Amalia avait bien du mal à se reconnaître. Elle était si habituée à ses longs cheveux, que sa soudaine courte cheveulure asymétrique lui donnait la sensation d'être une personne tout à fait différente.
Non.. elle était elle-même, c'était tout.
Repensant à la promesse qu'elle s'était faite, elle serra le poing avec conviction. Elle pensait sérieusement à quitter le club de musique, non pas pour s'en éloigner mais car cela la bloquait. Elle le comprenait à présent; elle devait renouer avec le chant et la musique seule, sans une quelconque pression académique. Exactement comme lorsque sa mère était encore en vie..
Terminant de peindre ses lèvres charnues en rouge, Amalia observa son visage, si ressemblant à sa génitrice. Elle les avait toujours teintes en corail jusqu'à présent, mais après s'être coupée les cheveux sur un coup de tête pour moins lui ressembler, elle avait décidé de se mettre au rouge, comme Madame Williams le faisait. Un petit hommage en quelque sorte.
L'image renvoyée était exquise, évidemment. La jeune femme avait conscience de cette apparence avantageuse, qu'elle ne pouvait nier ou détester, elle était le portrait de sa mère après tout. Il n'était plus question pour elle de détester son apparence, même si cela avait été source de souffrances, ou d'exposer sa beauté à tout prix par pur esprit de provocation. Il s'agissait d'une partie d'elle, qu'elle se devait d'assumer.
Avec délicatesse elle vint accrocher la
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]offerte par Len dans le dos de sa chevelure.
"Because I'm in love with Len.."Ce cadeau, il ne quitterait plus ses cheveux, il représentait une personne extrêmement importante pour elle. Quelqu'un qui lui avait appris à sourire de nouveau.
Encore perdue entre qui elle était et ce qu'elle voulait être, Amalia avait décidé d'abandonner sa stricte garde robe qui, après réflexion, la restreignait. Plus que tout, celle-ci lui rappelait son père. Elle ne voulait plus de vêtements si chics, elle recherchait quelque chose de plus décontracté, plus Taylor.. et peut-être, plus elle-même. La belle brune faisait probablement une crise existentielle. Elle avait juste ce besoin d'essayer des choses complètement différentes, en espérant se trouver, et cela passait par son apparence pour le moment.
Pour la première fois depuis longtemps, elle portait un jean bleu ciel, soulignant ses longues jambes, ainsi qu'un haut blanc à manches courtes laissant ses épaules dénudées et une paire de baskets, la seule qu'elle possédait à vrai dire et qui était bien plus chic qu'une paire lambda, puisqu'elle provenait de sa garde robe. Sa tenue contrastait presque avec son visage, valorisé par la simplicité de ce qui ornait sa silhouette. Sans surprise, ces vêtements des plus basiques la mettait parfaitement en valeur et inversement.
Amalia avait un peu l'impression de s'être déguisée mais cela n'était sûrement que temporaire, le temps qu'elle s'habitue à ce nouveau look. Il lui correspondait plus. Bien que toujours soignée, l'apparence n'avait pas grande importance pour elle, tant qu'elle avait sa musique et ses livres elle se sentait bien. Et cet état d'esprit devait se répercuter sur elle. De cette manière, le rôle qu'elle se jouait finirait bien par se dissiper, non ?
L'étudiante attrapa son sac, contenant ses cours, auquel était accroché plusieurs attrape-rêves et autres gris-gris. Elle ne croyait pas spécialement à leurs effets, mais trouvait cela joli. Et puis, elle y était habituée, puisque sa mère adorait ce genre de choses.
La brune sortit finalement de sa chambre, traversant les couloirs pour se rendre à son cours en amphithéâtre. La cloche se mis à sonner et les classes commencèrent à se vider lentement des élèves ayant commencé plus tôt qu'elle. Pressant légèrement le pas pour arriver à l'heure, sa matinée passa plutôt vite étant donné qu'elle avait peu de cours ce jour-là.
Finissant à 11 heures, elle réfléchissait à ce qu'elle allait faire pour s'occuper. Peut-être pouvait-elle en profiter pour jouer un peu de violon ? Il ne lui était pas obligatoire de continuer à s'acharner sur La Sicilienne, elle pouvait improviser quelque chose d'autre, juste jouer un peu pour le plaisir.
