Board Meeting

(nda: Cette introduction me rappelle les réunions au boulot, et comme je trouve ça sympathique j'ai fait de même ^^ )

Saitô se trouvait déjà dans la salle lorsque les premiers pénétrèrent la pièce. Afin d'instaurer un climat de confort et de partage, il avait proposé à la secrétaire de direction de préparer du café et du thé vert. Il avait installé des gobelets en plastique à chaque emplacement, disséminant par ci par là des récipients contenant sucre et petites cuillères, tout en discutant cordialement avec Mme Honda, qui installait différents dossiers et autre bloc-note à son emplacement attitré.
Tout le monde n'était pas encore arrivé, cependant l'heure sonna la fin des petites conversations... du moins.

Contre le mur à l'opposé de la pièce, Saitô se contenta d'observer ce petit monde, les bras croisés. Il remarqua ainsi le psychologue, vêtu de son éternelle blouse blanche tel un médecin ou infirmier. Le surveillant n'avait jamais vu de psychologue en tenue autre qu'un costard-cravate aussi, la première fois qu'il l'avait croisé, il avait cru qu'il était le médecin scolaire, Terrada. Il remarqua d'ailleurs que celui-ci n'était pas présent, puisqu'il gardait un élève en observation que Saitô lui avait déposé au petit matin, en prenant son poste. Le gamin rasait alors les murs de l'académie, apparemment suite à une nuit blanche un peu trop arrosée. En revanche, le médecin avait envoyé son assistant, Kazuma Fukuda, le représenter. Récemment arrivé dans l'académie, il était assez discret sans pour autant manquer de réserve. Lui en revanche, ne revêtait pas sa blouse. C'était le monde à l'envers. Il prit place à côté de Yui.

Saitô avait adopté la tenue décontractée comme à son habitude, en l'occurence un jean noir partiellement délavé, d'un tee-shirt gris uni et une paire de baskets. Il ne se fit pas prier pour se servir un café, qu'il savait forcément bon. Il allait fermer la porte lorsqu'une autre personne se faufila. Il le salua d'un signe de tête, puis referma la porte.
Madama Honda n'arrivant pas à se faire entendre et l'heure tournant, Ryosuke, de sa main de libre, porta son pouce et son index à la bouche et émit un sifflement court mais aïgu. Guère classe et courtois, je vous l'accorde, mais au moins, le silence régnait à présent. Pas le moins du monde embarrassé par les regards méprisants que certains anciens, et autres "détenteurs de balai" pouvait lui accorder, il fut donc le premier à prendre la parole tout en levant légèrement la main pour faire amende honorable.

- Bonjour tout le monde et euh, désolé pour cette...interpellation, mais je n'ai rien trouvé d'autre. Puisqu'on en est aux présentations, je commence donc.

Il se dirigea vers une chaise libre, situé juste à côté de celle sur laquelle s'était installé le dernier arrivant. Il parla clairement, un petit sourire amusé aux lèvres.

- Je m'appelle Saitô Ryosuke, je suis chargé de la surveillance des élèves et des lieux dans l'Académie. J'ai 36 ans, et je suis arrivé à Keimoo il y a un peu plus de sept mois.

Il ne parla pas de son expérience militaire passée, surtout lorsqu'il constata que le regard de quelques personnes avait changé au moment où il avait prononcé son nom. L'académie était vaste et si certains connaissaient l'identité de celui qui avait découvert le corps d'une lycéennne qui avait mis fin à ses jours quelques jours plus tôt, à présent ils pouvaient y mettre un visage.
Sa présentation terminée, il s'installa sur sa chaise, laissant son voisin prendre son tour, tout en dégustant une délicieuse lampée de café noir. Pas assez fort pour lui, mais il n'allait pas le corser pour son propre plaisir.

