Morning bear [Libre]

Sohei se trouvait dans les couloirs de l'université où il créchait maintenant depuis quelques mois. Les lumières étaient éteintes et seule la lueur d'un soleil bleu éclairait les pans de mur repeints d'un jaune vif, qui se reflétait sur son pyjama. Mais qu'est ce qu'il foutait dans les couloirs en pyjama...

"Quel con, j'aurais dû mettre mes palmes."

Pas la peine de rester sur un échec, il fallait qu'il avance de toute façon. Il y avait au bout du long couloir, une jeune fille qui tenait un parapluie ouvert et cette nana devait lui donner un paquet de copies à rendre au bureau dans les plus brefs délais mais... le plafond commençait à pleuvoir déjà et l'eau s'accumulait sur le sol pour bientôt lui arriver aux genoux. Plus moyen de marcher, bénit aurait il été s'il avait pensé à mettre ses palmes! Il entama alors de longs mouvements de brasse afin d'arriver à attraper les copies avant que l'eau ne les souille. Plus que deux mètres... un mètre et il pu enfin attraper le visage de la jeune pucelle au parapluie pour ne pas être emporté par le courant. Mais lorsqu'il lui demanda le souffle court le paquet de copies, elle ne lui répondit que des sons inarticulés et stridents tandis que dans ses yeux brûlaient quelques chiffres: 08.OO am. Quand il la frappa sur le sommet du crâne, sa terrible chanson cessa et...


... il ouvrit les yeux. Il était 8h du matin, et la matinée démarrait avec un cours de culture visuelle dans l'amphi. En voyant l'heure, on pouvait deviner qu'il avait déjà repoussé quatre fois son réveil mais... il n'en avait gardé aucun souvenir. En même temps, si on lisait le titre du livre ouvert sur son ventre, on verrait "Bonjour tristesse de Françoise Sagan" et on comprendrait pourquoi il s'est endormit si tard.
Toujours est il qu'il n'était plus temps de traîner car si la matinée commençait avec un cours à la con, la conscience de Sohei elle, démarrait avec un grand café très noir et une clope. Mou comme un ballon au soleil, il s'extirpa de son terrier de couvertures et enfila un pantalon, un tee shirt, des chaussettes et mordit sa brosse à dent avant de tomber dans ses chaussures et fermer la porte de sa chambre, son sac sur l'épaule. Pour avoir fait la route tous les matins depuis quelques mois, le brun n'avait nullement besoin d'écarter le rideau de cheveux qui lui barrait la vue pour atteindre son but. Si certains savaient descendre une braguette sans les mains, Sohei lui savait aller à la cafet' sans les yeux. L'appel du café sans doute... de toute façon ses lunettes n'étaient pas sur son nez, donc aucune différence avec ou sans frange.
Dans un soupire, il poussa la porte du réfectoire et s'effondra sur une chaise après avoir remplit une tasse de café avec deux sucres. Comme d'habitude, c'était trop chaud et comme d'habitude, il avait oublié la touillette. Haha... Dans un geste lourd, il tira sur ses écouteurs et les roula comme un handicapé sur la table à côté de la tasse dans laquelle il plongea son index pour touiller.

"Tiens doux jésus regarde... même pas mal."

Dans ton cul jésus.

[Je me permets de répondre parce que je m'ennuie et que tu m'inspire xD Et si le fait que Akane soit encore au lycée gêne, je peux m'barrer xD ]

Les yeux mi-clos, le regard hagard, les cheveux en bataille, l'oreiller sur le sol, les couvertures recouvrant tout son corps, Akane émergé lentement. Oui, je vous assure, cela arrive aussi à Akane de se réveiller un peu mal. Dans son cas, cela faisait une semaine qu'elle se réveillait ainsi. C'était toujours le même cirque. Elle cauchemardait toute la nuit à cause de cette foutu tenue de lycéenne. Une jupe... Un chemise cintrée ! Des mots qui n'avait pas franchit le bord de ces lèvres depuis ses 10 ans. Ou ses 15 ans... Dans tout les cas, cela faisait au moins une demie décennie qu'elle n'en avait pas porté. Elle avait bien entendue fait comme si elle s'en fichait. Elle l'avait porté comme demandé... Dans un cadre un peu moins adorable. Travestissons nous. Mais bon. Une semaine comme cela et les étudiants commençaient vraiment à se poser des questions. Qu'elle le fasse une ou deux journées pour marquer le coup, okay. Mais qu'elle le fasse tout le temps commençait vraiment à devenir bizarre. Surtout qu'elle avait maintenant la flemme de se coiffer et ses cheveux parfois très hirsute accompagné son corps androgyne.

