Rencontre d'une nouvelle proie ?

Asuka lui ouvrit la porte dans le but qu’elle rentrât dans la salle commune. Elle appréciait ce genre de geste puisque de nos jours, peu de garçons se comportaient de la sorte. Surtout à Keimoo. Cela lui donna encore plus l’envie d’en faire sa nouvelle proie. Rachel choisissait toujours ses prochains petits amis sur des critères que seule elle fixait et ces critères pouvaient changer selon son envie. Aujourd’hui, elle rajouta le critère de « gentleman » dans sa liste puisqu’en réalité aucun de ses petits amis avant ne l’était vraiment. Ce fut aussi pour cette raison que cela lui plut beaucoup sur le coup.
Rachel entra dans la salle commune alors qu’elle entendit le garçon lui répondre puis elle le sentit derrière elle : il lui emboîtait le pas. Quand elle entra dans la salle, elle vit toutes les têtes se tourner vers elle, et des murmures incessants survinrent la seconde suivante. Cela, elle ne l’appréciait pas du tout. Non seulement car elle savait qu’ils parlaient d’elle et voulait savoir par-dessus tout ce qu’ils disaient, mais aussi car cela pouvait baisser son estime aux yeux des autres. D’Asuka surtout. Au moins, à ce moment.
Il ne lui fallut pas plus d’une seconde pour réfléchir et trouver la solution à ce petit problème inconvenant. Elle ne souhaitait pas qu’Asuka sache, dès les premiers moments de leur rencontre, sa vraie nature. Elle voulait éviter cela pour tout au monde. Elle s’arrêta alors et fixa tout le monde. Ceux-ci cessèrent de parler et le silence tomba sur la salle commune. Tout le monde tourna la tête vers elle et elle se sentit prête à faire son petit discours. Et surtout à éviter ce qu’elle appelait « une catastrophe ». A savoir, perdre la confiance d’Asuka tout de suite.

- Oui, j’ai rompu avec Ryosuke, et alors ? Je suis sûre que toutes les filles dans cette pièce rêvent de sortir avec lui alors maintenant qu’il est libre, tentez votre chance, je vous en prie. Mais je ne vous demanderai qu’une seule chose : de ne pas raconter de pareilles salades sur moi et de faire passer de fausses rumeurs, alors que vous ne savez en réalité rien du tout. N’inventez pas d’histoires irréelles qui conteraient que Rachel Leboit a un mauvais caractère et qu’elle est méchante. Vous n’avez pas honte, surtout que je le dis encore une fois, vous n’étiez pas là donc vous ne connaissez pas les faits ?

Tout le monde resta bouche bée pendant un instant et Rachel sourit en son for intérieur. Encore une fois, son discours avait marché. Ses mensonges avaient marché. Elle vit tout le monde se disperser ou recommencer à parler. Mais cette fois-ci pas de murmures. Rachel fut satisfaite de ce qu’elle venait de faire. Elle se tourna enfin vers Asuka qui avait une expression neutre. En tout cas, c’était ce qui semblait à Rachel. Elle ne sut pas ce qu’il pensait sur le moment et elle aurait donné cher pour connaître ses pensées. Oui, elle voulait par-dessus tout savoir ce qu’il pensait, surtout d’elle, à ce moment-même. Malheureusement, cela était impossible et elle le savait bien. Cela la mettait en colère car elle ne pouvait pas avoir ce qu’elle souhaitait. Mais elle gardait cette colère enfouie en elle et se préoccupa du moment présent et de ce qui allait advenir.
Elle leva la tête pour fixer les yeux d’Asuka, qui était plus grand qu’elle. Elle lui sourit immédiatement en essayant de lui faire le plus de charme possible pour le séduire. Puis elle dit, encore une fois de sa voix mielleuse et douce, les mots suivants :

- Asuka, promets moi que jamais tu ne croiras ce qu’ils te diront. Ils te mentiront toujours. Je ne suis pas la fille qu’ils croient. Depuis mon arrivée ici, ils me traitent de tous les noms possibles, juste parce que je sors avec les plus beaux garçons de l’académie. Ils s’acharnent sur moi, racontent des rumeurs totalement fausses. J’ai très peu d’amies à cause de cela. Mais heureusement que j’en ai. Elles me soutiennent et me permettent d’oublier. Et surtout de ne pas me préoccuper de leurs paroles. Et d’avoir le courage de me défendre, comme je viens de la faire. Mais est-ce de ma faute si je tombe amoureuse d’eux et qu’eux, tombent amoureux de moi aussi ? Franchement, je ne le pense pas. De plus, toutes ces filles sont jalouses de moi. Quant aux garçons, ils rêvent tous de sortir avec moi. Je ne supporte pas ce genre de personnes.

