₪ Académie Keimoo ₪

In a decade, will you be there ?
 
AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment : -50%
-50% Baskets Nike Air Huarache Runner
Voir le deal
69.99 €

 

 Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]

Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité
Anonymous



Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] Empty
MessageSujet: Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]   Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] EmptyDim 6 Déc 2009 - 23:33

La vie est un livre suffisant.


Où avait-il bien put lire ça ? Cette phrase ne lui était pas inconnue, au contraire. Elle lui rappelait de nombreux souvenirs enfouis, des heures de lecture sans fin et une histoire fascinante. C'était le genre de réplique qui plaisait à Lukas. Simple, facile à retenir, mais pleine de sens. Derrière ces six mots se cachait un message digne des érudits de la Grèce antique. Tiens, peut-être l'avait-il vu dans un livre de philosophie. Non, ce n'était pas possible. Ce genre de livres était ennuyant, voir soporifique. Jamais il n'aurait daigné ouvrir pareil ouvrage. Il s'imaginait bien déceler cette citation au beau milieu d'un roman à l'histoire fictif, avec une couverture vieille et écornée. Les pages devaient être pliées de tous les côtés et la 124ème tenait encore par on ne sait quel miracle. C'était ce genre d'ouvrage qu'il s'amusait à parcourir afin de voir la science des jours anciens, où les auteurs pensaient à leurs convictions avant celles de leurs lecteurs. Poésie ? Non plus, trop tragique et gorgé de phrases assez longues pour vous étouffer pendant la lecture. Mais dans ce cas, quel pouvait bien être ce livre aux paroles si sensées ? Il fallait qu'il le retrouve, coûte que coûte. Le jeune homme désirait ardemment se souvenir de cette oeuvre qui lui permettrait de revivre des moments de son passé. Tout ce que sa mémoire lui accordait de ne pas oublier était cette phrase, ainsi qu'un visage. Pas moyen de faire le lien entre les deux, il ne s'en rappelait pas. Et pourtant, ce n'était pas faute d'essayer. Résigné, Lukas abandonna sa chambre où quatre livres gisaient sur son bureau. Il prit la direction de la bibliothèque, sa dernière solution.
Depuis qu'il était à Keimoo, l'adolescent n'avait pas souvent mit les pieds dans cet endroit bourré d'étagères et de manuscrits poussiéreux. La première fois qu'il s'y était rendu, il avait été déçu de voir la collection d'oeuvres proposées. Dans sa résidence, on comptait environ une soixantaine de ces merveilles d'écritures. Et cela bien sûr, en restant dans les romans classiques de l'époque des Lumières, du romantisme ou encore de l'humanisme avec des représentants tels que Rabelais, Victor Hugo et Diderot. A l'époque, avec miss Anna Birtwistle comme châtelaine, c'était le minimum à posséder. Les oeuvres contemporaines, sauf rares exceptions, n'étaient pas les bienvenues dans la bibliothèque personnelle de la famille. Et c'est pourquoi, ayant baigné dans des livres n'allant pas au delà du XXième siècle, le comte avait été surpris de voir ce qu'on pouvait trouver au Japon. Quant aux romans nippons, qu'avaient-ils d'extraordinaires ? Les histoires de samouraï étaient inintéressantes. Voilà donc dans quoi sa belle-mère avait grandit ? Il comprenait donc mieux pourquoi la littérature anglaise n'était pas son point fort.

