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 Ces blessures qui nous forgent [CLOS]

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MessageSujet: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyVen 8 Juil 2011 - 18:33


    Suite de :  Parce que sans toi(t), je ne pourrais pas être moi

    L'enivrante chaleur du tunnel doré s'était subitement évaporée, laissant place à la réalité. Celle-ci était froide, porteuse de douleur. Myle l'endurait difficilement à cet instant précis, mais la présence de l'infirmier qui portait le nom de Dorian, parvint à le soulager mentalement. Il n'était plus aux prises d'une créature aux griffes acérées et aux poings virulents. Il était entre des mains chaudes et affables. Chaque parole de la Blouse Blanche s'assimilait à une caresse dont l'artiste se délectait, non sans avoir envie de hurler de toutes ses forces, clamant haut et fort le patronyme de la diablesse qui l'avait littéralement mis en lambeaux. Cependant, il rencontra un hic. Plus il se repassait la scène en boucle, moins il avait le souvenir d'avoir pu mettre un prénom sur son visage. En effet, cette garce n'avait pas eu la décence de décliner son identité, ce qui était à la fois logique et intelligent, puisqu'ainsi, elle s'en tirait à bon compte. Myle s'en voulut de ne pas avoir su faire preuve d'humilité. Il avait souhaité se la jouer caïd alors que ça ne lui ressemblait pas, et il en avait payé le prix fort. Un bras partiellement immobilisé, des côtes endolories, et un visage tout boursouflé. De multiples picotements harcelaient ses joues, et ses yeux clignaient frénétiquement tandis que la douleur se montrait agressive et lancinante. Il en avait déjà marre d'être perçu comme un faible, mais il ne pouvait rien faire d'autre, si ce n'était de répondre docilement aux questions qu'on lui posait. Dans un ultime effort, il tourna légèrement la tête sur la droite pour pouvoir observer bien qu'à moitié la silhouette de son interlocuteur. Il crut le voir atterrir lourdement sur les fesses, à ses côtés, soupirant profondément et prenant l'initiative de lui demander son nom. Etrangement, Myle ne trouva pas la force de lui répondre. Il était assommé par l'algie, et était incapable de placer deux mots l'un derrière l'autre. Une brume opaque obstruait le flux de ses pensées, et sa bouche semblait pâteuse. Il remua plusieurs fois les lèvres, d'où s'échappa un souffle aussi discret que sa voix quasi imperceptible. Découragé, Myle baissa temporairement les bras et s'entendit dire que les secours allaient arriver. Quelques minutes de solitude, et l'appel fut passé. En moins d'une heure, ce fut le branle bas de combat dans l'établissement scolaire. La curiosité galvanisa la foule, et l'urgence de la situation bouscula les esprits. Le jeune adulte fut transporté sur une civière comme le voulait la tradition. On lui parla pour le maintenir conscient, et on parvint également à lui soutirer son identité. "Myle Knepper", avait-il répondu d'une voix faible. Puis, voyant qu'il se plaignait de la douleur, on décida de lui administrer des calmants, ce qui eut pour effet de l'endormir.

    Lorsqu'il rouvrit les yeux, ce ne fut pas le ciel surplombant le toit de Keimoo qui lui fit face, mais les lumières criardes ainsi que le plafond immaculé de l'hôpital. Des "bips" provenant d'une machine contrôlant son rythme cardiaque, rompaient le charme du silence. Au loin, des infirmiers se croisaient dans les couloirs, se transmettaient quelques injonctions, tandis que des médecins couraient de chambre en chambre afin que chaque patient ait son quota d'attention. Avalant difficilement sa salive, Myle essaya de se redresser, en vain. Son membre cassé était plâtré. Il cligna exagérément des yeux, tenta de remettre ses idées en place et, brutalement, fut enlacé par deux bras frêles mais puissants. Leur force résidait essentiellement dans l'affection qui les guidait. Le nez plongé au creux d'une épaule familière, il sentit les larmes lui monter aux yeux en reconnaissant le parfum de sa mère. Akane Yoshizuki, cinquante ans, était une femme pleine d'élégance et de distinction. En dépit de l'âge, son raffinement était au diapason de sa beauté. Ses traits étaient d'une finesse délicieuse, et en la voyant, on ne doutait pas du lien qui l'unissait à son fils. Aussi fébrile que lui, elle était pleine d'une humanité et d'un sentimentalisme débordants, qui l'incitaient à prendre chaque situation très à cœur. Lorsqu'il s'agissait de sa progéniture, elle avait vite fait de se mettre dans tous ses états, et à en juger par ses yeux rougis, elle avait déjà pleuré comme s'il venait d'être rappelé auprès de Dieu.

    - Mummy… déclara-t-il sur un ton désolé. Il ne faut pas pleurer, je suis encore là. Un peu amoché certes, mais… en pleine forme.

    Il douta cruellement de ses paroles et fronça les sourcils après les avoir prononcées sur un ton presque indifférent.

    - Lorsque l'Université m'a appelée, j'ai fait aussi vite que j'ai pu, expliqua-t-elle avec gravité.

    Tandis que sa mère interrompait sa chaleureuse étreinte, Myle aperçut Dorian Fatalys, l'infirmier de l'Académie Keimoo. Il était sagement planté dans un coin de la chambre, bras croisés sur son torse. Il avait l'air de quelqu'un qui attendait quelque chose. En l'occurrence, il devait guetter le réveil de l'étudiant, tout comme il devait se demander qui était à l'origine d'un tel désastre. L'artiste se souvenait parfaitement du visage de son agresseur, mais il était navré de ne pas pouvoir l'identifier. Ce n'était pas ainsi qu'il arrangerait les choses, mais il avait besoin de lui mettre des bâtons dans les roues, quoiqu'il arrive. Quand bien même s'il était de nature pacifique, il ne souhaitait pas laisser cette fille impunie. Comme tout mortel qui se respectait, elle devait avoir une bonne leçon. Seulement, à l'instar d'elle, il s'y prendrait plus intelligemment. D'ailleurs, il avait une petite idée derrière la tête.

