Et si les barbies ne regardaient que les images ?

Ce n'était pas évident de croiser Esfir plusieurs fois dans sa vie. Peut être parce que la jeune fille n'avait aucun lieu habituel, et qu'elle avait sans cesse la bougeotte. Elle était simplement comme une enfant. Elle courrait partout, elle sautait partout, elle criait partout. Esfir n'était peut être pas la personne que l'on croise tout les jours, mais elle reste cependant l'une des personnes les plus incroyable du pensionnat. Certainement la plus petite, son physique lui donnant bien moins d'âge que la vérité, elle possède aussi un charme étrange. Ces cheveux roses frisent le ridicule, ses robes d'un autre temps sont complétement démodées. Bien que l'académie est ouverte aux étrangers, Esfir fait partie des étrangers qui font vraiment étrangers. Elle reste la plupart du temps toute seule, et si elle ne crie pas, elle passe complétement inaperçue. Peut être à cause de sa petite taille.

Esfir est certainement un être des plus paradoxale. Elle est la fille la plus bruyante de sa classe, mais elle est aussi celle qui reste le plus seule. Elle peut rester des heures sans bouger dans une même pièce ou courir pendant des heures dans des lieux différents. Elle peut être invisible juste sous le nez de ses amis, et être plus que visible à des inconnus. En fait, Esfir avait le don de se faire discrète lorsqu'elle n'en savait rien. Parce qu'évidement, ses gênes lui ordonnaient d'être à la vue de tous.

Elle ne fut pas vraiment surprise de ne pas croiser Aleksi. A vrai dire, elle l'oubliait plus le temps passé, si bien que lorsqu'il débarqua et l'emprisonna dans ses bras, elle ne comprit pas vraiment ce qui lui arrivait, avant d'entendre sa voix. Elle hocha donc la tête dans le vide, sans même faire attention à lui. Elle enregistra docilement les informations dans sa tête, et le laissa partir sans un regard. Elle ne fit pas plus attention au regard surpris des personnes de sa classe. Elle ne pouvait même pas comprendre qu'ils puissent être surpris. Surpris de voir Esfir avec quelqu'un ? De voir un géant ? De voir un géant violet avec une naine rose ? Surpris de voir un câlin homme femme ? Contact ? Il y avait tant de chose pouvant surprendre ses gens... Mais elle ne s'en préoccupa pas. D'ailleurs, c'était à peine si elle avait remarqué quelque chose... Elle se fichait bien de l'avis des gens, de toute façon.

La jeune fille ne fut donc pas plus surprise de voir qu'Aleksi était arrivé avant elle - en même temps, ce n'était que le portail de l'école -, et qu'elle le retrouva très vite. En même temps, il était tout seul, bien plus grand que les autres, et avec cet air de béatitude silencieuse qu'elle trouvait énervante. Elle se demandait toujours comment il pouvait avoir l'air si calme. Haussant les épaules, la jeune fille se précipita vers lui. Elle slaloma entre les personnes présentes, et laissant de côté les expressions offusquées elle rentra impitoyablement dans Aleksi. Puis, elle sauta en arrière et enfonça son doigt dans le ventre du géant.

"J'ai cru que j'allais devoir t'attendre, franchement !"

Et elle lui décocha son regard de fausse colère, ses sourcils froncés et ses joues gonflés d'air. Bien sûr, Esfir n'avait pas que le physique d'une gamine de dix ans. Elle l'était réellement. Et pas par jeu, pas pour profiter de son physique. Simplement parce qu'elle n'avait pas grandis et qu'elle n'en avait pas plus envie que cela. Elle se sentait très bien comme elle était.

"Tu as encore grandis ! SI ! SI ! SI ! Avant, j'étais presque aussi grande que toi !"

Joli rêve que voilà.

Ce n'est pas qu'Esfir avait du mal, ou était contre les relations à distance. Elle se fichait bien de l'amitié, qu'elle soit à distance ou non. Pour elle, il n'existait pas vraiment d'amitié. Elle ne comprenait rien à ce genre de pratique. Elle n'avait pas encore prit conscience de l'essence même de l'amitié. Voilà pourquoi le fait de parler d'amitié à distance n'avait rien d'intéressant pour Esfir. Elle s'en fichait autant que de l'amitié. Elle n'avait jamais eu vraiment d'amis, parce qu'elle n'en comprenait pas l’utilité. Elle s'en fichait pas mal, elle n'avait jamais eu besoins de cela, n'avait jamais été en manque. Elle ne voyait pas en quoi il serait intéressant d'être ami avec un être humain. Les êtres humains étaient inutiles, et il n'y avait jamais rien de plaisant dans l'amitié. Rien qui vaille le coup, selon Esfir. Elle n'avait besoin de personne. Elle aimait être et agir seule. Elle l'avait toujours était, et elle ne voyait pas pourquoi cela changerait maintenant. Elle était très bien ainsi. Et puis, elle n'aimait pas devoir être avec des adultes, des grandes personnes se sentant toujours plus responsable et plus intelligent qu'elle. Et leur tirait la langue, à eux. Il n'y avait personne de meilleur qu'elle, et elle le savait bien. Elle ne voyait pas pourquoi elle devrait dépendre des autres. Elle avait toujours été autonome, et elle ne comptait pas changer cela. Elle ne voyait pourtant rien de néfaste dans l'amitié, elle n'en comprenait juste pas le sens.