Traversant les innombrables couloirs qui menaient à la dite bibliothèque, Lukas essayait toujours de se remémorer d’autres détails à propos de ce mystérieux ouvrage. Par habitude, il tournait une carte entre ses doigts sans même la regarder. Jamais il ne l’aurait fait tomber, trop habile de ses doigts pour ça. Aujourd’hui, il était habillé comme à son ordinaire. Chemise blanche et veston noir, il avait néanmoins abandonné le ruban bordeaux pour laisser son col entr’ouvert. En bas, il portait un pantalon de tissu noir classe et des chaussures de la même couleur en cuir. Rien de bien extraordinaire chez lui. En à peine quelques minutes, il arriva à destination et franchit les portes de l’immense salle. En ce samedi après-midi, peu d’élèves venaient se réfugier en ce lieu de calme et de silence. Rapidement, l’anglais en compta environ douze qui étaient trop occupés pour remarquer son arrivée. La seule qui le vit fut l’éternelle bibliothécaire, toujours fidèle à son poste. Cette vieille femme, pas loin de la retraite, était celle qui était de garde le samedi une fois sur deux. Elle avait des lunettes carrées de grand-mère, la peau ridée et un style vestimentaire qui aurait fait pâlir n’importe qui. Le stéréotype basique du métier. Derrière son ordinateur dont l’écran se reflétait sur ses verres de monture, elle épiait discrètement chaque personne qui traversait son champ de vision. Effrayante… toutefois, malgré ses réticences, le lycéen vint à sa rencontre. Saluant brièvement son aînée d’au moins une cinquantaine d’années, il n’attendit pas longtemps avant de lui poser la question qui lui brûlait les lèvres.


- Pardonnez-moi de vous importuner mais je suis à la recherche d’un livre qui se trouverait peut-être ici.
- Comme tout le monde mon petit, répliqua la vieille femme sans décoller le nez de son écran. Quel auteur ?
- Je ne sais pas… Justement je…
- Le nom de l’œuvre ?
- Je n’en ai pas la moindre idée. Seulement, il y a une phrase dont je me souviens qui pourrait peut-être vous être utile.
- Désolée je ne peux rien pour toi. Tu vas devoir te débrouiller tout seul. Tu n’as qu’à essayer du côté des romans.

Conversation terminée et ce, en un temps record de trente-huit secondes. Aussi sèche que sa peau, la bibliothécaire n’était pas passée par quatre chemins pour lui faire comprendre qu’il la gênait. Soupirant d’un air dédaigneux, Lukas n’attendit pas son reste et s’éloigna du bureau de cette pie acariâtre. Il allait trouver ce qu’il cherchait, et ce, sans l’aide de la sorcière. Etait-ce parce qu’il ne venait pas souvent ici qu’elle le méprisait autant ? Peu importe, c’était vraiment le cadet de ses soucis. Se faire apprécier par une vieille un peu aigrie n’était pas sa priorité absolue. Au moins, il savait maintenant que quémander l’aide de cette femme s’avérerait aussi inutile que de demander au premier idiot du coin. Reprenant son attitude indifférente, il se dirigea tout de même vers les étagères prévues spécialement pour les romans. Il passa devant la poésie sans s’arrêter, résolu à retrouver l’objet de ses désirs. D’un geste vif, il rangea la carte du Joker qui ne lui était plus d’aucune utilité désormais. Tandis qu’il marchait d’un pas assuré vers le fond de la bibliothèque, il sentit peu à peu des têtes se tourner dans sa direction. C’est bon, on s’était enfin rendu compte de sa présence. Même s’il s’en serait bien passé, il fit comme si de rien n’était. Accorder son attention aux regards ne ferrait que le ralentir, si ce n’était carrément l’ennuyer. Il n’avait pas que cela à faire aujourd’hui. Et lorsque Lukas s’était fixé un but, rien ne pouvait le détourner de son objectif. C’est pourquoi les autres pouvaient bien attendre ; il était occupé pour le moment.

*- Voyons voir… Où pourrais-je commencer mes recherches ? Je n’ai pas envie d’y consacrer tout mon après-midi non plus, pensait-il en fronçant légèrement les sourcils.*