Dorian était comme à son habitude affairé à mettre un ordre entre les dossiers de ses patients et sa propre interprétation personnelle quant à leur 'maladie' lorsqu'il entendit son ordinateur portable émettre le signal de l'arrivée d'un nouveau message.
Il grommela un instant, agacé d'être ainsi sorti de sa torpeur matinale et laissa tomber son crayon froidement sur le bureau en métal qui ornait sa petite pièce de vie. Sa chaise roula jusqu'au coupable de ce crime abjecte et il s'intéressa à ce qu'il s'y passait. Ah c'était un mail du cher Directeur de cette Académie qui venait d'arriver sur leur boîte professionnelle. Une réunion académique ? Qu'est-ce que ça pouvait bien être que cette nouvelle attraction ? Il était arrivé depuis à peine quelques mois et n'avait d'ailleurs jamais trouvé que le corps administratif était en retrait par rapport à la vie scolaire, si bien que peu de réunions lui allait très bien.

Il répondit positivement à cette demande sous-entendue, et laissa aussitôt tomber ses occupations vacantes qui avaient longue vie devant elles pour être achevées. Il enfila sa blouse d'infirmier pour être clair dès le début sur sa profession et sortit de son bureau, les mains dans les poches.
Aucune heure n'était vraiment précisée dans le mail, mais il avait comme l'impression qu'il serait en retard... Pardi.

Il eut de la chance, il se faufila maladroitement juste avant qu'un homme robuste et au regard plutôt supérieur ne lui ferme la porte au nez. Il se contenta d'un hochement de tête pour saluer les quelques personnes présentes, et s'assit sur le premier siège disponible. Il reconnut Mr. Valentine en passant mais ne lui accorda pas d'intérêt particulier puisqu'ils ne se connaissaient pas. D'ailleurs, à part Mme Honda qu'il considérait comme nettement inférieure aux responsabilités qui l'incombaient, il ne connaissait personne. Cette réunion s'annonçait bizarre... pourvu qu'il se dise des choses passionnantes.
L'homme imposant prit la parole après avoir émit un sifflement plus qu'agaçant aux oreilles de notre infirmier. Annh ainsi c'était lui le surveillant qui en faisait voir des tas à tous ces chers petits étudiants. Il paraissait plutôt... inaccessible vu comme ça. Dorian joint ses mains tout en posant ses coudes sur la table et garda le silence pendant que la Bibliothécaire se présentait. Mon Dieu qu'elle était rouge. Il eut presque envie de lui prendre la tension sur le moment pour vérifier qu'elle ne faisait pas une attaque cardiaque. Il esquissa un sourire amer et puis, toussotant légèrement pour faire comprendre aux autres qu'il allait se présenter, il se leva, toisant quasiment tout le monde de sa hauteur :

Bonjour. Dorian Fatalys. Pour ceux et celles d'entre vous qui ne me connaissent pas -et je dirais bien, tout le monde-... ironisa-t-il, mesquin et renfermé, je suis l'infirmier scolaire depuis quelques mois.

Il laissa passer un long et presque éternel silence. Il détestait vraiment devoir se présenter ainsi devant des êtres qui ne l'intéressait pas des masses. Il avait cette drôle d'impression de se retrouver au centre d'une réunion d'alcooliques anonymes. Bon sang, il aurait dû rester dans son cabinet.

Alors alors... pourquoi cette réunion ? Y'aurait-il un problème ?"

Dorian savait exactement qu'il était très voire trop ironique sur ce point là. Evidemment qu'ils avaient un problème. Une jeune fille venait de se suicider et c'était sûrement le but de cette réunion. Mais au moins, il avait fait l'effort d'amener le sujet.
Se rasseyant, il sombra dans un mutisme personnel. Il venait de repenser à Cammy... devait-il parler d'elle tout en gardant secret le fait qu'elle soit revenue ? Mmh... peut-être pourrait-il juste rappeler les faits à cette bande de gais lurons pour qu'ils tentent de se préparer à son retour imminent...