    Quoiqu'il en soit, Akane se montra pleine de gratitude à l'égard de monsieur Fatalys. Chaleureusement, elle insista pour lui serrer la main, ce qui n'était pas coutumier chez les japonais, évitant tous contacts physiques. Toutes ces années passées au Royaume-Uni avaient laissé des traces, mais peu importait. Elle finit par leur fausser compagnie en allant chercher un café. Désormais rassurée par l'état plus ou moins stable de son fils, elle pouvait poursuivre ses petites habitudes en paix. Et ce fut de cette manière que la langue de l'artiste se délia d'autant plus, en présence de celui qu'il pouvait considérer comme son sauveur. Rivant ses yeux profonds en sa direction, il maintint solidement son regard, et hocha calmement la tête en signe de reconnaissance. Un mince sourire fleurissait sur ses lèvres, tandis que la douleur persistait à quelques endroits.

    - Je suis vraiment navré. Mon cas a été si sérieux que vous avez été obligé de quitter votre poste. J'espère que cela ne vous portera pas préjudices. Vous avoir dans les environs a été une chance pour moi. Je ne sais pas ce qui se serait passé autrement.

    Il toussota et grimaça lorsque ses plaies le rappelèrent à l'ordre. Les effets des calmants se dissipaient, mais c'était assez supportable. Inconsciemment, il porta la main de son bras encore valide à son visage, et eut le déplaisir de constater la présence d'un hématome colossal situé sur le coin de la figure. Il s'en était pris plein la gueule, littéralement parlant, et il se souvint de la chose avec amertume. Spontanément, ses mains se crispèrent sur les draps immaculés, et abaissant les yeux, il poursuivit :

    - En même temps, je ne sais pas me défendre. J'ai toujours considéré que le monde est scindé en deux catégories bien distinctes. Les Forts, et les Faibles. Je suis à compter parmi ces derniers. Quant à la fille à la poigne de fer qui m'a mis chaos, elle fait sans nul doute partie de la première. Ce qui est bête, c'est que je ne connais même pas son nom, mais je me rappelle parfaitement son visage. Il était dur, très dur. De ses yeux jaillissaient des étincelles foudroyantes.

    Il aurait aimé compléter sa description, mais il fut interrompu par l'arrivée d'une infirmière. Griffonnant machinalement sur son bloc-notes, elle expliqua au patient qu'il ne serait pas utile de le garder plus de vingt-quatre heures. Il resterait pour la nuit et repartirait le lendemain en fin de matinée. Cependant, pour plus de sûreté, on exigea que le patient quitte l'Académie au moins pendant une semaine, et reste alité chez lui. On lui prescrivit aussi un rendez-vous chez un psychologue exerçant au sein de l'hôpital, afin de s'assurer qu'aucun traumatisme psychologique n'était survenu. Certes, Myle était encore sous le choc, ce qui était tout à fait légitime, mais il n'avait pas l'impression d'être plus névrosé ou plus psychotique qu'auparavant. Ce constat fut plutôt rassurant, et après avoir effectué quelques vérifications, la jouvencelle décocha un fabuleux sourire à Dorian avant de disposer de la chambre. Arborant une expression très badine, l'Artiste finit par dire :

    - Vous avez une touche, Dorian.  

    Suite à quoi, il sombra dans un silence religieux.



Dernière édition par Myle Knepper le Mer 28 Sep 2011 - 10:28, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyDim 17 Juil 2011 - 0:37

La 'promenade' en ambulance avait été longue, éternellement longue au point que Dorian s'en était presque prit à l'infirmier qui conduisait lorsqu'il n'avait plus eut assez de patience. Il s'en était fallu de peu, quelques mètres plus loin, et ils étaient arrivés à l'hôpital.
L'absence de paroles et de gestes de l'adolescent qui se trouvait devant lui l'avait cruellement blessé. Il n'aurait jamais pensé qu'une personne pouvait faire autant de mal à une autre, dans le contexte scolaire évidemment. Un meurtre est vite arrivé mais il était clair que Dorian n'avait pas prit conscience de certaines disparités au sein de l'établissement. Certains cas spéciaux passaient à la trappe alors qu'ils avaient clairement des problèmes. Après... peut-être que l'inconnu allongé à ses côtés avait été l'investigateur de la bagarre... ou pas. Il ne semblait pas avoir la tête du coupable mais il ne fallait pas juger sur les apparences.
L'infirmier assis à sa droite avait tenté de faire la discussion pendant le trajet mais Dorian avait été très discret et peu expansif, il n'avait que faire de meubler le silence qui s'était installé, pour l'instant, ce qui comptait pour lui, c'était cet homme là : Myle Knepper.

Dorian sortit aussitôt un papier usagé de sa poche pour griffonner ce nom dessus, au cas où personne ne serait capable de le lui rappeler plus tard. Il ne pouvait faire confiance à quiconque. Myle fut rapidement plongé dans une sorte de coma réparateur et Dorian fut contraint à rester dans le couloir pendant que des médecins s'occupaient de lui. L'attente fut longue encore. Il vit arriver une dame, affolée, sûrement sa mère ou quelqu'un de sa famille et elle fut envoyée dnas la salle d'attente, tout comme lui. Il n'eut pas vraiment le cran de lui adresser la parole puisqu'il ne savait pas grand chose à propos de ce qui s'était passé et ne serait donc pas d'un grand réconfort.
Puis tout s'était très vite enchaîné. Les médecins étaient revenus indiquant qu'il allait bien, qu'il n'avait rien de grave et qu'il était endormi mais qu'il pouvait recevoir des visites en attendant son réveil. C'est ce moment là que choisit Dorian pour se présenter à la dame nerveuse. L'échange fut bref, Dorian lui expliqua qu'il était infirmier à l'Académie Keimoo et que c'était lui qui avait trouvé Myle dans cet état. Elle ne perdit pas de temps en paroles et le pria juste de la suivre jusque dans la chambre.

