Une Rebelle, Une Artiste et des Hommes Verts, rien que ça !

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L'on pouvait voir le soleil se coucher, si on regardait bien par la fenêtre on pouvait remarquer plusieurs couleurs, du jaune, du rouge, de l'orange. Je dis ça mais, en même temps, je ne dis rien car certains risqueraient de me faire un spitch sur ce couché de soleil aussi banal que celui d'hier. Les couloirs de Keimoo étaient vides pour la plupart. Les élèves avaient comme qui dirait, disparus de l'Académie, plus un chat. Cela aurait été bien si certains avaient disparus totalement de la surface de la Terre, un peu de paix il n'y a rien de mieux. Tous n'étaient pas rentrés chez eux ou bien n'étaient pas allés rejoindre leur chambre. Notre jeune Sawako rodait encore dans les couloirs, seule, avec son apparence qui fait peur aux trois quarts des étudiants de Keimoo. Elle était équipée d'un appareil photo et d'un calepin. Oui, Sawako comptait bien rester ici malgré qu'elle n'ait point de chambre. Elle avait menti à ses parents, leur disant qu'elle dormait chez une amie, ils avaient été ravis et n'avaient pas demandés plus amples détails.

Si elle était restée ici, si elle avait autour du cou un appareil photo, dans sa main un calepin et un stylo, dans son sac de quoi manger et une couverture c'était bien pour une chose. Sawako allait traquer les extra-terrestres ! Et oui ! Sans mentir, elle allait se poser sur la pelouse de la coure et attendre l'apparition d'un de ses hommes verts. Elle était déterminée, elle savait que ce soir ils allaient se montrer, ce soir et pas un autre ! Personne ne réussirait à la faire changer d'avis et souvent le pire dans tout ceci, c'était qu'elle s'en contrefichait d'enfreindre l'une des règles de l'école. Quand elle a envie de faire quelque chose, rien ni personne ne peut l'arrêter. C'est donc d'un pas rapide qu'elle se dirigea vers le centre de la coure, à l'écart du préau. Sortant sa couverture de son sac, ainsi que par la même occasion à manger, elle observa le ciel et dès qu'un petit quelque chose volant semblait suspect, elle le prie en photo.

Mais alors que la nuit avait habitée tout le pays, le vent se leva faisant virevolter les cheveux de la jeune fille et lui procurant un frisson désagréable. Elle sera les dents et ferma les yeux pour essayer de ne pas sentir le froid. Elle se posa sur sa couverture, enleva un sandwich au poulet de son emballage et commença à manger, l'appareil photo toujours en main. La lune était très belle ce soir ou plutôt devrait-on préciser que c'était la pleine lune. C'était en partie pour ça que cette escapade nocturne vint à Sawako. De plus elle avait lu, dans un des innombrables magasines dont elle est membre, que ce soir les extra-terrestres devraient venir jeter un coup d'oeil sur Terre. C'était une chance incroyable d'être là prête pour les photographier et peut-être qui sait leur parler ? Alors qu'elle reprit une bouchée de son sandwich, notre lycéenne aperçut des lumières aveuglantes dans le ciel. Pour elle il n'y avait pas de doute, les hommes verts arrivaient ! Elle immobilisa ce moment et attendit le chargement de la photo et...

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Kyaaaaaaah ! Maudits soient ses avions !

Elle posa son dîner sur la couverture d'un geste qui montrait sa colère et se leva pour prendre en photo la lune, histoire de tuer le temps en attendant la venue de ses compagnons. Une rafale de vent lui souleva sa jupe, par réflex elle tint sa jupe un peu trop en retard, car on vit un bout de sa culotte. Heureusement pour elle, elle était seule. Elle sort son portable et regarda l'heure, 21h36. La fatigue l'empara mais, sa détermination l'aida à rester éveillée, louper ceux qu'elle admire, ou presque, serait horrible. D'ailleurs cette passion plus qu'étrange attisa la moquerie des autres, ils trouvaient que c'était un peu gamin et immature de croire à ces choses-là. Combien de fois lui a-t-on répété que les extra-terrestres, les OVNI et toutes ces choses-là n'existent pas et combien de fois elle n'a pas voulu en entendre plus et est partie ? Oh, je n'ai pas le nombre exact mais c'était plus d'une centaine de fois. Non, non, non et non ! Pourquoi l'embêter alors qu'eux croient aussi à des choses ridicules, absurdes et qui par dans la stupidité ? Le prince charmant, l'homme parfait, une vie magnifique sans problème, ces choses étaient impossibles à avoir ! Alors que l'on ne vient pas la voir pour sortir un discoure ennuyeux sur ce qui peut être réel ou pas.

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Si je les rencontrerais, je me demande ce que je leur dirais... Je devrais peut-être me présenter d'abord et leur dire que je suis une de leur plus grand fan !

C'est ainsi que pendant une bonne dizaine de minutes, Sawako s'entraînait à marcher avec grâce, à faire la révérence, à dire son prénom bien en articulant et en parlant bien fort. Elle espérait que ses amis de la planète Mars comprennent sa langue et ne la considèrent pas comme une ennemie à neutraliser. Trop occupée parce qu'elle faisait, elle ne savait pas si oui ou non on l'avait remarqué. Il est vrai qu'une forme plus qu'étrange, qui « gigote » sur la pelouse, avec un campement digne d'une scoute peut faire penser à une élève...folle...malade mentale...somnambule. Puis Sawako se retourna et sentit que quelque chose approchait mais, ne savait pas quoi. Elle recula d'un pas. D'un coup elle eut une idée et si c'était un extraterrestre ? Elle eut un petit sourire et attendit d'en être bien sûre pour sauter de joie.

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Après avoir échappé aux yeux de lynx des adultes qui la poursuivaient pour son manque d’assiduité à la majeure partie des cours de la journée, Myra fumait tranquillement une cigarette sur le balcon de sa propre chambre dont l’altitude permettait d’avoir une vue quasi intégrale sur une bonne partie du pensionnat. De là où sa chambre était située, elle pouvait parfaitement scruter la cour de fond en comble, pourvu qu’il y ait une forme de vie suffisamment intéressante pour attirer son attention. Pour l’heure, des élèves élégamment vêtus s’apprêtaient sûrement à aller en soirée, et à en juger par leurs nombreux conciliabules, ils cherchaient un moyen de se carapater discrètement, sans qu’aucun boulet ne vienne réduire leur plan en miettes. C’est que c’était tout un programme, d’élaborer une stratégie pour ne pas se faire attraper par les pions, susceptibles de nous disséquer rien qu’en nous transcendant de leurs regards suspicieux. Ils ressemblaient à des matons effectuant des rondes dans une prison, notamment par leur démarche chaloupée qui leur conférait une allure sérieuse et intimidante. Quand ils avaient ce comportement, il ne fallait pas chercher midi à quatorze heures car de cette manière, on pouvait être sûr qu’ils avaient une grande partie de l’établissement scolaire dans le colimateur. Et vicieux comme ils étaient, ils savaient feindre l’indifférence alors qu’ils vous épiaient, cherchant à décoder l’intention camouflée derrière chacun de vos faits et gestes.

La nuit finit par tomber, il était alors aux alentours de neuf heures du soir. L’académie Keimoo semblait désertée, dénuée de toute vie. Il n’y avait pas un chat pour témoigner d’une quelconque effervescence. Seulement une légère brise pour caresser les joues de notre adolescente anticonformiste qui, mordue par un froid quasi glacial, s’empressa de refermer la fenêtre de sa petite chambre. Dans un soupir, elle s’apprêta à tirer les rideaux quand elle crut apercevoir une silhouette gigoter comme une dératée, effectuant des mouvements amples des mains, comme si on essayait de répéter une scène tirée d’une pièce de théâtre. Arquant ses sourcils, elle fut intriguée par cette forme mouvante qu’elle décida de rejoindre, pour satisfaire sa curiosité et pour assassiner son ennui. Rares étaient les jours où elle n’était pas d’humeur festive. Aujourd’hui, elle souhaitait récupérer des nombreuses évasions qu’elle avait menée avec brio, pour s’infiltrer dans des boîtes de nuit où elle avait dansé et jumpé comme une folle dingue. Elle avait fait des rencontres, le répertoire de son téléphone portable était plein à craquer de plans grivois pour ne pas dire de plans cul dont elle ne manquerait pas de profiter à la première occasion. Enroulant son écharpe multicolore autour de son cou, elle traversa le pensionnat, descendit avec légèreté les escaliers qu’elle rencontra sur son chemin. Quand elle se trouva à l’extérieur, elle réalisa qu’elle avait été assez idiote pour omettre de prendre un gilet, ou de quoi se couvrir pour ne pas attraper un rhume. Il serait mal venu de se pointer sur le dancefloor avec le bout des narines irrité à cause des tonnes de mouchoirs utilisés. Ce n’était pas très séduisant, voyons !

- Brr si j’avais su je serais restée tranquillement recroquevillée dans mes draps, sur un matelas chaud et moelleux.

Rien qu’à cette idée, elle rougit de plaisir mais fut rapidement rattrapée par la réalité. Après tout, c’était elle l’abrutie qui s’était laissée sagement conduire par sa curiosité, et cette dernière ne tarda pas à y trouver son compte lorsque l’adolescente entendit d’étranges paroles non loin de là. Une personne semblait attendre quelqu’un. Sachant pertinemment que les bruits venaient de la cour, Myra s’y dirigea et, à quelques mètres d’elle, aperçut ce qui ressemblait à une jeune fille. Notre rebelle fut interloquée par tout l’attirail qui gisait à ses pieds, et qui s’apparentait à un équipement de camping, ou quelque chose qui pouvait s’y assimiler. Se pinçant la lèvre inférieure pour ne pas éclater de rire, elle dut aussi faire un effort surhumain pour ne pas râler à cause du froid, et surtout de ce petit vent qui fit virevolter son écharpe. Ce phénomène octroya à sa silhouette une allure pour le moins énigmatique, d’autant que sa longue chevelure pouvait donner l’image d’un poulpe ou d’une quelconque créature dont les tentacules se mouvaient, prêtes à capturer la première proie leur tombant sous la main. Une vision certes ridiculement métaphorique, mais qui pouvait stimuler l’imagination de son prochain. Par ailleurs, la cour n’étant que faiblement éclairée, et la pleine lune se trouvant actuellement voilée par un nuage qui passait par là, l’inconnue aux lubies d’aliénée n’avait dans son champ de vision qu’une ombre gigotant et lui adressant la parole sans se décider à amoindrir la distance qui les séparait :

- Qui est aussi idiot pour se geler les miches dans ce froid de mes trois fesses et de mes dix mille tentacules ?