Son arrogance et son humour cynique avaient été plutôt mal accueillis parmi les personnes présentes. Dorian n'était pas du genre à être un gros lourd qui insiste mais là, il comprit bien vite qu'il ne fallait plus jouer avec le feu. Le sujet était sérieux, ce n'était pas une petite réunion pour faire genre "on dirige l'école", non, c'était bel et bien un rendez-vous pour parler des problèmes de cette école, et plus particulièrement celui de Kara Sakki qui venait juste de mettre fin à ces jours.
Personnellement, il ne la connaissait pas, ne l'avait jamais vue ni croisé mais ne l'aurait sûrement même pas reconnue si elle avait été sa patiente au vu de l'égocentrisme naturel qu'il affichait. Seuls les élèves qui souhaitent être vus lui restaient en mémoire et au vu des récents évènement, Kara souhaitait plus que tout ... disparaître aux yeux de tous.

Ainsi, elle avait sauté du toit. Beurk, c'était carrément dégoûtant de se voir mourir, c'était sûrement moins flippant de se tirer une balle... mais bon chacun ses goûts.
Le suicide est un appel au secours lorsque la tentative échoue, mais là, elle savait très bien qu'elle ne s'en sortirait pas. Sa décision était sûrement prise depuis longtemps et peu importe ce qu'un psychologue avait pu lui dire ou ce que ses amis avaient pu faire pour elle, sa mort avait été inévitable. Quoiqu'il en soit, cet acte restait une tragédie sans précédent à Keimoo et ce triste moment funèbre venait s'ajouter aux autres faits inquiétants qui parsemaient l'école depuis quelques mois.

Serait-ce ce Saitô qui a découvert le corps ? Pour un surveillant, il ne semblait pas choqué outre mesure, était-il habitué à tant de barbaries ?
Lorsqu'il l'entendit proposer l'installation d'un système de surveillance, il fut pour et contre, sans pour autant exposer son avis tout de suite, et d'ailleurs... son avis... était-il le bienvenu lui aussi ?
Miss rat de bibliothèque prit la parole, toujours tellement timide, mais elle faisait des efforts, il crut bon de lui accorder un point dans son estime pour cela.
Il faillit s'esclaffer lorsqu'elle s'offusqua de mettre des alarmes et de les remplacer par des surveillants. Attendant la fin de son monologue pour se lever, tout en gardant son sérieux puisqu'il était de mise, il prit la parole, pour donner son avis :

Mettre des surveillants pour restreindre l'accès aux toits ? Vous aimeriez y être vous ? Toute la journée devant une porte. Je ne veux pas défendre Mr Saitô qui peut très bien le faire lui-même mais l'installation d'une alarme est sûrement beaucoup plus efficace qu'autre chose. Et puis... pourquoi pas rajouter quelques caméras dans les points 'stratégiques' de l'école ? demanda-t-il en prenant son menton du bout des doigts, mimant une intense réflexion, ... bien sûr, je ne parle pas de porter atteinte à la liberté des étudiants mais ils sont ici dans une Académie, pas chez eux ! N'en mettez pas dans les chambres, ni dans les toilettes, mais il faudrait peut-être faire une liste des points noirs de l'Académie. Je vois déjà par exemple, les sous-sols ainsi que les gymnases aux heures vides. Certains élèves ne se gênent pas pour y traîner sans autorisation. minauda-t-il sans balancer de noms pour autant.

Il se décala de sa chaise et fit quelques pas autour de la table, il n'avait pas envie de rester sans bouger. Il passa derrière Mr Valentine qui le regardait de façon beaucoup trop noir pour qu'ils puissent s'apprécier, puis derrière Mr Fukuda qui semblait trouver dérangeant le fait qu'il se déplace ainsi... Enfin, il se posta derrière le siège de Mme Mashimoto et posa ses mains sur le dossier, sa tête se trouvant juste au-dessus de la sienne :

Vous fumez ? demanda-t-il innocemment. Si je vous pose cette question abstraite, c'est parce qu'une campagne de pub contre les effets nocifs du tabac à été lancée. Vous savez les petits messages censés être très choquants et déstabilisants qui sont collés sur les paquets ? Avez-vous vu la réaction des jeunes fumeurs ? Ils en rigolent ! Il ne faut pas les prévenir des risques, il faut simplement interdire les étudiants de s'approcher d'un endroit dangereux. Peut-être que la mise en place d'une nouvelle mesure disciplinaire pour les 'réfractaires' serait de mise.