Rachel lâcha un petit soupir triste. Bien sûr, tout ceci n’était que fausseté mais semblait comme vrai. Rachel savait parfaitement comment s’y prendre. Elle voulait après tout devenir une actrice alors ce petit jeu lui permettait de lui montrer si elle en était une. Si elle avait les capacités nécessaires et requises afin d’être une bonne actrice. Et par la suite, de devenir célèbre. Non seulement pour sa beauté, mais aussi pour son jeu. En gros, elle prenait cela comme une espèce d’entrainement.

- Promets-moi Asuka. Je t’en prie. Je ne voudrais pas que tu vois en moi la fille que je ne suis pas.

Rachel prit la voix la plus suppliante possible. Elle le fixa avec un regard tout autant suppliant et des yeux qui inspiraient la pitié. Et elle espérait de tout cœur qu’Asuka se prenne à son jeu. Qu’il tombe dans son piège. Parce qu’elle savait que si ce n’était pas le cas aujourd’hui et à ce moment-même, elle aurait plus de mal à l’attirer dans ses filets. Et rient que cette pensée l’horrifiait et la mettait encore plus en colère. Alors elle tenta de chasser cette idée pour ne pas s’énerver encore une fois comme tout à l’heure. Elle devait être le plus calme possible sinon cela ne marcherait pas. Elle le savait.
Son esprit priait pour qu’Asuka lui réponde positivement, et surtout, qu’elle puisse commencer ce qu’elle désirait le plus à ce moment-même. Mordre le jeune garçon.

La réaction d’Asuka et sa réponse ne plurent guère à Rachel. Son expression du visage changea du tout au tout mais le garçon n’eut pas le temps de le remarquer car il partit s’asseoir sur un fauteuil et il mit ses pieds sur une petite table en face. Rachel bouillonnait, elle était vraiment en colère. Comme tout à l’heure, au moment où elle avait quitté Ryosuke. Elle fit un grand effort pour ne pas crier, pour ne pas exploser.
Elle sut sur le champ que cela n’allait pas être une tâche facile de faire en sorte que le garçon tombât dans ses filets. Ce qui l’exaspérait car elle n’aimait pas beaucoup faire trop de choses pour obtenir ce qu’elle souhaitait. Par ailleurs, Rachel était une grosse flemmarde mais quand il le fallait, il le fallait. C’était une de ses nombreuses devises. Même en colère, elle ne voulait pas que ce soit son dernier mot. Mais pour l’instant, elle décida de partir de la salle commune et rejoindre sa sœur dans les dortoirs comme le souhaitait au début. Marianne la calmerait et la conseillerait. Et le lendemain, Rachel serait prête à aller au front et attaquer à nouveau.
Elle ne se dirigea donc pas vers le garçon pour continuer la conversation avec lui. De toute façon, elle ne savait plus quoi lui dire. Elle n’avait rien à lui dire. Alors cela ne servait à rien qu’elle perdît son temps avec lui si c’était pour ne rien dire et qu’un silence s’installât entre eux. Elle vit Asuka ouvrir les yeux et la regarder s’en aller en direction des dortoirs. Il ne fit rien. Ne se leva pas. Ne cria pas pour l’empêcher. Encore une fois, elle sut que cela n’allait pas être de tout repos de gagner sa confiance et d’un jour, sortir avec lui. Mais Rachel attendrait. Pourtant, elle ne voulait pas attendre plus d’une semaine. Au pire, elle avait toujours les Autres. Ceux qui sont des aventures d’un ou deux soirs. Elle pouvait compter sur eux pour la combler pendant tout le temps qu’elle essayait de « choper » comme on dit, Asuka.
Rachel passa à côté du canapé où une fille enrobée regardait un magazine féminin japonais et elle rougissait devant une magnifique image d’un merveilleux garçon bien bâtit. D’abord, Rachel fut attirée par l’image puis par le garçon qui se trouvait dessus. Elle le reconnut. C’était lui. Elle tourna la tête vers lui. Il n’y avait pas de doute. Il lui ressemblait. Ainsi, Asuka était mannequin. Cela plut encore plus à Rachel et elle fut encore plus déterminée à sortir avec lui. Il pouvait lui fournir des contacts dans le monde du mannequinat également. Cela ne lui déplut pas à la seule pensée de pouvoir poser avant de devenir une actrice.

- Puis-je t’emprunter ton magazine quelques secondes, je te prie ?