La soirée était bien entamée déjà lorsque l'étudiant rouvrit les yeux. Dorian resta patient pendant tout le passage démonstratif d'affection dont fit preuve sa mère. Il se contenta d'observer et d'attendre sagement que vienne son tour.
Lorsque ce fut le cas, -après une poignée de mains des plus vivaces et un regard rempli de merci- il n'eut pas vraiment à poser de questions. L'étudiant était bavard.

Pour quelqu'un qui vient de se faire refaire le portrait, tu es plutôt... loquace." ironisa Dorian tout en décroisant les bras et en s'approchant du lit du malade. Il jeta vite fait un oeil aux moniteurs afin de prendre conscience de son état et l'écouta se débarrasser de tout ce qui lui hantait l'esprit depuis cet incident.
Ainsi il ne connaissait pas le nom de cette harpie. Quel dommage. L'affaire se révélait finalement plus compliquée qu'il ne l'aurait pensé. Comment une jeune femme avec autant de fougue et de haine avait pu passer inaperçue depuis tout ce temps ? Pourquoi avait fait autant de grabuge d'un seul coup ? Et... pourquoi Myle ? Il y avait encore un tel tas de questions qui restaient en suspens que Dorian prit quelques secondes pour faire le point tout en s'asseyant sur le rebord du lit pendant que l'infirmière faisait sa ronde. Il ne remarqua pas son clin d'oeil langoureux et fut assez surpris de la remarque de l'étudiant.

Ce n'est pas le moment. grogna-t-il tout en fronçant les sourcils avant de fixer Myle dans les yeux, cherchant à capter son regard ... dis-moi Myle, cette fille, pourquoi elle s'en est prise à toi ? Pourquoi sur ce toit ? Qu'est-ce que tu lui as dis pour qu'elle te mette dans cet état ? Il faut que tu m'aides sur ce point. Si tu n'es pas capable de me dire quelque chose sur elle, je ne pourrais pas t'aider... Parle moi d'elle... décris-la moi.

Dorian fut interrompu par un uniforme qui attira son attention. La police était là. Il allait devoir remettre ses questions d'enquêteur du dimanche à plus tard. Les officiers devaient le chercher. Il s'excusa auprès de l'étudiant et sortit de la chambre, allant directement à leur rencontre. Là aussi, l'échange fut bref et les policiers repartirent aussitôt. Dorian, soucieux, retourna près de l'étudiant et lui expliqua la situation :

Voilà où on en est. Il y'a eu une agression alors tu es en droit de porter plainte. Les policiers étaient là pour prendre ta 'déposition'. Je leur ai dis que tu étais trop fatigué et qu'ils feraient mieux de revenir demain mais... Veux-tu porter plainte Myle ?

Dorian ne sut pas le conseiller sur ce point là. Il ne savait pas quoi faire. Il se doutait que ça ferait sûrement de la mauvaise pub à l'Académie mais il ne pouvait pas faire passer l'administration avant le bien-être de ses étudiants et puis malgré tout, il s'y était attaché à ce bonhomme qui semblait aussi inoffensif qu'un oiseau mouche.
Il se détendit légèrement quand il prit enfin conscience que le pire était derrière eux et que la fille en question n'était pas forcément une criminelle en puissance. Il se plaça près de la fenêtre et relâcha ses épaules, tendues de nervosité.

Tu devrais pas t'en faire pour moi... C'est bien le comble de la victime de penser aux dommages collatéraux. Je n'ai pas quitté mon poste pour toi puisque tu fais partie de mon 'travail' au sens propre du terme. Quoiqu'il en soit, ne pense pas à ce qui aurait pu t'arriver si j'étais pas venu sur le toit. Tu es en forme, c'est tout ce qui compte.

Il repensa aux paroles de Myle qui passait d'émotion en émotion. Il était passé de la gratitude à la colère puis à la sous-estimation de soi.
Les forts, les faibles... Il avait sûrement raison mais il fallait un juste milieu entre les deux. Il y a aussi les gens normaux, qui ne font partie d'aucune de ces catégories et qui s'en sortent pourtant très bien. Dorian ne savait pas trop où il se situait lui. Il n'était pas fort physiquement, certes ; mais faible n'était pas un mot pour lui non plus. Ses mots étaient une arme tout autant efficace. Chacun devait trouver sa place et si Dorian devait se mettre quelques secondes à la place de Valentine pour jouer le psychologue, il dirait à Miss X que la violence est son exutoire et qu'elle comble d'autres lacunes avec ses poings. Chaque question à sa réponse.

Il revint près du lit et tenta de rassurer le jeune homme comme il pouvait avant que sa mère prenne le relais pour le border. Il manquait d'affection en ce moment et Dorian n'était pas à sa place dans le rôle du sauveur.

Tu n'es pas taillé pour la bataille avec les mains fines que tu as c'est sûr mais... il s'arrêta quelques instants. Il était parti pour une tirade sur l'intelligence et sur sa capacité à relativiser dans des situations où la violence ne résolvait pas tout, mais il fut attiré par les légères tâches qui pimentaient les mains de Myle, oh, tu fais de la peinture ? Tu es... là encore, il marqua une pause, il venait de penser à quelque chose.... à ranger dans la catégorie science-fiction et film policier à caractère sombre mais probable ... tu es un artiste ? Serais-tu capable de dessiner son visage Myle ?