La jolie japonaise bailla et se frotta les yeux. Elle soupira pour la trentième fois de la matinée et se leva. Elle ramassa l'oreiller, essaya de donner un air normal à son lit puis passa dans la salle de bain. Akane ne se regarda même pas dans le miroir, remplit ses mains d'eau fraîche et se la balança nonchalamment sur le visage. BROUH ! Okay, c'était froid. Elle déposa enfin son regard émeraude sur elle et mouilla un peu ses cheveux, les peigna avec les mains pour arriver à ce que toutes ses mèches retombe sur sa tête. Aucune qui ne se faisait vraiment la malle. Génial. Puis, elle prit une douche rapide, repartit dans sa chambre avec juste une serviette autours d'elle et choisit ses vêtements. Pas de jupe. Il ne faut pas pousser le vice trop loin. Elle ne la porter que pour ses cours. Elle choisit donc un pantalon baggy noir, un grand T-shirt gris ainsi qu'un sweat bleu marine. Elle n'était pas du genre à accorder ses vêtements... Le premier truc qui passait entre ses doigts étaient bon à prendre. Elle passa un boxer noir, se banda la poitrine et s'habilla rapidement. Bizarrement, ses compagnes de chambre dormait encore... Soupirant de nouveau, la jeune femme sortit se perdre dans les couloirs et fit une petite promenade matinale. Puis son portable afficha 8 heure et elle se demanda pourquoi son ventre n'avait pas encore crié famine.

Son pas la porta donc dans la cafétéria de l'université. Cette blague. Que foutait-elle là ? Aucune importance, tout communiquait ici et faisant partie du comité, elle pouvait dire n'importe quoi. Non mais. Elle attrapa donc une pomme et chercha une chaise. Il y en avait pleins. Partout. Avec des tables. Et un mec qui trempait son doigt dans une tasse fumante. Il était fou ? Il parlait d'ailleurs tout seul. La jeune fille tira une chaise devant lui, et sans s'y asseoir, adressa la parole au pauvre bougre.

"Vous allez vous brûlez. C'est assez douloureux, une brûlure..."

Sans blague !

C'était amusant de sentir les grains de sucre s'écraser sous son doigt au fond de la tasse, il avait l'impression de remuer du sable. Ça lui donnait envie d'aller à la mer... cette étendue presque infinie d'eau qui léchait les côtes de sa langue salée et iodée. Rien que d'y penser, il sentait ses poils se dresser du bas de son dos jusqu'au sommet de son crâne. Cet été peut être, il s'offrirait le privilège de camper sur la plage la plus proche. Enfin la plus proche... il savait qu'il devait prendre le train pour s'y rendre, mais si la chaleur n'était pas trop étouffante qui sait, peut être qu'il irait à pieds avec juste un sac et une bonne paire de chaussures.

Sohei n'était pas un sur-homme, ni un super-héros (d'ailleurs la perspective de porter son slip au dessus d'une paire de collants ne lui avait jamais traversé l'esprit). C'était un garçon on ne peut plus normal qui avait mal quand il fallait avoir mal. Simplement, les petits bobos ne lui faisaient pas peur. Il avait presque dissout tout le sucre quand une voix s'éleva dans les ténèbres. Hou my god était-ce Jésus qui lui répondait en personne? Le timbre de cette voix rappelait le moteur d'une vieille voiture qu'on ne peut pas démarrer les rudes matins d'hiver. Non... Jésus était censé avoir une voix chaude et avenante... pas semblable à un vieux pot d'échappement. Dans un faible élan d'énergie... mais surtout par pure curiosité, il releva le nez et écarta les cheveux de ses yeux afin de mettre un visage sur cette drôle de chanson, en vain.