Rachel prononça ces mots d’une voix mais qui surprit la jeune fille. Celle-ci acquiesça de la tête et s’exécuta sur le champ en lui passant le magazine. Asuka regardait la scène avec intérêt. En tout cas, c’était ce qui semblait à Rachel. Rachel examina mieux la photo. *Mon Dieu, qu’il est magnifique ! Je ne peux pas le laisser s’échapper !* pensa-t-elle sur le champ. Elle mit un doigt entre les pages du magazine pour ne pas perdre la page et la retrouver en une fraction de seconde. Puis, elle se dirigea vers Asuka pour reprendre la conversation. Elle avançait vers le fauteuil où le garçon était confortablement assis. Il la fixait et chaque pas lui devenait de plus en plus pesant. Elle ne savait pas vraiment comment réagir ni quoi lui dire. Mais elle était dans son élan, elle ne pouvait pas s’arrêter d’un coup pour repartir. Cela aurait semblé bizarre. Non seulement à Asuka mais aussi aux autres élèves présents dans la salle.
Quand elle arriva à sa hauteur, elle lui mit le magazine sous les yeux et montra sa photo. Asuka ne sembla pas réagir et son expression ne changea pas. Du moins, c’était ce que Rachel croyait. Encore une fois, elle aurait voulu connaître les pensées du garçon.

- J’ignorais que tu étais mannequin. Cela me plaît. Tu sais, en fait tu viens de rencontrer une future actrice célèbre. Je trouve que le monde du mannequinat et du cinéma sont assez proches. Qu’en penses-tu ?

Rachel avait parlé non sans réflexion. Elle savait à peu près à ce qu’elle voulait en venir. Mais elle ne savait pas si le garçon lui répondrait comme le souhaitait. En effet, tout à l’heure, elle n’entendit pas la réponse qu’elle voulait, alors elle se dit qu’il pouvait très bien divaguer cette fois ci également. Mais comme cette fois ci le but de la conversation n’était pas le même, cela ne la dérangeait pas du tout.
Elle s’assit dans le fauteuil à côté d’Asuka et l’observa en attendant une réponse. Bien sûr, elle n’oublia pas de poser ses coudes sur ses genoux, ce qui fit qu’elle se pencha. Encore une fois, elle offrit une vue totale sur sa poitrine et son soutien gorge en dentelle rouge, et fraîchement acheté la veille quand elle faisait les boutiques, au jeune garçon. Elle lui souriait bêtement également. Mais cela paraissait comme un sourire sympathique et n’avait pour but que de le séduire.

Un silence s’installa entre les deux adolescents. Rachel ne savait plus quoi dire et la réponse d’Asuka ne l’avait pas satisfaite en réalité. Puis Asuka n’avait probablement rien à lui dire. En fait Rachel se rendait compte qu’il était différent des autres garçons. En effet, ceux qu’elle abordait, aimaient parler avec elle. Ils espéraient toujours qu’elle sortît avec eux puisque Rachel faisait partie des filles les plus désirées. Cela rendait de nombreuses filles jalouses, comme celle qui racontaient des rumeurs. Mais aujourd’hui, Asuka ne lui parlait pas. Il ne faisait rien pour tenter de la séduire à son tour. Rien qui pouvait signaler qu’il était intéressé. Au contraire.
Cela déplut très fortement à la jeune fille et sa colère monta encore. Bien sûr, elle tentait par-dessus tout de la contrôler afin de ne pas la montrer aux autres. Par ailleurs, elle n’avait pas de prétexte pour l’être, du moins aux yeux des autres. Elle la taisait au fond de soi mais elle se connaissait. Quelque chose devait la calmer bientôt sinon elle ne tiendrait pas. Seule Marianne était capable de la calmer à ce moment, alors elle ignorait comment faire pour éviter que sa colère explose. Elle fut un peu nerveuse, mais comme Asuka ne la regardait, il ne le remarquait certainement pas.
Tout d’un coup, son portable vibra. Un e-mail. Elle sortit son portable de la poche de son minishort et lut le message. Sa sœur. Comme par miracle. Comme si elle avait entendu les pensées de Rachel. L’espagnole se dépêcha de lui répondre en lui demandant de se rendre dans la salle commune, car elle ne pouvait vraiment bouger. Bien sûr, elle pouvait. Mais elle ne le voulait pas. Elle devait absolument rester sinon elle ne pourrait plus parler avec le mannequin.
Pendant que sa sœur lui répondait et venait la rejoindre dans la salle, une idée de conversation lui vint tout de suite.