Une main sur le menton, le jeune comte s’arrêta devant la dernière étagère près du mur. Mieux valait réfléchir avec logique pour gagner du temps. Premièrement, il était certain que le manuscrit qu’il voulait était daté du XIXème siècle grand maximum. Lentement, il longea l’étagère en scrutant la couverture des différents ouvrages. Rien ne lui convenait, rien n’attisait en lui la flamme d’un quelconque souvenir enfoui. Toutes ces reliures lui paraissaient d’une banalité affligeante comparées au fruit de ses désirs. Les plus élégantes semblaient d’une simplicité sans égal et celles aux couleurs chatoyantes étaient tout bonnement fades. Plus il parcourait le passage exiguë, plus Lukas se rendait compte d’une chose : son roman à lui n’était pas là. Instinctivement, il se remémora la phrase qui le hantait alors que ses yeux bleus cendrés perdaient toute leur lueur. Il s’était sûrement trompé. Frustré, il s’accouda violemment contre l’étagère branlante. Cette dernière, sous la force du mouvement, ne supporta pas le choc. Soudain, elle se mit dangereusement à basculer vers le mur. Le jeune homme se redressa aussitôt alors qu’un cri lui parvenait de l’autre côté. Les livres se renversèrent sur le sol, heurtant au passage un corps qui leur répondait par des protestations on ne peut plus humaines. Se rendant compte de son erreur, l’escrimeur n’attendit pas une seconde de plus pour venir en aide à la personne coincée entre l’étagère et le mur. Il s’engouffra dans la mince ouverture qui risquait de se refermer à chaque instant en fonction de l’équilibre du grand meuble de bois. Accroupie entre les romans ouverts, une adolescente se protégeait la tête avec ses bras. Sans hésiter, Lukas lui tendit la main afin de la sortir de ce mauvais pas.


- Suis-moi si tu ne veux pas finir écrasée, déclara-t-il en faisant allusion à l’étagère qui allait sûrement glisser d’une seconde à l’autre.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] Empty
MessageSujet: Re: Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]   Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] EmptyMer 16 Déc 2009 - 20:44

La jeune fille était étendue sur son lit, à plat ventre. Elle balançait ses jambes dans un rythme régulier. Un rythme lent, apaisant. Devant elle, des feuilles sous un cartable. Des feuilles aussi blanches que la neige, dénudées de son écriture. Un manuel était ouvert un peu plus loin, mais elle n'y avait toujours pas posée les yeux. Elle tapotait son crayon dans un geste sec, rapide. Tout le contraire du rythme de ses pieds. C'était deux extrémités sur la même petite personne. Un petit soupir. La concentration n'était pas avec elle aujourd'hui. On aurait dit que tout s'était ligué contre elle, ayant comme objectif de la taquiner inlassablement, sachant pertinemment qu'elle ne pouvait faire qu'une chose : étudier. Et se priver de tout le reste. Pas d'amis, pas de balade, aucune distraction. Vraiment, c'était une torture.

Petit coup d'oeil à son portable, puis elle détourna rapidement la tête. Non, elle ne devait pas succomber à la tentation. Elle se tapota les joues, reprit son crayon et continua de fixer sa feuille. Injustice, sa mère semblait toujours trouver le moment exact pour l'enfermer dans sa chambre avec comme mobile qu'elle devait étudier. Tiens, en parlant de sa mère, elle pouvait entendre celle-ci rire avec ses copines au rez de chaussé. Deuxième soupir. Injustice. Et voilà dans quoi ses pensées étaient perdues. Elle était partie. Bonjour la lune, comment ça va ? Elle aurait pu rester là un bon moment, à fixer ses feuilles. Enfin, c'était le plan jusqu'à ce que son chat, Picasso, décide qu'il sautait sur le lit. L'effet fut immédiat. Un objet non-identifié apparaît soudainement devant ses yeux et la demoiselle se redresse soudainement, laissant échapper un petit cri. Une main sur le coeur, elle cligna quelques fois des yeux, réajustant sa vu pour se rendre compte que l'objet était son chat. Poussant un petit soupire, elle baissa la tête.