Sa voix rauque car enrouée par la cigarette renforçait l’aspect mystique de la scène. L’autre, qui semblait prendre racine sur place ne daignait pas répondre quoique ce soit, apparemment subjuguée ou en appréhension devant ce qu’elle était en train de voir. Allait-elle réaliser qu’un être humain marchant comme elle sur deux pattes lui adressait la parole, en se souciant implicitement de son état mental ? De plus, la rebelle ne connaissait aucun autre pensionnaire dont la principale passion était de dormir à la belle étoile, autrement ça se saurait, et l’individu concerné aurait atterri à la une du journal du pensionnat. Ainsi, soit la personne en question s’était retrouvée dehors dans un étrange concours de circonstances, soit elle venait tout simplement de la ville. Peut-être bien qu’il s’agissait d’un SDF qui n’avait nul part où aller ? Attristée par cette perspective, Myra oublia finalement de rire, et demeura silencieuse, serrant les doigts sous l’emprise de la fraîcheur nocturne qui l’assaillait de toute part. Une bonne bouteille de Vodka aurait pu la réchauffer. Ah…de la Vodka…<3

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Elle n'osa pas s'approcher davantage, on ne savait pas ce qui pouvait arriver si elle le ferait. Sawako entendit de plus en plus de bruits de pas qui se rapprochaient à une assez grande vitesse pour elle. La joie qu'elle éprouvait au tout début se calma un peu, car elle avait peur que cela soit un surveillant, un professeur ou encore le directeur en personne. Elle savait que si on la découvrait ici, au milieu de la coure à faire je ne sais quoi, elle risquerait d'avoir soit des heures de colles, soit peut-être une exclusion temporaire. La lycéenne ne voulait même pas imaginer qu'elle serait la réaction de ses parents. Si seulement ils savaient où elle était et ce qu'elle faisait, ils en rigoleraient, pour après s'énerver. Avec son imagination débordante, Sawako tînt son appareil photo en main, prête à prendre une photo de la « créature » qui s'approchait d'elle. Bien sûr sa naïveté avait des limites, elle ne pensait tout de même pas que c'était E. T qu'était venu la voir. Le vent s'était calmé et tant mieux, mais les nuages apparurent et l'on pouvait craindre qu'il se met à pleuvoir. Puis une voix se fit entendre en face de Sawako. Celle-ci sursauta sur le coup de la surprise puisqu'elle avait cassée le silence. C'était s'en aucun doute celle d'une fille, mais ce qu'elle avait dit était quelque peu bizarre.

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Encore une mauvaise alerte

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Si je suis dehors c'est pour une bonne raison. Et puis toi aussi t'es dehors et moi je n'ai pas froid.

Elle enleva son appareil qui était autour de son cou et le posa sur la couverture, prenant au passage une bouteille d'eau fraiche. Elle voulait bien savoir l'identité de son interlocutrice, elle avait deviné que c'était une fille mais, après ? Elle se racla la gorge et se demanda comment elle pourrait expliquer cette « bonne raison » qui fait qu'elle soit dehors et non dans son bon lit bien au chaud. Mais comme elle lui avait dit, elle n'avait pas froid. Elle s'assoit sur la pelouse avec son air tranquille et observa de temps en temps le ciel. Elle pourrait lui dire que c'est pour une expérience, mais ça ne marcherait surement pas. Rien que d'y penser, elle savait qu'elle allait se moquer d'elle, c'était ce que faisait la plupart des élèves. Eux, n'arrivaient pas ou plutôt ne voulaient pas la comprendre. Elle ne refuserait pas si quelqu'un lui demanderait de l'accompagner, c'est qu'on se sent un peu seul dehors à cette heure-ci ! Mais il ne fallait même pas penser à essayer de dormir, on risquerait de louper quelque chose d'intéressant par-dis !

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Je suis sortit pour photographier des extraterrestres ou encore des Ovnis. Et il paraitrait que ce soir ils vont se montrer, alors je veux être là pour les voir.

Elle se sentait tout de même fière de lui avoir dit ceci. Elle ne savait pas exactement à quelle heure ils pouvaient se montrer et l'attente commençait à être longue, très longue même. Elle était là depuis quand même 20 : 30. Pas une fois elle avait baissé sa garde, toujours armé de ce qui lui permettrait d'avoir une preuve de ce qu'elle pourrait avoir vu. Sawako ne connaissait pas grand monde à Keimoo, elle ne savait pas à qui s'adresser pour une sortie nocturne à la recherche d'hommes verts, alors elle faisait toujours ça toute seule. C'était seulement sa 2e sortie mais, il fallait vérifier si cela valait le coup de sortir. Ça ne sert à rien de sortir et de rester planté là pendant deux voir trois heures pour au final s'emmerder et rien apercevoir.

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Euh...j'ai oublié de me présenter, j'crois bien. Moi c'est Sawako et toi ?

Il fallait bien commencer part quelque chose et puis le coup des présentations quand il y a un grand silence ou quand on ne sait pas quoi dire, cela marche à coup sûr. Mais elle ne savait pas si son interlocutrice allait rester ou pas. Ce serait bien, c'est que la Sawako s'ennuie un peu, le boulot de photographe d'extraterrestres demande certes beaucoup de patience mais, elle aurait bien voulu ramener un livre. Lire dans le noir, faut le faire ! C'est vraiment stupide, quoi que certains soient bien capables de le faire... Les pauvres, ils ne doivent pas être très bien dans leur peau. Bref, l'heure qui était inscrite dans son magasine et qui indiquait la venue des hommes verts approchait.

L'artiste avait hâte de les voir. Et ce n'était pas des blagues, car nombreuses sont les apparitions suspectes au Japon. Mais certaines personnes racontent des bobards pour se faire connaitre. Sawako jeta un coup d'oeil dans son sac ou plutôt chercha avec sa main ce qu'elle avait ramené, histoire de voir s'il y en avait assez pour la jeune fille et elle. Elle comptait trois sandwichs, quatre bouteilles d'eau et c'est tout. Elle aurait dû ramener des serviettes peut-être, mais les serviettes c'est bien pratique mais, on doit les jeter après et si on ne connait pas l'emplacement exacte des poubelles, on a une chance sur un million de ne pas se crouter. Elle se souvint qu'elle était avant entrain de répéter sa rencontre avec ceux qu'elle admire. Mais elle ne pouvait plus continuer, elle n'était plus seule et elle passerait pour une folle si elle se remettait à le faire. Non, c'était bien une mauvaise idée. Mais il faut bien l'avouer qu'elle passait déjà pour une fois même avant la venue de l'étudiante. D'ailleurs, elle l'avait peut-être vue faire et la prenait déjà pour une malade mentale ou peut-être une fille dont il ne faut pas approcher. Sawako est sociable oui mais, elle a toujours une attitude étrange qui peut effrayer certains.

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Bon sang de bonsoir, elle n’avait vraiment pas été très fûtée d’omettre de prendre ne serait-ce qu’un gilet. Un tout petit gilet de rien du tout pour la réchauffer et lui faire oublier qu’elle était actuellement à l’extérieur de ce fichu pensionnat. Heureusement qu’elle semblait avoir une personne fortement intéressante par son étrangeté en face d’elle, car si il n’en tenait que de son libre-arbitre, je peux vous assurer qu’elle aurait déjà fait demi-tour. Contrairement à sa piètre personne, sa nouvelle rencontre paraissait beaucoup plus téméraire qu’elle. Tandis que les nuages masquaient le ciel, empêchant quiconque de pouvoir contempler la beauté sempiternelle de l’astre lunaire, Myra fut incapable de parfaitement distinguer les traits du doux visage qui proférait des paroles légèrement hostiles, dans la façon dont elles étaient tournées. En effet, la première réplique de cette inconnue laissait sous-entendre qu’elle était à la fois surprise, peut-être aussi déçue et frustrée d’avoir réceptionné son entrée en matière plus qu’étrange, dont le champ lexical humoristique n’avait pas eu l’effet escompté. Faisant fi des frissons qui assaillaient son corps tandis que le souffle de Zéphyr s’enfouissait entre sa peau et ses vêtements, elle daigna s’approcher sans plus d’hésitation, se frictionnant le haut des épaules pour espérer gagner quelques degrés de plus.

- Oh hé bien mille excuses. On dirait que je te dérange.

En effet, à en juger par le matériel qui l’accompagnait, cette jouvencelle avait des idées pour le moment méconnues derrière la tête. Elle n’était pas ici par hasard, et donc, comme elle l’avait si bien spécifié, si elle était dehors en cette nuit glauque et glaciale, c’était pour une bonne raison, et elle seule était bien placée pour le savoir. Alors, autant par respect que par intrigue, Myra n’osa pas directement donner suite à la conversation, tandis qu’elle se décida à lui expliquer le pourquoi du comment de son incruste dans la cour. A mesure que ses explications se développaient, les sourcils de la rebelle se haussèrent avec franchise, et ses lèvres se pincèrent, d’abord pour étouffer un ricanement qui aurait certainement eu le don de vexer son interlocutrice, après quoi, ses persifleries se muèrent en un profond intérêt pour les plans farfelus de Sawako. Ce prénom, elle put l’entendre lorsqu’à la fin de son discours, la fanatique des extra-terrestres daigna décliner son identité. En hochant positivement de la tête, notre anticonformiste de première renommée en fit de même, observant les faits et gestes de mademoiselle Jones qui trifouillait incessamment dans son strict nécessaire comme pour s’assurer qu’elle n’avait rien oublié.

- Enchantée Sawako, je m’appelle Myra.

Que Sawako soit rassurée, elle avait suscité la stupéfaction de la rebelle, ce qui la convainquit de s’éterniser avec elle sous ce ciel presque étoilé, dont la magnificence aurait pu être infaillible si il n’y avait pas tous ces nuages pour voiler le berceau des anges. A ce rythme là, si une soucoupe volante parvenait à entrer dans l’atmosphère de notre planète, aucune photo claire et précise n’allait pouvoir être capturée pour certifier l’existence d’une autre forme de vie dans la galaxie entière. A vrai dire, Myra ne s’était jamais posée la question de savoir si l’être humain était réellement seul. Pour tout vous avouer, elle s’en fichait un peu, mais maintenant qu’on soulevait cette énigme, elle avait envie de la percer à jour parce que si jamais Sawako parvenait à prouver que les OVNIS ne sont pas qu’une lubie universelle, peut-être qu’elle pourrait acquérir une certaine notoriété. Etant donné que Mrs Jefferson ne comptait pas faire de son existence un train-train quotidien banal et sans saveur, autant profiter de cette occasion pour rendre le tout palpitant et nouveau.

- Tu fais ça souvent de te poser quelque part et d’attendre que des martiens te rendent visite ? C’est une passion ? Une question très existentielle que tu souhaites résoudre pour te prouver quelque chose ? Chais pas moi !

Il y avait tant de choses à savoir sur son prochain, qu’à chaque fois qu’elle rencontrait une personne qui ne la brimait pas, elle se sentait contrainte de la harceler de questions pour espérer la cerner rapidement. En revanche, ce n’était pas pour autant qu’elle attendait quoique ce soit de l’individu en question, car chez elle, tout était spontanéité, naturel et hasard. Elle n’aimait pas les gens calculateurs, qui venaient gratter l’amitié avec un objectif bien précis. C’était ce style de rencontre qui l’amenait réellement quelque part, car au moins, elle était sûre d’être surprise et elle adorait se faire surprendre.

- Par contre, je suis vraiment navrée de te demander ça mais tu n’aurais pas une couverture ou une veste à me passer ? Tu dois bien avoir quelque chose pour moi dans tout ton attirail non ?

Elle avait soumis sa demande en arborant une expression montrant son supplice et surtout son agonie, avec l’impression de se trouver en Sibérie. Elle en vint même à s’inquiéter à propos de son état de santé, allant jusqu’à se demander si elle ne commençait pas à vieillir avant l’âge, en se plaignant de choses dont elle avait autrefois cure. Mais le problème n’était pas là, il lui fallait une couche de tissu supplémentaire pour se sentir mieux, et tenir compagnie à Sawako. Car maintenant qu’elle l’avait trouvée, et qu’elle n’avait jamais aucun impératif pour se détourner de ses projets, elle désirait réellement rester. Finalement, les ovnis, et les petits bonshommes verts, ça la captivait.

