Danger Zone, what will happen next?

Invité

"You will never know.
Danger Zone, what will happen next?
You will never know!"

Depuis quelques jours, Rachel marchait toute l’après-midi en déposant des CVs dans de nombreux magasins de vêtements. Si elle préférait davantage un travail dans une marque de luxe, elle sillonnait tout de même les autres marques. Après tout, elle savait parfaitement que si elle voulait vraiment trouver un travail, il ne fallait pas avoir de limites, sinon c’était plus difficile. Or, même si elle avait encore assez d’argent pour vivre quelques mois tranquillement, cela ne durerait pas éternellement. De plus, elle devait absolument trouver un nouvel appartement. Pour le moment, elle logeait avec Ray, Andy et Quinn dans un logement pour trois. Ils étaient cinq dans ce petit appartement et cela ne pouvait pas continuer de la sorte. Surtout qu’avec la batterie dans la chambre de Ray, ce n’était pas du tout évident d’y vivre à trois. Rachel avait vraiment besoin de trouver rapidement un travail pour avoir un salaire stable qui rimerait par la suite avec une vie plus stable aussi. Si elle entrait dans les magasins de vêtements, c’était parce que ce domaine l’intéressait plus et qu’elle s’était fixé un nouvel objectif de carrière. La création de sa propre marque de vêtements de luxe. Mais ce n’était pas encore pour tout de suite.

Le matin même, la jeune femme de 21 ans avait eu un entretien d’embauche dans une marque « moyenne », à savoir que ce n’était pas une marque de luxe mais ce n’était pas non plus celle où les habits coûtaient le moins cher. Elle avait accepté de s’y rendre, toute contente que sa démarche commençât déjà à porter ses fruits. Elle se doutait bien que rien n’était encore fait mais d’était déjà un bon début. Le magasin en question se trouvait dans le centre commercial. La directrice l’avait appelée la veille pour la voir à 10h. Rachel s’était donc déplacée, la petite Rose avec elle. Comme tout cela se fut décidé assez tard, elle n’avait pas envie de tout le temps déranger les garçons afin qu’ils gardassent sa fille. Pour le moment, elle dépendait beaucoup d’eux et en même temps, elle avait l’impression de trop souvent leur demander de s’occuper de Rose pendant son absence. Cette fois-ci, elle se mit d’accord avec la directrice pour qu’elle pût prendre sa fille. Celle-ci avait accepté et il en fut ainsi. Pour que Rose fût sage et se comportât correctement – il est difficile de demander cela d’une fillette de deux ans tout de même ! – Rachel lui promit de l’amener dans un magasin de jouets afin qu’elle choisît quelque chose. Et, la fille fut très calme pendant tout l’entretien.

Rachel ne savait pas du tout la manière dont s’était passé l’entretien mais elle n’avait pas l’impression de l’avoir raté. La femme lui avait demandé d’attendre quelques jours avant d’obtenir une réponse définitive. En tout cas, l’emploi du temps de Rachel correspondait avec le profil que le magasin recherchait. Cela ne voulait pas dire qu’elle était prise pour autant. Alors elle attendrait tout simplement. La jeune espagnole ne souhaitait tout de même pas espérer trop puisqu’elle se disait que bien d’autres magasins existaient et avaient sa candidature. D’autres magasins étaient susceptibles de l’appeler alors elle ne se faisait pas encore de soucis pour rien. Si elle n’était pas admise dans celui-là, ce serait un autre qui la prendrait.

Le rendez-vous se termina assez rapidement en réalité. Rachel avait été en avance et l’entretien avait commencé à l’heure prévue. Un quart d’heure plus tard, tout était fini. Elle sortait de la salle puis du magasin. La petite leva la tête et la regarda dans les yeux. Elle prononça quelques petits mots – son langage n’était pas encore fluide mais compréhensible tout de même – et Rachel lui sourit. Rose n’avait pas oublié la promesse que sa mère lui avait faite. Les enfants n’oubliaient jamais. Cela surprenait grandement la jeune mère. Rachel lui répondit alors qu’elles se dirigeaient vers le magasin de jouets. Comme elle ne connaissait pas par cœur le centre commercial – elle y avait été qu’une seule fois seulement pour rencontrer ~~ce connard menteur d’~~Akim Kovatchev deux ans plus tôt – elle alla vers le plan pour trouver la localisation du magasin en question. Elle se sentit obligée de pointer sur le plan l’endroit de ce dernier pour le montrer à Rose. La fille sourit et acquiesça. Cela se voyait qu’elle était excitée par l’envie de jouer avec tout ce qui pouvait bien se trouver dans le magasin. Cela fit rire Rachel.

Les deux montèrent alors au premier étage et arrivèrent au bout de quelques instants, juste en face de la boutique. A l’entrée, un homme assez vieux semblait attendre et regardait les passants. Rachel ignorait totalement qui il pouvait bien être. En tout cas, ce n’était pas un gars qui surveillait les entrées et les sorties des clients afin de voir si les bornes bipaient. Tout d’un coup, alors que Rachel mit un pied dans le magasin, ce dernier bougea et vint la voir sur le champ. La jeune femme sursauta, quelque peu étonnée par la démarche de celui-ci.

- Bienvenue dans notre boutique ! dit-il avec un grand sourire. Vous cherchez un jouet, Madame ? Je vais vous amener un conseiller, attendez une petite seconde je vous prie.

Les yeux écarquillés, Rachel n’eut pas le temps de lui répondre qu’il était déjà parti. Elle cherchait certes un jouet, mais elle n’avait pas besoin de se faire aider par qui que ce fût. Du moins, c’était ce qu’elle pensait. Elle pouvait très bien se débrouiller toute seule sans aucun problème. Choisir un jouet ou une peluche pour une gamine de deux ans était un peu compliqué peut-être mais pas si on ne prenait pas trop de temps. Rachel avait eu pour idée de se rendre dans un rayon, montrer un ou deux jouets à Rose et lui prendre celui qu’elle préférait. C’était comme cela qu’elle faisait souvent. Il n’y avait pas besoin de conseiller pour ce genre de choses. Pourtant, elle ne bougea pas et attendit. Ce n’était pas très poli de planter une personne si celle-ci se déplaçait jusqu’à elle.

Son nouveau téléphone sonna. Elle se mit alors à le chercher dans son sac à main, toujours en surveillant la petite qui se tenait à côté d’elle, très sage. Rachel regarda pour savoir qui appelait. C’était Rayflow. Visiblement, il devait sortir d’un de ses cours et il avait une rapide pause. Elle répondit. Une discussion entre eux commença alors. Puis, Rachel avait de plus en plus de mal à contenir la petite qui voulait partir pour s’amuser dans la boutique. Trop préoccupée, Rachel voyait une silhouette s’approcher d’elle mais elle ne se concentrait pas sur la personne en question.

- Ray, je t’en prie, je te dis que je peux me débrouiller toute seule. Laisse moi gérer, s’il te plaît. Je préfère prendre un appartement seule avec Rose, ne te dérange pas pour nous. Tu sais bien qu’en Espagne j’habitais seule avec elle et tout s’est très bien passé. C'est mieux que tu restes avec Andy et Quinn. Vous venez à peine d'emménager, tu vas pas déménager avec moi maintenant.

A ce moment, Rose se défit de la main de sa mère et partit vers les peluches qui étaient à côté d’elle. La mère soupira, quelque peu agacée. Ce n’était visiblement pas le bon moment non seulement pour parler de ces choses-là mais également de l’appeler.

- Ray, je te rappelle plus tard, je suis au magasin de jouet, Rose vient de m’échapper.

Elle raccrocha quand elle entendit un « ok » qui provenait de Ray. Enfin, elle se dirigea vers Rose pour lui reprendre la main. L’expression sur son visage changea pour signifier à sa fille qu’elle n’était pas du tout contente qu’elle s’était dérobée, même si c’était pour aller juste à côté.

- Qu’est-ce que maman t’a dit ? Que tu ne dois pas partir toute seule ! Je ne suis pas contente, Rose. Allez, viens maintenant.

Rachel reprit la petite par la main. Enfin, elle se concentra sur le conseiller qui venait d’arriver et qui semblait attendre qu’elle était prête à l’écouter. Elle releva alors la tête vers ce dernier et allait s’excuser pour ce petit désagrément. Pourtant, Rachel ne put prononcer un mot. La personne qu’elle vit en était la cause. Elle ne s’attendait pas à la rencontrer, surtout dans ce genre d’endroit. Cela faisait tellement longtemps qu’elle ne l’avait pas vue et c’était vraiment la dernière personne qu’elle souhaitait croiser. Elle avait tenté de l’oublier et cette personne se tenait à nouveau devant elle. Rachel resta bouche bée, ne sachant plus du tout ce qu’elle pouvait faire ni de la façon dont elle devait se comporter. Sa main serra davantage celle de Rose qui poussa un petit cri sous la pression, quelque peu douloureuse pour sa petite main. Sa mère sembla ne pas l’avoir entendu. La jeune femme rapprocha sa fille encore plus d’elle, de sa jambe, comme si elle cherchait à la protéger de cette personne. Même si elle avait changé la couleur de ses cheveux, il y avait des traits qui ne changeaient pas. Rachel la connaissait assez pour ne pas se tromper.

Elle avait devant elle Wunjo Ivanova.

Wunjo Ivanova…

Edit Shiki: On attend d'être re-validée avant de poster un sujet, mademoiselle ;) Verrouillage temporaire. ^^

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Encore une journée de travail bien chargée pour Wunjo. Il ne savait pas bien pourquoi, mais toute la ville semblait s’être donnée le mot aujourd’hui pour aller acheter des doudous, jouets, et autres gâteries pour leurs bambins. Le magasin grouillait de mamans et gamins et c’était un véritable jeu d’adresse de transporter des cartons de doudou sans bousculer ou renverser les demies-portions visiblement intenables. Heureusement, le brun avait maintenant un peu d’expérience dans ce boulot et avait appris à se montrer particulièrement prudent.

Fatigué par les allers-retours avec des cartons pleins les bras –aujourd’hui était la journée « livraisons » avec l’arrivée de toutes les nouveautés au magasin- il s’assit un instant derrière la caisse, soufflant un peu. Il attrapa la bouteille d’eau que le petit vieux rangeait sous le meuble et en but quelques gorgées, profitant que toutes les clientes semblent occupées dans les rayons. Le patron s’acharnait à ne pas vouloir engager de nouveaux vendeurs, affirmant qu’il préférait travailler en effectif réduit, et qu’il n’avait pas vraiment les sous –ce dont Wun ne doutait pas. La boutique n’était pas très grande, et même si elle marchait plutôt bien, les prix très concurrentiels qu’ils offraient laissaient en fait peu de marge au propriétaire. Il y avait pourtant certains jours, comme celui-ci, où Wun aurait apprécié un collègue pour lui filer un coup de main. D’autant que le petit vieux n’était plus au top de sa forme, laissant donc au russe le soin de s’occuper de toutes les tâches un peu physiques.