En ce qui concernait la question d'amitié ou non avec Aleksi, la réponse était simple. Elle s'en fichait. Elle s'était résolu à la conclusion suivante, elle resterait avec le pinceau géant tout le temps, jusqu'à ce qu'elle se lasse et qu'elle le laisse. Ce n'était pas plus compliqué que cela. Il n'existait pas d'amitié selon Esfir, et Aleksi n'en serait pas l'exception. Tant qu'elle ne voyait pas l'utilité de l'amitié, cela serait ainsi. Elle ne devait rien à Aleksi, et il ne lui devait rien non plus. C'était magnifique.

La jeune demoiselle secoua la tête pour montrer qu'elle n'était pas d'accord. Elle n'avait pas peur d'être en retard. De toute façon, il n'existait pas de retard chez Esfir. Elle avançait à son propre rythme, et ne pouvait donc pas être en retard dans son propre jeu. D'ailleurs, Aleksi avait de la chance. Esfir était dans un jour, ou dans un court moment, où son rythme était celui des gens odrinaire. Où une minute c'était soixante secondes, et qu'une heure c'était soixante minutes. Elle aurait très bien pu arriver avec beaucoup de minutes de retard, juste pour observer un envole de coccinelle et selon elle, elle n'aurait pas été en retard. Ou elle aurait aussi très bien pu oublier. Car Esfir avec cette faculté d'oublier certaine chose, sans même s'en apercevoir. C'était une possibilité. Il ne fallait pas mettre en doute les capacités de la jeune fille.

"Et ben moi, si ! Je suis fâchée !"

Et avant qu'elle puisse en rajouter, elle se prit un doigt accusateur dans le ventre. Elle tenta donc de se venger, en prenant le dis doigt dans ses propres mains et essaya de le mordre. Ce fut en vain, puisque le pinceau géant était plus rapide qu'elle. Il avait reprit ce qui lui appartenait d'un mouvement simple qui prit Esfir au dépourvu. Il était plus fort, plus puissant qu'elle. Bien sûr, tout être pourvu d'une force supérieur à celle d'une mouche était plus fort qu'Esfir. Elle n'était pas reconnue pour sa force légendaire. Mais elle ne le reconnaissait pas pour autant et en voulue donc d'autant plus à ce grand dadais.

Voulant donc se venger, elle le suivit. Ils l'éloignèrent de l'académie pour se dirigeaient vers le centre ville. Esfir, elle, essaya de trouver une action vengeresse. Elle se tortura l'esprit calmement, avant de trouver une idée géniale. Elle chercha à écraser les pieds d'Aleksi. Elle se plaça donc derrière lui, et essaya tant bien que mal de le poursuivre de ses petits pieds. Elle avait du mal à suivre les grandes enjambés du jeune homme. Elle parvint enfin à marcher de son minuscule pied sur celui d'Aleksi lorsqu'il reprit la parole. Elle haussa les épaules, éludant la question.

Reprenant la route, elle se plaça maintenant devant lui, fière de ne pas traîner derrière, malgré sa petite taille et l'envie du géant de la laisser derrière, bien entendu. Brusquement, elle s'arrêta, cherchant à ce que le jeune Nordique lui rentre dedans, dans son minuscule petit corps. Puis, elle se tourna, et plaqua ses mains dans son dos. Elle prit un air angélique, et c'est comme si une auréole brillante venait d'apparaitre au dessus de sa tête. Elle prit donc la parole.

"J'essayais de faire comprendre aux mollusques de ma classe combien les scarabées sont jolies. Mais ils sont tous plus grand que moi, alors je suis monté sur la table, c'était plus commode."

La jeune fille fit alors un tour sur elle même. Elle s'avança directement vers Aleksi,et posa ses deux mains sur ses genoux, c'était un endroit facilement atteignable pour elle. Elle leva sa tête et montra ses crocs au jeune homme. Puis, elle refit un tour sur elle même et fit deux pas en arrière, afin de pouvoir avoir une vue sur l'expression d'Aleksi. Elle le regarda un instant avant de hausser les épaules. Observer les humains n'avaient jamais parut intéressant à Esfir. Elle ne les aimait pas, et se fichait donc bien de savoir quel était leur comportement. Elle répondit donc honnêtement à Aleksi.