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Si nous devions expliquer par un seul mot la première impression qu'à eut Sawako quand elle avait entendu l'étudiante, on pourrait prendre : Euh... Oui, c'est que venir comme ça lui parler c'était un peu soudain et sur le coup elle ne savait pas quoi dire de bien intelligent et qui ferait avancer la conversation. Mais sa phrase qui lui était destinée évidemment, l'avait fait rire à l'intérieur. Elle n'aurait pas voulu offenser la jeune fille, ce n'était pas poli de rigoler dès que celle-ci aurait ouvert la bouche. Sawako pensait qu'elle était du genre à être froide, renfermée et qui se moquait d'un peu tout le monde. Mais, c'était le contraire et elle parut très sympa aux yeux de l'artiste qui afficha un léger sourire. Elle n'avait pas à se cacher, la lune ne se voyait que peu à cause des nuages, fichu nuages qu'ils disparaissent.

Elle aurait bien voulu le faire l'après-midi mais c'était impossible, elle avait cours la plupart du temps jusqu'à dix-sept heures et le week-end sa mère avait besoin d'elle pour l'aider à la maison. Puis elle fut sortit de ses pensées par les excuses de son interlocutrice. Elle paniqua un instant, croyant que les paroles qu'elle avait dîtes auparavant l'avait blessé. Elle voulait dire quelque chose mais, avait peur d'aggraver la situation. Puis elle préféra se présenter et l'étudiante lui indiqua par la même occasion son prénom. Il n'y avait pas au final de quoi s'inquiéter, notre Sawako stresse toujours pour un rien. C'était un bien joli prénom, peu commun pour Sawa mais, qui était simple à retenir.

Mais malheureusement, le temps passait mais rien ne se distinguait dans le ciel noir. L'étudiante n'avait pas prêté attention aux étoiles, peu nombreuses mais, elle les remarqua et les pris en photo pour son album. Puis vinrent en trombe les questions de Myra et qui pouvaient laisser croire qu'elle voulait en apprendre plus. Mais Sawako ne s'était pas posé ce genre de question « Résoudre une question »...Pour elle c'était des spécimens très étranges et dont on ne savait pas beaucoup à leur sujet. S'il existe, s'il n'existe pas, malgré les apparitions, certains restent septiques à ça.

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Je ne le fais pas souvent, comme j'suis l'une des seules à m'intéresser à ça, je n'ai personne pour m'accompagner et de plus il faut prévoir tout ça bien à l'avance.

Puis elle réfléchit un moment, qu'elle serait la réaction de Myra quand elle lui dira que c'était bel et bien une passion et qu'elle leur voue une attention très particulière ? Il fallait se lancer.

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Oui c'est ça, c'est une passion. J'adore les extraterrestres ! Et je trouve que les dires comme quoi ils n'existeraient pas sont entièrement faux.

C'est ça, c'est entièrement faux ! Bien sûr que les martiens c'est un sujet intéressant, on pourrait voir ce qu'ils apporteraient à la planète. Mais il y aura toujours des gens ayant leur propre avis et restant fermés sur la question. Elle ne supportait pas ce genre de personne qui ne veut rien savoir, on aurait beau leur montrer des preuves par centaines, rien ! L'artiste regarda à nouveau l'heure sur son portable et put lire 21 : 54. D'après le magasine dont elle en était membre, les hommes verts se présenteraient à 22 : 10. Il restait seize minutes pour se préparer, on ne pouvait pas savoir ce qu'il se passerait. Allaient-ils faire une ronde et repartir ou bien se poser et observer ce qui les entoure ? Telle était la question. En parlant de question, Myra venait d'en poser une. Comparée à Sawako, elle avait froid et il fallait vite quelque chose pour la réchauffer. Elle se dirigea donc vers la couverture puis la prise et la secoua pour faire tomber le peu d'herbe qui avait et la tendit à la jeune fille.

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Voilà, en espérant que tu as moins froid. Mais, ça voudrait dire que tu veux rester avec moi ?

Qui l'aurait cru, pour une fois elle ne sera pas seule durant toute la nuit. Elles seront deux à voir venir les martiens de leur planète natale, deux à voir une soucoupe volante voler dans le ciel. En espérant qu'après ça tout le monde ou du moins une bonne partie, la croira enfin sur l'existent de ces phénomènes. La nuit risquerait peut-être d'être longue mais, elles allaient pouvoir discuter pendant ce temps. Sawa ne cachait pas la joie d'avoir trouvé une personne qui aimait, apparemment, aussi les extraterrestres. Elle leva la tête vers le ciel et aperçut un petit quelque chose qui était en train de voler, écarquillant les yeux, elle se leva.

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Là !!!! Regardes, y'a un truc qui vole et cette fois-ci ce n'est pas un avion !

Elle ne cessa pas de répéter « Incroyable » durant une bonne dizaine de minutes, stupéfaite parce qu'elle venait de voir. L'Ovni, car on ne savait ce que c'était, continuait à tournoyer dans le ciel semblant chercher une direction où partir. Hélas, les nuages ne permettaient pas une photo exacte et claire de la chose, ce qui agaçait Sawako. C'était le moment pour elle de prouver ce qu'elle se tuait se tuer à expliquer. Elle appuya sur un bouton, après avoir pris son appareil photo et décida de faire une vidéo. Peut-être qu'après ça, on pourrait en tirer quelque chose de potable qui ne ferait pas croire à un montage. Elle sauta presque de joie tout en continuant à filmer le spectacle qui se déroulait dans le ciel.

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Après être restée dans son coin, semblant se protéger de son prochain en se servant de l’obscurité, Myra avait fini par montrer son vrai visage à son interlocutrice en s’approchant franchement d’elle pour aller prendre ses aises à ses côtés. Ce fut avec plaisir qu’elle reçut de sa part de quoi se couvrir, endossant précipitamment la couverture qu’on avait secouée après qu’elle ait été en contact direct avec l’herbe fraîchement tondue de la cour. Notre rebelle s’étonnait toujours de l’assiduité des membres du personnel à s’atteler à l’entretien de l’établissement. De plus, depuis les derniers remaniements du règlement intérieur, ces initiatives s’intensifiaient et certains conflits entre plusieurs groupes d’élèves prenaient des proportions relativement importantes. Inutile de préciser que Myra n’en n’avait pas tenu compte en dépit du fait que beaucoup des mesures prises récemment menaçaient des personnes telles qu’elle qui refusaient de se mettre sérieusement au boulot, pour faire en sorte que leur avenir soit radieux et que la réputation de l’établissement n’en pâtisse pas. A ses yeux, plutôt mourir que de les écouter, eux et leurs conseils qui se voulaient bienveillants mais qui ne faisaient que servir leurs intérêts personnels. Elle préférait mille fois découvrir les passe-temps favoris des bonshommes verts en la charitable compagnie d’une artiste, dont elle apprit la réelle passion pour les extra-terrestres et tout ce qui les concernait, de près ou de loin. Dès lors qu’elle ouvrait la bouche pour en discuter, elle l’écoutait attentivement et hochait fermement de la tête pour lui assurer qu’elle prêtait une oreille attentive à ses centres d’intérêt. D’accord, ce n’était pas évident d’adhérer à celui-ci, parce qu’il fallait avouer que c’était assez spécial, et Sawako reconnut d’elle-même qu’elle était une des rares personnes à s’y consacrer. Cependant, après avoir eu envie d’éclater de rire sous son nez, Myra se souvint qu’elle aussi connaissait parfois ces phases d’incompréhension qui la rendaient particulièrement mal à l’aise avec les autres.

Alors, par empathie mais aussi par sympathie, elle ne put s’empêcher d’esquisser un sourire lorsque sa camarade déclara implicitement prendre très à cœur la résolution de cette question, qui était de savoir si une autre forme de vie pouvait exister. Par la suite, Sawako parut s’étonner de constater que la rebelle semblait vouloir rester avec elle. Ce fut au tour de cette dernière d’être surprise par cette interrogation à laquelle elle ne répondit que tardivement, paraissant réfléchir tandis que les étoiles commençaient finalement à pointer le bout de leur nez. Quand bien même si d’immenses masses cotonneuses persistaient à les voiler, on pouvait clairement les distinguer dans cette étendue bleue marine qui absorba littéralement le regard de Myra. Quand elle réalisa qu’il était peut-être temps de donner suite à la conversation, elle râcla de la gorge et parut embarrassée d’avouer son envie de rester auprès de Sawako. A l’entendre parler, elle avait pour habitude de faire ses expériences seule, du fait de l’amusement voire de l’indifférence que sa passion pouvait engendrer chez les autres. Loin d’être une sauvage fermée d’esprit, mademoiselle Jefferson savait tout de même s’intéresser à certaines choses.

- A moins que tu ne veuilles pas de moi. Mais en effet, je comptais rester avec toi !

Encore quelques secondes à cogiter sans daigner piper un mot, et elle aurait été interrompue par la soudaine excitation de sa nouvelle rencontre qui, ni d’une ni deux, poussa une exclamation de joie, annonçant l’arrivée d’un miracle. Interpellée par son attitude euphorique, elle mit un temps à la suivre tant elle pouvait s’apparenter à une pile électrique chargée au maximum. Elle semblait tellement épanouie et sur le qui-vive, que Myra ne fut pas sûre de pouvoir la contrôler si jamais il y avait un quelconque dérapage. Soucieuse de la déconcentrer durant son ouvrage, elle la vit s’approprier son appareil photo puis, sans perdre une minute, elle appuya sur le bouton permettant de capturer ce cliché prometteur. Regardant par-dessus son épaule, la rebelle finit par lever les yeux au ciel, apercevant en effet une forme qui ne pouvait être comparée à celle d’un avion. Elle clignotait et avançait à une allure vertigineuse, tant et si bien que Sawako prit une vidéo par précaution, craignant de ne pas détenir suffisamment de preuves pour appuyer ses suppositions. L’apparition avait été brève mais bel et bien réelle.

- Han my fucking gawd ! T'as vu comme ça allait vite ? Tu crois que c’était une soucoupe volante ou un engin du même genre ? Montre la vidéo pour voir !

L’impatience de Myra était palpable. Si un jour elle avait su qu’elle se trouverait en présence d’un phénomène aussi mystérieux et féérique que celui-là, qui sait si elle ne se serait pas elle aussi lancée à la poursuite d’un quelconque indice, montrant que l’Homme n’était pas seul dans la galaxie. Néanmoins, elles avaient peut-être tort de s’émoustiller dès la première étrangeté, car une réaction aussi prématurée pouvait tout aussi bien laisser place à une brusque déception sûrement difficile à encaisser pour notre enquêteuse sur les martiens. Mais avec Myra à ses côtés, elle pouvait être sûre d’être boostée, et puis Sawako ne semblait pas être du style à se décourager. Pas comme notre rebelle qui, en dépit de sa forte personnalité à l’originalité jusqu’alors incontestée, avait tendance à se vexer très facilement et à prendre au pied de la lettre la moindre critique. Et désormais, c’était celle de sa possible nouvelle amie que l’on guettait et qui jugerait si oui ou non ces premières preuves étaient valables. En attendant qu’elle finisse d’enregistrer la vidéo, Myra voulut s’assurer qu’elles ne passaient pas à côté d’une seconde éventuelle apparition. Pour se faire, elle scrutait le ciel de son regard intense, s’attendant à dénicher le scoop du siècle.

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Elles avaient parlé pendant un petit moment sans trop savoir à quoi chacune ressemblait. Peut-être que quelquefois, elles avaient fait place à leur imagination pour deviner le visage de l'autre. Pour en venir à l'instant où la rebelle sortit de l'ombre et dévoila son visage à l'artiste. Un sourire orna les lèvres de cette dernière, elle avait à faire à une fille qui était bien loin d'être laide. Pas qu'elle l'aurait rejetée si elle n'était pas comme elle l'aurait voulu, elle n'était pas ce genre de personne à faire une sélection et à choisir qui peut lui parler et qui ferait mieux de tracer sa route. L'entente entre les deux demoiselles se faisait bonne, aucun signe de haine à l'horizon. Myra avait donc décidée de rester avec Sawako qui n'allait pas refuser sa venue, loin de là.