Il laissa là la pauvre bibliothécaire et retourna vers son siège, calmement. Cette fois, il n'avait pas été désobligeant.

Ce fut la jeune bibliothécaire qui prit la parole en premier. Avec un petit air amusé, Saitô l'écouta, comme toutes les oreilles qui se trouvaient là. Aussi la demoiselle, qui était à présent le centre de l'attention de tous, était particulièrement déstabilisée d'être ainsi dévisagée. Ce qui devait être plus perturbant encore, c'était de lire les avis favorables mais également désapprobateurs sur les visages de tout à chacun. Saitô, bien que sensible à l'effort qu'avait surmonté la jeune femme, en dépit de sa timidité maladive, pour exprimer son avis, fut toute fois en total désaccord avec ses propos. Déjà, elle se fourvoyait: Ryosuke n'avait jamais prétendu que l'école était responsable du terrible sort de Kara Sakki. Cette dernière avait du faire preuve de suffisamment de détermination pour en arriver à cette extrémité, et même si le toit n'avait pas été accessible, il aurait été plus que probable pour elle de trouver une autre alternative pour...éteindre sa chandelle.

L'ensemble des propositions était un peu fébrile et peu efficace. Les surveillants n'étaient pas non plus des agents de sécurité, et Keimoo n'était pas un de ces établissements sensibles tels qu'on en trouvait aux Etats-Unis. De plus, l'effectif actuel n'était pas suffisant et les embauches se faisaient rares compte tenu de la réputation actuelle de l'académie. Les disparitions d'élèves, rebellions, agressions, et autres affaires médiatisées ne facilitant pas la tâche. Enfin, c'était notamment grace à la presse que Saitô avait eu vent des déboires de Keimoo et c'était la raison pour laquelle il avait tenu à travailler ici. Malgré tout, il aimait son job.
Revenant au coeur du problème, il se permit toutefois une remarque, sans toutefois hausser la voix, pour ne pas se montrer trop imposant et ne pas effrayer cette biche.

- Mademoiselle Mashimoto, une alarme de sécurité, c'est discret et bien plus efficace que l'intimidation qui n'engendrerait que plus de conflit auprès du...
Il n'avait pas eu le temps de terminer sa phrase que l'infirmier se leva. Il s'interrompit donc, perturbé par ce geste une fois de plus hautain de la part de Fatalys. C'est qu'il devenait vraiment énervant la longue ! Surtout à l'évocation de son nom accentué par cette tonalité qui ne venait pas du continent. Cependant, Saitô dut reconnaitre que l'idée des caméras n'était pas si mal. Le fait de prendre les sous-sols pour exemple lui provoqua un petit pincement intérieur parce qu'un doux souvenir lui y était rattaché, mais si sa rencontre avec la petite Saki à cet endroit lui avait été agréable, il n'oubliait pas que lors de son passage dans ces lieux sombres et humides, il avait remarqué sur le sol des canettes de bières, des mégots de cigarettes mais également des emballages de médicaments, probablement type ecstasy. Pourtant, c'était un lieu qui, comme le toit, était censé rester verrouillé. Les gamins étaient vraiment futés. Les simple serrures ne leur résistaient plus.

Sortant de ses pensées, il observa le petit cinéma de l'infirmier qui avait quitté sa place, jusqu'à ce qu'il y retourne. Serrant les poings, il réprima une remarque cinglante tandis que Valentine prenait à son tour la parole. A ce rythme, il y avait de fortes chances pour que ça tourne au règlement de compte verbal, Saitô lui-même était limite. Lorsque Honda ouvrit à nouveau la bouche en soulignant les disparitions, une cacophonie résonna dans la salle, et la pauvre dame fut littéralement incendiée

- S'il vous plait !