"J'ai été trop surprise pour réagir. Mais si je n'avais pas entendu ta voix, je t'aurais foutu une belle baffe. On ne touche pas ma grandeur impunément."

Et elle tourna la dos à Aleksi, afin de montrer son impatience. Ils allaient le voir, ce film, oui ou non ?

[C'est la deuxième fois que je fais cette réponse. Tout à l'heure, j'ai eu un bug internet et j'ai tout perdu >_> Je suis moins contente de cette réponse là, mais bon, j'ai eu le courage de la refaire, alors je me pardonne xD Désolée du retard, aussi.]

Et comme l’avait deviné Aleksi depuis longtemps, il n’y avait pas d’amitié forcée avec Esfir. Elle lui accordait jusque là de l’attention, mais il n’était pas sûr que cela soit toujours ainsi. Esfir n’aimait pas qu’on l’oblige, à quoi que ce soit. Elle avait l’esprit de contradiction, et parfois, juste pour ne pas faire comme les autres font ou lui demande, elle faisait le contraire, quoi qu’elle n’en éprouve pas le moindres intérêt, sauf peut être celui de ne pas faire comme les autres. Toutefois, en règle générale, Esfir n’en avait que faire. Elle ne recherchait pas l’originalité, puisqu’elle ne cherchait pas la reconnaissance des autres. Elle ne vivait que pour elle et qu’importe les humains. C’était d’ailleurs peut être parce qu’elle n’appréciait que très peu le genre humain qu’elle menait avec satisfaction la voie de la désobéissance. Ou plutôt, de la rébellion passive. La jeune fille n’aimait pas les ordres, et elle ne les écoutait donc pas. Elle ne se forçait jamais à faire les choses et dès que quelque chose lui déplaisait, elle le disait, le criait et refusait à tout jamais de le refaire. C’était aussi simple que cela.

« Expérience personnelle. »

Et comme si c’était une réponse tout à fait compréhensible et au combien coûteuse pour la demoiselle, elle fronça les sourcils tout en haussant les épaules et en soupirant. Comment faire plusieurs gestes lourds de significations sans aucun lien au même instant. Digne de la princesse des insectes Esfir. Selon elle, il n’y avait rie d’autre à expliquer. De plus, elle ne se sentait pas si fâché que cela. Juste pensive devant la poussée de croissance du géant, et sa façon de la regarder de haut. Elle n’était pas une enfant, elle n’était pas petite et il n’avait aucun droit de la regarder. Personne n’en avait le droit. Tous les humains étaient inintéressants, et rien d’inintéressant ne pouvait s’approcher d’elle. C’était ainsi. Elle avait fait quelques exceptions pour Aleksi parce qu’il n’était pas trop grand lorsqu’elle était sur ses genoux, mais à cet instant, il l’était de trop, et elle n’était plus sur ses genoux. Et elle avait remarqué combien même sur une table leur différence de taille était énorme. Elle ne pouvait pas se laisser faire. Elle montrerait à Aleksi pinceau géant violet ce qui attendait toute personne pensant se moquer d’elle et de sa taille, non mais !

« Arrête de faire semblant, tu as eu mal ! Ah ça non je ne crois pas monsieur le pinceau ! Aucun humain ne peut être plus parfait que moi ! Et comme tu n’es pas moi puisque c’est moi qui le suis, tu ne peux être parfait. »

Logique.

Elle se retourna, et la boucle se boucla. Peut être que montrer ses jolis dents, qui n’avait rien d’une agression pour elle, puisqu’elle étudiait les insectes et non les animaux réveilla Aleksi. Elle n’en savait rien, parce que tout ce qu’elle faisait était simplement des pulsions tout à fait anodines qu’Esfir laissait filer. Elle ne cherchait pas à paraître normale ou encore moins à être polie, respectueuse et dans les cadres. Elle se fichait bien des conventions, et vivait comme elle l’entendait. Voilà pourquoi se comporter comme un animal n’avait rien de dégradant ou d’agressif. Elle avait juste envie de faire ça, elle avait juste envie de montrer à Aleksi qu’elle n’était pas qu’une petite poupée rose et elle avait juste envie de se venger de la taille du géant. Alors, peut être que oui, finalement, il y avait une touche de violence dans tout ça. Mais pour tout dire, Esfir n’avait pas le don de la violence, et de toute façon, elle n’aurait pas pu si elle l’aurait voulu vu sa taille et sa force. Elle n’avait pas le don pour la violence, et n’était aucune tourné vers. Elle avait beau avoir des paroles cinglantes et non mesurées, elle n’était pas violente en geste. C’était une aristocrate distinguée, voyons. Couverte de boue et reniflant tel un chien, certes, parfois, mais une aristocrate distinguée tout de même. C’était une reine, une princesse, la meilleure personne qui soit.