Elle ne sera pas seule dehors et à deux on tue le temps plus facilement. Mais l'heure n'était pas à la discute, car voilà qu'une forme étrange aux lumières chaudes et aveuglantes apparut dans le ciel. Elle volait bas et pencher tantôt à droite, tantôt à gauche. Chose bien peu habituelle mais, pour notre Sawako c'était un ovni et rien d'autre. Ça ne pouvait pas être un avion et encore moins un hélicoptère. En un rien de temps, elle filma ce spectacle qui ne s'expliquait pas.

Huit secondes plus tard, l'engin s'immobilisa et partit d'un coup dans une direction inconnue. L'artiste se retourna vers Myra, n'en croyant toujours pas ses yeux puis celle-ci lui demanda de lui faire voir la vidéo. Priant pour que la vidéo soit réussite, car il n'y avait plus possibilité de la refaire. La vidéo se mit en route et elle était d'une qualité des plus satisfaisante et ne risquait pas de laisser croire à un foutu montage pour devenir célèbre.

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Incroyable ! C'est la première fois que j'en vois un d'aussi près. Ils sont restés assez longtemps, d'habitude on ne peut les apercevoir que quatre ou cinq secondes. Ça ferait un sacré scoop !

Pour un scoop s'en était un et un très bon même. C'était une chance incroyable que la soucoupe arrive pile poile au-dessus de l'académie et pas dans un endroit plus reculé. Ils étaient peut-être en mission de reconnaissance, observant le terrain et ce qui s'y trouve. Il y avait très peu de chance qu'ils se posent sur terre, le gaz que l'on respire serait plus un poison pour eux qu'une aide pour rester en vie. En somme c'était une bonne chose d'être sortie en pleine nuit lais il fallait rester sur ses gardes. La rebelle scrutait le ciel et elle avait bien raison de le faire, on ne sait pas si d'autre faits surnaturels peuvent se montrer.

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Demain je mettrais cette vidéo sur le net, je vais voir si l'on ne pourrait pas faire un article à mettre dans le journal de l'académie.

Montrer à toute la population de l'école qu'ils ne sont pas les seuls êtres vivants à habiter dans la galaxie risquerait de leur faire un petit choc. Surement, on ne la prendra plus pour une folle démesurée, se faisant des films et vivant dans un délire qu'elle seule comprenne. Et puis elle n'était plus seule, il y avait désormais Myra qui était là pour l'aider. On nous dit de ne jamais croire ce qu'écrivent les rédacteurs dans les magasines dont l'abonnement vaut une petite fortune, mais là ils avaient dit vrais en quelque sorte. L'heure à laquelle ils avaient prévu l'apparition des martiens n'était pas encore arrivée, ores eux s'étaient déjà montrés. Décidément, on ne peut pas leur faire totalement confiance.

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Ça m'a donné faim pas toi ? Si tu veux j'ai ramené de quoi nous remplir l'estomac, ainsi que de l'eau.

Avait-elle demandée tout en prenant de la main sa sacoche, dont elle sortie la nourriture qu'elle avait emballée dans de l'aluminium. C'était elle qui les avait faits, en espérant que sa voisine aime le poulet. Tout en commençant son repas, Sawako essayait de voir si une étoile filante ne montrait pas le bout de son nez. Elle avait eu à faire à une soucoupe volante pourquoi pas maintenant à l'étoile qui exaucerait les voeux. Ce détail, elle ne l'avait jamais compris. Devrait-on vraiment croire qu'elle pourrait réaliser notre voeu le plus cher ? C'est un peu facile à dire et en même temps ce serait bien si ça pourrait être vrai. C'est un peu comme les ovnis, on ne croit que ce que l'on voit. D'ailleurs notre artiste pensait que tout le monde ne la croirait pas, car puisqu'ils ne l'auront pas vu de leurs propres yeux ce serait difficile pour eux d'y croire. Mais si l'on restait fidèle à ça, on serait l'un des plus idiots de la planète.

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T'y croyais avant aux extraterrestres et aux ovnis ?

Cette question lui trottait dans la tête, avait-elle besoin d'une preuve pour y croire totalement qui sait. Ou c'était, poussé par la curiosité, qu'elle s'était prêtée au jeu. Bref, elle attendait avec une certaine impatience la réponse de la rebelle. En attendant elle n'avait pas fini son sandwich et l'enroula dans de l'aluminium pour qu'il soit encore mangeable après. Buvant une petite gorgée d'eau et s'allongeant dans l'herbe fraichement tondue, les mains derrières la tête et les yeux rivés vers les étoiles qui s'étaient multipliées avec le temps. Elle essaya de compter les étoiles pour s'apercevoir que leur nombre était infini, qu'elle avait beau les compter elle en oublierait toujours.

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L’étonnement avait rendu Myra complètement inerte devant l’immensité du ciel qu’elle essayait de scruter de fond en comble, dans l’espoir qu’une nouvelle apparition surnaturelle intervienne. Cependant, après que les nuages ce soient délicatement retirés de devant l’astre lunaire baignant enfin les adolescentes de sa lueur bienfaitrice, elle ne vit rien d’autre qu’un vide intersidéral. Ceci lui prouva qu’elles ne devraient rien attendre de plus en cette soirée, qui avait tout de même porté ses fruits. En fin de compte, elle ne regretta pas d’être descendue harsardeusement, quittant enfin sa piaule où elle avait maintes fois décuvé, pour se consacrer à une rencontre qui valait beaucoup plus la peine que toutes celles, éphémères, qu’elle pouvait faire dans diverses soirées. Elle ne le savait peut-être pas par manque de conscience, mais elle vivait actuellement une expérience plus humaine que celles connues jusqu’à présent. Il y avait un réel échange avec Sawako, un partage des goûts, des passions et des sentiments devant une chose qui les dépassait totalement, mais pour laquelle elles avaient un intérêt incommensurable. En particulier mademoiselle Jones, qui juste après avoir entendu la demande de la rebelle, s’empressa de s’assurer que sa vidéo avait été correctement enregistrée, suite à quoi elle se mit à la visionner. Toujours en regardant par-dessus son épaule sans vraiment oser marcher sur ses plate bandes, Myra réajustait la couverture qui la réchauffait pour mieux savourer cet instant de gloire. En effet, tandis que leurs yeux fixaient intensément le petit écran de la caméra, elles assistèrent à un événement qui allait sûrement marquer un tournant important dans l’existence d’étudiante de Sawako. Après des années à avoir encaissé les brimades de son prochain, elle allait peut-être parvenir à acquérir une certaine reconnaissance de sa part, de sorte que son statut de jouvencelle délurée, passionnée de choses dont la fiabilité avait toujours été remise en question, devienne plus avantageux et lui offre une meilleure réputation au sein de l’académie. Quant à Myra, elle savait que cette découverte ne changerait rien à sa situation, mais elle savait au plus profond d’elle-même qu’elle lui avait procuré un bien fou, autant parce qu’elle lui avait permis de cerner une jeune fille simple et sociable, mais aussi parce que ça avait été l’une des rares soirées où elle n’était pas allée se « bourrer la gueule » dans un bar. Elle avait oublié autrement qu’en s’infligeant des tortures physiologiques dont l’intérêt était minime, puisqu’elle ne récoltait rien d’autres que des insultes de la part des adultes, et l’indifférence de la part de ses semblables qui ne la voyaient que comme une amie d’un soir, et réciproquement.

Muette face à ce que sa camarade venait de lui montrer, elle finit par se détacher de l’emprise maléfique de cette vidéo époustouflante. Elle papillonna brusquement des yeux, se réhabituant à l’obscurité avoisinante, après s’être laissée aveugler par la pure Vérité. Elle écouta docilement son interlocutrice qui lui confia qu’elle comptait exposer son œuvre sur la toile, territoire où tous les yeux du monde pouvaient se poser et prendre connaissance des recherches de chacun. Elle approuva timidement son projet, se demandant si les internautes n’allaient pas croire à un trucage comme on en voyait souvent, en particulier quand il s’agissait de court-métrages montrant l’apparition d’un spectre. On redoutait très régulièrement qu’un travail d’orfèvre ait été produit pour pouvoir créer un canular où on y verrait que du feu.

Myra n’eut pas le temps de s’éterniser dans ses pensées. Sawako eut vite fait de l’en extirper, en lui rappelant qu’il était peut-être l’heure de se remettre de leurs émotions en se remplissant le ventre. Maintenant qu’elle y repensait, à trop vouloir fuir les yeux de lynx des surveillants, la rebelle en venait à ne plus venir au réfectoire, prenant le risque d’attirer davantage les soupçons sur elle à force de trop s’absenter. Elle savait qu’elle aggravait son cas, et elle bénit profondément sa coéquipière d’avoir tout préparé à l’avance, comme si elle s’était douté qu’une tierce personne allait la rejoindre tôt ou tard. Ce fut donc sans hésitation qu’elle s’accapara l’un des sandwichs soigneusement emballés dans de l’aluminium, le déballant avec une précipitation qui trahissait sa faim. Mordant dans son encas avec une impressionnante voracité, elle ne prenait pratiquement pas le temps de mâcher. A croire qu’elle ne s’était pas alimentée depuis belles lurettes, ce qui n’était pas faux. En étant perpétuellement en vadrouille, elle ne s’octroyait jamais une pause pour s’allonger quelque part, comme le fit Sawako à cet instant. La rebelle la rejoignit donc dans l’herbe, continuant de savourer son dîner, lui faisant honneur comme si il s’agissait du dernier.

- Ca doit être super agréable de dormir à la belle étoile, tant qu’il n’y a pas d’ignobles insectes pour nous piquer durant notre sommeil.

Elle avait fait cette remarque personnelle sans attendre une quelconque réponse. Elle avait uniquement éprouvé le besoin de briser le silence autrement qu’en croquant férocement dans son sandwich. Lorsqu’elle eut fini d’en gober le dernier morceau, elle se lécha consciencieusement le bout des doigts pour recueillir les quelques miettes qui s’y étaient égarées. Puis Sawako lui demanda si avant cette expérience, elle croyait aux ovnis et à tous ces faits non expliqués, dont certains s’efforçaient de prouver la véracité. Eblouie par la beauté détonante des étoiles, l’anticonformiste marqua un temps avant de répondre :

- Pour tout te dire, je ne m’étais jamais posé la question avant. Pas par manque d’intérêt, mais parce que je n’ai jamais vraiment eu le temps. Je n’ai pas non plus eu une vie très palpitante, mais je n’ai jamais été une personne tranquille, je me sens tout le temps obligée d’aller voir à droite et à gauche pour tester, expérimenter, rencontrer des gens. A un point tel que je ne prête plus aucune attention à des questions existentielles comme « Est-ce que tu crois en Dieu ? » ou encore « Est-ce que tu penses qu’il y a une vie après la mort ? ».

Elle parut réfléchir encore un instant. Elle se grattait frénétiquement sa tignasse d’ébène qu’elle avait coiffée d’une façon très particulière, s’étant aidé d’un simple crayon de papier pour lui épargner toutes ses mèches qui voilaient son champ de vision. Finalement, agacée de sentir l’accessoire menacer de tomber, elle l’ôta brusquement de sa chevelure, laquelle retomba subitement sur ses épaules. Triturant la mine de l’objet en question, elle en revint à l’interrogation que Sawako lui avait soumise.