« … Trop tard. »

Une masse informe se tenait en face de lui, de l'autre côté de la table. D'après ce qu'il pouvait voir, c'était noir et gris... assez frêle... et tenait quelque chose de non identifiable dans une main, l'autre était posée sur le dos d'une chaise. Si c'était ni pompom, ni populaire, ni prof, ni Jésus... il leva mollement sa main pour lui signifier de prendre cette chaise dans un geste lent et lourd, tandis qu'il essuyait son index sur son pantalon.

« Ce n'est qu'un doigt sur une main gauche... si j'en avais pas ce serait pareil. »

Les yeux fixés sans vraiment de retenue sur la créature, il se demandait s'il la connaissait. Peut être l'avait-il déjà croisé dans les couloirs... ou même dans un cours. En tout cas cette silhouette et cette voix ne lui disaient absolument rien, parole de myope.
Sohei plaçait toujours tous ses espoirs dans la première tasse du matin, car si cette dernière n'avait pas raison de son état de mollusque, il resterait ainsi jusqu'à ce que celle du lendemain le réveille tout à fait. C'était d'une logique presque mathématique... mais c'était surtout très idiot... et fatalement problématique. Il leva la tasse jusqu'à ses lèvres pour en boire d'abord une petite gorgée afin de tester la température, puis en ingéra deux longues alors que les vapeurs du sommeil semblaient se lever. Tout ça, c'était dans la tête.

« Vous buvez rien le matin? »

A moins qu'il ne se trompe, l'individu X n'avait pas posé de récipient sur la table.

L'ours affalé sur la table semblait se rendre à peine compte de la douleur. Bon. En voilà une chose. Il la fixa un instant, mais comme s'il ne la voyait pas. Était-il malvoyant ? Dans le sens où il voyait un peu mal. Mais pas trop. Ou alors il était tellement pas réveillé que ses yeux était vitreux tout seul. En voilà une autre. La japonaise s'assit lentement sur sa chaise, et croqua dans sa pomme tout en regardant dans sa poche si elle n'avait pas un pansement. Madame pharmacie. Même carrément à côté de la plaque, elle avait la tête sur les épaules. D'ailleurs, tant mieux pour elle. Posant sa pomme, elle sortit son portefeuille. Dieu, elle ne l'avait pas oublié. Puis en sortit un pansement. Elle faillit le tendre à l'individu puis se dit que s'il était vraiment soit endormie soit avec une vue peu rassurante, il fallait mieux que se soit elle qui s'occupe de son doigts. Elle soupira un instant en regardant le jeune homme boire quelque chose de si chaud, puis répondit mollement.

"En général non. Pas des boissons chaudes en tout cas. Et depuis la mise en place du nouveau règlement, plus d'alcool non plus."

Humour. Akane n'avait jamais était fan d'alcool, encore moins au petit matin. La blague de ses congénères du FLPCB l'avait encore plus rendus sur cette voie. De l'alcool fort dès la première lueur d'espoir dans son cerveau, c'était l'éteindre à tout jamais. La japonaise croqua une nouvelle fois dans sa pomme, la reposa à la même place et regarda pensivement son pansement. Elle eut un vrai bug dessus avant de se rendre compte qu'elle devait le donner à son nouveau compagnon d'infortune. Ouaip', deux ours à peine réveillé à la même table, c'était géant.

"Je tiens dans ma main gauche un pansement pour votre doigts. Fin, si vous n'en voulez pas, s'pas grave. Je me demande d'ailleurs si le pansement à un effet anti-brûlure. Trop dure d'y réfléchir..."

Oui, quand Akane n'est pas réveillée, elle pense tout haut, des choses parfois vraiment peu intéressante et totalement hors sujet. Sa principale qualité, rappelez vous, est sa merveilleuse façon de tourner les phrases. Chanteuse, compositrice... Elle manie sa langue comme elle le veut - mauvais esprit s'abstenir- et ne manque pas d'en faire profiter les autres si on lui demande. Peu bavarde mais la langue acéré, la pauvre japonaise ressemble plus à une limace qu'à une humaine. Mais soit, on ne peut pas être classe tout le temps. Cela dit... Je trouve que même en mode loque, elle a la classe. Nonchalance. Un peu idiote, mais toutefois du genre fragile. C'est mignon, non ? Une voix totalement enraillée et un air de zombie mais... Mais la classe.

