donc ainsi. Si je suis née pour être martyr, et bien soit.

Si les portes de Libra lui sont ouvertes pour l’Eternité, qu’est-ce qu’une vie de souffrances ? Elle se lève alors, étire un sourire et tente de prendre une inspiration. Ainsi, tout naturellement, elle remet de l’ordre dans la maisonnette et s’autorise un regard sur cette petite montre ébréchée. Il lui reste un peu de temps avant de se mettre en route pour les thermes.

You think that you'll get by, you will die, you will cry

Quelques jours plus tard, un messager sera envoyé à Cammy pour apaiser sa peine.
Bien plus tard, elle recroisera Yui Valentine tandis qu’elle se rend non loin de l’hôpital pour glisser une lettre dans la boite aux lettres de la maison de ses parents. Un test, probablement. Elle jouera le jeu, sourira, fera semblant comme à une certaine époque oubliée, sans réaliser la portée de la distance qu’elle instaurera entre elle et lui. Et encore plus tard, tandis que l’hématome de son bras commençait à  jaunir, elle rencontrera à nouveau cet homme. Elle fuira son regard, par crainte de voir à nouveau cette violence qui flirte avec sa mémoire.

- Il va falloir que vous soignez ma conscience Cammy. Vous avez envahi mes perceptions alors pour votre bien... pour éviter que je dérape comme la dernière fois,

Lui a-t-il dit un jour. A une époque, elle aurait sûrement répondu de manière cinglante qui’il aille se trouver une autre infirmière. S’il n’était pas tranquille avec sa conscience, c’est qu’il n’avait pas pris les bonnes décisions et qu’il n’a plus qu’à s’en prendre à lui-même au lieu de se défouler sur elle. Mais...elle a juste penché la tête, sans sourire. Elle n’y arrive plus. Elle ne comprends pas pourquoi elle est toujours éprise. Tout ce qui a été en cet homme, le déclenchement de ce doux tourment, a disparu. Les petites attentions, ces bras qu’il lui avait tendus à chaque fois qu’elle en avait ressenti le besoin… Il les a oubliés. Dorénavant, la seule chose qui semble l’attirer à elle, c’est ce faible lien qui les lient : leur folie commune. Il a dérapé, c’est vrai.

- ...accordez-moi quelques instants seulement. Je vous en prie Cammy. J'ai vu Thor la semaine dernière! Et je vous jure que ce n'était pas à Libra.

Libra, Libra. Et encore Thor. Il se souvient d’une personne qui n’existe pas en ce monde. Il la voit désormais à Keimoo. Une obsession qu’elle jalouse. Pourquoi ne peut-il pas se souvenir d’elle ? C’est une autre entaille qu’il lui inflige sans s’en apercevoir et ce jour là, c’est elle qui a tourné les talons...avant de se raviser et de revenir vers Yui avec un maigre sourire. Ensuite… elle lui a simplement demandé de lui raconter les circonstances de sa rencontre avec le Gardien Impartial.

Les autres rencontres avaient été plus brèves, elle n’avait pas pu lui accorder tout le temps qu’il aurait espéré obtenir parce que décembre lui avait offert un Joker. Il était Tentation, magnifique, angélique. Cammy se sentait revivre peu à peu à ses côtés, recréant ainsi son enfance dans une boule de neige indestructible. La dernière rencontre avec Yui était une invitation à l’Académie. Double épreuve. Elle n’avait pas fourni de réponse claire, mais il était évident qu’il lui fallait accepter. Ce qu’elle vivait avec Joshua était bien trop bénéfique. Elle ne pouvait pas goûter seule à un bonheur offert, pas dans ces conditions.

Elle devait voir Yui Valentine y goûter à son tour avant de sortir définitivement de sa vie.

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