Dernière édition par Dorian Fatalys le Jeu 25 Aoû 2011 - 14:11, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyMar 19 Juil 2011 - 22:33

    Assurément, la présence de sa mère à cet instant funeste de son existence était une bénédiction. Elle était l'unique personne à avoir été là au cours de son enfance, de son adolescence, et maintenant pour son entrée dans le monde des adultes. Certes, elle travaillait avec beaucoup de rigueur pour les faire vivre et lui financer ses études, mais elle avait une affection incommensurable et illimitée pour son fils. Dorian semblait l'avoir compris puisque sitôt que sa mère leur faussa compagnie, il se rapprocha lentement mais sûrement du jouvenceau, comme pour combler ce vide affectif. En effet, pour quelqu'un ayant subi des sévices physiques, Myle était assez loquace, et la vivacité de son esprit pouvait surprendre. Mais il n'avait pas de temps à perdre en simagrées ou en conjectures. Il fallait qu'il se débarrasse de tout ce qui le pesait, ce qu'il fit en ne se souciant pas du jugement que l'infirmier pouvait lui porter. Il avait conscience du fait qu'il s'était contenté d'effectuer son travail, mais tout de même, il avait une certaine admiration pour lui. Bien que sa nervosité demeurait visible, il n'en restait pas moins pourvu d'un sang froid remarquable. L'artiste se demanda s'il s'agissait d'une preuve irréfutable de son professionnalisme, ou si c'était simplement un critère inné de sa personnalité. Dans tous les cas, son principal intérêt reposait sur l'identification de la personne n'ayant eu aucun scrupule pour le battre et cribler son âme de blessures éparses. Pour l'heure, Myle n'avait strictement aucune information à fournir, tout du moins, sur son patronyme. En cherchant son regard, Dorian tenta de lui soutirer quelques détails comme le pourquoi du comment de cette confrontation, ou encore l'élément déclencheur de la violence qui lui avait été infligée.

    Tout en se souvenant du déroulement des évènements, le jeune homme plissait les yeux et fronçait les sourcils. Il souffrait de ce qu'il avait pu ressentir à ce moment là. Il se surprit à être épuisé rien qu'en visualisant le visage dur et belliqueux de son agresseur. La honte perdurait toujours dans les entrailles de son être, et il désirait profondément revenir en arrière pour lui mettre une raclée. Cependant, comme allait le souligner l'infirmier par la suite, il n'avait pas l'apparence d'un guerrier robuste et puissant. Il avait plutôt la délicatesse d'un elfe, comme ceux qu'il se plaisait à dessiner en s'adonnant avec douance à sa passion pour le dessin. Crispant ses doigts sur les draps immaculés, il se décida à ouvrir la bouche pour prononcer ces quelques mots :

    - J'étais venu sur le toit pour prendre l'air, me changer les idées et penser. Je souhaitais juste profiter d'un moment de solitude pour réfléchir à certaines choses, et elle est arrivée. Elle a commencé à me parler d'une voix forte et autoritaire, en prétendant que j'étais sur son territoire, et que je devais disparaître sur le champ. J'étais un obstacle pour elle, avant même qu'elle m'ait adressé la parole. Comme toute personne juste qui se respecte, j'ai essayé de lui expliquer que…que le toit n'était pas concrètement à elle.

    Les souvenirs affleurèrent à la surface par des flashs successifs. Dans sa mémoire, des images tournoyaient, s'entremêlaient pour reconstituer progressivement le scénario exact de ce qu'il s'était passé. Il puisa dans ses piètres forces afin de pouvoir soumettre le plus de détails possibles à Dorian. Il sentait son regard posé sur lui. Il était d'une neutralité bienveillante. Myle était en confiance, alors il pouvait bien faire ça, ne serait-ce que pour préserver une partie de son intégrité. Tout garder pour lui par pudeur ou par fierté mal placée n'était pas une bonne alternative. Cette inconnue devait être dénoncée pour l'acte commis.

    - Je me souviens également qu… qu'elle a reçu un coup de téléphone. Il a dû se passer quelque chose de grave car elle s'est mise à pleurer en raccrochant soudainement. Elle m'a demandé si je trouvais ça amusant de la voir pleurer. Je me souviens très bien de cette phrase puisque c'est là que les choses ce sont gâtées. Elle semblait désespérée, très triste aussi, mais je ne sais pas pourquoi. En tout cas, c'est ça qui a dû la convaincre de se défouler sur moi. En fait, je pense que j'étais juste là au mauvais moment…

    L'interrogatoire fut inopinément interrompu par l'arrivée en fanfare des officiers de police. De là où il se trouvait, Myle reconnut leur uniforme, au même titre que Dorian. Ce dernier s'empressa de sortir de la chambre pour échanger quelques mots avec eux, après quoi il revint auprès de l'étudiant pour lui exposer la situation. Sachant que l'affaire prenait des proportions considérables, l'artiste inspira un grand coup et tenta de garder son calme. Surtout, ne pas paniquer. C'était lui la victime, et celle qui avait nui à son bien-être avait bien plus à craindre de l'avenir. Dans la foulée, l'infirmier lui expliqua qu'il pouvait porter plainte. A ces mots, le jeune adulte baissa subitement les yeux. N'importe qui aurait compris qu'il ne comptait pas attirer l'attention sur lui. Effectuer cette démarche le ferait sortir de l'ombre. Sil y avait bien une chose qu'il exécrait, c'était d'être sur le devant de la scène. Quitte à se venger, il préférerait que la justice ne soit pas impliquée dans cette histoire. D'ailleurs, Dorian lui laissa le choix, mais à dire vrai, il ne savait pas comment procéder.

    - Que feriez-vous à ma place, Dorian ?

    Ce n'était pas le genre de chose à demander, mais il prenait le risque. A l'heure actuelle, il avait besoin d'une opinion objective. En tant qu'adulte et parfait étranger, Dorian était tout à fait capable de lui exprimer son idée sans que celle-ci soit influencée par l'affect ou quoique ce soit d'autre. Cependant, l'expérience existentielle ne nous rendait pas maître de toutes les situations. Apparemment, la Blouse Blanche était aussi confuse que son interlocuteur, ce qui n'éclairerait pas vraiment la lanterne de Myle. Outre cette question pratique, Dorian précisa qu'il ne devait pas se sentir coupable de quoique ce soit. Il avait raison, le principal, c'était qu'il se sente bien désormais. Même avec le visage boursouflé et un bras cassé, il pouvait se satisfaire d'être encore en vie, de pouvoir respirer dans un endroit sécurisé sans que quiconque vienne lui pourrir son oxygène. A ces mots délicats, un mince sourire fleurit sur les lèvres de l'artiste. Un sourire généreusement adressé à l'adulte qui pouvait l'interpréter comme bon lui semblait.