Ce qui était formidable, c'était que l'instauration du vouvoiement c'était fait sans encombre. Généralement, soit Akane avait la net impression qu'elle devait tutoyer son vis-à-vis soit elle s'énervait intérieurement devant le manque de politesse de son compagnon qui osait la tutoyer alors qu'il n'y avait aucune raison. Ah, le Japon... De plus, plus elle regardait l'ours, plus elle se demandait s'il n'était pas bien plus vieux qu'elle. C'est vrai que d'une part, elle n'était pas ici à sa place. Elle risquait fort de rencontrer des personnes d'une vingtaine d'année. Mais aussi, il semblait que le jeune homme fasse encore plus âgé. Il ressemblait un peu à un prof. En plus... Ours ?

Il ressemblait totalement à un ours...

"J'me demande s'il était un ours dans une autre vie..."

Comme dit précédemment... Akane pense tout haut. Chose qu'elle ne sait pas forcément. Ahah !

« Hm »

L'alcool au petit matin... est ce que ça comptait si on était encore ivre de la veille? Non certainement pas. Le matin et le soir faisaient souvent une différence au niveau des envies, l'alcool c'était un peu comme la soupe à l'oignon: le soir d'accord mais le matin m'en parle pas. Les commissures des lèvres de Sohei se relevèrent dans un sursaut au souvenir d'un matin en particulier où le couloir lui avait semblé très instable jusqu'à la cafétéria.

Dans un profond soupir, le brun tendit ses jambes sous la table pour les croiser. Il bougeait si peu parfois qu'il en avait des fourmis, et les jambes étaient terriblement sensibles puisqu'il les sentait à chaque mouvement moindre pendant 5 minutes. Le silence semblait être revenu autour de la table, seul le bruit de quelques déglutissions se disputaient un match, entre le café et la pomme. Il se souvenait d'un moment dans Pulp Fiction quand Vincent Vega et Madame Mia Wallas mangeaient dans la voiture du restaurant en ne sachant pas de quoi parler. Il trouvait cet instant très intéressant et totalement stupide à la fois: lui même ne se sentait pas le besoin spécial de combler un quelconque silence, et si ça gênait quelqu'un, ce n'était certainement pas lui. Après tout, il ne rebondissaient qu'exceptionnellement sur les conversations et n'était pas du genre à parler pendant des heures... Fallait qu'il y ait autre chose dans les phrases que de simples mots, un peu de bohème sans doute. Cependant son acolyte ne semblait pas abandonner comme les rares autres.

Un pansement... Franchement Sohei ne s'attendait jamais à grand chose quand il rencontrait quelqu'un, mais ça c'était fort. Certes, les pansements n'étaient utiles en rien pour les brûlures de ce genre puisque ce dont il avait besoin était plutôt un verre de glace pilée, mais c'était assez compliqué à expliquer... là il tenait quelque chose.

« J'le veux... à condition que vous fassiez un bonhomme dessus. »

Il tendit son bras pour pointer son index en face du visage de son voisin, puis sortit un Posca noir de sa poche de l'autre pour le lui mettre en main.

« Avec un bisou magique. »

Il se revoyait à 5 ans là, en short dans le jardin de la terrasse, un bout de verre dans le pouce. Il aurait donné n'importe quoi pour retourner en enfance. Pas de travail, vivre pour les vacances, s'amuser avec rien... il aimait cette insouciance qu'avaient les enfants malins. Et puis il n'avait plus autant d'admiration pour ses maîtresse de classe. Elles semblaient toutes bien moins belles que lorsqu'il était petit (et au coin). Bref, il avait gardé une partie de cette insouciance. Simplement, elle sortait rarement son nez.

« Un ours... peut-être... un gros plein de grands poils. »

Sohei s'imagina en Baloo un instant avant de penser à l'ironie de la situation. Il en faut peu pour être heureux... certes, mais le Bonheur n'était qu'un terme idéalisé.

