L’écran devint noir tout d’un coup et les noms du réalisateur, producteurs, acteurs et toutes autres personnes ayant travaillées sur ce film, apparurent au fur et à mesure que le générique de fin avançait. Les lumières se rallumèrent dans la salle de cinéma et tout le monde commença à se lever et se rhabiller. Certains restaient encore assis et attendaient probablement la fin du générique afin de voir s’il y avait une petite scène à la suite. C’était souvent le cas, mais comme c’était une comédie, Rachel doutait fortement que cela valait la peine d’attendre cinq voire quelques minutes de plus. Elle entreprit donc de se lever également et prit son manteau. La comédie qu’elle était venue regarder avec Ray valait la peine d’être regardée. Elle n’en savait pas pour lui, mais au moins elle, elle avait beaucoup rit. Les situations étaient vraiment cocasses, les personnages très drôles tout comme le scénario et les répliques, puis tout se termine bien. Elle était contente de ce petit moment tranquille et détendu qu’elle venait de passer. Quand elle croisa le regard de ce dernier, elle lui sourit instantanément.
Mais tout cela fut vite balayé par l’angoisse. En effet, si Ray croyait que c’était une simple petite soirée tranquille au cinéma, il n’en était rien pour Rachel. Après un peu plus de trois mois de vie commune, même si leur relation s’était améliorée au fil des jours, la jeune femme n’était pas complètement satisfaite, ni heureuse. Au contraire, elle souffrait constamment. Cette douleur qu’elle ressentait se reflétait sur son visage, qui arborait une expression de peine et de tristesse presque continue. Depuis quelques temps, il avait été rare de la voir sourire pleinement, vraiment heureuse et surtout, de tenir une conversation avec elle. La jeune femme s’était renfermée sur elle-même. Dès le début, elle avait compris que Ray lui en voulait et qu’il avait besoin de temps pour digérer tout cela. Elle s’était simplement tue, n’insistait jamais et attendait le moment où ce dernier lui avouerait qu’il oubliait le passé, ou s’il avait envie qu’elle partît.
Pendant le premier mois, elle ne disait rien. Le deuxième mois, elle commença à s’impatienter, mais n’osa rien dire. A Halloween, ils avaient passé du temps ensemble et Rachel avait cru que cela pouvait peut être changer certaines choses. Mais cela ne fut pas le cas. Ray continuait à s’occuper de la petite avec une grande dévotion, ce que la jeune mère appréciait énormément. Elle aimait les observer ensemble, cela la rendait heureuse un peu quand même. Elle savait qu’il tenait vraiment à Rose. Mais en ce qui la concernait, elle n’en savait rien. Il ne lui parlait que très rarement de ses sentiments. Quant à Rachel, elle lui avait avoué plusieurs fois qu’elle l’aimait très fort. Elle ne voulait pas insister et ne l’avait plus répété, même si elle brûlait d’envie de le lui crier tout le temps. Puis, elle se rendit compte au bout du troisième mois, notamment après Halloween quand rien ne changea, qu’elle souffrait en permanence à cause de cette situation. Si elle n’en voulait pas à Ray pour cela, elle ne le supportait plus. Elle avait donc intimé à Andréa, qu’elle était prête à partir si au bout du troisième mois, Ray ne lui disait pas rester.
La fin du troisième mois pointa le bout de son nez. Décembre arrive donc très vite, bien plus qu’elle ne l’aurait espéré. Elle avait pris la décision de parler sérieusement avec Ray. Cette conversation était réellement nécessaire. Il avait fallu quelques jours avant qu’elle prît son courage à deux mains et proposât à l’homme qu’elle aimait, de passer une soirée avec elle. Ils avaient convenu de se rendre au cinéma pour regarder une comédie. Rachel s’était alors promise de débuter la discussion à la fin du film. Ce n’était certes pas un moment agréable, mais il fallait que cela se fît. Après, elle se sentirait probablement bien mieux, même si la réponse de Ray fût négative, même si elle dût quitter leur appartement et tenter de l’oublier. Elle avait l’impression d’être capable d’oublier son amour pour lui – même si cela lui semblait une tâche bien difficile quand même – et de ne le considérer que comme un très bon ami. Parce que malgré tout, elle connaissait son attachement avec la petite et jamais elle ne se permettrait de les séparer.