Un enseignant avait pris la parole. Il s'agissait du professeur de Physique-Chimie, dont la retraite approchait à grand pas, Yoshinobu Matsuda. Réputé pour sa sévérité mais cependant très respecté en tant que doyen de l'Académie, les quelques mots qu'il venait de prononcé avait suffi à attirer l'attention et clouer le gosier des plus réfractaires.

- Loin de moi l'idée de remettre en doute l'autorité de notre direction, je soulignerais que le règlement de l'école n'est pas pour rien dans le départ de certains élèves et autres affaires scandaleuses qui ont touché l'Académie. Keio Dupreil et Cammy Logan mais aussi Lun Marv, Tenma Aoki, plus récemment Yume Namida, en sont les preuves vivantes. N'êtes-vous pas d'accord ?

Saitô attrapa cette perche tendue pour se manifester à nouveau.

- Tout à fait, Matsuda-San. Bien que n'étant pas encore présent lors du changement du règlement, il n'est pas nécessaire d'avoir été témoin des conséquences pour ne pas en avoir eu vent. Intimidation, punitions, exclusions... Ce ne sont pas les seuls moyens à employer. Plutôt que de mettre en avant les échecs, pourquoi ne pas agir dans le sens inverse et récompenser ceux qui se donnent à fond pour réussir ? C'est de ça dont a besoin Keimoo, d'une image positive. Si j'étais élève ici il y a 20 ans, il est évident que je me serais aussi fait la malle. Des familles dépensent des sommes colossales pour que leur enfants aient une bonne éducation. Pas pour les priver de liberté. Que deviennent ceux qui se font exclure, ceux qui tournent mal ? Ils volent de leur propres ailes jusqu'à ce que l'un d'eux se retrouvent un pied dans la tombe, au fond d'une chambre d'hôpital.

Une pensée pour Kumori, dont l'actualité avait fait le tour du Japon, réduisant ainsi les inscription de 2011.

- L'idée des caméras n'est pas mauvaise... Mais regardons les choses en face. Nous ne sommes pas dans un pénitencier. Les gamins ici sont brillants, ça tout le monde le sait. Cependant à l'heure actuelle, elles ne serviraient à rien sinon qu'à soulever d'autres polémiques. Sans compter leur coût.

Il pensa au précédent Event qui avait rencontré un certains succés même auprès de quelques élèves récalcitrants, comme Taylor Donovan. C'était pourtant une course qui avait pour simple but de gagner quelques oeufs en chocolat... Un jeu enfantin. Mais le simple fait d'attribuer une récompense avait suffit à sortir les élèves de leurs cocons, et de les voir s'unir. Saitô avait suivi de près les évènements, et tout s'était déroulé sans débordement. Le comité des élèves s'était organisé avec brio pour faire de cet évènement, un succés. L'espoir était loin d'être perdu.

Cette réunion était réjouissante, bien plus qu'il ne l'aurait pensé. En effet, il n'avait pas du tout accordé d'importance auparavant à tout ce qui passait ici... des agressions, du racket, des vols, des coups, des disparitions et puis ce suicide qui avait déclenché cette alerte rouge. Kara Sakki avait dû mettre fin à sa vie pour que l'Académie se 'bouge le cul'. Dommage qu'il ait fallu en arriver là.
Quoiqu'il en soit, quelques idées fusaient mais étaient aussitôt retournés à l'envoyeur avec un argument contre-indicateur. Dorian regarda Yui d'un air un peu détaché et supérieur :

Et qui s'occuperait de mes 'patients' à l'infirmerie ? Vous peut-être ? Vous êtes déjà débordé en tant que psy, alors ne mélangeons pas tout, voulez-vous.

C'était acerbe, peut-être que Yui allait réagir au quart de tour et venir lui en flanquer une mais si le personnel de Keimoo n'arrivait déjà pas à se tenir entre eux, où allait l'école ?! Enfin bref, il fallait réfléchir calmement à quelque chose qui endiguerait ce problème sans attenter à la liberté des étudiants comme l'avait bien fait remarquer Saitô.