[Je m'excuse du retard, je n'avais pas vu que tu avais répondu. HONTE à MOI !]

Le silence s'était bien vite installé entre les deux jeunes gens. C'était d'une évidence radical. Son compagnon aimait être tranquille et les paroles n'étaient pas quelque chose qu'il recherchait. Cela leur faisait au moins un point commun. Akane se complaisait dans le silence. Encore plus quand le réveil avait était difficile et quand un inconnu vous faites face. Dans son cas, c'était plutôt elle qui lui faisait face, puisqu'elle s'était totalement incruster. Mise à part cela, Akane ne parlait vraiment pas beaucoup. Juste pour dire au prof qu'elle n'admettais pas la façon dont son regard se posait sur la poitrine de telle camarade, ou pour dire à un garçon dans le couloir que sa conduite l'empêchais d'aller se reposer dehors. En gros, elle ouvrait sa bouche pour débiter des conseils plus que désintéressait. Ou pas.

Un bonhomme. Quel était l'âge de ce garçon ? Ou de combien de degré de connerie son cerveau était-il touché ? Allez savoir, Akane se posa à peine la question. Le matin aidait beaucoup à oublier. Elle savait plutôt bien dessiner. Enfin, dans un style qui lui plaisait... Mais elle s'imaginait mal dessiner sur un pansement pour une brûlure. Voyez l'absurdité de la chose. L'homme en face d'elle était plus âgé, sans aucun doute, souhaitait un bonhomme comme un enfant, et elle, souhaitait lui donner un pansement inutile contre une brûlure. Dans tout les cas, on aurait pu les prendre pour deux fous. Akane, elle, n'haussa que légèrement un sourcil, s'empara du stylo noir et fixa son pansement.

Un bisous. Cela allait-il trop loin ? Akane ne s'arrêta pas la dessus. Sur l'ours non plus. Elle lissa doucement le pansement plusieurs fois, puis commença une représentation de son compagnon en ours. Un animal avec une tasse de café et des cheveux hirsutes... Je vous jure que dessiner une chose ressemblant à quelque chose le matin, et sur un pansement n'est pas chose facile. Encore moins pour Akane. Le résultat n'était pas trop mal. Restait son bisous magique. Quelle connerie.

"Les ours aime t-il les bisous ? Et n'est-ce pas dangereux pour celui qui l'offre ? C'est bien la première fois que je parle avec la réincarnation d'un ours..."

Akane venait de poser le stylo entre Sohei et elle et fixait maintenant l'index du jeune homme. Cela ne ressemblait pas à une patte d'ours, mais peut être n'était elle pas assez réveillée pour voir distinctement la différence entre un ours et un être humain. Tout cela était grisant. Un peu trop peut être...

Son esprit normalement si pointue venait d'en prendre gros sur la patate. Elle marchait au ralentit. Un peu comme si une crise venait de s'autoproclamer dans son cerveau et lui ordonnait de ne pas se dépenser tout de suite. Résultat, elle semblait encore plus bête qu'une de ces camarades de chambrée. Dont je tairais le nom pour le respect de l'anonymat. Elle risquerait presque de se comporter comme une fille. Quoi que cela fusse impossible. Elle se croyait vraiment homme. Pour elle, il n'existait pas de femme en elle. Sauf quand on lui faisait remarquer. Et qu'elle devait se rendre dans sa chambre. Des moments qu'elle oublier bien vite pour ne pas sombrer dans le désespoir. D'un idiotisme...

"Les Hommes sont des animaux comme les autres, quand on y réfléchit."

C'était juste une question de race. Un peu moins poilu et plus avide, c'était sans doute les deux principales différences entre les humains et les autres. En ce qui concernait les ours, il avait vu une émission à la télévision une fois, sur un vieil homme qui s'occupait d'ours en liberté et qui avait été accepté par ces animaux sauvages, si bien qu'il pouvait parfois les caresser, et se coucher près d'eux. Le japonais avait trouvé ça absolument fascinant.

"Et puis la vie sans prises de risque c'est un peu comme un western sans Clint Eastwood... ça n'a aucun intérêt et ça parait très long."