    - Merci.

    Il finit par se focaliser sur ces fameuses mains pures et fines, aux doigts longilignes et à la pâleur surprenante. Dorian semblait paré à lui faire une petite leçon de morale, le genre de leçon qui aide à aller de l'avant et réchauffe le cœur. Mais il se stoppa directement en remarquant parmi cette pâleur flagrante plusieurs tâches. En effet, il s'agissait, entre autres, de peinture ancrée dans sa chair datant de sa précédente séance au club d'art. Dans un sursaut, Myle réalisa qu'il venait d'être partiellement démasqué sur ses activités extrascolaires. Il se surprit même à en rougir légèrement. Cependant, Dorian avait raison sur un point : son talent allait lui être d'un grand secours. Il pouvait parfaitement revoir le visage de son agresseur, et s'il lui était donné la possibilité de le reproduire sur papier, les investigations passeraient à la vitesse supérieure.

    - Encore faut-il avoir le matériel nécessaire.

    Il soupira et aperçut sa mère pénétrer dans la chambre, un café dans les mains. Spontanément, elle alla vers son fils, et le bombarda de questions en tout genre du style : Est-ce que tu as faim ? Souhaites-tu que l'on appelle les infirmières pour qu'elles renforcent tes calmants ? Ton oreiller est-il bien calé ? Tu veux que je t'aide à te positionner correctement ? Tu as soif ? Comment te sens-tu ? J'ai vu la police, est-elle venue te questionner directement ? Et tant d'autres choses qui lui donnèrent le tournis. Au lieu de la laisser poursuivre dans sa lancée, il s'efforça d'apaiser ses ardeurs en l'agrippant doucement par le poignet. Il la rassura en clamant d'une voix sûre qu'il allait bien, mais qu'il allait avoir besoin de son aide pour une chose bien particulière. Soudainement très à l'écoute, madame Akane Yoshizuki anciennement madame Knepper se statufia sur place, et prit connaissance de sa requête sous l'air attentif de ses interlocuteurs.

    - Mummy, je vais avoir besoin de mon matériel de dessin.

    - Chéri, pour qui me prends-tu ? Avant que tu te réveilles, j'ai fait un saut très rapide à l'académie pour récupérer une petite partie de tes affaires personnelles. Cela dit, vas-tu pouvoir dessiner avec ton bras droit endommagé ?

    - Tu te souviens lorsque l'homme qui m'a servi de père m'a brisé le poignet droit lorsque j'étais petit ? Il m'a disputé parce que je passais plus de temps à dessiner qu'à faire mes devoirs pour l'école. Je suis resté une semaine avec le poignet bandé. Par conséquent, j'ai appris à griffonner avec le gauche. Naturellement, le résultat n'est pas aussi irréprochable, mais je peux me débrouiller et produire quelque chose d'assez ressemblant.

    Akane s'en voulut d'avoir éveillé de très anciennes blessures psychologiques chez sa progéniture. Elle s'excusa en lui baisant délicatement le front, et sortit de son sac son bloc à dessins contenant quelques croquis récemment effectués. En première page, l'ébauche d'un personnage portant une armure prestigieuse, dont les dorures renforçaient sa splendeur. Aucun détail n'était laissé au hasard, pas même l'expression ténébreuse de cet homme provenant directement d'un imaginaire aux influences très diverses. Myle remercia chaleureusement sa mère et s'appropria sa trousse qu'elle lui avait également apportée, et qui contenait la majeure partie de ce avec quoi il procédait. Conscient qu'il n'avait pas le temps de s'éterniser en fioritures, il s'empara d'un modeste crayon très foncé tenu maladroitement dans sa main gauche.

    - Avez-vous un peu de temps devant vous, Dorian ?

    Après avoir obtenu une réponse à sa question, il s'empressa de passer à l'action. Dans un premier temps, sa main trembla par manque d'habitude, mais il réussit à se dépatouiller comme il put. D'abord, à l'aide de traits fins, il construisit la forme du crâne afin de ne pas se précipiter dans la disposition des yeux, du nez et de la bouche. Il souligna méticuleusement la partie inférieure de ce même crâne, y compris la base de la mâchoire. Après quelques étapes que je ne prendrai pas la peine d'énumérer exhaustivement, il s'affaira à la reproduction des yeux qu'il fit les plus sévères et les plus intenses possibles, pourvus de cils longs et touffus. Des sourcils fins mais légèrement asymétriques, ainsi qu'un nez peu imposant mais bien affirmé par sa longueur et son extrémité pointue. Des lèvres ni trop pulpeuses ni trop absentes, juste comme il fallait. Le tout était encadré par une chevelure raide, dégradée, avec une mèche voilant légèrement les yeux de la demoiselle. Il se permit d'ajouter quelques touches colorées, en comblant partiellement ses cheveux d'un brun franc et naturel, et en apposant une généreuse touche de bleu à son regard. Car c'était bien de cela dont il se souvenait le mieux. Elle savait mettre cet atout en valeur, puisqu'il se souvint du crayon noir contournant habilement ses yeux. Plus ou moins satisfait de son œuvre, il la présenta timidement à l'infirmier, en se souciant de l'aide que cela allait apporter. Soutenant intensément son regard, il déclara :

    - Ce n'est pas terrible mais je suis épuisé.

    Sur ce, il bâilla à s'en décrocher la mâchoire et s'appuya de tout son poids sur son oreiller. Akane le borda correctement et s'empara du bloc à dessins puis de la trousse qu'elle déposa sur la petite table près de son lit. Puis, le silence se fit, en attendant que le verdict soit prononcé.
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MessageSujet: Re: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyMar 16 Aoû 2011 - 13:36

Mmh... hé bien oui, le temps n'est pas un problème. Fais, je t'en prie.