Si son chat se mettait de la partie, il était hors de questions qu'elle étudie dans ses conditions. Le mieux était encore d'aller à la bibliothèque à Keimoo. Au moins là, elle ne se ferait pas déranger. Prenant son chat, elle posa celui-ci sur l'autre extrémité du lit, avec l'ordre de ne pas bouger. Refermant son manuel ainsi que son cartable, elle les glissa dans son sac près du lit. Une fois sceller, elle l'enfila et descendit au rez de chaussé. Sa mère était au salon, en compagnie de ses amies du boulot. Ça faisait un moment qu'elles ne s'étaient pas réunies. S'approchant de sa mère, Inoe lui expliqua la situation. Elle sembla comprendre et lui permit de s'y rendre. À la bibliothèque point, lui avait-elle dit précisément. Opinant, elle passa le bonjour aux autres femmes et se dirigea vers la porte d'entré. Enfilant un manteau ainsi que des petits bottillons, la demoiselle salua pour une dernière fois tout le monde et sortit.

C'était un bon samedi après-midi. Vraiment. Même la météo était contre elle. Prenant une bonne bouffée d'air, la jeune fille débuta sa balade en direction de Keimoo. Celle-ci fut bien moins longue qu'elle ne l'aurait cru d'ailleurs. Faut dire qu'elle était d'humeur assez rêveuse aujourd'hui. Bien vite, elle avait atteint les grilles menant à la prestigieuse académie. Peu de personnes étaient présentes et la grande et cour était vide. C'était étrange d'observer cette grande étendue habituellement peuplé d'étudiants. Reprenant le pas, la demoiselle pénétra dans l'école et avança jusqu'à son casier. Retirant son manteau et troquant ses bottillons pour des chaussures, elle saisit son matériel et referma son casier.

La bibliothèque n'était pas un endroit très fréquenté d'habitude. Ses occupants étaient, pour la plupart, des internes de l'académie. Un endroit calme. Il n'y avait aucun doute. Ici, personne ne s'énervait, criait à tue-tête ou riait à gorge déployée. Repérant une petite table près d'une fenêtre, Inoe s'y dirigea silencieusement, saluant poliment la bibliothécaire au passage. Aucune réponse. Il n'y en avait jamais. S'installant confortablement, elle ouvrit de nouveau son manuel ainsi que son cartable. Saisissant un crayon, elle résuma son activité, c'est-à-dire : fixer ses feuilles. Autre soupire. Pourquoi n'arrivait-elle tout simplement pas à s'y mettre ? Partout où elle allait, elle y trouvait une distraction. Et dans ce cas-ci, il s'agissait de tous ses livres qui n'attendaient que son inspection. Un petit coup d'œil ne ferait de mal à personne, non ?

Elle regarda autour d'elle un moment. Personne ne lui prêtait la moindre attention. À croire qu'elle vérifiait les alentours avant de commettre un crime. Pinçant les lèvres, Inoe attendit quelques instants pour finalement se relever. Parcourant les étagèrent, elle s'arrêta devant celle des romans. Lentement, ses yeux parcouraient les livres, s'arrêtant parfois sur des titres accrocheurs ou des couvertures lui plaisant. Il n'y avait rien de vraiment intéressant. La jeune fille avait déjà parcouru les romans. C'était sans doute par ennui. Une raison de ne pas retourner à sa table. Un bruit sourd retentit. Est-ce que ça venait de l'autre côté, elle ne saurait le dire. Ah, tiens, c'était elle ou l'étagère basculait ? La demoiselle, perplexe, releva la tête juste à temps pour voir un livre venir à sa rencontre.

Réflexe humain, Inoe se protégea la tête avec ses bras, tombant à genoux, laissant échapper un petit cri suivit de plaintes de douleurs alors que les livres se faisaient de plus en plus nombreux. Et heureusement qu'elle s'était recroquevillée puisqu'un grincement se fit entendre et lorsqu'elle rouvrit les yeux, l'étagère se trouvait beaucoup plus près d'elle qu'au départ. Son petit coeur battit la chamade sou l'adrénaline. Elle avait faillit avoir une étagère dessus. L'expérience n'aurait sans doute pas été très amusante. Et la voilà qui restait là, figé par la soudaine peur de ce qu'il aurait pu arriver. Une voix la ramenait sur tête et la demoiselle détourna les yeux pour voir un jeune homme qui lui tendait sa main. Ses paroles n'étaient pas tombées dans l'oreille d'une sourde et ce n'est qu'après une brève hésitation que la japonaise saisit sa main et avec son aide, se dégagea de ce mauvais pas.