Il avait compris ça vers la fin de l'adolescence, un peu tard. En même temps dans la cafétéria à la vue de plusieurs témoins, il ne risquait pas de lui arracher la gorge d'un furieux coup de patte. Il passerait au tribunal, serait jugé dangereux et enfermé pour acte de barbarie et homicide volontaire sans possibilité de faire appel... avec un avocat commit d'office un peu blasé par son travail... Il n'avait pas besoin d'être enfermé et surveillé pour se sentir en prison, son quotidien dans sa chambre d'internat s'en chargeait bien. Dans le film "Félon", le gros lunetteux super classe disait avec un fatalisme presque divin que "la prison, c'est dans la tête". Pas besoin d'épiloguer, surtout que l'odeur d'une quantité importante de sang le mettait assez mal à l'aise. Aucune chance que ça arrive. Son truc s'il en avait un, serait sans doute le poison. C'était fin et vicieux, c'était parfait pour lui.

Éprouvant les secondes qui dansaient le bal du silence, il appuya sur le pansement et grimaça faussement, geignard:

"Oouillouillouille! Dépêche toi, la douleur est insupportable..."

Même pas exigeant. Jusqu'où pouvait il aller avec cet être non identifié avant d'atteindre ses limites? C'était une excellente question dont la réponse faisait ronronner son impatience d'un feu ardent. Se faire dicter la morale, ou bien recevoir un poing... peu lui importait tant que c'était amusant et instructif. Cette créature ne semblait pas venir de la terre elle non plus, et la perspective de se trouver un camarade lui brûlait les cheveux.

"Pas vraiment, ils sont beaucoup plus bête."

Non non, Akane ne détestait pas la race humaine. Tout d'abord, après la mort de son frère, elle avait effectivement eu un de ces passage très sombre dont les gens sortent changés, grandit généralement. Elle en était heureusement sortit. Pas vraiment dans le bon sens au départ, les restes de ces interminables pensés noires la rattrapant encore parfois. C'est dans ces années là qu'elle fut très agités et changea bien des fois de lycées. Puis elle se calma un peu rencontra Kyo et quelques temps plus tard, fut de nouveau en proie à des démons. Pas si intérieur que cela puisqu'elle ne s'en prenait plus à la Terre entière mais au système. Et elle était parvenu à devenir stable ici. Elle rencontra Elio, quelques autres olibrius... Et ce qu'elle souhaite par dessus tout, c'est de rester en paix, ici. Elle ne veut surtout pas partir de cette académie. Mais quand on est rebelle comme elle. Pas grande gueule mais éprise de la justice et de la liberté, il ne faut pas trop rêver. L'épée de Damoclès tournoyait paisiblement au-dessus de sa tête. Paisiblement... Pour le moment. Peut être dormait-elle, elle aussi, comme Akane.

"Vrai. On devrait peut être sauter des dernières marches du hall de l'université a pieds joints."

A vrai dire, Akane n'avait pas compris du tout la comparaison avec les western, puisqu'Akane n'avait aucune connaissance la dedans. Et puis, quand on est aussi reveillé qu'elle, vous pouvez toujours essayer de comprendre, vous n'y arriverez pas. Mais, ce qui comptait, c'était qu'elle comprenne l'essentielle. Et elle l'avait compris. De toute façon, elle vivait ainsi, elle. Calme, mais bouillonnante aussi. Évidement, elle ne pouvait savoir ce qui se tramait dans la tête de son ourson. Mais... Peut être ne s'y passait-il rien non plus. C'est vrai quoi. Elle avait l'esprit un peu vide, pourquoi pas lui ?

"L'impatient. Petit ours est trop mignon."

La jeune fille attrapa doucement la main de son compagnon de petit déjeuner puis y déposa ses lèvres. Elle voulut le mordre pour rire, mais ce dit que finalement ce n'était peut être pas une bonne idée pour sa brûlure. Et en plus, c'était trop bizarre. Quoi qu'Akane n'avait pas vraiment de notion du mot bizarre. Sinon, beaucoup de ces amis, ou des faits et gestes de certains seraient réunis dans le casier bizarre. Donc trop ordinaire, donc plus si bizarre que cela. La vrai personne bizarre, ce serait une personne simple et ordinaire. Ce serait bizarre a en crever les yeux. Certainement. Mais pour le moment, les deux personnes dans la cafétéria ne semblait pas brancher bizarrerie et ordinaire, qui ? Eux vivaient la minute à la minute. Et c'était déjà beaucoup.