- En fait, je pense que si je ne t’avais pas rencontrée, si je n’avais pas eu la curiosité de descendre de ma chambre ce soir, je ne me serais jamais posée cette question. Et maintenant, je dirais que oui, que je crois en l’existence d’une espèce autre que la nôtre dans l’univers. Après tout, pourquoi pas hein ? On en a bien la preuve non ?

Elle haussa naïvement des épaules, fouillant dans la poche droite de son pantalon. Elle y recueillit son briquet ainsi qu’un paquet de cigarettes. Avant qu’elle se décide à en allumer une, elle se prit à demander à son tour :

- Dis-moi plutôt comment cette attirance pour les extra-terrestres t’es venue. Est-ce que ça date de ton enfance ? Ou alors est-ce que c’est quelqu’un qui t’a transmis cette passion ? Dis-moi tout !

Invité

Toujours allongées sur l'herbe de la coure, les deux étudiantes regardaient le ciel et les quelques nuages qui se dissipaient, leur permettant d'apercevoir l'éclatante lune, déesse de la nuit. On ne pouvait entendre que leur voix et rien d'autre, pas de bruits de criquet, pas de bruits de voitures, rien. C'était très agréable surtout que l'air c'était adoucie et l'on ressentait qu'on entrait dans la période printanière. Les températures devaient avoisinées les seize degrés, ce qui n'est pas frais surtout en pleine nuit. La rebelle fit une remarque qui n'était que vrai. C'est vrai que dormir dehors en cette chaleur ça ne pouvait qu'être agréable si les insectes décideraient de ne pas s'inviter.

D'ailleurs l'artiste sourit à cette parole. En y repensant elle n'avait jamais dormi à la belle étoile et voudrait bien essayer un jour. Peut-être que ce sera cet été, dans son jardin ou en pleine forêt et accompagnée ou toute seule. Oubliant presque qu'elle avait posée une question auparavant destinée à Myra, elle s'en rappela quand cette dernière décida d'y répondre finalement. Et la réponse qu'elle reçut la satisfaisait, enfin plutôt qu'elle avait devinée que sans elle miss Jefferson n'aurait jamais pris conscience de l'existence même des extraterrestres et des ovnis.

Au fond d'elle, elle était contente de lui avoir fait partager sa passion. Elle savait que certains n'auraient pas pris la peine de chercher plus loin. Et le fait qu'elle montre une certaine joie à la vue de la scène qui venait de se passer quelques minutes auparavant, rendu Sawako quelque peu fière d'elle. Elle le pouvait, elle lui avait quand même fait découvrir quelque chose. Dans sa réponse elle découvrit quelque point de la vie de Myra et se trouvait très intéressée parce qu'elle disait. Il fallait voir ses yeux, ronds comme des soucoupes et avec une attention des plus grandes. Puis elle s'arrêta un moment et reprit.

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Oui, on en a la preuve.

Elle accompagna ses dires par un grand sourire qu'on ne pouvait surement pas distinguer puisqu'il faisait noir et que la lune n'éclairait pas tout. Elle entendit un bruit de frottement, la rebelle semblait chercher quelque chose dans ce qui pourrait être la poche de son jean. Ayant une oreille attentive, Sawako reconnut là un paquet de cigarettes. Ça lui allait bien de fumer, ce genre de filles avec un fort caractère fument toujours, ça leur donne un certain style plutôt envieux. C'était à son tour d'avoir droit à une interrogation, elle se redressa ramenant ses jambes contre elle et écouta ce que sa camarade lui demanda. Elle toussa et replaça par la même occasion une mèche de ses cheveux qui la gênaient derrière l'oreille.

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Et bien, depuis mon enfance je m'intéresse à pleins de choses, j'étais tombé sur une émission qui parlait effectivement des ovnis. Ça m'avait beaucoup intrigué et j'ai voulu aussi en voir.

Elle rigola mettant sa main devant sa bouche et enfouie sa tête dans ses bras. Elle faisait souvent ça pour se reposer un peu. Elle ne voulait pas dormir, ce serait idiot et impoli de laisser Myra parler dans le vide. Elle se reposait seulement les yeux mais, il n'y avait pas à s'inquiéter, elle écoutait toujours. Elle releva la tête brusquement et enleva ses bras autour de ses jambes.

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J'suis sûre que Georges Bush est un extraterrestre ! T'as pas remarqué ses yeux ? D'ailleurs une émission a traité ce sujet et a même dit que le roi d'Angleterre ou je n'sais-plus-qui venait aussi d'une autre planète.

Il n'y avait pas de doute sur ça, ses deux hommes très célèbres avaient rejoint l'espèce humaine pour nous espionner et était en mission. Ils avaient certes réussit à duper à peu près toute la majorité du monde mais, pas Sawako et elle voudrait bien le prouver. Peut-être qu'il avait un masque ou qu'il s'était fait une chirurgie esthétique pour ressembler aux humains ! On devrait mieux se méfier.

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Ah et je t'ai pas dit ! J'adore les fantômes. J'en ai déjà vu une fois, je devais avoir huit ans et j'étais sortie avec l'école dans un château. J'ai jamais eu autant peur de toute ma vie. Je sais je suis bizarre.

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Cela faisait fort longtemps que Myra ne s'était pas sentie aussi bien, en harmonie avec ce qui l'entourait, et surtout en bonne entente avec la personne qui l'accompagnait. Quand il ne s'agissait pas d'une aventure d'un soir avec qui elle ne faisait que partager des baisers aussi platoniques que les caresses dont on la gâtait, c'était des jouvencelles enragées qui venaient frapper à sa porte pour lui annoncer qu'elle s'était faite plaisir avec leur petit copain. Oups. Entendons-nous bien sur le fait que ses intentions n'étaient pas mauvaises, et qu'elle considérait que c'était dans la responsabilité de ses prétendants éphémères d'assumer les conséquences de leurs actes. De ce fait, quand elle se trouvait dans des situations aussi cocasses, elle prenait soin d'expédier la conversation en sommant la Reine d'aller voir son Roi pour de plus amples explications. Dans un sens, ce qu'elle faisait n'était pas très valorisant pour sa personne, puisqu'elle se donnait sans modération, à croire qu'elle n'était qu'une bête sauvage. Elle savait pertinemment que sa réputation était faite de ce côté là, et elle persistait à se complaire dans ce malheur qu'elle prenait avec le sourire, car elle ne voyait rien de mal à jouir dans les bras d'un homme, plutôt qu'à s'extasier devant de la poudre blanche. Bon, certes, ça aussi elle avait déjà testé, mais elle n'en n'était pas spécialement adepte. Ce n'était qu'une expérience parmi tant d'autres.

En attendant, elle se contentait largement de sa cigarette, drogue douce et routinière qui savait assassiner sa solitude ou agrémenter les quelques discussions censées qu'elle n'entretenait qu'avec une minorité de relations. Sawako faisait déjà partie de celles-là, que la Rebelle appréciait pour leur authenticité, qui résultait essentiellement de leurs occupations atypiques. Oui, elle pouvait se féliciter de lui avoir appris quelque chose, et elle aurait encore sûrement l'occasion de sautiller sur place, en l'informant que des personnalités influentes seraient, paraît-il, issues d'une autre planète par exemple. En l'entendant dire une telle chose, Myra eut envie de s'esclaffer comme lors des premiers instants passés avec elle. Mais après s'être laissée prendre au dépourvu par l'apparition d'un objet non identifié dans la voûte céleste, elle révisa illico presto son jugement, histoire de ne pas paraître inculte. A la place, elle hocha simplement de la tête pour signifier qu'elle l'écoutait, et qu'elle serait prête à approuver n'importe quel aveu de sa part. Elle semblait se renseigner avec tant de méticulosité sur la question, qu'elle n'osait remettre en doute tout ce qu'elle avançait. Elle mettait tant de conviction dans ses hypothèses, qu'on était tenté de se laisser aller, et de partir à l'aventure pour comprendre le pourquoi du comment de ces phénomènes inexpliqués. Sawako avait le don de contaminer la Rebelle par son enthousiasme, et elle n'imaginait pas à quel point elle lui était déjà reconnaissante pour cela. De plus, elle était du genre à se livrer facilement, à narrer ces tranches de vie qui expliquaient concrètement comment elle en était arrivée à poursuivre les extraterrestres. Suspendue à ses lèvres en même temps qu'elle tirait plusieurs nuages de fumée de sa cigarette, Myra n'osait pas l'interrompre et sombrait dans un silence cérémonieux jusqu'au moment où la voix de notre Détective s'évanouit définitivement.

- En fait, quand on réfléchit bien,

conclut-elle suite aux dires de son interlocutrice

, ton existence est un mix entre X-Files et Ghost Whisperer. Tu es vraiment fascinante Sawako, et je ne dis pas ça que pour te faire plaisir, je le pense réellement.

Nous remarquons donc les références très spirituelles de Myra, qui en plus d'adorer faire la couture, ne manquait pas d'élaborer ses créations en face d'une bonne série télévisée. Quand elle ne sortait pas pour festoyer, elle s'affalait dans le salon de l'académie où un écran plasma avait été mis à disposition des élèves. Elle se réunissait avec ses camarades, et suivait les péripéties rencontrées par ses héros préférés, totalement captivée.

- Tu veux bien me raconter ton entrevue avec les fantômes ?

La supplia-t-elle comme une enfant.

Pendant ce temps, Sawako montrait quelques signes de lassitude. Elle semblait éprouver le besoin de reposer ses yeux, cependant, elle parvenait à garder le fil de la conversation. Aussitôt, Myra s'inquiéta de savoir si elle ne commençait pas à être de trop, ou alors si il n'était pas temps pour elles de dormir à la belle étoile plutôt que de s'épuiser en anecdotes. Elles auraient encore toute une partie de l'année pour se raconter des secrets, et puis, elles n'en n'étaient pas à quelques heures près. Maintenant qu'elles s'appréciaient mutuellement, la Rebelle craignait moins de la voir s'éloigner. Et comme à chaque fois qu'elle développait des affinités avec quelqu'un, elle ferait tout pour ne pas s'insinuer dans son entourage, au risque de laisser ses pulsions la mener par le bout du nez. Si forte de caractère en apparence, mais pourtant si faible quand on la voyait saliver en apprenant qu'une fête se déroulait à tel endroit. Elle était incorrigible, mais elle n'avait pas oublié les bonnes manières.

- Ou sinon, on peut très bien dormir. Tu m'as l'air épuisée, et toute chasseuse d'extraterrestres digne de ce nom doit reprendre des forces pour explorer toute la galaxie. Qu'est-ce que tu en penses ? Comme tu veux.

Myra acheva de déguster sa cigarette en l'écrasant contre le sol, suite à quoi elle laissa les dernières volutes de fumée mourir dans l'atmosphère. Elle observa une ultime fois les étoiles scintillantes qui les narguaient de leurs perchoirs, et qui devaient probablement s'amuser de leur incapacité à les atteindre. Dans tous les cas, Mrs Jefferson, si elle ne pouvait attraper un quelconque astre stellaire, comptait en revanche sur le courage de Sawako pour élucider les énigmes qui se cachait derrière ces innombrables points lumineux. Qui sait si derrière chacun d'eux, il ne vivait pas des bonshommes verts ?

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Combien de temps étaient-elles dehors à regarder le ciel en espérant qu’une nouvelle apparition vienne les surprendre ? Sawako ne le savait pas et se le demandait bien. Elle se décala un peu pour pouvoir mettre la main sur son sac et y sortir son portable qui était quelque peu froid. Elle l’ouvrit, il était à clapet, et jeta un petit coup d’œil. La lumière était trop forte et elle eut les yeux qui lui faisaient mal. Elle ne put voir l’heure…zut. Peut-être qu’on était déjà le lendemain, elle ne savait pas. Elle n’alla pas chercher plus loin ce serait plus une perte de temps qu’autre chose, voilà tout. Elle rangea son téléphone et n’entendit que le souffle de Myra, la fumée qui sortit de sa bouche et qui s’évaporait dans l’air. L’étudiante se frotta les yeux et mit sa main devant sa bouche, elle qui pensait tenir plus longtemps que ça c’était raté. Mais la volonté de discuter avec la rebelle la tenait éveillée et tant mieux.