Les récentes incartades de Wunjo –le fait qu’il ait retouché à la drogue, qu’il ne traîne dans les bars un peu trop souvent, ou les fatigues liés à sa déprime actuelle- faisaient qu’il avait plus de mal à faire ses heures de travail sans être épuisé à la fin de journée –et parfois même dés l’après-midi. Le patron lui proposait régulièrement d’aller se reposer chez lui, songeant probablement qu’il était malade –son teint beaucoup trop pâle le laissait croire- mais Wun déclinait toujours la proposition. Que ferait donc ce cher petit vieux sans lui pour l’aider ?
En se zieutant rapidement dans le miroir des WCs, Wun trouva que, pour une fois, il n’avait pas trop mauvaise mine. Certes, il était pâlot, mais il n’avait pas de cernes –il avait dormi comme un caillou- et il avait même l’œil plutôt vif –mais ça, ça avait peut être un rapport avec l’herbe…

Soupirant, prenant son courage à deux mains, il se releva, bien décidé à aller chercher le dernier carton de peluches dans l’arrière boutique. Il jeta un rapide coup d’œil aux clientes, s’assurant qu’aucune ne semblait à la recherche de conseils ou d’aide et disparut rapidement dans le débarras. Il attrapa le petit couteau posé sur une table et déchira le scotch des cartons, les ouvrant dans un grand bruit. Il vérifia rapidement que le contenu correspondait à la feuille de livraison, signa le papier, le posa sur la table, et attrapa le carton dans ses bras.

Il grimaça un peu, se demandant comment des peluches, des objets somme toute plutôt léger en général, pouvaient peser aussi lourd. A croire que quelqu’un avait décidé de cacher des parpaings ou des lingots d’or dedans. Cette idée le fit vaguement sourire, mais il ne s’attarda pas plus sur le sujet, sentant que ses bras n’allaient pas tenir bien longtemps. Il s’excusa plusieurs fois en faisant se déplacer quelques clientes sur son chemin avant d’atteindre l’étagère voulue où il commença à entreposer les fameuses peluches.
Il était en train de finir la rangée des girafes lorsque le patron le rejoignit d’un pas un peu pressé.

« Dan, il y a une cliente là bas qui m’a l’air un peu perdue »

Déclara-t-il, pointant vers l’entrée du magasin une demoiselle de toute évidence pas japonaise –pas avec une telle chevelure blonde.

« Mais patron, je n’ai pas fini de … »

« Plus tard Dan ! Les livreurs sont au garage en bas, je dois aller signer les bons de livraison pour qu’ils déposent tout, le rangement peut bien attendre un peu ! »

Le coupa-t-il, d’une voix un peu pressée. Il lui tapota gentiment l’épaule, avant de filer à toute allure vers l’arrière boutique, dont les escaliers arrières donnaient directement vers le parking souterrain du centre commercial où se trouvait, notamment, l’espace livraison. Wun soupira doucement, songeant qu’une troisième personne ne serait VRAIMENT pas de trop. Qu’importe, le vieux avait raison : le client était roi, les peluches pouvaient bien attendre un peu avant d’être placées sur leur nouvelle planche d’exposition.

Reprenant le carton dans ses bras, il se dirigea vers la cliente en question, arrivant devant elle alors qu’elle lui faisait dos, réprimant sa fille à propos d’une bêtise. Wun adressa un sourire compréhensif à la gamine qui venait de lever les yeux vers lui, alors qu’il saluait la mère et l’enfant.

« Bonjour madame, est-ce que je peux vous aider ? »

Et c’est ce moment que choisit la mère pour se relever, lui faisant finalement face. Il ne fallut pas longtemps à Wunjo pour reconnaître la personne qu’il avait en face de lui. Simultanément, ses yeux s’arrondirent de surprise –il ne s’attendait absolument pas à tomber sur elle- et ses mains décidèrent de lui faire défaut. Le carton lui glissa des mains et tomba sur ses pieds –lui arrachant au passage un grognement- alors que les peluches se répandaient par terre en silence.

Il lui fallut plusieurs longues secondes pour réagir à la situation, s’accroupir, et commencer à ramasser son bordel. Il avait été incapable de dire quoique ce soit : que ce soit le nom de Rachel, un « toi ici ? » ou autre, rien n’était sorti. La vérité, c’était que Wunjo ne savait absolument pas quoi dire, quoi faire. S’il ramassait ses peluches et s’enfuyait en courant, Rachel avait-elle eu le temps de le reconnaître ? Il avait envie de se dire que non. De croire qu’il pouvait juste fuir, disparaître, et éviter une quelconque confrontation, mais le regard de la jeune femme lui avait dit le contraire. Il leva timidement les yeux vers la petite fille qui était avec Rachel, et qui l’observait avec la curiosité de tout enfant. Etait-ce sa fille ? Dur à dire. Wun ne savait pas si, finalement, son ex avait gardé l’enfant ou non. Il était au fond tout à fait possible que Rachel ait décidé d’avorter, et que cette gamine là soit la fille d’un autre mec, qu’elle aurait rencontré après, et avec qui, peut être même, elle vivait.

Wun détourna les yeux, fixant son attention sur les peluches. Lorsqu’il eut finit, il prit soin d’éviter le regard de la jeune femme, et sans vraiment se tourner vers elle, il marmonna, dans une tentative de fuite lamentable :

« Je vais vous chercher un autre vendeur »

Il fit un pas, et se heurta au petit vieux, qui avait surgi derrière un rayon. Les yeux de Wunjo s’allumèrent, soulager que le patron arrive pile au bon moment pour le décharger de cette confrontation à laquelle il ne voulait absolument pas faire face.

« Ah tu es là Dan ! »

Lança le patron, d’une voix pressée, comme toujours.

« Il faut que je redescende en bas, il y a un problème avec la livraison ! Je te laisse t’occuper du magasin hein ! »

Et sans vraiment laisser au vendeur le loisir de répondre quoique ce soit, il disparut à vive allure, laissant un Wunjo pantois et désarmé derrière lui, avec son carton de peluches toujours serré contre lui. Il se retourna vers Rachel, constatant qu’elle était toujours là, avec sa fille. Il pinça les lèvres, ne sachant que dire, qui regarder. Il finit par déposer le carton sur le comptoir, réalisant que cela ne l’aidait en rien.

Que dire ? Que pouvait-il dire après tout ce temps, après ces mois et années de rancune ou de haine que la jeune femme avait dû cultiver envers lui ?
Il n’osait toujours pas la regarder dans les yeux, et son regard, autrefois vairon, aujourd’hui parfaitement assorti, finissait toujours et encore sur la petite fille. Elle, elle ne savait pas –encore- qui il était, il était donc facile d’affronter son regard, puisqu’il n’y lisait que de la curiosité enfantine, pas de reproche, pas de haine, pas de colère, pas de blessure.

« Vous cherchez quelque chose en particulier ? »

Fut finalement les seuls mots qui osèrent quitter ses lèvres. Comme ça. Mine de rien. Comme s’ils ne se connaissaient pas, comme s’ils étaient deux inconnus : elle, une maman à la recherche d’un jouet, lui, un vendeur. Un vendeur au regard très fuyant alors.

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Au moins, la surprise était partagée. Les deux ne savaient que faire ni que dire. Rachel resta bouche bée et ne réagit même pas lorsque Wun fit tomber le cartons qu’il tenait dans ses mains. Les peluches qui se trouvaient à l’intérieur s’éparpillèrent sous les pieds de la jeune espagnole. Cette dernière sentit que la pression dans sa main diminuait, Rose souhaitant attraper une peluche en forme de girafe. Rachel eut tout de même le réflexe de la retenir en la repoussant vers l’arrière afin qu’elle comprît qu’elle ne pouvait pas se ruer sur les jouets ni en prendre un. Enfin, elle vit Wun qui semblait totalement paniqué et hors contrôle. Lui non plus ne devait pas savoir comment il devait se comporter désormais. Quant à Rachel, elle resta figée sans rien dire et elle continuait à le regarder tout simplement. Wun se baissa et commença à ramasser ce qu’il venait de faire tomber. Il essayait visiblement de ne pas croiser le regard de Rachel. Elle l’observa se relever et ne pas la regarder dans les yeux. Il prononça quelque chose, des mots qui rentrèrent par une oreille et qui ressortirent par l’autre instantanément. Elle ignorait donc ce qu’il venait de lui annoncer mais elle le voyait déjà s’enfuir.

A ce moment, elle ne savait plus du tout ce qu’elle devait faire. Elle s’était tout le temps promis de faire regretter à Wun tout ce qu’il avait fait la prochaine qu’elle le revoyait. Pourtant, tout n’était pas aussi évident. Rachel ne s’y était pas préparée au final. Maintenant qu’il se tenait devant elle, elle n’avait pas le courage de le frapper ou autre. Elle n’avait même pas envie de crier, de se mettre en colère contre lui comme elle en avait longtemps rêvé. Ce dernier ne s’était même pas présenté pour voir sa fille lorsqu’elle était née. Rachel ne savait pas pourquoi elle s’était attendue au moins à sa présence à l’hôpital. Il aurait pu venir quelques minutes, juste par curiosité pour voir Rose. Mais ce ne fut pas le cas et la jeune espagnole avait été déçue mais très en colère contre ce dernier. Elle portait en elle une énorme haine et une peine incommensurable. Pourtant, à cet instant, elle ne pouvait pas bouger ni dire quoique ce fût. Comme si le changement de caractère de Rachel eût également déteint sur ses sentiments envers Wun. Comme si elle ne lui en voulût plus pour tout le mal qu’il lui avait fait. Alors quand elle le vit s’en aller, elle avait l’intention de le retenir. Elle était sur le point de prononcer son prénom et de tenter de le prendre par le bras. Elle n’en eut pas le besoin car Wun fut arrêté par l’autre vendeur.