L'idée du dessin n'était pas mauvaise. Non pas que Dorian se flatte lui-même mais il s'était étonné tout seul de penser subitement à cette solution. Elle avait dut lui être suggérée inconsciemment. Peut-être aurait-il dû se reconvertir en flic qui étudie le comportement psychologique des criminels, il aurait eut un succès fou.
Myle aussi sembla séduit par cette alternative, il mit moins de temps qu'il faut pour réagir et ordonna gentiment à sa mère de lui fournir le matériel nécessaire. Dorian fronça les sourcils quand il entendit les paroles de son patient. Ainsi il avait déjà subit des violences lorsqu'il était plus jeune ? Les victimes sont toujours les mêmes. Il porta une main à son menton, glissant ses doigts sur une peau dont la barbe était continuellement inexistante. Il recula passablement pour se tourner vers la fenêtre pendant que Myle dessinait.

La violence... Il se remémora les innombrables coups de trique qu'il avait reçu étant gosse. Il n'avait pas interprété ces actes comme une violence paternelle, il les avait plutôt vu comme une façon ardue et agressive de se faire apprendre l'obéissance et l'intelligence. Mais à bien y réfléchir, ça avait été une torture pour lui étant gamin. Son dos portait sûrement encore les marques des cicatrices. S'il avait un enfant un jour, jamais il ne se sentirait en position de le frapper pour lui faire apprendre quelque chose. C'était un comportement inhumain.

Cette horrible jeune fille qui avait frappé cet étudiant semblait en pleine quête d'elle-même. Elle avait un besoin inassouvi de conquête de territoire et de supériorité féminine sur tout ce qui était un minimum emprunt de virilité. Seuls les hommes étaient des problèmes alors ?
C'était trop difficile d'établir un jugement sur de simples présomptions. Et puis, ce n'était pas son boulot de chercher à comprendre d'où venait son problème. Valentine s'en chargera si elle daignait se pointer de nouveau à l'Académie.

Attendant toujours le dessin de Myle, Dorian fut assez tiraillé pour répondre à sa question... Porter plainte, ou pas. L'avenir de cette adolescente semblait tout tracé de toute façon mais était-ce une raison pour le rendre encore plus sombre ?

Quand ton ... Père t'a brisé le poignet, as-tu... enfin ta mère a-t-elle porté plainte ? demanda-t-il sans chercher à juger qui que ce soit et sans regarder la mère de Myle qu'il considérait comme tout à fait exemplaire et attentive au bien de son enfant. Je ne suis pas à ta place Myle, ce n'est pas à moi de prendre cette décision. Mais en tant que membre du Personnel, je suis aussi là pour te conseiller et t'écouter. Alors, pour être franc, à ta place... oui, je porterais plainte contre elle.

Evidemment, Dorian ne savait pas que Myle n'était pas du genre à s'attirer l'attention mais l'affaire qui était là dépassait largement la timidité du jeune garçon. S'il ne le faisait pas pour lui, il pouvait penser à une possible future victime de cette fille ? Même si elle ne tuait pas, même si elle ne faisait pas de tort irréversible, elle était peut-être à deux doigts de commettre l'irréparable.

Le dessin était enfin terminé. Dorian reporta toute son attention sur l'action présente et récupéra le calepin pendant que l'étudiant se réinstallait confortablement dans son lit, histoire de se reposer un minimum. Dorian prit une profonde inspiration et posa ses yeux sur le dessin. Ce qui le choqua aussitôt, ce ne fut pas ce visage qui ne lui disait rien mais bien le croquis en lui-même : Myle possédait un talent impressionnant. Malgré les atrocités qu'elle venait de lui faire subir, cette jeune femme était magnifique. Son regard noir qui contrastait temps avec le bleu de ses yeux la rendait presque démoniaque.

Il y a beaucoup d'étudiants à Keimoo. Navré Myle, pour ma part, je ne la connais pas, mais je vais faire circuler ce dessin et nous aurons rapidement un nom à mettre sur ce visage avoua-t-il conscient que c'était bien peu sûrement face à l'attente que le garçon avait placé en lui. Il posa le croquis sur le casier qui contenait les affaires de Myle et se rapprocha de lui, pour s'asseoir sur le rebord de son lit. Tu dessines extrêmement bien, cela dit.

Dorian n'était pas le genre d'homme qui fait des compliments ou qui remontent le moral pour que ses interlocuteurs se sentent mieux. S'il disait quelque chose d'agréable, c'était parce qu'il le pensait. Il était simplement sincère, en bien comme en mal. Ce petit bout d'homme qui se tenait en face de lui, le rendait curieux. Il était tout boursouflé à cause des hématomes, il devait être fragile psychologiquement à cause du contre-coup et de l'appréhension future quant à son devenir et pourtant, il trouvait la force d'être gentil, respectueux, poli et serviable. Dorian ne put s'empêcher d'esquisser un sourire compatissant.
Reprenant son costume d'infirmier et de personnel face au patient, il fit part de ses pensées les plus préoccupantes :

Les choses vont sûrement se mettre en place rapidement. Elle va être convoquée à l'Académie en Conseil Disciplinaire, elle sera sûrement renvoyée et j'y mettrai un point d'honneur. Et après, pour ce qui est de la Police, ton jugement sera seul maître à bord.

Malgré ce qu'il venait de dire, Dorian sentait comme un mauvais pressentiment quant au renvoi de la demoiselle fautive. Lui, son choix était fait, il était clair et sans appel, mais les autres poltrons qui faisaient office de jugement suprême auront-ils le même éclair de lucidité ? Cette fille bien que jeune et jolie pataugeait dans les torts, elle ne devait pas s'en sortir facilement. Il se battrait pour avoir raison, quite à se mettre tout le monde à dos et à jouer son poste d'infirmier. Foi de Dorian, elle ne passera pas à la trappe cette garce.

Et toi ? demanda-t-il en lui tapotant doucement son bras valide, Quel est ton planning proche ? -hormis la guérison, ça va de soi-, tu comptes reprendre les cours normalement après ça ? Peut-être devrais-tu t'inscrire au Club de Boxe, qu'en dis-tu ? Il ne chercha pas à retenir le rire simple et sincère qui émana de sa gorge. Voilà que l'infirmier incitait l'agneau à la violence. C'était le monde à l'envers. Evidemment, il ne cherchait pas à lui insuffler un goût de vengeance mais plutôt à lui enseigner le principe même de la prévention. S'il avait su se battre, ou se défendre un minimum, il serait peut-être dans le même état aujourd'hui, mais il aurait sûrement rendu les coups...