Le sujet de conversation des filles était, pour ne pas changer, « les choses bizarres » enfin on peut appeler ça comme ça, plus précisément elles parlaient de fantômes. Comme quoi Sawako avait trouvée quelqu’un qui s’intéressait à ses histoires qui d’habitude endorment tout le temps. Faut l’avouer, elle n’était pas super dans le genre à raconter des histoires. D’ailleurs Myra fit une remarque très amusante qui fit rigoler l’artiste. Elle ne connaissait pas beaucoup ses séries mais, en avait tout de même entendu parler et en y réfléchissant elle était assez d’accord avec elle. Mais ça n’en restait pas moins un compliment quand Sawako entendu qu’elle était « fascinante ». Elle était bien la dernière personne à croire qu’on puisse lui dire ça. Parce qu’elle n’était pas du genre à être prétentieuse, à dire que du bien d’elle et à zapper ses défauts comme si elle était parfaite. Un simple sourire, qu’on ne put voir, fut affichait sur son visage.

Après avoir parlé de ce qui lui est arrivé et des raisons qui l’ont poussés à porter un certain intérêt à ces êtres différents de nous, elle pensait que ce serait surement finit. Pas que ça la dérangeait, non au contraire, mais à trop parler de sois elle oublierait presque qu’elle n’était pas toute seule. Elle voulait aussi savoir quelques trucs sur l’étudiante mais elle n’osait pas lui demander d’en dire plus sur sa vie. Même si elles avaient passées pas mal de temps ensemble et qu’elles allaient rester dehors jusqu’à l’aube.

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J’opte pour la deuxième option si cela ne te dérange pas, on aura surement d’autres occasions pour parler de mes rencontres avec les fantômes.

Dommage que la fatigue soit venue s’emparer de l’étudiante mais, elle ne pouvait presque plus laisser ses yeux ouverts sans qu’eux se referment. En espérant que cela ne pose pas de problèmes. Elle ne savait pas si Myra avait l’habitude de se coucher plus tôt ou plus tard, du moins elle semblait être le genre à aller en boite et à rentrer à des heures pas possibles. Sans plus attendre Sawako se leva et sortit une couverture, même si l’air était doux on ne pouvait pas prévoir ce qui pourrait arriver, autant être préparer.

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Tu peux fumer une autre cigarette, si tu veux ça ne me déranger pas.

Elle déposa la grande couverture sur elle, après s’être couché sur l’herbe. Celle-ci recouvrait aussi la rebelle. Une première de dormir dehors, avec les insectes, les bruits de la ville, habillée, sans son oreiller, sans sa grosse couverture. Avec comme petit-déjeuner qui l’attendait un jus d’orange et une pomme, pas de tartine ni de lait chaud avec du cacao. Mais, c’était juste pour une nuit et elle avait le beau ciel étoilé, une nouvelle amie et c’est tout aussi bien. Quelques instants plus tard, l’artiste n’était toujours pas endormie. Elle qui était si fatiguée, elle essayait de fermer les yeux très forts et de ne penser à rien du tout. Rien. Au matin elle sera fatiguée avec de grosses poches sous les yeux et elle s’endormir cette fois.

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Myra...tu dors ?

La question à laquelle la plupart des personnes ne peuvent pas répondre. Puisqu’ils sont en train de dormir. Il faut tenter sa chance et la jeune fille ne savait pas si elle avait réussit à s’endormir. C’était une situation bien bête, elle avait décidée qu’il était temps de dormir mais, là voilà en train de parler encore et toujours. Ca arrive des fois qu’elle soit naïve... mais c’est passager et ça heureusement. Elle lui tournait le dos, ses mains près de son visage, entendant son propre souffle.

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J’ai raconté un peu ma vie maintenant c’est à toi de raconter la tienne, si tu le veux bien.

Invité

Quand on appréciait la compagnie de quelqu'un, on finissait par ne plus voir le temps passer, et c'était dommage car finalement c'était toujours les meilleurs moments qui s'achevaient le plus rapidement, comme si quelqu'un, tout là haut dans le ciel, souhaitait nous frustrer en nous prouvant par a+b que le bonheur demeurait éphémère, donc partiellement accessible. Myra ne savait pas si on pouvait réellement voir la situation comme ça, mais à cet instant précis, elle ne pensait à rien d'autre qu'à la personne avec qui elle était en train de parler de choses peu ordinaires mais captivantes. Si elle avait su qu'elle s'y intéresserait un jour, elle aurait tourné sa langue sept fois dans sa bouche avant de prétendre le contraire. Elle n'était pas cartésienne à l'origine, loin de là, elle n'était pas aussi conservatrice que son idiote de mère dont les opinions arbitraires n'avaient jamais cessé de l'exaspérer. Non, notre rebelle avait plutôt tendance à être ouverte d'esprit, à s'adonner à une multitude d'expériences, peu lui en importait l'origine, pourvu que ça lui permettait de s'enrichir et de se coucher moins bête le soir, si soir il y avait puisqu'elle vivait autant la nuit que le jour. Chez elle, les heures n'existaient pas, sauf quand on la forçait à poser ses fesses sur une chaise et à écouter un enseignant soliloquer sur une matière quelconque. Là, elles devenaient palpables, et elle les apparentait à une lente et interminable torture semblable à l'agonie qu'une personne mourante devait endurer au seuil de la mort. C'était intenable, mais en dépit de sa fainéantise, elle était encore là, dans ce prestigieux établissement, à taper la discussion avec une jouvencelle un peu décalée de la normalité, ce qui faisait tout son charme.

Après qu'elle lui ait demandé de lui narrer son aventure avec les fantômes, Sawako opta plutôt pour une bonne nuit de sommeil réparatrice. Il devait se faire tard, et Myra ne voulait pas l'empêcher de se reposer après toute l'émotion qu'elles avaient encaissé. Cette apparition furtive dans le berceau des anges l'avait laissée songeuse, et elle n'arrêtait pas de se repasser la scène en boucle, espérant secrètement que ça n'avait pas été le fruit de son imagination. Parce que, si ça avait été le cas, ça aurait été une grosse déception, et aussi une prise de conscience sur l'emprise que nos désirs les plus profonds peuvent détenir sur notre imagination. D'un côté, ce n'était pas spécialement rassurant de savoir qu'une espèce autre que la nôtre puisse nous côtoyer dans l'univers, mais de l'autre, ce serait absolument révolutionnaire d'apprendre l'existence d'une peuplade spatiale, car ça défierait toutes les hypothèses jusqu'alors irréfutables que la science avait pu émettre à ce sujet ! Sa camarade à l'oeil aiguisé et à la curiosité inébranlable deviendrait célèbre pour ses découvertes, et elle en boucherait un coin à toutes les mauvaises langues qui soutenaient que rien à part l'être humain, ne pouvait survivre dans notre galaxie.

Tandis que Sawako venait de rabattre ce qui lui servait de couverture sur elles, Myra sortit machinalement une autre cigarette de son paquet et l'alluma de la même façon sous le clair de lune. Puis, elle s'allongea sur le côté, et s'appuyant sur son coude, poursuivit ses réflexions intérieures. Leur cheminement n'était pas extrêmement rigoureux mais, chose très rare venant de sa part, elle prenait le temps de penser. Elle s'en donnait pour imaginer, rêver, et se projeter dans un avenir plus ou moins proche. Elle ne faisait l'impasse sur aucune éventualité, et se surprit à apprécier cette capacité dont elle était dotée en tant qu'Homme, mais qu'elle n'utilisait pas aussi souvent que ce qu'elle devrait. Il faut dire que lorsqu'elle se divertissait, elle possédait des oeillères, et par conséquent, elle ne voyait plus rien à part ce monde ultra-coloré et acidulé, qui lui donnait accès à des substances étranges et détentrices d'un pouvoir qui la fascinait. Cependant, tandis qu'elle ressassait sa médiocrité en créant des nuages de fumée dans l'atmosphère, elle fut interpellée cinq minutes plus tard par la voix de son amie. Celle-ci se risqua à lui demander si elle dormait, question qui aurait pu paraître stupide dans la mesure où en effet, personne n'aurait pu lui répondre si la Rebelle s'était assoupie. Par chance, Myra n'étant pas habituée à se coucher aussi tôt, elle n'arrivait pas à fermer ses yeux encore aussi ronds que des soucoupes. Elle se retourna donc pour faire face à son interlocutrice, et accueillit sa prochaine interrogation non sans avoir un brusque mouvement de recul. Elle lui confia vouloir en savoir plus sur elle, ce qui signifiait qu'elle allait devoir passer par la case "vécu", et toutes celles qui lui étaient associées dont cette famille qu'elle avait fui comme la peste, son pays natal qui lui manquait malgré tout, et ces amis avec qui elle ne traînait jamais longtemps car ils changeaient toutes les quarante huit heures. Quant à ses passions, hormis la couture, elle n'en n'avait pas ou alors elles se limitaient à des activités sordides et peu exemplaires, car elles auraient pu mettre plus que sa dignité en danger.

- Hé bien, pour commencer, j'adore fumer ma clope au clair de lune. Tu as déjà essayé ?

Je le conçois, c'était une manière assez idiote d'esquiver le sujet, mais honnêtement, elle ne voyait pas quoi dire sur elle, hormis qu'elle était une adolescente à l'esprit libertaire, qui profitait de la moindre occasion pour s'amuser. En dehors de ses soirées, elle n'avait pas de vie à proprement parler ou alors, elle lui trouvait un goût fade, et elle voyait sa routine comme une chose sans saveur qu'elle subissait, au lieu de l'exploiter pour avoir un avenir florissant. Et réalisant que ce qu'elle venait de dire était assez déplacé, elle baissa honteusement les yeux, écrasa nerveusement ladite clope pour qu'elle arrête de cracher son sillon de fumée, et se cala sur le dos, croisant ses mains sur son ventre.

- Ma vie n'est pas aussi fascinante que la tienne dans la mesure où je n'ai aucun but à accomplir. Bon, c'est vrai que j'ai jamais cherché à en avoir un, mais j'ai toujours eu tendance à vivre dans l'excès, et on va dire que ça n'a pas trop plu à ma mère avec qui j'entretiens des relations très...comment dire...conflictuelles. J'ai profité du divorce de mes parents pour quitter les Etats-Unis et suivre mon père qui souhaitait refaire sa vie ici. Et j'ai bien fait. D'ailleurs, ça doit bien être l'une des seules choses que je ne regrette pas dans ma minuscule existence. Haha...

Ce rire qu'elle venait de simuler était tout sauf une marque d'entière satisfaction à l'égard de ce qu'elle avait pu dire, ou de ce qu'elle avait pu faire. Quand elle s'aventurait dans les anecdotes de son passé, elle ne parvenait pas à s'en réjouir, à le prendre avec légèreté en se disant qu'elle était encore plus jeune que ce qu'elle l'était actuellement, et que c'était avant tout pour cette raison qu'elle et sa mère n'avaient pas réussi à se comprendre. Mais à quoi bon s'embarrasser de réminiscences inutiles. Elle était très bien là où elle était actuellement, faisant abstraction des règles, jouant avec cette débauche devenue le ciment de notre société.