Elle les observa et les écouta attentivement. Ainsi Wun se faisait appeler Dan. Etait-ce encore une chose qu’il avait changé dans sa vie ? Ou était-ce tout simplement normal ? Rachel n’avait aucune idée de la vérité. Autrefois, elle avait cherché à connaître la réelle identité de Wun car elle se doutait que quelque chose de louche planait au dessus de lui. Elle avait rencontré Lun qui, elle en était sûre et certaine, connaissait la vérité. Mais il ne le lui avait jamais dit. Ensuite, elle avait accepté de rencontrer un certain Akim Kovatchev qui lui avait raconté certaines choses. Pourtant, Rachel n’était pas vraiment convaincue de la véracité de ses dires. Il lui avait probablement dit des mensonges afin qu’elle laissât tranquille Wun, ce qui l’intrigua davantage par la suite lorsqu’elle y avait réfléchi. Elle se rendit compte une nouvelle fois du fait qu’elle n’avait aucune piste ni idée sur l’identité du père de sa fille. Elle eut donc une idée qui lui vint en tête. Si elle restait calme, elle voulait au moins une chose de la part de Wun. Elle désirait la vérité. Après tout ce qui s’était déroulé entre eux, il lui devait bien cela. Du moins, c’était ce qu’elle estimait mais elle n’était pas sûre que c’était de cette manière-là que Wun le vît.

Enfin, Wun se tourna vers elle lorsque son patron le laissa tout seul. Elle comprenait qu’il ne se sentait peut être pas très à l’aise en sa compagnie. L’impression était quand même partagée. Rachel remarqua alors que Wun jetait des coups d’œil vers Rose. Visiblement il préférait soutenir le regard de sa fille plutôt que de Rachel. Cela ne la dérangea pas du tout et ne la décontenança pas. A partir du moment où il ne pouvait plus s’échapper, cela lui convenait. Maintenant, il ne pouvait plus fuir comme il l’avait toujours fait. Il devait assumer. Rachel n’était pas très rassurée en ce qui concernait cette partie-là. Il n’avait jamais pris les responsabilités suite à la grossesse de Rachel. Il lui avait seulement demandé de garder l’enfant, c’était tout. Elle l’avait écoutée et, bien des fois alors qu’il l’avait abandonnée et l’avait laissée se débrouiller toute seule, elle s’était répétée qu’elle n’aurait jamais du suivre son conseil. Ou plutôt, son ordre. Ce ne fut que bien plus tard que Rachel se rendit compte du bonheur que Rose lui procurait. Elle était donc très heureuse et c’était certainement la seule chose pour laquelle elle pouvait remercier Wun. Celle de lui avoir ordonné de garder Rose.

Il lui adressa enfin la parole, toujours les yeux fixés sur Rose. Qu’est ce qu’elle voulait ? C’était tout simple. Présentement, elle était venue dans un magasin de jouets pour acheter quelque chose pour sa fille Rose. Mais maintenant, ce n’était pas la seule chose qu’elle souhaitait. Alors qu’elle sentit à nouveau la main de Rose qui tentait de s’échapper, elle se baissa et la prit dans ses bras. Dès lors, si Wun voulait fixer Rose, il avait dans son champ de vision le visage de Rachel également. De cette manière, ils pouvaient se parler plus facilement. La jeune espagnole fit alors un pas en avant mais elle ne sut pas pourquoi.

- S’il te plaît, trouve un jouet pour ta fille, dit-elle en murmurant mais de façon à ce qu’il fût le seul à l’entendre.

Elle n’avait pas envie d’être polie en le vouvoyant. Il ne le méritait pas. Puis, ce n’était pas comme si elle avait hurlé dans tout le magasin qu’elle le connaissait. Si elle avait baissé la voix, ce n’était pas pour rien. Non, elle n’avait pas honte de le connaître – quoique parfois elle aurait pu – mais elle préférait que les autres mamans ne sussent rien. Et il avait le droit de savoir que Rose était sa fille. Après tout, il pouvait hésiter en se demandant si c’était vraiment son enfant ou pas. Maintenant, au moins tout était clair. Rachel remonta Rose qui commençait à peser son petit poids et qui, glissait tout doucement sur son côté. Elle avait formulé sa demande et il allait l’exécuter. Cependant, elle se doutait qu’il ne dirait rien d’autre. C’était à elle de faire le premier pas et de le lancer. De lui-même, il ne lui parlerait pas et elle ne connaîtrait jamais la vérité. Bien évidemment, rien ne lui prouvait qu’il était disposé à la lui révéler, mais au moins, elle avait une chance en or de savoir enfin. Elle n’avait pas envie de la laisser passer. Avec son bras libre, elle attrapa celui de Wun avant même que ce dernier eût le temps de se tourner et disparaître dans les rayons pour lui trouver un jouet.

- Mais moi, je souhaiterais quelque chose d’autre, ajouta-t-elle.

Elle laissa le silence planer entre eux pendant quelques secondes. Elle le fixait dans les yeux pour être sûre et certaine que ce dernier ne se déroberait pas.

- Je veux la vérité, Wun. La vérité sur toi, sur ton identité.

Elle se demanda ce qui était en train de se passer dans la tête de Wun à ce moment. Elle était également très curieuse de connaître l’expression que prendrait le visage de ce dernier. Elle eut un rapide sourire, comme si elle était redevenue la Rachel d’autrefois, manipulatrice et séductrice. Pourtant, ce sourire n’avait rien à voir avec tout cela. Elle n’était pas non plus en train de savourer une quelconque victoire. Après tout, elle n’avait pas encore obtenu son but. Mais le sourire resta quelques secondes puis disparut.

- Après tout ce que j’ai vécu à cause de toi, tu me dois au moins ça, Wun.

Que dirait-il ? Comment réagirait-il ? Oserait-il lui révéler la vérité ou se déroberait-il comme il l’avait toujours fait ?

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Wunjo avait, par sa position passée de membre de la mafia, vécut pas mal de situations bizarres, dangereuses ou même ridicule, mais il avait l’impression que ce moment étrange où votre ex se pointe sous votre nez avec votre fille accrochée au bout du bras battait à peu près tout. Il zieuta un instant la gamine, cherchant sur son visage des similitudes avec le sien. C’était bien évidemment ridicule, puisqu’à cet age là un enfant ressemble à n’importe quel enfant, à part peut être les cheveux et les yeux. Ses cheveux rappelaient plus ceux de sa maman que ceux de son papa –d’autant que ceux du papa étaient actuellement noirs- quant à ses yeux, les yeux vairons n’étant de toute façon pas héréditaires, il n’y avait pas grand-chose de plus à en dire. Les niaiseries que les gens s’acharnaient toujours à balancer, type « oh, il ressemble à sa maman mais il a le sourire de son papa » avaient toujours sonné parfaitement ridicule selon Wun, et voir sa fille génétique se pointer sous son nez ne changeait pas son opinion là-dessus.

Lorsque Rose releva finalement les yeux vers lui, il les détourna, reportant son attention sur…. Un rayon de jouet. Il ne savait plus où se mettre et encore moins où poser ses yeux. Il avait pourtant la désagréable impression que Rachel ne comptait pas décamper de sitôt et, au contraire, qu’elle avait des comptes à régler avec lui –ce qu’il comprenait parfaitement d’ailleurs au vue de leurs derniers…contacts. Ou plutôt de sa disparition soudaine et inexpliquée.

Wun voulut faire un pas en arrière, presque par automatisme, lorsque Rachel se rapprocha de lui, mais son dos cogna contre l’étagère de poupées juste derrière lui, l’empêchant de fuir d’avantage. Il avait maintenant à son niveau, et beaucoup trop proche, les visages de son ex et de sa fille. Il ne pouvait probablement pas imaginer pire cauchemar là tout de suite.
Il pinça les lèvres, serrant les dents, forçant un sourire tout sauf naturel en réponse à la demande de Rachel.

« Bien sur, madame »

Déclara-t-il, un peu sèchement, sans chercher à se montrer spécialement désagréable. Il avait juste un mal fou à prétendre ne pas être irrité par l’apparition de sa « petite famille » et surtout du mal à comprendre pourquoi Rachel restait au lieu de se barrer loin de lui. Ce n’était pas comme s’il n’y avait qu’un seul magasin de jouets dans tout keimoo. Même dans le centre commercial, il y avait déjà plusieurs magasins du genre.

« Alors, quel genre de jouet ? »

Demanda-t-il, d’un ton égal, essayant de toute évidence de rester concentré sur ce qui était le plus simple pour lui : son travail.
L’ennui étant que Rachel en semblait absolument pas du même avis que lui. Alors qu’il s’apprêtait à se tourner pour se diriger vers un des rayons, il sentit une main se refermant sur son bras. Inutile d’être un génie pour deviner à qui cette main appartenait. Il tira doucement sur son bras pour le dégager, posant ses yeux sur elle. Il sentait bien, à son attitude, que la discussion qui fâche n’allait pas tarder à pointer le bout de son nez. La suite des dires de Rachel ne fit que le lui confirmer, et il haussa les sourcils d’un air interrogateur, bien qu’il ait en vérité une vague idée de ce qu’elle comptait lui dire ou demander.

Et comme prévu, ça ne lui plut pas. Il fronça les sourcils, se demandant dans un premier temps pourquoi elle s’accrochait à cette histoire après tant de temps. Certes, il avait été un parfait connard mais…. Il n’était probablement pas le seul connard sur terre, sûrement pas le premier que la demoiselle avait connu et potentiellement pas le dernier non plus.

« Tu la connais la vérité. Je suis un salaud, fin de l’histoire »

Répondit-il, à demie-voix, pour que les enfants environnant –dont la sienne- ne l’entendent pas, ni les clientes qui s’offusqueraient probablement d’entendre un vendeur parler ainsi à une jeune mère.
Il préférait très largement que Rachel en reste à cette explication –parfaitement crédible et valable dans son cas- plutôt que de la laisser creuser. Il ne voyait dans tous les cas pas l’intérêt de parler du passé, d’autant qu’il ne faisait plus partie de la mafia maintenant. Il avait une vie réglo. Fausse, également, mais réglo quand même. Et remuer les vieilles histoires n’amèneraient rien de bon à personne, pas même à Rachel ou sa … leur fille.

Et comme il s’y attendait un peu, cela ne suffit pas à Rachel. Il croisa les bras, la fixant en silence. Si elle pensait véritablement que le faire culpabiliser allait le faire parler, elle se mettait le doigt dans l’œil. S’il lui disait la vérité au sujet de la mafia et de lui, il la mettrait probablement en danger, et cette fois-ci, il aurait une encore meilleure raison de culpabiliser.

Il plissa les yeux, la dévisageant, se demandant comment il allait sortir de cette discussion sans cris, insultes, pleurs, et toute la parade de la crise.