C'est un fait que si j'étais élève ici, je n'apprécierais pas d'être surveillé à longueur de journée... mais le but n'est pas là. Il faudrait juste augmenter la sécurité ou la difficulté d'accès à ces endroits précis.

Il porta une main à son menton en entendant la remarque de Yui. Punir les élèves peu appréciés ? Quelle était que cette idée saugrenue ! Il posa ses deux mains sur la table et se leva, soudain atteint de folie passagère dans le regard :

Parleriez-vous de discrimination Monsieur Valentine ? Je ne pense pas qu'au 21ième siècle, on utilise encore des agissements aussi négatifs, surtout dans une école !

Une fois de plus Mr Saitô inversa le problème et parla plutôt d'avantages ou de récompenses à donner à ceux/celles qui n'avaient pas de problèmes ou qui passaient une scolarité calme et intellectuelle. L'idée en soit n'était pas mauvaise mais ça ferait encore une fois de nouvelles disparités entre des élèves déjà séparés en groupes sociaux. Prenons l'exemple des racailles par exemple, ils n'auront jamais de récompenses, et les rebelles, les creepies ?
Bref, ils tournaient en rond et ne trouvaient pas d'idées qui pourraient sauver le climat tendu qui régnait à Keimoo.

Lorsqu'un autre prof s'énerva légèrement pour reporter le sujet sur les disparitions inexpliquées de plusieurs élèves, Mrs Mashimoto se leva pour se carapater. Et bien en voilà d'un acte utile et agréable. Dorian se contenta de chasser cette pensée d'un geste de la main et profita de l'intervention de ce prof pour libérer les dernières informations dont il avait été mis au courant :

Bien, concernant les élèves, il y a quand même quelques bonnes nouvelles non ? Le jeune Marv est réapparu d'entre les morts, Dieu seul sait pourquoi mais il est là. Tadashii Tsumi également paraît-il ? Quant à Sora Kumori, il est sorti du coma et il trace de nouveau sa route dans les méandres des couloirs de l'Académie. dit-il tout en souriant. Il était sincèrement soulagé de voir revenir ces précieux élèves qui pourraient lui apporter de nouveaux ragots à l'infirmerie.
Cependant, Yume Namida est partie finir ses études à Londres, et apparemment, elle ne reviendra pas. Quant à Cammy Logan... qui vivra verra. En ce qui concerne les autres comme Keio Dupreil, Tenma Aoki, je n'ai pas de nouvelles.

Il préféra taire sa rencontre avec Cammy Logan ne lui ayant pas parlé de cette réunion et ne sachant pas s'il pouvait faire part de son retour.
Il songea également à Yume et préféra taire aussi d'où venaient ses sources. Il se rassit sur ces bonnes paroles.

Il semblerait donc que cette réunion ne fût pas vouée à l'échec. Enfin, si on ne tenait pas en compte la fuite de la bibliothécaire dont la pression accentuée l'avait poussée à prendre la fuite.
Pas mal d'idées fusaient et Ryo espérait que Mrs Honda arriavit à prendre les notes nécessaires. De son côté, Saitô avait sorti un papier et un stylo afin d'en prendre également, relevant des noms qui lui semblaient familier mais dont il n'arrivait pas à associer un visage. Selon lui, il fallait impérativement revoir certaines parties du règlement, instaurer une système d'alarme pour les accés "réservés", mais il avait également apprécié l'idée du psychologue. L'idée qu'un membre du personnel ait un rôle de tuteur afin que les élèves soient écoutés serait un sacré bon en avant. Mais l'écoute ne suffisait pas, les actions qui en découleraient seraient nécessaires, mais encore là, à user avec beaucoup de subtilité et de tact. Saitô, sans vouloir constester les capacités de ses collègues, doutait que ce fut dans les attributions de tout le monde. Lui-même ne s'estimait pas forcément plus capable qu'un autre, mais le fait d'avoir pu venir en aide à Saki Ôsen était une victoire. S'il pouvait venir en aide à d'autres élèves, il le ferait sans hésiter.