"Les ours aiment le café ?"

Si les ours aimaient le café ?

"Excellente question."

Dans un ultime sursaut d'énergie, il parvint à se lever pour aller remplir sa tasse une nouvelle fois. Même plus besoin de radar puisqu'il venait déjà de faire le chemin. Ses affaires étaient restées sur la table pour signifier à son compagnon de réveil qu'il ne l'abandonnait pas sans rien dire, mais devant la machine il entendit l'heure qu'il était au hasard d'une conversation. Il restait un quart d'heure avant l'heure H à laquelle débutait son premier cours, et il avait encore des choses à faire avant d'aller finir sa nuit sur sa chaise d'amphi.
En revenant près de la table, il haussa les épaules en regardant vers son acolyte et prit la parole:

"Je crois surtout qu'ils aiment l'air frais et nicotiné de la première cigarette de la journée."

Sohei posa sa tasse pour boutonner son gilet le samedi avec le dimanche, balança son sac sur son épaule et enfonça son mp3 dans sa poche. Il se sentait encore un peu ivre de la veille (ce qui n'était pas pour lui déplaire), mais son équilibre précaire promettait la possibilité de le suivre à la trace, puisqu'il comptait bien balader sa tasse jusqu'à sa salle de cours pour la boire là bas.

"Les loutres aiment la cigarette?"

Il avait déjà tourné les talons, pensant bien que l'autre le suivrait... enfin avec un peu de chance.

"C'est moi qui offre."

L'ours en question devait avoir fait la transformation du café en énergie énorme puisqu'il réussit à se lever en un éclair, comprenez trop rapidement pour les yeux endormis d'Akane, et avait traversé la cafétéria afin de se reprendre un café. Café super bénéfique pour les ours. C'était maintenant inscrit dans la mémoire de la jeune femme. Si un jour elle rencontré un ours, elle ne lui donnerait jamais de café. Manquerait plus qu'il décuple sa force. Akane n'avait, en passant, même pas réfléchit une minute à la possible trahison de son nouveau compagnon. L'idée qu'il puisse partir sans rien lui annoncer ne lui avait même pas traversé l'esprit. En fait, elle avait était tellement étonné de la vitesse de déplacement de son ami qu'elle n'avait pas pu réfléchir à autres choses. D'ailleurs, il marchait vite et droit, c'était impressionnant. Presque aussi bien qu'une personne bourrée, en fait.

"Alors, en plus, les ours fument."

Akane se demanda maintenant si la cigarette rendait les ours joyeux, pensif ou admirablement gentil. Quoi que son vis-à-vis était plutôt gentil. On ne pouvait pas le dire méchant. Peut être cela le rendrait-il nerveux et agressif ? La curiosité assez perturbé d'Akane la poussa à se lever à son tour, et ébouriffer ses cheveux courts, et à suivre l'ours.

"Je ne sais pas. Les loutres fument certainement juste lorsqu'on leur propose. Je pense."

Et c'était bien une proposition, non ?

Le réveil trop lent de la demoiselle commençait à handicaper de moins en moins. Elle voyait maintenant parfaitement dans les 5 mètres, marchait plutôt droit et ne dodelinait plus de la tête en baillant. De plus, ses yeux n'affectaient plus la ressemblance avec des balles de tennis. Elle ressemblait davantage à un être humain. Encore que... La jeune japonaise attrapa sa pomme, croqua une dernière fois dedans et jeta le trognon dans une poubelle puis elle suivit comme elle put Sohei.

L'air frais lui gifla les joues et lui piqua les yeux. Elle laissa deux larmes coulaient avant de les essuyait mollement. Pleurer à cause du vent n'était pas quelque chose de super gênant pour elle. Elle s'en fichait d'ailleurs royalement, comme la plupart de choses de ce bas monde.