Dernière édition par Dorian Fatalys le Jeu 25 Aoû 2011 - 14:11, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyLun 22 Aoû 2011 - 11:12

    La sentence de Taylor était inévitable. Si ce n'était pas l'administration de Keimoo qui la lui infligeait, ce serait une autre personne, et peut-être que les circonstances seraient à son désavantage cette fois-ci. Compte tenu de son tempérament violent et de ses paroles si indélicates, elle allait forcément s'attirer les foudres de nombreuses personnes qui deviendraient ses ennemis, et lui en feraient voir de toutes les couleurs. Il était inconcevable qu'elle sorte indemne de cela, parce que Myle, en dépit de son immense mansuétude, en avait assez d'être considéré comme une victime. Il ne jubilait pas vraiment à l'idée de la dénoncer, mais il se doutait que ce serait une bonne façon de la contrer indirectement. Peut-être que certains allaient le traiter de tous les noms d'oiseaux pour cette initiative, mais il ne voyait pas quelle alternative employer mis à part celle-ci. Accessible et impliquant des adultes qui prendraient probablement sa défense, elle lui assurerait une certaine protection. C'était un peu la récompense pour avoir osé se mettre sur le devant de la scène, en clamant haut et fort qu'une racaille lui avait porté atteinte de diverses façons. Et attendant d'être encouragé par Dorian, il envisagea donc sérieusement cette initiative, sans pour autant la mettre à exécution expressément. Il avait encore besoin de peser le pour et le contre, mais il savait que son temps de réflexion ne devait pas être équivalent à celui de sa convalescence. S'il ne répondait pas rapidement à ses attaques, elle pouvait tout aussi bien prendre la décision de disparaître de la circulation. Or, il souhaitait lui rendre la monnaie de sa pièce, et quelque part, ce serait lui rendre service que de chambouler un peu ses mauvaises habitudes.

    En contrepartie, Myle ne s'était pas attendu à cette question concernant les brutalités de son père au cours de son enfance. L'espace d'une minute, l'artiste se figea, et se vit retourner des années en arrière, où les choses étaient tout sauf évidentes. Les raisons pour lesquelles personne n'avaient réagi étaient multiples. Aaron Knepper était réputé pour son parcours professionnel irréprochable. On trouvait donc légitime qu'il ne souhaite que le meilleur pour son fils, osant le défier avec véhémence en passant ses journées à gribouiller. Au départ, nul ne prenait son talent au sérieux, ce qui avait instauré un puissant complexe d'infériorité chez le pauvre bambin. Par ailleurs, sa mère n'osait jamais s'opposer à son mari, car la régence commune de leur entreprise lui paraissait prioritaire. Cependant, le jour où elle avait daigné ouvrir les yeux sur cette impitoyable réalité, elle avait tout mis en œuvre pour l'éloigner de son père, sans pour autant le traîner en justice. Sans doute était-elle trop amoureuse à l'époque, pour recourir à des solutions aussi extrêmes.

    - Si je n'ai jamais porté plainte contre lui, c'est tout simplement parce que j'étais trop jeune pour comprendre que ce qu'il faisait n'était pas moral. Quant à ma mère, il s'agissait tout de même de son époux. A l'époque, ce n'était pas concevable. Mais si c'était à refaire, peut-être bien qu'elle aurait agi sans tarder. De toute façon ça ne sert à rien de regretter. Ca fait depuis quelques années maintenant que nous n'avons plus de nouvelles. Après le divorce, Maman a coupé les ponts. Notre venue ici a été une vraie bouffée d'oxygène.

    Suite à sa réponse, Dorian lui expliqua les mesures qui allaient être prises, si jamais l'artiste acceptait de dénoncer son agresseur. De prime abord, l'Académie la ferait passer au Conseil Disciplinaire, ce qui n'était pas rien. Elle risquait tout de même de ruiner sa scolarité ainsi qu'une bonne partie de son avenir. Quel autre établissement voudrait d'elle, alors qu'elle était une véritable garce aux comportements agressifs peu modérés ? Quoiqu'il en soit, Myle fut rassuré de savoir que l'infirmier mettrait tout en œuvre, pour s'opposer à une quelconque objection de la part de ses collègues. En même temps, n'importe qui en voyant l'état du jouvenceau, comprendrait qu'elle n'y avait pas été de main morte. Par ailleurs, il ne pouvait pas avoir inventé le portrait qu'il en avait dessiné par le pouvoir du saint Esprit. Il n'était pas du genre à émettre des accusations à tout-va, et à moins que les grands chefs de Keimoo soient fâchés contre lui, il y avait peu de chance que les sanctions de Taylor soient légères. Ou alors, le fonctionnement de l'Académie était tel, qu'il susciterait indignation et incompréhension chez ceux bénéficiant de ses bons et loyaux services.

    Sur ce, après avoir palabré sur l'ampleur des évènements, la Blouse Blanche tapota gentiment le bras valide de son patient, avant de le questionner sur son planning des prochaines semaines. L'idée du club de boxe le fit quelque peu frémir. Il avait horreur de la violence, mais en repensant à son agresseur, il se demanda si son fabuleux coup droit n'était pas le fruit de nombreux entraînements dans une discipline similaire.

    - Je vous l'accorde, mon gabarit n'est pas très imposant mais je ne pense pas être suffisamment hargneux pour ce genre de sport. En contrepartie, la fille qui m'a agressé devait avoir un don pour ça. Juste une idée comme ça pour les gens qui s'occuperont de l'identifier : peut-être devraient-ils écumer toutes les listes d'adhérents aux différents clubs. Pour commencer, ça réduit un peu le champ de recherche, et puis, je ne serais pas surpris d'apprendre qu'elle pratique un sport de combat. Pour canaliser une telle violence, ça peut être efficace. Sauf qu'elle a eu la mauvaise idée de perdre ses moyens en ma présence.