« Parce que selon toi je suis comme n’importe qu’elle autre fille d’ici ? Je ne suis pas d’ici, et je ne suis pas n’importe qui ! Comment ça ! Tu ne m’en crois pas capable ! Sombre crétin, tu crois franchement que je me laisserais faire par n’importe qui ? Bien puisque tu ne peux pas simplement accepter cette exceptionnelle gratitude de ma part, tu n’en as plus le droit à partir d’aujourd’hui ! »

La jeune fille fit la moue, fronçant les sourcils jusqu’à se creuser de belles rides. Elle croisa ses bras sur sa maigre poitrine, serrant ses mains contre ses bras à s’en faire blanchirent les jointures et rougirent la peau. Elle tourna ostensiblement le dos à Aleksi tout en gonflant ses joues. Elle boudait, complètement vexée devant l’attitude du géant. S’il devait y avoir une personne mécontente, c’était elle. Elle avait acceptait de le voir, et il se promenait de ses trente six mètres de haut, la plongeant dans une espèce de complexe d’infériorité. Il la prenait de haut, lui imposant un rythme de marche et de conduite qu’elle n’aurait jamais pris elle-même. Et c’était lui qui était en colère ? C’était lui qui osait se plaindre d’une quelconque attitude ? Elle n’en croyait pas ses oreilles. Vraiment pas. Il y en avait sur cette Terre qui ne savait vraiment pas où était leur place.

« Quelqu’un d’autre, quelqu’un d’autre, comme si quelqu’un d’autre pouvait venir me voir. »

Murmura t-elle pour elle-même, comme si l’idée d’Aleksi était tout bonnement idiote. Et pour Esfir, elle l’était. Elle ne voyait pas qui pouvait venir la voir. Elle avait même assez peu compris la présence d’Aleksi, parce que selon elle il n’y avait pas de raison de le revoir. Mais il était là, et elle avec lui. Alors, quelqu’un d’autre ? Mais qui ? Ce n’était pas comme si elle connaissait du monde, comme si elle voulait faire ami-ami avec les autres. Elle était très bien toute seule. Elle avait toujours était très bien toute seule. Alors pourquoi attendrait-elle quelqu’un d’autre. Et même quelqu’un, tout simplement.

Aleksi n’en avait peut être pas idée. Il ne pouvait pas deviner combien la jeune fille était solitaire et qu’elle aimait être ainsi. Il ne devait pas comprendre que son allusion n’avait même pas effleuré la jeune fille, qu’elle n’avait aucun amoureux, et qu’elle n’en avait pas besoin, qu’elle n’y accordait aucune importance. Sauf qu’il devait se souvenir de leur dernière discussion. Celle où ils n’étaient jamais tombés d’accord. Celle où Esfir disait haut et fort que jamais elle ne serait amoureuse, que cela ne servait à rien et ô combien il lui paraissait improbable qu’un humain puisse la satisfaire. Elle avait toujours dit que les humains étaient moins bien que le reste, et qu’elle n’accordait aucun intérêt aux méandres incompréhensibles des relations humaines.

Même en voyant le cinéma devant elle, Esfir ne se dégonfla pas, dans tous les sens du terme. Elle resta prostrée de dos à Aleksi, ne cherchant même plus à être méchante. Elle n’était pas triste ou quoi que ce soit. Elle était plutôt décontenancée et vexée. Elle ne comprenait pas les paroles d’Aleksi, elle n’aimait pas ce qui se passait. Elle n’était plus maîtresse de la situation et comme à chaque fois qu’elle ne comprenait pas quelque chose, elle avait envie de se mettre en colère. Mais elle avait déjà épuisé un stock de rage, et elle n’allait pas en ouvrir un nouveau tout de suite. Sauf si Aleksi ne faisait aucun geste, ou s’il en faisait un de déplacé. Le pire dans cette histoire, c’est qu’Esfir n’avait sans doute pas le sang froid du Nordique. Même pas un dixième de son sang froid d’ailleurs. Esfir était la figure même des pulsions à vifs, le contraire total de la tempérance. Elle était un feu à découvert, un torrent d’eau qui ne faiblissait jamais. C’était le pire moment qu’il pouvait y avoir dans leur relation à peine entamée. Qu’Aleksi attende d’Esfir un contrôle d’elle qui n’existait pas. Esfir ne comptait pas. Esfir vivait. Il n’y avait rien à calculer ou à réfléchir. Agir, toujours.