- Dis, tu pourrais m’arranger quelques contacts ? J’aimerai commencer le plus tôt possible mon métier, voire même à la fin de cette année. Alors tant qu’à faire, déjà commencer pour se préparer, nouer des liens et surtout s’entraîner.

De l’entraînement. Elle n’en avait pas besoin. Des contacts et des liens. A moitié. Son père travaillait dans une boîte de production alors elle pouvait facilement en avoir. Elle en avait déjà quelques uns. Mais il valait toujours mieux en avoir davantage et le plus possible. Elle espérait vraiment qu’il l’aide dans sa requête et dans sa recherche. Qu’il lui parlerait enfin. En plus, elle se rendit compte qu’elle aimait sa voix. Cette voix si pittoresque. Qu’elle n’avait jamais entendu auparavant. Un garçon ne parlait pas de la sorte, avec une voix si aigüe, si féminine. Cela lui plaisait dans le fond. Elle voulait qu’il continue à parler, même si c’était que des phrases courtes, comme depuis le début. Bien sûr, son souhait était qu’il prononçât davantage de mots qu’il ne l’avait fait jusque là.
A ce moment, sa sœur arriva et lui mit une main sur l’épaule. Rachel fit semblant de sursauter car elle avait demandé à Marianne d’entrer dans son jeu et d’y jouer. Marianne avait tout de suite compris et savait aider sa sœur. Parfaitement, même. Elle aussi pouvait devenir une très bonne actrice, mais ce n’était pas son souhait premier. Pas comme celui de Rachel.

- Rachel, cela fait des heures que je te cherche. Je suis contente de t’avoir trouvée.
- Que voulais-tu me dire puisque tu me cherchais ?

Marianne lui répondit qu’Eric avait appelé et qu’il souhaitait que Rachel l’appelle à son tour. Bien sûr, Rachel crut que c’était faux car elle pensait que Marianne jouait son rôle. Et elle trouvait qu’elle était parfaite. Asuka ne pouvait pas voir que les deux sœurs n’étaient pas sérieuses et que toute cette situation avait été prévue. Marianne sembla remarquer alors le garçon et lui sourit en le saluant. Mais celle-ci se baissa et murmura quelques mots à l’oreille de Rachel. Cette dernière fut surprise et écarquilla les yeux. Mais elle sourit sur le champ, heureuse de la nouvelle. Eric avait vraiment appelé. Rachel voulait lui parler, entendra la voix de son grand frère, si important pour elle. Il était la deuxième personne qui, Rachel le savait, ne la décevrait jamais. Qui l’écoutait, la comprenait, ne la jugeait pas et ne la critiquait pas. Son grand frère était une grande perle pour elle. Et les seuls moments où elle pouvait discuter avec lui, lui procurait beaucoup de bonheur. Après tout, celui-ci était aux Etats-Unis et cela faisait plus d’un an qu’elle ne l’avait pas vu. Lui trop pris par ses études et elle, au Japon ne pouvant pas partir en réalité.
Mais Rachel sut qu’elle ne pouvait pas appeler sur le champ. Cela aurait été impoli vis-à-vis d’Asuka.

- Marianne, je te présente Asuka. Asuka, voici ma petite sœur. Marianne, tengo un secreto pero no lo digas a nadie : es un modelo.

Elle ignorait si Asuka parlait et comprenait l’espagnol mais quand elle était avec sa sœur, elle préférait parler sa langue natale. Après tout, Rachel avait plus de facilités à parler l’espagnol, ce qui était tout à fait normal. Le japonais elle le parlait avec un fort accent qui s’entendait. Mais de nombreuses personnes, surtout ses petits amis, lui disaient que cela faisait tout son charme et que c’était très sexy. Rachel en jouait aussi. Mais pas avec Marianne.
Elle fit un clin d’œil que seule sa sœur comprit. Marianne inclina la tête, comme dans la tradition japonaise, pour saluer encore une fois le jeune garçon dont elle connaissait désormais le prénom.

- Enchantée. J’espère que tu t’entends bien avec ma sœur. Elle vaut d’être connue et surtout, de ne pas devenir son ennemie. Notre pauvre mère en a fait l’expérience …

Rachel frappa doucement sa sœur au genou et elle dut plier un peu la jambe. Rachel ignorait pourquoi, et n’aimait pas non plus, qu’elle racontât leur vie. Surtout qu’elle ne connaissait Asuka qu’à peine depuis quelques minutes. Il n’avait rien à savoir sur leur vie familiale et sur les relations entre les différents membres de celle-ci. Rachel poussa un grognement que Marianne savait interpréter et comprendre. Elle porta tout de suite sa main à la bouche, probablement pour s’excuser. Rachel le savait.

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