« Je n’dois rien à personne »

Répondit-il simplement, tout en sachant pertinemment que c’était on ne peut plus faux. Mais il ne devait la vérité à personne, ça s’était vrai. Il avait déjà dévoilé bien trop de choses à des gens qu’il avait mis en danger, et il avait décidé, depuis son changement d’identité, que cela n’arriverait plus. Le cercle malchanceux des gens connaissant la vérité à son sujet ne s’élargirait plus dorénavant, et Rachel ne ferait pas exception, qu’il lui ait fait du mal ou non, qu’elle ait un enfant de lui ou non.

« Alors ce jouet ? »

Enchaîna-t-il, d’un ton plat, comme si les questions de Rachel n’étaient jamais tombées entre le moment où Rachel lui avait dit vouloir un jouet pour Rose et maintenant. Elle pouvait toujours penser qu’il était lâche, ou tout simplement se conforter dans l’idée qu’il était définitivement et irrémédiablement un connard, il trouvait ça mieux que la vérité.

Et puis, ça ne changerait pas ce qu’elle avait du penser de lui jusque là, pourquoi briser les bonnes vieilles habitudes, au juste ?

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Bien évidemment. Tout se déroulait de la façon la plus normale. La plus habituelle. Tout de même ! Rachel connaissait suffisamment Wunjo pour savoir qu’il ne lui dirait rien du tout. Comment avait-elle pu, rien qu’une seconde, s’imaginer qu’il pût lui révéler la vérité ? Stupide Rachel ! Naïve Rachel ! De plus en plus depuis son changement, elle voulait croire en la sincérité des autres. Pourtant, cela ne devait pas s’appliquer à Wunjo. Comme il le disait bien, et il n’était pas difficile de le confirmer, c’était un salaud. Il n’y avait pas grand-chose à tirer de cet homme. Il ne prenait jamais ses responsabilités. Et pourtant, c’était bien lui qui avait demandé à Rachel de garder Rose. A cette pensée, la jeune espagnole fut surprise : il estimait qu’il ne lui devait rien. Elle avait envie de rire dans tout le magasin, tellement fort que toutes les clients se retourneraient vers eux deux. Ce n’était pas un rire suite à une blague, non c’était davantage un rire ironique. Mais elle se retint parce qu’elle savait très bien qu’elle ne devait pas porter leur attention sur eux. En même temps, Rachel eut un sentiment très fort de dégoût envers Wun. Jamais encore il ne lui avait provoqué ce genre de sentiment auparavant. Elle avait envie de vomir rien qu’en se remémorant les paroles qu’il venait à peine de prononcer. Comment osait-il dire une chose pareille ? Dans ce cas, c’était bien pire qu’un simple salaud.

La jeune maman se mordit la lèvre lorsqu’elle sentit que les larmes lui montaient aux yeux. Elle le savait, c’était des larmes de colère mais en même temps, des larmes de tristesse et de douleur. Parce que désormais, elle se souvenait à nouveau du passé et de tout le mal qu’il lui avait fait. Certes, elle se serait mieux porté si elle n’avait rien demandé, mais elle n’avait pas pu s’en empêcher. C’était plus fort qu’elle. Depuis le début, elle avait toujours aspiré à connaître la vérité. Cela ne lui avait jamais réussi et surtout, l’avait toujours rendue triste et avait augmenté la douleur qu’elle ressentait à l’époque. Rachel eut tout d’un coup une impression de revenir dans le passé, comme si rien n’avait changé. Comme si les deux ans n’étaient pas passées. Elle sentit alors son cœur se serrer et elle eut une soudaine envie de crier et de faire un scandale. Mais elle ne pouvait pas bien évidemment. Tout simplement parce que ce n’était pas bien pour l’image de Wunjo auprès des clients du magasin mais également parce qu’elle était certaine de se faire virer par la suite par un garde de sécurité. Ce n’était pas la meilleure manière d’arriver à ses fins. Elle devait tenter de se calmer et de contrôler ses émotions. Pour l’instant, il fallait qu’elle restât tranquille dans ses propos et dans ses gestes. Parce qu’une fois lancée, elle préférait terminer ce qu’elle était en train de faire. Or, pour le moment, ce n’était que le début. Même s’il avait refusé, elle pouvait insister ou du moins, lui dire bien d’autres choses. Elle savait qu’elle se mettrait davantage en colère, mais cela n’avait plus d’importance maintenant.

- T’es pire qu’un simple salaud, Wun, lui répondit-elle en baissant la voix. Bien pire. Tu me dégoûtes.

La vérité sortait de sa bouche une fois qu’elle était en colère. Elle ne se gêna pas de prononcer le mot « salaud » même devant sa fille – alors qu’elle aurait du avoir honte quand même, non ? – parce que Rose ne comprenait pas encore l’anglais. Elle ne parlait que l’espagnol. Il était vrai qu’elle entendait de l’anglais depuis qu’elle était au Japon puisqu’elles vivaient avec trois américains qui parlaient tout le temps en anglais. Même Rachel sentait que son propre anglais s’améliorait à force de discuter avec eux et de les écouter. Quant au japonais, la jeune espagnole n’était pas friande de cette langue et évitait de la parler quand elle le pouvait, à la maison. Pourtant, elle se doutait bien que sa fille dût l’apprendre et ce serait le cas en vivant au Japon. En tout cas, pour le moment, Rachel pouvait dire ce qu’elle voulait.

- Il y a plusieurs raisons qui m’empêchent de faire un scandale ici et de te détester autant que je ne le devrais, ajouta-t-elle entre ses dents pour ne pas laisser la colère l’emporter. Rose est la meilleure qui me soit arrivée dans toute ma vie. Grâce à toi. Alors, c’est la seule chose pour laquelle je devrais te dire merci.

Elle marqua une pause. Oui, Rose était l’une des raisons – et certainement la plus importante – pour laquelle la jeune espagnole n’avait même pas envie de détester Wunjo ni de le frapper. Autrefois, elle s’était imaginée le revoir et lui donner des coups là où elle aurait pu. Désormais, elle n’osait même pas. Même si elle pouvait lui en vouloir pour toute la douleur qu’il lui avait causé, leur fille était une raison qui changeait tout. Maintenant, elle était certaine de ne plus arriver à haïr cet homme autant qu’elle se l’était toujours promis.

- Et moi, comme une idiote, je suis incapable de te haïr à fond. Après tout le mal que tu as provoqué. Tu n’as même pas idée. C’est toi qui me demande de la garder et c’est toi qui disparaît. Mais en fait, je ne sais même pas pourquoi je te dis tout cela puisque tu en auras certainement rien à foutre, jamais.

Rachel sentit qu’elle ne pouvait plus retenir les larmes qu’elle essayait de contenir. Quand elle ferma l’œil droit pendant une fraction de seconde, la larme coula alors sur sa joue. Elle détourna alors la tête afin qu’il ne la vît pas mais elle se doutait bien que cela ne changeait rien du tout. Elle se mordit la lèvre inférieure et s’insulta intérieurement. Vraiment, quelle idiote ! De toute façon, même si elle disait tout ce qu’elle pensait, cela n’améliorerait rien du tout. Wun devait écouter par une oreille et tout ce qu’elle disait devait ressortir par son autre oreille. Jamais il ne se préoccuperait d’elle et de sa fille. Et cela, cela la tuait. Cela la rendait folle. Elle finit par tourner la tête à nouveau vers lui. Elle avait tellement de choses encore à lui dire ou alors à lui demander. S’il ne souhaitait pas lui révéler la vérité, peut-être qu’elle pouvait user d’une manière différente pour en avoir quelques bribes. Le faire parler pour tenter d’obtenir de lui au moins une partie.

- Qui est A.K. ? Qui il est pour toi ?

Rachel avait sorti cette question comme de nulle part. Elle avait changé de sujet si soudainement qu’elle était sûre que cela pouvait déstabiliser un tant soit peu son interlocuteur. A.K., cet homme qu’elle avait rencontré il y avait maintenant plus de deux ans, quand elle était enceinte de Rose. Elle avait cru qu’il pouvait lui apporter des réponses mais ce ne fut pas le cas. Encore un salaud, comme Wun. En réalité, ce souvenir la hantait encore de temps en temps lorsqu’elle y pensait. Or, elle détestait ce ton avec lequel il lui avait parlé. Et ce sourire. Sur le moment, elle en eut des frissons rien qu’à l’idée de se remémorer le sourire qu’il avait eu tout du long de la conversation. Ce sourire mesquin, manipulateur et menteur. Il avait été faux du début jusqu’à la fin. Même lorsqu’il l’avait prise dans ses bras pour la consoler. Désormais, elle était sûre et certaine qu’il avait menti tout du long et elle, elle s’était laissée mener en bateau. Il l’avait manipulée sans ménagement mais elle ne l’avait pas perçue, trop fragile pour cela à l’époque. Encore aujourd’hui, elle ignorait totalement qui était cet inconnu. Elle était juste au courant du fait que Wun et lui se connaissaient.

- Tu sais, cet homme à la peau mate, cheveux bruns, au charme arabe et tout maigre, précisa-t-elle au cas où. Il m’a dit des choses intéressantes sur toi.

Bien évidemment, les choses intéressantes dont elle parlait étaient toutes fausses. Elle en était certaine. Cet homme n’avait fait que lui mentir en lui révélant des choses totalement farfelues sur Wunjo. Elle avait fait comme si elle le croyait, mais depuis, elle y avait réfléchi. Quelque chose clochait. Mais aujourd’hui, elle avait l’impression que cela pouvait affecter son interlocuteur. Peut-être même que cela le ferait réagir et il lui révélerait – consciemment ou non – une partie de la vérité. Elle n’en savait rien. Elle attendait simplement la suite.

En tout cas, pour le moment, le choix du jouet était passé en deuxième plan…

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A.K. Wun haussa un sourcil interrogateur. Là, tout de suite, il ne remettait pas les initiales, ou le surnom, ou qu’importe, la personne se cachant derrière ce sobriquet. De quoi parlait-elle ? Essayait-elle de le menacer ou de lui faire peur en invoquant des noms au hasard ? Non, ça serait grotesque. Pour taper à un endroit si l’on ne sait pas par avance que ça va faire mal ?

Lorsque la jeune femme précisa sa pensée –se rendant visiblement compte que A.K ne suffirait pas à tirer une sonnette d’alarme dans l’esprit du russe- ses sourcils se froncèrent petit à petit alors qu’il liait les initiales, la description, et son faux-frère, Akim Kovatchev.
Si Rachel pensait avoir joué une carte maîtresse en invoquant Akim Kovatchev, elle avait tout à fait raison. Akim était un sujet sensible chez Wunjo, et il ne savait pas bien comment, elle s’en était rendu compte. Il ne put cacher l’air surpris et perturbé qui s’installa quelques secondes à peine sur son visage. Il le chassa rapidement, espérant qu’elle n’avait rien vu –mais en doutant aussi sérieusement. Trop tard. Il ne l’avait pas vu venir, celle-là.