Les classes continuaient d'affluer dans les couloirs, de manière assez décourageante, aussi Amalia profita de la première ouverture pour pénétrer dans la cafétéria, bien plus vide que les couloirs. Elle n'avait pas l'intention d'y manger mais puisqu'elle y était, elle profita de ce fait pour se prendre un thé à un distributeur. Des rires féminins lui parvint aux oreilles, ainsi que le bruit des pas d'un groupe de filles quittant la file où les élèves s'agglutinaient généralement pour se servir leur déjeuner. Elle n'y aurait pas prêté plus d'attention que ça si un bruit sourd n'avait pas retentit peu de temps après, faisant redoubler les rires. La violoniste tourna finalement la tête vers l'origine du grabuge, découvrant une jeune blonde au sol et un attroupement autour d'elle. Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que l'une d'elle lui avait fait un croche pied, ce qui avait entraîné le plateau de l'étudiante dans sa chute, ainsi que l'attention d'une bonne partie des élèves présents. Ils n'étaient pas très nombreux mais assez pour que cela soit gênant.
Amalia observe la blonde se relever, la même expression que Yuka avait si souvent au visage.
"Depuis combien de temps cela dure ? songea-t-elle sans la quitter des yeux." Cette ambiance, elle ne la connaissait que trop bien. Elle l'avait vu, elle l'avait vécu. Il lui était impossible de ne pas la repérer.
Un coup bas, puis la fausse innocence et la victime qui faisait semblant d'ignorer ce qu'il venait de se passer. Tout dans son attitude lui rappelait Yuka ; s'écrasant constamment face à son groupe de "camarades".
Quelques secondes à l'observer suffit à le lui faire comprendre: elle n'avait pas l'intention de se défendre. Le bip sonore de la machine la rappela à l'ordre et elle saisit son thé.
La jolie jeune femme s'avança silencieusement vers le petit attroupement qui n'avait toujours pas bougé. Et elle renversa le contenu de sa tasse sur une grande brune. Enfin, par rapport au groupe, en ce qui la concernait elle n'avait aucun mal à la regarder de haut. Un cri strident ne tarda pas à raisonner dans ses oreilles, accompagné des cris d'indignation des amies de la "victime". C'était sûrement par intuition qu'elle avait viser cette "Tori", visiblement la leader. Les autres filles agissant comme les parfaits moutons de ce genre de groupe.
"Pourquoi tu fais tout ce cirque ?" La froideur de ses paroles et de son regard coupa vite court à leurs piaillements. Elle pu lire la surprise dans le regard de son interlocutrice. Cette dernière n'était clairement pas de celles qui s'écrasaient mais, sa question était tellement hors de contexte que cela lui avait fait perdre ses moyens. De toute manière, s'engager dans un duel verbal avec Amalia aurait été peine perdue, il ne faisait aucun doute qu'elle possédait plus de charisme que tout l'attroupement réuni.
"Tu es celle qui t'es renversé mon café dessus à ce que je sache. Je ne faisais que marcher pacifiquement dans le réfectoire."Les protestations ne tardèrent pas à fuser après ce qu'elle déclara calmement, le regard toujours acéré. Ses accusations étaient si objectivement fausses qu'elles n'avaient bien sûr aucun mal à la contredire et à se défendre face à ça, faisant fi des regards posés sur elles. Elles avaient le beau rôle pour l'instant.
"..c'est ce que ça donne quand vous lui faites un croche pied si peu discret, termina-t-elle en désignant la blonde."Le silence revint. Elles étaient bien gênées tout à coup. Même si elles ne considéraient pas qu'elles harcelaient cette fille, elles n'avaient pas besoin d'être des lumières pour se rendre compte que leur comportement serait mal vu d'un point de vue extérieur. L'expression décontenancée de Tori finit cependant par disparaître, pour laisser place à un regard hautain. Sa majesté avait visiblement repris son attitude originelle. Sans ciller, Amalia continua de la fixer froidement. Elle n'avait pas encore adresser le moindre regard à la petite blonde, tout comme celle-ci n'était pas encore intervenue.