A présent, ce fut le cas de Taylor Donavan qui était soulevé. Cette réunion allait-elle traiter d'élèves au cas par cas ?
Et bien soit. Une fois de plus, un évènement facheux s'était déroulé sur le toit. Saitô songeait quelques minutes plus tôt à la demoiselle, à propos de l'Event de Pâques. Mais l'Event avait eu lieu avant qu'elle envoit Myle Knepper à l'hôpital. Le surveillant, aussi souple qu'il était concernant les élève devait bien avouer que cette affaire était grave, et que des mesures disciplinaires devait se tenir.

- Il me semble qu'elle est renvoyée temporairement le temps qu'une décision soit prise. Quelle est-elle ? La logique voudrait qu'elle passe devant le conseil de discipline. Une fois de plus, cela remet en avant les mesures à prendre sur l'accés aux toits. Il est possible que l'agression aurait pu être évité si les "fortes têtes" étaient soumises à une observation plus étroite. Quant à la demoiselle, je suppose que le renvoi est inévitable. Cependant, j'estime qu'il est de notre ressort - et quand je dis nous, je ne parle pas de l'ensemble du personnel, mais du système éducatif - d'aider cette jeune fille à sortir du pétrin dans lequel elle se fourre. Elle semble ne pas savoir qu'elle chemin emprunter pour avancer. Si la commission et le grand Conseil opte pour le renvoi, est-ce que ça lui rendra service ? Quel avenir aura-t-elle ? Certains diront "Peu importe ! Ça ne nous concerne plus !" Mais non. Parce que peu importe ce qu'elle fait ensuite, Keimoo en sera forcément la cause.

Une fois de plus, il songeait à un cas similaire. Celui d'un fil à papa qui le sollicitait régulièrement pour le sortir du pétrin depuis qu'il avait été renvoyé de Todai. Il avait tenté une inscription à Keimoo, mais son dossier ne l'avait pas aidé et il ne fut pas accepté. Aujourd'hui, il dealait et s'attirait les plus grosses emmerdes possible. Alors, autant qu'il le pouvait dès que son planning le lui permettait, Ryo allait le voir, avec ou sans invitation.

- J'estime que tout le monde a droit à une seconde chance.

Certains étaient d'accord, d'autres pas. Il avait fait ce qu'il pouvait, mais... il lui était impossible de résoudre les problèmes de tout le monde.

Spoiler:

En effet l'idée d'une sorte de cellule psychologique pour écouter les élèves en crise n'était pas mauvaise, elle était cependant plutôt difficile à mettre en place. L'Académie comptait pas moins de 200 étudiants minimum rien qu'au lycée et il semblait évident que seuls les élèves dont le caractère est influençable viendraient parler de leurs problèmes aux membres du Personnel qui ne seront plus assez impliqués personnellement pour tendre une oreille responsable à tous les malheurs du monde. C'était voué à l'échec.

Définir un tuteur pour chaque élève semble judicieux mais les élèves bornés, agressifs, sûrs d'eux, revendicateurs et rebelles ne viendront pas nous voir pour expliquer leur problème et la solution qu'ils attendent. Les mêmes fauteurs de troubles agiront toujours aussi impunément au sein de l'Académie.

En parlant de fauteurs de troubles, le sujet de Taylor Donovan arriva rapidement sur le tapis. Logique. Dorian repensa à Myle, encore alité même s'il avait ardemment reprit des forces et de la volonté.
Après avoir eu le portrait de la jeune fille, Fatalys s'était empressé de le distribuer à tous les membres du personnel ainsi qu'au Comité des élèves, tout en leur imposant une discrétion au sein de l'Académie pour éviter la panique et la fuite de Taylor. Finalement, les recherches avaient été fructueuses, il s'agissait de Taylor Donovan, jeune fille de 21 ans, d'origine Américaine, arrivée depuis peu au Japon et depuis encore moins de temps en faculté. Inscrite au Club de Boxe, elle n'avait pas mit longtemps à faire exploser toute sa rage. Certaines filles de sa section se plaignaient de rackets et de violences grandissantes. Elle était irrémédiablement sur la mauvaise pente en effet.