Alors qu’il sortait de la salle, elle prit la main de Ray. Malgré tout, elle tentait toujours et encore quelques approches. Et même s’ils n’étaient pas réellement en couple, elle souhaitait encore profiter du contact avec ce dernier. Elle ne pouvait pas en être sûre, mais cela pouvait très bien être ses derniers moments auprès de lui. Elle le tint alors bien fort, ce qui aurait déjà pu alerter le jeune homme que quelque chose ne tournait pas rond. Pourtant, la jeune mère cachait ses sentiments – comme une bonne actrice – pour le moment et ne faisait que lui sourire à chaque fois que leurs yeux se croisaient. Finalement, ils furent dehors dès qu’ils passèrent les portes d’entrée (ou de sortie) du cinéma. Tout le monde retournait désormais à leurs affaires et à leurs vies. Ils s’arrêtèrent devant le cinéma quelques instants, et elle savait que c’était le moment opportun pour démarrer la conversation. Son cœur s’accéléra et l’angoisse monta encore d’un cran. Rachel évita alors de trop regarder Ray dans les yeux et se concentra sur les passants. Quand l’affluence se fit moins forte et qu’il n’y avait plus autant de personnes dans la rue, elle décida de se lancer.
- Ray, il faut qu’on parle, avoua-t-elle avant de rajouter : Je veux dire, qu’on parle sérieusement, toi et moi.
Elle se doutait bien que ce n’étaient certainement pas les mots qu’il avait espéré. Il s’était probablement attendu à ce que Rachel se mît à parler du film et de ce qu’elle en avait pensé. Ses mots avaient du le surprendre. La jeune femme le fixa rapidement dans les yeux pour noter sa réaction, puis elle baissa son regard qu’elle riva sur le sol. Elle n’était plus du tout à l’aise. D’ailleurs, comme dans un signe d’alerte que quelque chose était peut être en train de se rompre, elle enleva sa main de celle de Ray. Elle joignit les siennes et commença à jouer avec ses ongles assez longs, preuve qu’elle était de plus en plus stressée. L’homme pouvait facilement désormais deviner que le moment qu’ils allaient passer, ne serait certainement pas des plus agréables. Cela contrastait vraiment avec les instants précédents où tout était calme et tranquille. Rachel inspira longuement puis expira pour se donner du courage. Elle releva les yeux pour les plonger dans ceux, bleus ciel comme ceux de Rose, de Ray.
- Je suis désolée mais, je n’en peux plus, continua-t-elle avec les révélations. Je t’avais dit plusieurs fois mes réels sentiments pour toi, et ils n’ont pas changé. Depuis, j’espérais que tu avais fait le point avec les tiens et j’attendais que tu m’en parles. Je n’ai jamais insisté car je n’ai pas osé. Mais je suis arrivée à un point où j’ai commencé à souffrir de cette situation. Je te vois auprès de Rose et cela me ravit énormément, mais je ne sais pas ce que tu ressens vis-à-vis de moi. Je me suis rendue compte aussi que peut être qu’il valait mieux pour moi de me séparer de toi, d’oublier mon amour pour toi et de te considérer comme un ami. Même si cela risque de m’être difficile et douloureux, au moins je ne souffrirais plus autant que maintenant et tous les jours. Je t’ai certainement trop blessé pour que tu puisses me le pardonner. J’ai donc pris la décision que je devais en parler avec toi.
Elle laissa son discours en suspens. Pour le moment, ce n’étaient que des explications, mais venaient ensuite des questions et surtout, des conditions. Parce que Rachel n’en pouvait plus de vivre dans cette situation. Elle avait besoin de réponses et d’être sûre et certaine des sentiments de Ray.
- Ray, est-ce que tu m’aimes ? demanda-t-elle.
La question fatidique était lancée. Maintenant, il suffisait d’attendre la réponse…
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