- Sinon, à moins qu'une question te brûle les lèvres, je ne vois pas ce qu'il y a à dire sur moi. Et c'est pour ça que je préfère écouter mon prochain. Ainsi, j'ai l'impression de vraiment vivre quelque chose à travers ses expériences personnelles.

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Qu’était donc la vie des jeunes d’aujourd’hui ? C’était ce que Sawako se demandait encore et toujours depuis quelques temps maintenant. Elle allait parfois en ville l’après-midi, seule ou accompagnée de sa mère et elle voyait des groupes d’étudiants qui rigolaient entre eux. Comme si le monde s’arrêtait autour et qu’il n’y avait plus aucuns soucis. Elle avait le même âge que la plupart de ces personnes, seize ans et pourtant elle avait la vie d’une fille de quatorze. Elle ne sortait que très rarement avec ses amies et se renfermait dans son monde, ce monde qu’elle s’était construite et qui lui appartenait, qui lui permettait d’imaginer, de faire tout ce qu’elle voulait. Elle était trop peu présente dans la réalité pour savoir qu’elle pouvait introduire, laisser des personnes dans son monde ce qui la rendrait encore plus heureuse.

Peut-être n’avait-elle pas l’habitude de faire des sorties entre amis, peut-être n’en prouvait-elle pas le besoin de faire comme tout le monde ? Elle voulait sortir de l’ordinaire, c’était déjà assez fait avec sa passion pour les extra-terrestres. Sawako était quelque peu perdue toute fois. Elle pouvait faire preuve d’une telle timidité en présence de personne qu’elle ne connaissait pas, que se faire de nouveaux amis qui eux sortent, lui était presque impossible à réaliser. Elle pensait qu’elle serait trop « bizarre » pour eux, trop « la tête dans les nuages ». C’était le stéréotype même de la gentille fi-fille qui ne fait jamais rien de mal et qui reste là comme ça, dans son coin à jouer tranquillement. Drogue, alcool, elle n’abordait jamais ce sujet puisqu’elle n’y touchait pas. Vous imaginez donc qu’elle fut assez surprise quand la rebelle lui demanda, peut-être d’un coup de tête, si l’envie de fumer lui avait déjà pris.

Qui plus est, au clair de lune. C’est une belle image certes mais, elle fit non de la tête comme si Myra pouvait deviner sa réponse. Elle pouvait s’en douter, qui sait. C’était le commencement de sa réponse, qui nourrira la curiosité de l’artiste. N’en perdant pas une miette, elle restait comme figeait quand celle-ci continua son récit sur, je cite « sa minuscule existence ». Vivre dans l’excès, parents divorcés tout ça représentaient les jeunes de maintenant. A l’entendre, on conclurait qu’être loin de sa mère était comme une bénédiction, une libération. La rebelle avait résumé en quelques phrases sa vie et l’artiste trouvait que cette dernière était bien mieux que la sienne.

Même si tout le monde sait qu’un divorce n’est pas la chose la plus belle au monde. Sawako pensait à un truc ridicule, elle se disait que cette fille devait avoir beaucoup de succès auprès des garçons. Un caractère à ne pas se laisser marcher sur les pieds, une cigarette à la main qui devait lui donner un air classe, une forte présence. Ca plaisait aux garçons, parait-il. Elle voulait bien lui poser cette question qui lui trottait dans sa tête parmi tant d’autres. Mais il fallait faire gaffe, certaines d’entre elles ne devaient surement pas être posées. Ses questions l’ennuyaient-elles peut-être ? Elle déduisait peut-être qu’il était temps de dormir ? Sawako ne voulait pas, elle en était restée sur sa fin. Elle préféra commencer par quelques de plus mieux.

-

Tu veux qu’j’te dise ? Tu es vraiment une fille intéressante, crois-moi. J’ai une question, oui encore une. Ca se passe comment avec les garçons ? Tu as surement pas mal de succès. Je paris que tu en attires tellement et que tu ne sais même pas lequel choisir !

C’est ce qu’elle pensait et elle avait hâte d’avoir sa réponse. Pas qu’elle avait besoin de conseils ou je n’sais quoi. Sawako admirait de loin les rebelles, ces personnes qui s’en contre-fichent des règles et des lois. Qui disent le fond de leurs pensées sans se préoccuper de ce que les autres en pensent, des répercutions que cela peut avoir après. Accumulant à coup sûre les heures de colles et les convocations chez le principal. Mais, étrangement ils n’étaient pas violents. C’est certain, elle aurait bien voulu être une des leurs. Bo, ce n’était pas le moment de penser à ça quand même. Elle était née comme ça et il ne fallait pas s’en plaindre tout de même. Y’a un bon font à être artiste, grâce à nos œuvres ont accroit notre popularité, certes minime mais présente tout de même, auprès des étudiants de l’académie. Allongé sur l’herbe, ses yeux noirs de même couleur que ses cheveux, scrutant le ciel étoilé ainsi que ses doigts entremêlés et posés sur son ventre. L’été au Japon était mieux que celui en Angleterre.

-

Tu n’as aucun but ? Pourtant, il faut penser à ton avenir ! Tu ne veux rien faire plus tard ?

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Peu habituée à s'étendre sur ce qu'elle avait pu vivre, Myra redoutait la réaction de son interlocutrice. Elle ne connaissait pas grand chose de l'artiste, et outre le fait qu'elle lui semblait tout à fait correcte et respectueuse, qui sait si elle ne méprisait pas ceux qui s'adonnaient à des plaisirs éphémères, au lieu de se consacrer à des choses sérieuses ? La Rebelle ne put s'empêcher de penser aux réprimandes de Svan, sa voisine de chambre, qui en tant qu'érudite confirmée, ne se gênait pas pour lui faire comprendre gentiment qu'il était temps de se réveiller. Cependant, elle n'avait pas envie d'ouvrir les yeux sur la réalité de son existence, elle était parfaitement à l'aise dans ce rêve, cette douce illusion qui faisait danser les ombres, sourire béatement son prochain, et s'illuminer son regard. Elle ne concevait pas son quotidien sans le divertissement, aussi vain était-il, car il n'entraînait que des dépenses improductives suite auxquelles elle se trouvait aussi démunie qu'au commencement de tout ça. Elle voulait toujours courir contre la montre, elle ne savait pas ce que c'était que de se recueillir en elle-même, par conséquent, elle n'avait pas la prétention de dire qu'elle se connaissait aussi bien que ça. Il y avait peut-être des années, depuis qu'elle s'était défaite de l'emprise de sa mère, qu'elle n'avait pas osé s'immobiliser face à un miroir en comptant jusqu'à dix, pour voir si elle était capable de supporter son propre reflet. Du peu qu'elle se maquillait, elle le faisait à l'instinct, et elle ne voyait sa valeur dépendre que de l'opinion des autres. Les introspections, elle ne savait pas ce que ça signifiait et elle n'avait aucune idée du soulagement que ça pourrait lui conférer. Parce qu'elle se fuyait, aussi lâche était-elle.

Alors évidemment, voir Sawako s'extasier sur son récit la laissa pantoise. Elle ne voyait pas en quoi elle pouvait être une fille intéressante, puisqu'elle passait son temps à papillonner d'homme à homme, et de femme en femme, l'un n'excluant pas l'autre que je sache. Elle n'avait absolument aucun respect pour son corps, n'avait rien retenu des jolis principes si bien élaborés par sa famille traditionaliste, et ne détenait aucun contrôle sur son être. Si l'artiste commençait à aduler une faiblarde de son espèce, elle risquait de tourner mal, et Myra lui souhaitait tout sauf de suivre le même chemin qu'elle.

- Il n'y a rien d'intéressant à toujours s'amuser. Si j'agis ainsi c'est par lâcheté.

A l'entendre parler, on aurait dit qu'elle s'automutilait, mais il ne fallait pas se voiler la face. Même si elle passait délibérément au-dessus des lois, qu'elle était anti-conventionnelle ce qui assurait son authenticité en quelque sorte, elle ne valait pas mieux que tous ces adolescents qu'elle fréquentait. Elle était exactement dans le même panier qu'eux, à s'abrutir sans modération en sachant pertinemment que ça ne changerait rien à leur situation. Mais en effet, comme vint le sous-entendre Sawako, ça ne l'empêchait pas d'avoir le choix parmi les nombreux jouvenceaux qu'elle rencontrait. Toutefois, aborder ce sujet avec elle était un risque à prendre, car la majeure partie de ses relations était dépourvue d'un quelconque sentiment amoureux. Il n'y avait qu'une attirance purement physique, qui ne durait jamais longtemps sitôt qu'elle avait consommé le plaisir tant convoité avec sa proie d'une nuit. Pour elle, l'amour était absolument indéfinissable, elle pensait qu'il n'existait pas, qu'il y avait tout à construire pour lui octroyer de la matière. Et ce devait être affreusement ennuyeux. Voilà pourquoi elle préférait aux relations durables celles que nous pourrions qualifiées de sulfurisées, prêtes à déguster comme les plats que vous foutez au micro-onde. Il n'y avait pas de place aux sensibleries, seulement à un processus de séduction assez primitif voire barbare, précédant une jouissance agissant comme une libération sur l'esprit de Myra.

- Que ce soit avec les garçons ou avec les filles, on va dire que je me débrouille plutôt bien oui. Mais je ne m'attache à aucun d'eux, je n'en vois pas l'intérêt. D'un commun accord, on prend du bon temps ensemble puis on se quitte aussi rapidement que l'on s'est rencontrés.

Et pour ce qui était de ses projets pour le futur, elle aurait aimé pouvoir offrir une réponse positive à Sawako, mais la seule chose qu'elle trouva à faire pour donner suite à son ultime question, fut de hausser des épaules avec insouciance. Elle n'avait pas spécialement envie d'y réfléchir, mais si il y avait bien un domaine dans lequel elle aurait aimé percer, c'était bien la couture qui était son unique forme d'expression. Dans chacune de ses créations, aussi inachevées étaient-elles à cause de son manque d'assiduité au club, elle y apposait une parcelle d'elle qu'elle n'osait jamais s'avouer. Ca la détendait, et ça la divertissait autrement qu'en se défonçant la cervelle avec un rail de poudre immaculée, ou tout simplement avec les innombrables cigarettes qu'elle consumait toute la sainte journée. Elle y trouvait son compte, dans la mesure où elle n'avait qu'à suivre bêtement quelques consignes pratiques, puis à se laisser aller. Et si son interlocutrice portait secrètement les Rebelles en admiration, Myra en revanche en avait énormément pour les Artistes, parce qu'ils avaient cet univers propre qui s'étendait jusqu'à des années lumières, car l'imagination ne connaissant pas de limites, ils pouvaient donner vie à des choses extraordinaires. Ils étaient des magiciens à ses yeux, et eux avaient une façon plus appropriée de délirer, littéralement parlant.

- Et toi, outre ta relation très proche avec le paranormal, comment te définirais-tu ? Plutôt fêtarde, pantouflarde, intellectuelle...?

La liste était longue mais elle s'arrêta là pour le moment, attendant d'en savoir toujours plus sur celle qui avait ouvert son esprit aux mystères de l'espace. Du coup, à cause de l'apparition furtive dont elles avaient été témoins, elle se sentait contrainte de scruter le ciel, par réflexe, au cas où un nouveau visiteur aurait envie de les narguer, du haut de son perchoir céleste. Elle avait envie de s'allumer une autre cigarette, mais ça lui passa en se souvenant du refus catégorique que Sawako avait exprimé lorsqu'elle lui avait proposé de partager. Peut-être que malgré son autorisation, l'odeur du tabac l'embarrassait, ce qui n'était pas une tare en soi.