J'ai suivi cette affaire de près étant donné que c'est moi qui ai trouvé Myle sur le toit après son agression. J'aime autant vous dire que mon jugement risque d'être un peu faussé à cause de mon implication personnelle dans cette histoire mais... je ne supporte pas un tel comportement venant d'un élève. C'est absolument inadmissible s'emporta Dorian avant de s'excuser platement pour avoir haussé la voix. Il ne reprochait rien à tous les gens présents ici, mais il était clair que cette jeune fille n'avait plus rien à faire à Keimoo. Myle Knepper est encore à l'hôpital depuis cette agression et il a décidé de porter plainte contre elle, alors Keimoo n'est plus d'un grand secours pour cette racaille en crise. Personnellement, je vote pour le renvoi définitif même si je comprends que ça ne lui sera pas d'une grande aide dans sa vie future, mais que voulez-vous faire ? Lui parler ? La border quand elle se couche ? Elle n'a pas demandé votre aide parce qu'elle s'est sûrement énervée pour un rien. Ce genre de personne ne fera jamais d'efforts et ne changera jamais. Je ne tolérerais pas qu'elle puisse revenir dans cet établissement. Dans cette affaire, il ne s'agit plus de penser à Taylor mais à Myle. La victime, c'est lui que je sache.

Dans sa tête tout était clair, Taylor devrait être irrémédiablement punie et si elle ne l'était pas, il s'engagerait auprès de Myle pour poursuivre cette étudiante en justice et dans chaque parcelle de cette Académie à la recherche du moindre faux pas qui la conduirait au renvoi définitif. De toute façon, à l'heure actuelle, elle avait fui ses responsabilités, en bonne lâche qu'elle était. Elle ne reviendrait pas à la faculté, c'était trop risqué pour elle.

Pendant de longues minutes après son monologue, Dorian ne put que constater que son attitude bornée et sans appel avait un peu cassé l'ambiance. Il semblerait que toutes les personnes présentes actuellement soient dotées d'un soupçon supplémentaire de 'seconde chance'. En étalant ainsi sa définitive opinion, il avait froissé quelques idées de rééducation de la jeune rebelle, mais personne n'avait osé lever la voix contre sa proposition. Ils n'avaient fait qu'acquiescer... mollement mais sûrement.

Il passa une main dans ses cheveux fraîchement coupés et tout en reposant ses deux paumes de main sur la table, il put enfin lâcher cette pression qu'il avait accumulé depuis son retour de l'hôpital. Il avait gagné. Myle avait gagné.
Après de banales papotages et formalités administratives, il entendit le surveillant invoquer une nouvelle proposition. Dorian en mouchard ? Vu sous cet angle, c'était pas très glorieux mais il s'avérait que c'était plutôt vrai. De nombreux étudiants arrivaient chez lui avec des arcades sourcilières en sang ou des bleus autant inexpliqués qu'inexplicables sur des parties du corps rarement exposées aux brimades quotidiennes. Il serait pas mauvais de tenir un rapport quotidien sur ces présumés actes de violence.

Je m'y tiendrais, acquiesça-t-il à son tour avant de regarder le surveillant sortir de la salle suivi de près par la secrétaire Mlle Honda. Il n'était pas contre un bon café lui non plus mais il se contentera de celui dans son bureau. Il avait passé bien plus de temps que nécessaire en compagnie de ses 'collègues' et il ne voyait pas l'intérêt de partager un moment café avec des personnes qui ne cachaient pas leur aversion pour lui. Quand on est intelligent et professionnel, on n'a que très peu d'amis. Il vivrait avec.
Il remit le col de sa veste et salua poliment le reste du personnel qui était encore assis à traînasser. Il fut plus généreux avec le psychologue dont il ne savait pas encore s'il devait le haïr ou l'apprécier à sa juste valeur, Valentine... murmura-t-il avec un signe de main typiquement militaire et un sourire narquois, puis il quitta la salle aussi discrètement qu'il était entré, sur des pattes de velours.