    Finalement, son rire léger se joignit à celui de l'infirmier, tandis que sa mère, non loin de là, les scrutait en se demandant comment ils pouvaient rire d'une telle situation. D'un autre côté, il valait mieux que son enfant relativise, plutôt qu'il s'apitoie sur son sort. Il n'y avait pas plus mauvais pour se remettre d'un tel malheur. Visiblement, la présence de monsieur Fatalys l'avait un peu réconforté, et désormais campé sur des positions précises, Myle savait ce qu'il lui restait à faire.
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MessageSujet: Re: Ces blessures qui nous forgent [CLOS]   Ces blessures qui nous forgent [CLOS] EmptyMar 27 Sep 2011 - 19:50

Le bip régulier des différentes machines "reliées" à l'étudiant était à la fois rassurant et extrêmement flippant. C'était un de ces nombreux détails qui vous tant détester les hôpitaux et c'en était un pour Dorian. Il avait fait un effort surhumain pour se retrouver là assis sur le lit de son petit protégé à parler de tout et de rien sans se sentir oppressé par la blancheur immaculée des murs.
Chaque traumatisme a une origine, et pourtant, même en fouillant scrupuleusement dans ses souvenirs proches comme lointains, Dorian n'arrivait pas mettre le doigt sur cette phobie des couloirs d'hôpital. L'odeur, l'étroitesse, la couleur ou encore le sol tellement brillant à force d'être lavé, tout ça devait sûrement provenir de souvenirs plus anciens... il était peut-être plus aisé de ne pas s'en souvenir. Inutile de ressortir les restes archéologiques d'une vieille blessure.
Malgré cette appréhension de tout ce qui touche à ce côté sanitaire de la profession, Dorian avait fait des études de médecine poussées et avait obtenu d'excellents résultats, il était le genre d'homme qui allait au bout de ses moyens lorsqu'il entreprenait quelque chose et qui ne supportait pas la défaite, d'où sûrement cette implication dans le sort futur de Myle. Il se sentait obligé de lui venir en aide et de prouver sa valeur. Le faire revenir sur ses paroles ou lui annoncer que son agresseur serait relaxé reviendrait à pendre Dorian sur la place publique. Une humiliation en bonne et due forme. Un échec total malgré l'esprit acharné de compétition dont l'infirmier était doté.

Myle s'enquit de la façon dont "l'enquête" allait se dérouler. Il conseillait au prof de faire le tour des clubs de sport pour tenter de trouver le nom de la future 'non désirée' de Keimoo. Ce n'était pas une mauvaise idée, certes, sauf qu'elle ne venait pas lui et qu'une fois de plus, l'étudiant malingre et fluet venait de lui voler la vedette. Il ne faisait pas bon rester trop longtemps auprès de lui, il avait cette douce faculté de vous amener dans son monde et de vous évincer délicatement, sans se rendre compte du poids de ses paroles. Son visage reflétait la gentillesse à l'état pur et il avait pourtant cette étincelle de vengeance dans les yeux. Tout être agressé réagirait de cette façon, logiquement. J'y veillerais ne t'en fais pas. Mais cesse de te préoccuper de cette histoire pour le moment. Un étudiant tel que toi a sûrement des choses bien plus intéressantes à penser ou à planifier, non ?
En parlant de planification, Dorian se rendit compte qu'il n'avait pas tenu tout son registre à jour concernant cette histoire. Il sortit son blackberry de la poche intérieure de sa veste et tapota quelques touches pour le faire arriver dans l'agenda. C'était ici qu'il notait tous ses rendez-vous, ses obligations ou ses projets. Bien entendu, il aurait été malpoli de remplir le dossier de Myle devant l'étudiant même. Il en fallait peu pour contrarier un ado de nos jours et Dorian se passerait très bien d'une jolie petite crise pour enfant. Aussi, il verrouilla rapidement son téléphone qu'il remit aussitôt dans la poche et s'empressa de se lever du lit pour le surplomber de toute sa hauteur. Il remit de façon magnanime le col de sa veste déjà parfaitement ajusté et se tourna vers la mère de Myle pour lui serrer généreusement la main en lui murmurant des paroles rassurantes qui conviennent dans ces cas précis, tout va bien se passer désormais, le pire est derrière vous. Gardez le moral et restez telle que vous êtes. Un brossage dans le sens du poil comme on aurait difficilement mieux fait, mais Dorian ne s'en cachait pas, il était manipulateur et s'adaptait partout, c'était presque devenu naturel chez lui cette façon de flatter les gens qu'il voulait avoir à la botte.

Il revint tranquillement vers Myle à qui il accorda un sourire bienveillant. Bon rétablissement Myle, prends ton temps même si l'envie de fuir ces lieux est omniprésente. Je serais bien capable de te ramener moi-même si tu sors avant la date officielle. Il fit un nouveau sourire, joueur. Il avait presque l'impression de jouer le rôle du père dans cette histoire. C'était à la fois enrichissant et terriblement déprimant. Oublies-la cette fille qui t'a fait ça. Vis ta vie. Je te tiendrais au courant, ne cherches pas à en savoir plus, promets-le moi.
C'était toujours la même marche à suivre, dans tous les cas de figure : rupture difficile, divorce, humiliation, dispute familiale, échec au travail. Il suffisait juste de tourner la page, et de penser à la prochaine étape plutôt que de ressasser sans cesse les épreuves épuisantes qui venaient de nous tomber dessus. Mais c'était largement plus facile à dire qu'à faire. Il aviserait.
Il plongea les mains dans ses poches avant de sortir sans se retourner, il avait besoin d'air. La journée était bien entamée, il était resté plus longtemps qu'il n'aurait pensé.
En espérant ne jamais revenir dans cet endroit morbide, Dorian franchit rapidement les portes automatiques de l'hôpital...

[ Clos pour ma part =) ]
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