Invité

L

es choses ne sont pas toujours comme elles le sont ou comme on voudrait qu’elles soient. Il y a peu de chance que ce que nous avions décidé de faire se réalise. Alors que ce que nous ne voulions pas faire nous soient obliger d’être fait. A lire on aurait mal à la tête car c’est très difficile à percevoir. Disons que la chance n’est pas toujours là au moment voulu. Des personnes n’ont jamais vraiment eu de chance dans la vie et en n’auront peut-être jamais. Je dis ça pour la vie de Myra, elle détestait ou plutôt elle ne s’entendait pas avec sa mère. C’était bien dommage, ne plus avoir de contact avec celle qui nous a donné la vie. Comme c’est bien dommage de quitter son pays natal, celui qui nous a vu naître. Sawako était aussi éloignée de son deuxième pays d’origine, elle y retournait pendant les vacances quand elle le pouvait toute fois. Elle n’y était plus allée depuis un an, son père trop occupé par son travail tendit que sa mère cherchant à fuir le sujet ou à sortir des excuses plus difficiles à croire les unes que les autres. L’artiste avait peur d’une chose bien stupide, de ne plus savoir parler anglais après tout ces longs mois éloignée d’Angleterre. Mais une fois qu’une langue est acquise, elle le reste pour la vie, non ? Bien sur, à la maison parfois, il se pouvait qu’elle parle avec son père en anglais. Sa mère n’étant pas très forte en cette langue, elle ne se mêlait pas de la conversation qui devenait compliquée à comprendre pour elle.

La rebelle lui fit par de sa réaction après que notre étudiante vint lui annoncer, qu’elle ne trouvait sa vie, point banale. Cette dernière fut assez surprise dans le sens où elle croyait que ça lui ferait plaisir qu’elle lui dise ça. Elle semblait se rabaisser et n’était pad fière de ce qu’elle avait put faire, apparemment. Il était très difficile pour l’artiste de bien comprendre ses sentiments à cet instant mis elle ne préféra pas réagir à ce commentaire. Après tout, elle n’a pas vécu ce que Myra avait vécu, n’étant qu’une simple spectatrice à tout ceci. Ne perdant pas espoir tout de même, elle n’en oublia pas sa question sur ces relations avec les hommes. Cette réponse lui convenait parfaitement. Elle s’était imaginé un truc de ce genre, elle est comme ça la vie d’une fille telle que la rebelle. Mais niveau avenir, c’était pas encore ça pour elle. Elle en savait fichtrement rien ! Sawako se demanda bien si elle n’avait ne serait-ce qu’une seule idée en tête qui ferait basculer la balance. L’artiste croyait que les questions étaient finies pour toutes les deux, à croire que Myra n’avait pas encore tout à fait finie.

-

E

t bien…je suis une fille très sociable. J’aime aider les gens en difficulté. Mais je n’suis pas une intellectuelle. J’avoue j’peux être flemmarde des fois.

A

jouta-t-elle avec un petit rire. Cette question était à la fois intéressante mais difficile. Sawako n’était pas une fille originale, elle était à la limite de la banalité. Et savait que ce serait bien difficile de faire changer tout ceci. La chose qui la rendait originale ? C’est pourtant flagrant, c’était sa passion ! Et elle en était fière. Elle n’était pas satisfaite de sa réponse, qu’est-ce qu’elle pouvait apporter de plus à celle-ci pour qu’elle devienne cool aux yeux de Myra ? Elle ne voyait pas et préférait laisser tomber. Il était temps de dormir car sinon au petit matin, elles risqueront de se réveiller trop tard et de se faire repérer par quelqu’un. Sawako ferma les yeux après s’être recouverte jusqu’au nez. Dans un silence elle laissa échapper un « Bonne nuit » étouffé à cause de la couverture. Puis elle tomba dans un sommeil profond et rien n’y personne ne put la réveiller. Le vent s’était levé un moment ce qui lui fit froncer les sourcils. L’artiste dormait profondément et ne semblait rêver de rien. Puis après des heures de sommeil, une voix se fit entendre.

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N

on mais, c’est qui elles ? Qu’est-ce qu’elles foutent là ?

U

ne main vînt se poser sur la tête de Sawako puis sur son épaule, un petit coup qui la fit se retourner. Elle détestait qu’on la réveille aussi précipitamment. Puis un « rooh ! » se fit entendre dans la coure déserte. C’était le gardien qui faisait sa route matinale et qui avait découverte les deux jeunes étudiantes endormies dans l’herbe. C’était bien la première fois que des jeunes restaient dans l’académie pour dormir à la belle étoile. Et c’était interdit de faire ça ! Sawako, elle, pensait que c’était Myra qui la réveillait. Et les petites tapes continuaient alors l’artiste fit un signe de la main comme si elle voulait écarter une mouche ou je-ne-sais-quoi. Ne voulant point se réveiller, au bout de cinq minutes une voix se fit entendre qui ne cachait pas un agacement propre. L’étudiante sursauta et remarqua qu’elle s’était trompée et que ce n’était pas son amie qui en était la responsable. Elle leva les yeux sur le gardien et semblait désemparée, elle n’avait jamais vécue ce genre de situation auparavant. Elle secoua Myra au plus vite.

-

M

yra réveille-toi, vite !

Invité

La question de Myra ne fut pas une tasse de thé pour Sawako. Si la jeune fille se qualifiait de banale, au point que c'en était désolant, il n'était pas très justifié de sa part de se rabaisser autant. Tout dépendait de quel point de vue on se plaçait, car si on avait un tant soit peu de morale, il serait plus judicieux de vanter la sagesse de l'Artiste. Quoiqu'il en soit, la Rebelle ne la perçut pas comme une personne ennuyeuse, loin de là. Elle l'était déjà beaucoup moins que Svan, lorsqu'elle se permettait de partir dans des raisonnements pseudo-philosophiques qui avaient le don d'irriter l'espagnole. Certes, elle était tolérante quant aux faits que certains puissent avoir de l'engouement pour les études et l'instruction que cela impliquait, mais elle ne pouvait pas croire que tout ceci puisse faire de nous une personne à part. A ses yeux, l'instruction n'était pas une référence. Il ne fallait pas l'abolir, mais il ne fallait pas la placer sur un piédestal non plus. Elle permettait surtout de s'intégrer dans un groupe d'individus. On pourrait prendre l'exemple de la politique. Il n'est pas toujours évident de s'y intéresser, car en partant de préjugés publics, on pourrait résoudre la question de la politique en prétendant que tous les politiciens sont des menteurs, et qu'ils ne savent utiliser leur verve que pour proférer de fausses promesses. Pourtant, d'un point de vue technique, on ne peut pas clore un débat sur un avis aussi subjectif. Il faut avoir des connaissances sur la chose, pour rendre crédibles ses opinions personnelles. Or, Myra reconnaissait se camper sur des positions qui lui avaient été insufflées par cette espèce d'opinion publique qui n'apportait pas grand chose en fin de compte. Elle dispensait de réfléchir par soi-même, faisant de nous des parfaits moutons gambadant sagement en troupeau. Il suffisait d'un porte-parole influent pour faire changer le troupeau de direction, tout en lui donnant l'illusion d'acquérir un avis qui lui est propre.

Myra aurait aimé discuter encore un peu avec Sawako, car elle pressentait que leur discussion pourrait emprunter un tournant très captivant. Cependant, l'Artiste montra une fois de plus quelques signes de faiblesse, et l'engagea à se reposer pour qu'elles ne se réveillent pas trop tard. La Rebelle eut vaguement souvenance de la présence d'un gardien qui effectuait régulièrement des rondes, afin de s'assurer qu'aucun élève n'avait fait le mur, prévoyant de rentrer à des heures pas possibles. Ainsi, elle obéit aux directives de la prudente Sawako, et rabattant sa couverture jusqu'à son menton, elle écrasa l'ultime mégot de cigarette qu'elle avait consumé cette nuit-là. Lorsqu'elle ferma les yeux, elle fut automatiquement happée par l'obscurité d'un sommeil profond, néanmoins brusquement interrompu par des ronchonnements.

- Hmnyé que se passe-t-il ?

Elle se redressa difficilement après que Sawako lui ait ordonné de se lever et cela sans plus tarder. Dans un premier temps, Myra ne comprit pas les raisons de sa détresse. Puis, toujours emmitouflée dans sa couverture, elle leva lentement mais sûrement la tête en apercevant dans son champ de vision des jambes n'appartenant pas à sa camarade. Elle reconnut le gardien et, automatiquement, se mit en position de défense en se défaisant de la couverture qu'elle laissa retomber mollement sur la pelouse de la cour. Confuse et sur le qui-vive, elle réalisa qu'elle ne devait en aucun cas se faire remarquer après les innombrables effractions commises au sein du pensionnat. Entre la consommation de produits illicites, et les expéditions nocturnes dont elle revenait toujours indemne, il ne faisait pas bon se retrouver nez à nez en face de ce fameux gardien. La culpabilité se lisait clairement sur son visage, et le fait qu'on l'ait découverte en flagrant délit ne prévoyait rien de positif pour son matricule.

- Dis donc la gosse, j't'avais pas déjà vu fourrée dans des sales coups ?

Possible, mais des comme moi, il doit y en avoir des centaines entre ces murs. C'est l'une des phrases typiques grâce auxquelles elle se serait défendue en temps normal, mais du fait qu'on venait de la tirer de son sommeil, son sens de la répartie se voyait inefficace. Elle n'eut pas la force de polémiquer sur la question, et l'adulte profita éminemment de ce coup de mou pour la descendre un peu. Moralement, ce ne fut pas pour plaire à la Rebelle, qui se vit limite considérée comme un rebut de la société. Elle ne l'aurait pas pris contre elle là encore en temps normal, mais l'irritabilité dont elle était soudainement la proie n'arrangea pas sa situation émotionnelle. Elle avait affreusement mal à la tête, encore sonnée par les réflexions très profondes élaborées avec Sawako. Les évènements de la veille étaient flous, et le gardien lui apparaissait comme un bourreau s'acharnant ardemment sur un condamné.

Les adolescentes furent quelques minutes plus tard prises en sandwich par deux surveillants passant hasardeusement dans les environs. Interpellés par la mine renfrognée de leur gardien, et également par le matériel de campement de Sawako resté sur la pelouse, ils trouvèrent le moyen de s'incruster dans la conversation. En reconnaissant la personne de Myra Jefferson, ils eurent l'expression d'un héros venant de capturer le grand méchant qu'il cherchait depuis des siècles. Les filles furent escortées jusque dans ce qu'ils appelaient le bureau de la vie scolaire, où elles furent sermonnées par le Maître des lieux. Leur petite effraction ne fut pas sans conséquences. Tout du moins, elles furent légères pour Sawako qui, contrairement à son acolyte, avait su se montrer discrète jusqu'à preuve du contraire. En revanche, la Rebelle, de part ses nombreuses absences injustifiées en cours et de ses autres frasques, reçut un avertissement qui lui porterait préjudice lors des prochains conseils de classe où on débattrait de ses résultats tantôt catastrophiques, tantôt inexistants. On la menaça de l'exclure si elle prévoyait de sévir. Dans l'espoir que cela puisse la calmer, on lui infligea par ailleurs quatre heures de colle qu'elle effectuerait dans la journée, et cela sous la juridiction d'un surveillant qui ne manquerait pas de veiller au grain. En sortant du bureau aux côtés de l'Artiste qui ne tarda pas à lui fausser compagnie, Myra soupira longuement. Elle qui s'était crue invincible dans son besoin irrépressible de répandre sa propre loi, venait de chuter violemment de son piédestal. Ainsi va la vie.