Il fronça brièvement les sourcils, essayant de lier les élèments. Comment Akim et Rachel se connaissaient-ils ? L’avait-il retrouvé lorsqu’elle était revenue à Keimoo ? Pourquoi l’aurait-il cherchée en premier lieu ? Il avait connaissance de son existence, puisqu’il avait copieusement engueulé Wun lorsqu’il avait appris que celui-ci avait engrossé une demoiselle. Mais de là à la chercher… pourquoi ? Et surtout : pourquoi n’avait-il rien dit à Wun ?

Il rangea cette information dans un coin de sa tête, se mettant une note mentale à lui-même disant qu’il fallait qu’il en parle à Akim…. A ceci près qu’Akim et lui étaient comme… en froid. Ils ne se parlaient plus, en tout cas.
En attendant, il avait un problème plus urgent : détourner Rachel de quelque piste de réflexion que ce soit concernant Akim et lui.

« AK ? Oh. Encore un ex qui s’accroche… tu ferais mieux de ne pas l’écouter, il dirait n’importe quoi pour me pourrir la vie… »

Gros coup de bluff, mais tant pis. Il préférait jouer la carte du sarcasme, c’était probablement la meilleure chose à faire pour qu’elle lâche l’affaire. Wun n’avait pas la moindre envie de s’étaler sur le sujet. Il ne voulait pas que Rachel en sache plus au sujet d’Akim, ou au sujet d’Akim et lui. Traiter le sujet avec légereté lui avait semblé une bonne idée pour que la demoiselle pense que ce n’était pas un sujet important. Même si vu la tête qu’il avait tiré lorsqu’elle l’avait évoqué, elle devait bien se douter qu’il devait être un peu plus qu’un « ex persistant ». Ou alors il était un ex sacrément important, quelque part.

Dans tous les cas , il espérait que ceci allait clore le sujet. Il n’avait pas envie d’en discuter d’avantage, il savait le sujet suffisamment brûlant pour ne pas être capable de garder un masque placide très longtemps.
Le mieux dans ce cas était encore de détourner le sujet de conversation de manière plus directe, ne laissant pas d’autres choix à Rachel que celui de lâcher l’affaire.

Il fit un pas vers elle, réduisant l’espace entre eux à quasiment rien. Personne autour d’eux ne sembla remarquer l’étrangeté de la scène, toutes les mères étant bien trop occupée à gérer leurs enfants d’un côté et les jouets de l’autre. Plongeant ses yeux assortis d’un bleu inhabituel, il fronça légèrement les sourcils, pinçant les lèvres en une ligne droite.

« Ecoute, Rachel… tu as changé de vie, et tu sembles t’en sortir plutôt pas mal. J’ai changé de vie aussi. Je ne vois pas ce que ça peut nous apporter de parler du passé aujourd’hui »

Déclara-t-il, le plus simplement du monde, l’attrapant par le bras d’un geste calme, mais ferme, sans pour autant lui faire mal. Juste histoire de lui faire comprendre qu’il n’avait ni l’envie ni le temps de plaisanter, et qu’il resterait implacable sur le sujet : il n’avait pas envie de parler du passé, il ne parlerait pas du passé, peu importe ce qu’elle lui demandait ou disait.

Sans lui lâcher le bras, il poursuivit, la voix basse, le ton sombre.

« Et puis tu veux quoi au juste ? Des réponses ? En voici : pourquoi est-ce que je suis parti comme un voleur ? Parce que je ferais un père horrible. Pourquoi je t’ai demandé de garder l’enfant ? Parce que j’ai eu…. Pitié… d’un embryon. Voilà. Contente ? »

Il avait dit tout ceci d’une traite, sans respirer, sans s’arrêter, sans détourner une seule seconde ses yeux d’elle. Il fallait qu’elle comprenne et accepte qu’il ne dirait rien de plus. Il voulait lui faire croire qu’il ne lui disait rien de plus parce qu’il n’y avait rien de plus. Il ne comprenait pas pourquoi elle était persuadée qu’il y avait autre chose à dire. Certes, il y AVAIT autre chose à dire, mais rien de ce que Wun n’avait dit ou fait ne pouvait le lui laisser croire… si ?

A moins que…. Se pourrait-il que Akim lui ait dit quelque chose ? Mais quoi ? Probablement rien sur l’Organisation. Akim ne ferait jamais rien pour mettre en danger l’organisation, et c’était bel et bien le problème. Alors qu’avait-il pu dire qui avait planté une petite graine, une petite idée dans la tête de Rachel ? Petite idée qui, une fois implantée, refusait bien sur de s’en aller. C’était le souci, avec les idées. Et avec les femmes. Les femmes étaient bien plus obsessives que les hommes une fois qu’on les lançait sur un chemin, c’était assez terrifiant.

Il leva les yeux au ciel, soupira un court instant.

« Sérieusement. Lâche l’affaire. En plus j’ai du boulot »

Et sur ce, il lui lâcha le bras, recula, attrapa un des lapins en peluche qui était toujours rangé avec ses semblables dans le carton, le fourra de force dans les mains de Rachel, l’air de dire, « tiens, le voilà ton jouet », et tourna les talons, pour aller se ranger derrière la caisse, à à peine 2 mètres de Rachel, feignant de se plonger dans le tri des tickets de caisse, évitant obstinément du regard la demoiselle. Quelque part, une petite voix lui soufflait à l’oreille que obstinée comme elle semblait être, ce n’était pas l’ignorer physiquement qui mettrait terme à cet interrogatoire. D’un autre côté, c’était sa dernière idée. Pourquoi ne passait-elle tout simplement pas à autre chose ?

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Alors ainsi, Rachel avait vu juste. Les deux hommes se connaissaient. Et plutôt bien en plus. Sinon, Wun n’aurait pas réagi de la sorte en se rendant compte qu’elle avait rencontré cet homme. Elle nota donc la surprise sur son visage et comprit tout de suite qu’il était perturbé. Il devait y avoir anguille sous roches, désormais Rachel n’en doutait plus. En tout cas, elle ressentit une impression de victoire. Elle avait réussi à bien le déstabiliser. Or, c’était vraiment ce qu’elle cherchait depuis le début. Elle ignorait ce qu’elle pouvait en tirer, mais au moins, Wun était conscient qu’il n’était pas forcément à l’abri. La jeune espagnole n’était pas prête à lui révéler vraiment ce que cet homme lui avait dit. C’étaient que des mensonges de toute façon et cela ne lui servirait à rien d’en parler. Au contraire, cela pouvait soulager Wun s’il était au courant. Et ce n’était vraiment pas du tout ce que souhaitait la jeune mère pour le moment. Elle se doutait que par la suite, il se renseignerait certainement, mais pour le moment, il n’avait aucune autre information que celle-ci. Et Rachel sentait vraiment qu’elle avait tiré sur une corde sensible. Elle pouvait donc en tirer quelque chose, même si elle ne pouvait pas non plus en être sûre et certaine. Comme elle s’y attendait, Wun esquiva le tout en répondant vaguement. Il n’était pas à l’aise totalement non plus. Cela, Rachel le voyait. Et intérieurement, elle souriait, toute contente.

Cependant, ce fut le tour de Rachel d’être quelque peu déstabilisée. Elle se mordit simplement la langue, ce qui ne se vit pas. En fait rien de grave. Simplement que cela lui avait paru quelque peu étrange d’entendre « ex » de la bouche de Wun. Après tout, c’était quelque peu bizarre de s’imaginer que l’homme avec qui vous avez eu un enfant, pût avoir des relations masculines. Non pas que cela la dérangeât ou la choquât puisqu’elle savait que ce n’était pas le premier homme qu’elle connaissait à être bisexuel. Cela lui avait semblé simplement étrange, comme si elle s’était attendue que lui ne l’était pas, et que seules les femmes l’attiraient. Mais la surprise passa assez rapidement en réalité. Elle se concentra davantage sur ce qu’il disait de cet « ex ». Ce dont elle était désormais sûre, c’était qu’il avait plus qu’un simple lien avec cet homme. Elle commençait donc à comprendre la raison pour laquelle l’autre inconnu avait peut être souhaité la rencontrer. Si les deux avaient une liaison plutôt forte, il était tout à fait normal que cela devait être bizarre d’entendre que Wun avait mis Rachel enceinte. L’homme lui avait menti. Elle en avait désormais la preuve. Pourtant, elle doutait du fait que c’était vraiment pour pourrir la vie de Wun. Il disait cela certainement pour qu’elle ne s’intéressât pas plus à toute cette histoire. Et si elle jouait elle-même sur un coup de bluff, en prétendant qu’il lui avait raconté des choses compromettantes ? Elle était certaine que cela était en mesure de le perturber davantage. Elle était donc prête à jouer la carte du bluff quand ce dernier se rapprocha d’un pas d’elle. Il la surprit énormément car depuis le début, il évitait plutôt tout contact avec elle. Elle ne s’y attendait donc pas du tout. Il l’attrapa donc par le bras.

Alors qu’il lui parlait, elle ne sut pas pourquoi, elle ressentit le besoin de détourner la tête. Depuis le début, elle avait gardé le contact visuel entre eux deux. Mais cette fois-ci, alors que c’était lui qui parlait – et qui pouvait sembler se montrer presque menaçant – elle n’avait pas envie de le regarder dans les yeux. Elle riva donc ses yeux sur Rose, qui les observait simplement sans vraiment comprendre tout ce qui se déroulait sous ses yeux de petite fille innocente. Rachel se mordit alors la lèvre. De plus, elle n’acceptait pas du tout ce qu’il lui disait. Elle ne cautionnait pas ses paroles. Rachel avait l’impression qu’il disait tout cela comme si ce n’était pas du tout sa faute qu’elle était tombée enceinte, et que surtout, lui avait été le plus héroïque des hommes à ce moment, notamment en lui demandant de garder l’enfant. Elle soupira longuement. Non, elle n’était pas contente du tout. Elle n’appréciait pas ses paroles. Tout comme elle n’était pas satisfaite. Ses explications étaient toutes simples et ne lui servaient seulement dans le but de se libérer de son emprise. Tout homme aurait dit la même chose, elle en était sûre. Puis, comment pouvait-il être certain de faire un père horrible alors qu’il n’avait jamais essayé ? Il avait simplement peur. Rachel aussi avait été effrayée. Pourtant elle, elle ne pouvait pas y échapper. Elle n’avait pas le droit d’être lâche, de la même façon que l’avait été Wun. Et qu’il l’était encore. Quand il termina, elle osa enfin à nouveau plonger ses yeux dans les siens. Elle les retint quelques instants comme une preuve de défi, une expression de colère sur le visage.

- Un peu d’aide ne t’aurait pas tué non plus, répliqua-t-elle. J’étais perdue aussi, tu crois quoi ? C’était pas évident à gérer. Je pensais que malgré le fait que tu ne serais pas toujours à mes côtés, tu m’aiderais rien qu’un peu. Je ne te demandais pas grand-chose.

Simplement peut-être d’être quelques fois à ses côtés lorsqu’elle en avait besoin. Comme Lun l’avait fait jusqu’à ce que Rayflow ne reprît le relais. Deux hommes merveilleux et qui l’avait beaucoup rassurée et aidée. Sans eux, elle ne s’en serait pas sortie.

- Pourquoi ce serait toujours aux femmes d’endosser le poids d’une grossesse et les hommes qui peuvent les abandonner lâchement ? siffla-t-elle entre ses dents.

Il la lâcha alors et se rendit derrière le comptoir de la caisse. Juste avant, il avait pris un jouet et l’avait mis dans les mains de Rose. Celle-ci sourit instantanément, certainement enfin contente qu’on prît la peine de s’occuper d’elle. Cela faisait de longues minutes que la pauvre attendait d’avoir un quelconque jouer entre les mains. Rachel la regarda avant de se concentrer à nouveau sur Wun. Lâcher l’affaire. Il avait trop de boulot. Elle n’en avait que faire. Elle ne lâcherait pas tant qu’elle le déciderait, elle. Ce n’était pas à lui de lui ordonner une telle chose. Et le fait qu’il fût en train de travailler, elle n’en avait que faire. Elle s’avança donc et ne se préoccupa pas de ce qu’il venait de dire.

- A moins que, comme ton ex me l’a dit, tu n’aies cherché à garder l’enfant simplement pour avoir un héritier.

L’inconnu lui avait réellement dit une chose pareille. Mais la raison pour laquelle il l’avait dite, elle préférait ne pas en parler pour le moment. Elle avait l’impression que ce n’était pas un détail qui pouvait perturber Wun, contrairement à ce qu’elle venait de lui révéler. Elle souriait. Elle n’était pas encore certaine de savourer une victoire, pourtant, elle avait envie de lui sourire malicieusement. C’était tout. Elle n’abandonnerait pas. Malgré le fait qu’il lui eût dit que cela ne servait à rien de remuer le passé car tous les deux avaient changé de vie, Rachel ne l’écoutait pas. Elle avait envie de s’obstiner et continuer.

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« Tu ne me demandais pas grand-chose, mais tu me demandais quelque chose »

Répondit-il, sèchement. Ha. Nous y voilà. Wun et les problèmes d’engagement. Il n’aimait déjà pas qu’on attende de lui certaines choses, alors qu’on les lui DEMANDE… Vraiment, il allait falloir que les gens se mettent en tête que c’était pas son truc les engagements. (Mais ça, Rachel avait du le comprendre… juste un peu trop tard).

Et si au début de leurs retrouvailles, Wun avait endossé le rôle du blasé, du salaud assumé, il en avait maintenant un peu marre. Son ironie le rattrapait, le cynisme le chatouillait, et sa mauvaise habitude de jeter des piques à tout bas pour faire des bras de fer de répartie le reprenait petit à petit. Il n’avait plus envie d’esquiver, la queue entre les jambes, essayant d’éviter la discussion. Non il avait envie de se gausser de tout et de rien, de l’agacer, jusqu’à ce qu’elle ne déclare forfait, exaspérée par son manque d’humanité –et à ce jeu là, Wunjo était TRES doué.

« Mm… parce que les femmes sont beaucoup plus douées que les hommes en victimisation ? »

Répondit-il du tac au tac, avec un sourire parfaitement insolent sur les lèvres alors qu’il soutenait le regard de la demoiselle.

Sur ce coup de poker là, Rachel avait été moins chanceuse que sur le premier. Tout d’abord parce que ce genre d’information ne le bousculait pas tant que ça. Mais surtout parce qu’on ne pouvait surprendre Wun qu’une fois. Il avait passé des années à mentir comme un arracheur de dents et à afficher divers masques pour se fondre dans la masse ou au contraire s’en détacher. Rachel l’avait eu une fois, parce qu’il ne s’y attendait vraiment pas, et qu’il était encore faible de l’étonnement de leurs retrouvailles, mais maintenant, il était mentalement préparé.

Et pourtant… la remarque de la demoiselle le surprit à nouveau… mais différemment. Wun…. Eclata de rire. Oui. Peut être était-ce un peu nerveux aussi. Mais pas tellement. Surtout parce que… Holy shit ! Akim avait vraiment dit ça ? Il repartit dans un petit rire. Akim avait grain. Ok, ça n’avait en fait rien de nouveau, strictement rien, mais là… où était-il allé chercher une idée aussi… aussi…. Grotesque ? Un héritier ? Bon sang un héritier… pourquoi Wun voudrait-il un hériter ?

Il attendit que son rire se calme un peu avant de reprendre la parole sans s’étouffer –quoique Rachel se serait sûrement plu à voir cela. Bon sang. Rire faisait du bien. Rire lui faisait oublier que la situation était tout de même un peu critique.

« Mais oui, bien sur. Je meuuuurs d’envie d’avoir un héritier. Pour lui léguer mes… 3 meubles et 2 bouquins ? Wouh. Petite chanceuse. C’est vrai qu’il serait trop dommage que ces biens disparaissent dans la nature à ma mort mm ? »

Non, vous ne rêvez pas, Wun redevenait… moqueur, taquin. Il reprenait du poil de la bête. Bluff ou pas bluff ? comme toujours, c’était difficile à dire. Il était un bon bluffeur. On l’avait entraîné, pendant des années, à être un excellent joueur de poker, et c’était plutôt une réussite. Il jouait à merveille le désinteressé alors qu’il paniquait intérieurement, notamment. Mais ça, Rachel ne le savait pas. Elle savait qu’il savait mentir, elle ne savait pas à quel point. Et il ne comptait ni lui dire, ni le lui montrer. Il comptait juste jouer le Wunjo habituel, qu’elle connaissait, jusqu’à ce qu’elle arrive à la conclusion suivante : qu’il s’en fichait, point final. Que ce soit vrai ou non importait peu d’ailleurs, tant que elle, elle le croyait.

« Si ce cher A.K t’a dit ça, ça ne fait que confirmer ce que je viens de te dire : il aime bien raconter des conneries »

Poursuivit-il, classant les tickets restant méticuleusement. Il leva les yeux vers Rachel, elle l’observait toujours avec son sourire.

« Tu ne trouves pas qu’il a un humour top ? Je me souviens avoir pas mal ri avec lui… »

Oui, il jouait totalement au con. Il jouait d’autant plus au con que Akim n’avait pas d’humeur. Il était extrêmement cynique, et si Wun était habitué et resistant à ses attaques bourrées de sarcasmes, ce n’était pas le cas de tout le monde. Il était plutôt doué pour mettre les gens à l’aise, Wunjo le savait pertinemment.
Il venait de finir le tri des papiers, et referma précautionneusement la caisse, reportant son attention sur Rachel. Un air mi-menaçant mi-joueur sur le visage, il déclara, un sourire en coin.

« Madame, je vous ai trouvé un jouet. Achetez le ou non, mais veuillez ne pas me déranger d’avantage dans mon travail »

Il se pencha un avant, plissant les yeux sur elle, lui montrant qu’il n’était pas le moins du monde intimidé par son attitude et ce qu’elle avançait, que ce soit vrai ou non. Nom d’un cochon ! Est-ce qu’il était le type qui avait tenu tête à la mafia avant de se barrer en leur riant le nez ou non ? Ce n’était pas une ex avec une progéniture à lui qui allait lui faire peur, ça non !

« Sinon, ça devient du harcèlement. C’est interdit et punissable par la loi »

Il pencha la tête sur le côté, la dévisageant avec un calme étonnant et presque inquiétant, avant de tourner son regard vers le vigil du centre commercial, comme pour lui indiquer qui serait la personne qui allait la foutre dehors si elle insistait un peu trop. Et Wun ne doutait pas trop des compétences du vigil : ces types là étaient formés à résister aux yeux de biches, aux regards larmoyants et aux charmes des demoiselles.

Wun en profita pour zieuter rapidement le magasin, à la recherche d’une cliente abandonnée qu’il pourrait prendre sous son aile, et qui lui donnerait une excellente excuse pour se débarrasser de Rachel. D’ailleurs, voilà qu’une petite lueur d’amusement danser dans ses yeux alors qu’il dévisageait la jeune femme : oserait-elle faire son cirque sous le nez d’une mère complètement étrangère à toute cette histoire ? Il allait tester. Soudainement, et sans trop savoir pourquoi, il se sentait d’humeur extrêmement joueuse. Comme s’il retrouvait l’adrénaline de l’équilibriste qui tente le tout pour le tout, et tant pis si ça foire.

Quittant soudainement et sans prévenir la caisse, il se dirigea vers une cliente au hasard qui semblait un peu perplexe devant un rayon de jouets, en prenant plusieurs en main, les comparant d’un air incertain : pile ce qu’il lui fallait, en somme.

« Bonjour madame » lança-t-il, tout sourire, à l’adresse de la jeune mère, qui leva un regard soulagé vers le vendeur qui venait l’aider dans sa décision. « Je peux peut être vous aider ? » poursuivit-il, un air aimable que Rachel ne lui avait probablement pas beaucoup vu.

Il leva d’ailleurs le nez vers celle-ci, et profita que la cliente soit occupée à observer les jouets, pour jeter à la demoiselle un air narquois. Il savait qu’il jouait avec le feu en la défiant de la sorte, mais étonnamment… il s’en fichait. Ca l’amusait. Il avait retrouvait son côté joueur de manière assez inattendue, et ça le mettait d’humeur joyeuse. Ce coup d’œil ne dura que quelques secondes, que déjà il rebaissait le nez vers la cliente, feignant de l’écouter avec la plus grand attention.

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Choquée. Oui, Rachel était choquée. Il n’y avait vraiment pas de mots pour définir la réaction de Wun. Elle se demandait même si elle pouvait trouver un mot encore plus fort que « salaud ». Non, Wun ne l’était pas du tout. Il était encore pire que cela. Pourtant, aucune expression ne lui venait à l’idée sur le coup. Elle resta bouche bée devant les paroles de son interlocuteur. C’était lui qui lui avait demandé de prendre certaines responsabilités, notamment de garder de la petite. Et c’était lui qui se permettait de simplement disparaître sans aucune aide ? Puis, de se plaindre qu’elle lui demandait quelque chose. Vraiment, c’était pire qu’un simple salaud. Si jusque là elle avait réussi à garder son calme et surtout, ne pas trop penser au fait qu’elle lui en voulait à mort, elle ignorait si elle serait dans la capacité de continuer un peu plus longtemps. Finalement, elle se disait même qu’elle n’aurait jamais du réagir de la sorte. Elle aurait simplement du le frapper, sans se préoccuper des vigiles ni des mères aux alentours, puis sortir dans un autre magasin. Si seulement les mères dans ce magasin savaient qu’elles faisaient aveuglément confiance à un vendeur qui lui-même avait refusé d’être père. Quelle situation cocasse, hein ! D’ailleurs, Rachel ne comprenait pas très bien la raison pour laquelle il s’était mis à travailler dans un magasin de jouets. C’était assez étonnant avec le caractère de ce dernier. Il aurait plutôt du travailler dans un magasin de vêtements ou tout simplement, dans un bar. Cela lui aurait beaucoup mieux collé à la peau. Les jouets et les enfants n’étaient visiblement pas fait pour lui.

Le pire, fut certainement les prochaines paroles de Wun. Il avait retrouvé une certaine assurance, ce qui dérangea tout de suite la jeune mère. Non seulement elle n’apprécia pas encore une fois ce qu’il venait de lui dire, mais en plus, elle se mit en colère quand elle aperçut cet air, et surtout ce sourire, insolent qu’il avait pris. Comme c’était frustrant et énervant à la fois. Elle se rendit compte qu’elle perdait du terrain, et cela fut d’autant plus embêtant. Elle ne sut plus trop comment gérer cette situation. Tout ce dont elle ne doutait plus, ce fut que Wun ne parlerait certainement jamais et qu’il était pire qu’un salaud. Elle n’avait vraiment rien à faire avec ce type. Cela ne servait même plus de lui parler. Puis, il se mit à rire suite à ce qu’elle lui avait dit sur les paroles de cet homme. Il commença d’abord à se vanter qu’il n’avait rien du tout à léguer à Rose et surtout, il continua à prétendre que son « ex » ne voulait que raconter des conneries sur lui. Tout cela pour terminer sur le fait qu’il avait un humeur qui lui plaisait. Non, Rachel haïssait les deux hommes. Elle détestait leurs humours complètement dénués de sens. Elle n’avait qu’une seule envie : mettre une grosse gifle à Wunjo. A nouveau, elle avait retrouvé ce désir si ardent en elle de se défouler. Pourtant, elle ne pouvait pas le faire dans cet endroit. Elle n’était pas non plus capable d’attendre qu’il finît son travail afin de le faire, cela aurait semblé beaucoup plus qu’étrange. Elle avait la petite, également. La jeune espagnole se doutait bien que l’homme recommençait à se moquer d’elle, voire était tout simplement en train de la taquiner. Ce qui ne lui plaisait absolument pas. Elle ne savait plus trop ce qu’elle devait faire.

Elle était sur le point d’essayer de trouver quelque chose à lui répondre, même si ce n’était pas vraiment évident. Elle avait envie de le menacer encore, tenter un nouveau coup de bluff. Il ne la laissa pas faire et se mit à lui parler comme ils ne se connaissaient pas du tout. Une nouvelle fois, il surprit tellement Rachel, qu’elle ne sut vraiment la façon dont elle devait réagir. Elle resta bouchée bée, tout simplement, et les yeux écarquillés. Elle tourna la tête pour voir un vigile quand il parla d’harcèlement, même si elle ne comprenait pas ce qui l’avait poussée à le faire. Elle n’aurait pas du détourner la tête. La seconde suivante, Wun en profitait pour se rendre aux côtés d’une autre mère afin de lui donner des conseils. Il se permit même de lui lancer un air plutôt malicieux et condescendant à la fois. C’était certainement la petite goutte d’eau qui avait fait renverser le vase. A ce moment, Rachel retrouva son caractère de pétasse, celui qu’elle avait avant de tomber enceinte de Rose. Elle eut tout d’un coup un désir terrible d’embêter Wunjo. Elle observa le magasin pour savoir ce qu’elle pouvait bien faire. Elle vit alors la présence du petit vieux qui revenait. Elle eut une idée superbe mais peut être un brin trop méchante. Elle avait envie de faire du mal à Wun, en parlant son supérieur. Elle hésita quelques instants. Non, peut être pas, finalement. Elle lui aurait simplement expliqué d’une manière implicite, que son vendeur ne faisait pas correctement son travail. Et qu’il n’était probablement pas la personne pour laquelle il essayait de se faire passer. Elle savait que cela pouvait blesser, ou du moins, mettre en colère Wun. Elle réfléchit quelques instants. Au final, tout cela pouvait se terminer plutôt mal. Comme Rose était à ses côtés, elle préférait ne pas se lancer dans une telle expérience. Sans Rose, elle aurait peut être un peu plus le cran de faire cela.

Elle finit par rejoindre Wun et la mère qui n’avait aucune idée du jouet qu’elle voulait acheter pour son enfant. Elle se mit entre Wun et celle-ci, toute souriante.

- Madame, n’écoutez pas les conseils de ce vendeur, déclara-t-elle avec un grand sourire, tout en sachant que ce qu’elle venait de dire le mettrait en colère, tout en surprenant la mère. Ce jouet par exemple, ma fille vient de le casser, cela ne vaut pas la peine de l’acheter.

Bien évidemment, ce qu’elle racontait n’était que mensonges. Elle voulait simplement déranger l’homme dans son travail. Et pourquoi pas éloigner la mère de ce dernier ou lui donner envie de ne pas acheter. Un énorme sourire faisait passer tous les mensonges possibles. Rachel se doutait bien que la colère de Wun serait grande et elle était prête à tout encaisser. Même s’il s’en ficherait probablement, elle utiliserait Rose comme excuse pour qu’il n’explosât pas trop. Elle se tourna vers Wun, toute souriante et sans se soucier de son expression et de ce qu’il pouvait bien penser à cet instant.

- Par ailleurs, ce jouet ne me convient pas, ajouta-t-elle à son adresse. Veuillez en trouver un nouveau pour ma fille. Et tout de suite.

Elle parlait comme autrefois. En donnant simplement des ordres que les autres devaient exécuter sur le champ. Elle ne se souvenait pas si elle avait agi de la sorte avec lui autrefois, ou s’il l’avait connue ainsi. Mais peu lui importait. Elle voulait simplement le faire sortir de ses gonds. Si elle y arrivait…

Spoiler:

♦ Civil - Dealer - Bookmaker Age : 38 644 **KMO** :

Wun plissa les yeux, assassinant Rachel du regard. Ca, c’était petit. S’attaquer à son boulot, c’était un coup bas. L’attaquer directement devant une cliente, c’était fourbe, mais probablement plus actique pour Rachel que d’aller directement se plaindre au patron. Tout simplement parce que le patron considérait Wun comme son petit fils, à peu de chose près. Pour une raison étrange et non identifiée, il faisait une grande confiance au russe. Il l’avait même invité à manger avec sa femme et lui plusieurs week-end. Si la demoiselle était allée se plaindre à lui, il lui aurait probablement proposé un jouet gratuit pour se faire pardonner en lui assurant qu’il gérerait le problème lui-même, mais Wunjo aurait gardé son job, il en était sûr. Sans le savoir, en renonçant à aller directement voir le patron, et en choisissant à la place de s’en prendre directement à une cliente, Rachel punissait encore plus Wun.

La cliente en question dévisagea Rachel et Wunjo d’un air un peu perdu, dubitatif. La vérité, c’était qu’elle n’appréciait pas l’attitude de la jeune femme. Ce n’était pas contre Rachel, c’était juste un comportement fort peu…japonais. Faire un scandale, se mêler des affaires des autres, c’était considéré comme impoli d’un point de vue japonais, et la jeune maman devait probablement se dire que Rachel n’était qu’une « show-off », ces européennes qui se prenaient un peu pour des starlettes et qui aimaient attirer l’attention. D’un autre côté, elle se disait aussi probablement que cette demoiselle ne faisait pas ça sans raison. Elle ne pouvait pas deviner qu’il y avait un processus de vengeance derrière cela. Dans le doute, elle reposa le jouet avec précaution, adressant un sourire maladroit à Rachel et Wunjo. Elle murmura un remerciement, à l’adresse de l’un ou de l’autre, dur à dire, et quitta le magasin. Impossible de savoir si elle avait définitivement renoncé à son achat, ou si elle comptait juste le repousser, et passer un autre jour où Rachel ne serait pas là, par exemple.

Dans le doute, Wun considérait que c’était une vente perdue et oui, il était furieux.

« C’est con, ce que tu fais »

Murmura-t-il, à voix basse, l’air extrêmement mauvais.

« C’est con, et dégueulasse. Parce que ce n’est pas moi que tu punis, c’est le patron de la boutique, et il ne t’a rien fait »

Poursuivit-il, enfonçant son index entre les clavicules de la jeune fille. Mine de rien, le patron était devenu quelqu’un d’important pour Wun. C’était un brave type, gentil, ouvert d’esprit. Et l’ancien mafieux supportait assez mal qu’on s’en prenne à lui d’une manière ou d’une autre. Cela dit, Rachel avait probablement obtenu ce qu’elle voulait : elle avait mis le jeune homme en rogne. Il ne risquait pas de lui en dire plus –au contraire, il n’avait qu’une envie, la foutre dehors- mais il avait perdu son calme.

Lui adressant un sourire glacial, il se redressa, la toisant avec un mépris tout nouveau, qui venait de voir le jour en conséquence du comportement de la jeune femme.

« Je ne crois pas, non »

Fut tout ce qu’il trouva à répondre à l’ordre formulé par la demoiselle. Si elle doutait encore de la non-coopération du russe, elle avait là la confirmation qu’il avait décidé de faire sa mauvaise tête jusqu’au bout. Il n’avait plus envie de jouer. En fait depuis le début, il n’avait pas envie de jouer, pas au boulot.

Son sourire s’étira en un rictus moqueur alors qu’il continuait de le regarder de haut.

« Je croyais qu’il ne fallait pas écouter les conseils de ce vendeur ? »

Déclara-t-il, reprenant mot pour mot la phrase que Rachel avait servi à la cliente qui venait de partir.

« Vous l’avez dit vous-même, ça ne vaut pas la peine. »

Enchaîna-t-il, toujours à voix modérément basse, pour ne pas que des oreilles qui traînent puissent les écouter. En vérité, personne n’en avait rien à faire d’eux, les clientes étant trop occupées à jongler avec les jouets et à essayer de tenir leurs gamins.
Il fit un pas vers elle, se penchant, rapprochant ses lèvres de l’oreille de la jeune femme.

« Maintenant, si t’es pas contente, dégage. »

Voilà, c’était dit. Ni plus ni moins : Wun voulait juste qu’elle disparaisse. C’était un juste retour des choses, non ? La dernière fois qu’il s’était vus, c’était lui qui avait disparu, comme un salaud, comme elle aimait à le lui rappeler, alors cette fois-ci, c’était au tour de Rachel de partir… non ? Et cette fois-ci, il ne s’en alla pas, il ne tourna pas le dos. Il resta planté devant elle, continuant de la dévisager avec dédain. Elle aurait été un insecte qu’il l’aurait considéré tout autant. Il avait ses raisons. D’abord, il l’avait vu uniquement comme quelqu’un d’embêtant : quelqu’un qui venait remuer le passé, poser des questions. Maintenant qu’elle s’en était indirectement prise au patron, il lui en voulait vraiment.

Ironiquement, depuis la dernière fois qu’elle l’avait vu, Wun avait pas mal muri. Il avait en tout cas appris à ne pas systématiquement repousser les gens qui essayaient de s’attacher à lui et à accepter de tisser des liens. Il s’était fait des amis, des vrais, et quelque part, le patron en faisait partie. Il était un peu une icone familiale pour le russe maintenant. Et s’il y avait bien une deuxième chose qu’il avait appris durant ce temps où Rachel et lui avaient construit leur vie chacun de leur côté, c’était à protéger ses proches. Quelque part, on pouvait dire que la demoiselle l’avait rencontré au mauvais moment.

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Une sonnerie retentit tout d’un coup. Rachel fut surprise et sursauta sur le coup. Elle avait été trop préoccupée par toute cette histoire avec Wunjo qu’elle avait vraiment perdu toute notion de la réalité. Le monde autour d’elle n’avait pas compté pendant quelques minutes, elle s’était enfermée dans son propre monde. Même sa fille n’avait pas reçu l’attention qu’elle aurait du pendant ce temps-ci. Sans écouter tout ce que l’homme lui avait dit, elle se mit à chercher le portable qui sonnait dans son sac. Elle jura en espagnol parce qu’elle ne parvenait pas à mettre la main dessus. Qu’il y eût peu ou beaucoup de choses dans son sac, de toute façon, celui de Rachel était toujours mal rangé et elle ne trouvait jamais rien. Elle finit par le sortir presque au dernier moment. Elle nota rapidement le fait que c’était un numéro inconnu. Elle répondit tout de suite et s’éloigna, sans se préoccuper du fait qu’elle laissait Wun tout seul. De toute manière, après tout ce qu’il venait de lui dire, elle n’avait envie de rien lui dire. Elle avait été choquée, en colère et avait envie d’exploser d’un rire moqueur à ses paroles. Or, il valait mieux qu’elle ne fît rien. Elle l’ignora donc, tout comme elle ne prêta aucune attention à ce qu’il avait dit, tout simplement pour ne pas se mettre davantage en colère. Alors qu’elle décrochait, elle se rendit compte qu’elle n’avait plus aucune main libre et qu’elle se trouvait dans une position qui commençait à devenir inconfortable. Elle grimaça alors qu’elle écoutait la personne se présenter. Elle remonta Rose en la faisant sauter en l’air, mais cela n’aida pas beaucoup. Finalement, elle décida de la poser sur le sol et de la prendre par la main.

Quelques minutes plus tard, Rachel avait convenu avec la personne au téléphone qu’elle viendrait cette après-midi passer une nouvelle interview. Ce qui la dérangeait, c’était toujours la présence de Rose. Elle ne pouvait pas téléphoner à la maison pour la faire garder par l’un des garçons. Elle n’avait pas vraiment envie. Elle n’avait donc pas le choix que de la prendre à nouveau. Elle finit par se baisser et expliquer à sa fille toute la situation. Finalement, Rachel eut un peu de mal à avouer à Rose qu’elle ne lui achèterait rien pour le moment. Elle vit la tristesse et toute la déception de celle-ci dans les yeux. Les larmes n’allaient pas tarder. Pour la rassurer, elle lui promit cependant un très bon déjeuner et surtout, qu’elle lui offrirait très rapidement un cadeau encore plus grand. Cela ne changea pas grand-chose, pourtant la fillette accepta la proposition en acquiesçant de la tête. Le cœur de Rachel s’était quelque peu serré mais elle préférait ne rien acheter pour l’instant et surtout, dans ce magasin. Après tout ce qui venait de se dérouler ces dernières secondes, elle n’avait vraiment pas du tout envie de se rendre à la caisse mais surtout, choisir un jouet. Elle aurait pu prendre une simple peluche, mais ce n’était pas le seul magasin qui vendait des jouets dans les alentours. Puis Rose avait déjà pas mal de peluches et de jouets à la maison. Rachel avait surtout pris avec elle des affaires de la petite plutôt que les siennes. Et de toute façon, les garçons lui offraient toujours des trucs par ci par là. Elle ne manquait donc de rien. C’était simplement qu’il était forcément un peu décevant de croire quelque chose, qu’on vous y amène et de finalement, qu’on vous dise que cela ne pas va pas être possible. La jeune mère comprenait parfaitement la déception de sa fille, mais pour le moment, elle ne pouvait rien faire contre.

Rachel se relève et prend la main de sa fille. Elle repose le jouet qu’elle tenait dans les mains sur l’étagère la plus proche. Elle ne se préoccupa pas si c’était la bonne, de toute manière, c’était à Wun de ranger par la suite. Elle passa à côté de ce dernier en le bousculant un tout petit peu. Elle finit par s’arrêter un pas plus loin et se retourner.

- Si tu continues comme ça Wun, tu perdras une à une les personnes qui te sont chères, dit-elle simplement. Et personne ne sera là pour t’aider à te relever. Surtout pas moi.

Elle se doutait bien que cela ne servait pas à grand-chose de rajouter qu’il ne pourrait jamais compter sur elle. Il devait très bien le savoir et, de toute façon, cela ne devait pas être sa pensée première. Elle n’était finalement pas grand-chose pour lui. Elle n’était pas importante à ses yeux, alors il ne se fatiguerait certainement pas à venir la voir s’il avait un énorme problème. Mais Rachel savait parfaitement de ce qu’elle parlait. Elle avait elle-même perdu toutes les personnes qui lui étaient proches, juste par son comportement. Si elle n’avait pas été aussi nymphomane autrefois, elle ne serait jamais tombé enceinte. Cela aurait évité l’énorme dispute avec sa mère, le fait que son père ne lui parlait plus et que son grand frère avait coupé tout contact avec elle, tout comme le fait que Marianne, sa petite sœur, avait été tellement choquée par son attitude, qu’elle ne la considérait même plus comme sa sœur. Enfin, Rachel était partie sans dire un mot et même si, en revenant elle avait un peu récupéré Ray, ce n’était pas gagné pour autant. Leur relation était compliquée et très tendue. Rachel se demandait même parfois si un jour ils se mettraient vraiment ensemble. Tout ce qu’elle savait, c’était que si tout continuait de cette façon, elle abandonnerait une bonne fois pour toutes ses espoirs d’être avec l’homme qu’elle aimait. Elle considérait cela comme un bon retour des choses. Elle lui avait brisé le cœur un an et demi auparavant, c’était désormais son tour de le faire. Elle avait donc prévu de déménager avec Rose et de tenter d’oublier Ray. De passer à autre chose et peut être, essayer de rencontrer quelqu’un d’autre qui pourrait lui prendre son cœur. Bien évidemment, seulement si rien ne s’améliorait.

- Une dernière chose avant que je ne parte pour de bon, ajouta-t-elle sans lui laisser le temps de réagir à ses autres paroles. Je ferai tout pour que Rose n’apprenne jamais ton existence. Reste loin d’elle et n’essaye jamais de la contacter. Parce que si tu tentes, je ferai tout pour t’en empêcher.

Rachel ignorait si Wun en avait quelque chose à faire de tout ce qu’elle disait. Que ce fût pour le fait qu’elle pensât qu’il se retrouverait seul au bout d’un moment, ou que ce fût pour cette remarque-ci. Après tout, Wun ne devait avoir aucune envie de connaître sa fille ni de la contacter par le futur. Mais elle préférait le prévenir tout simplement, au cas où et afin qu’il fût au courant. Rose ne serait jamais à lui. Rose ne le connaîtrait jamais. Rachel ne manquera pas de le vérifier et de la surveiller. Elle ne pouvait pas être certaine de ce qui se déroulerait à l’avenir. Peut-être que l’instinct paternel de Wunjo pouvait se réveiller et ce dernier, désirer enfin contacter la petite. Ce qui ne lui sera pas possible, Rachel dans les parages. Enfin, Rachel se retourna et continua à partir. Elle passa les portes d’entrée du magasin sans rien dire d’autre et sans même poser un nouveau regard sur lui. Elle n’avait plus envie de le revoir. En même temps, elle espérait vraiment que ce fût la dernière fois qu’ils se voyaient. Même si elle se doutait bien que, comme ils habitaient la même ville, il se pouvait qu’ils s’aperçussent encore une fois. Ils avaient côtoyé les mêmes personnes autrefois, il se pouvait même que c’était toujours et encore le cas. Rien ne lui prouvait donc qu’elle n’était pas en mesure de l’éviter jusqu’à la fin de sa vie. Mais elle espérait que s’il y avait de prochaines retrouvailles, celles-ci ne seraient pas trop proches de celles-ci. Car, pour le moment, il l’avait mise en colère et elle devait se calmer. Elle devait l’oublier encore une fois et se changer les idées. Alors elle s’éloigna loin, dans un endroit où elle pouvait nourrir la petite et continuer la journée.

"Are your secrets where you left them? cause now your ghosts are mine as well
I think it's time I met them and I think it's time you tell

And you should have told me when you met me all these things I should know
And I should have asked we should have talked about this so long ago"

"We are in a mess, a Danger Zone
What will happen next? You never know.
We are in a mess,a Danger Zone
What will happen next? You never know."

"All your secrets.
All your Lies.
All of it."

» Danger! On double! [PV Erwin]