Son sauveur avait eu raison, car quelques secondes suivant sa sortie, l'étagère ne tint plus longtemps, s'écrasant sur le sol. Inoe elle, tenait toujours la main du garçon, observant l'endroit où elle se trouvait il y a quelques instants. Ce n'est que la bibliothécaire qui reprit rapidement ses esprits, accourant vers les deux jeunes gens. À en croire son expression, ses yeux exorbitée et à la veine gonflée sur son front, elle n'était pas très contente.


« Mais qu'est-ce qui se passe ici !? Vous deux, qu'avez-vous fait !? Aucune importance, je ne veux pas le savoir, vous allez me nettoyer ça sur-le-champs ! »

Quoi, mais elle n'était qu'une pauvre victime ! Cependant, rétorquer ne semblait pas possible maintenant puisque la vieille était déjà partie à son bureau, les surveillant avec attention. La jeune femme, elle, fit une petite moue. Finalement, étudier ne semblait plus si ennuyant. Mais bon, elle n'allait tout de même pas le laisser seule à nettoyer le tout. Il l'avait aidé à sortir de là, elle pouvait au moins faire cela. D'ailleurs, il faudrait peut-être le remercier. Et lâcher sa main.

«  Ah, merci beaucoup. Un peu plus et je finissais là-dessous. »

Petit sourire, maintenant, il fallait se mettre au boulot.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] Empty
MessageSujet: Re: Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]   Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] EmptySam 19 Déc 2009 - 0:09

Apparemment, les paroles de Lukas eurent l'effet escompté car l'inconnue ne se fit pas prier. Elle empoigna aussitôt la main qu'il lui tendait et accepta de se faire traîner en avant. Mettant toute sa force dans ce simple geste, il se recula et s'empressa de tirer l'adolescente de ce mauvais pas. Grâce à sa musculature honorable au niveau des épaules, il parvint facilement à écarter la demoiselle de tout danger, tel le prince charmant venant à la rescousse de sa princesse. Ses mouvements furent très coordonnés car dès que plus personne ne fut piégé sous l'étagère, cette dernière s'écroula violemment. Des dizaines d'oeuvres classiques et contemporaines étaient écrasées par le poids du meuble. Un véritable gâchis. Tant de romans abîmés en un instant, cela dépassait l'entendement. Tout cela à cause d'un geste un peu trop brusque, de surcroît. Les deux jeunes gens en restaient cois, tétanisés à l'idée qu'une seconde plus tôt, ils étaient encore à l'endroit précis où l'étagère s'était abattue. De son côté, l'anglais sentait toujours une main dans la sienne, ce qui lui échappait. Il aurait bien retiré ses doigts si la demoiselle avait décidé de faire de même. Mais sans qu'elle s'en rende sûrement compte, elle gardait sa main en otage, ne semblant pas décidée à la libérer. Il ne comprenait pas l'intérêt de conserver ce contact entre eux maintenant qu'elle ne risquait plus rien. Le comte préféra ne pas lui en faire la remarque et de toute façon, on ne lui en laissa pas l'occasion. Tout deux n'eurent pas le temps de souffler car cela avait provoqué un vacarme sans nom qui avait tôt fait d'alerter la maîtresse des lieux. Elle se précipita vers eux comme une véritable furie, totalement incontrôlable. En digne vieille femme acariâtre, elle commença par les incendier pour ensuite les obliger à réparer les dégâts. Elle trouvait inutile de demander des détails sur ce qui s’était passé. A croire que si un élève était resté coincé, cela ne l’aurait pas importunée. Comme cette bibliothécaire pouvait être effrayante… En à peine deux minutes, elle s'éloigna en maugréant quelque parole incompréhensible. Lorsque sa silhouette maigrichonne ne fut qu'un vague souvenir, la tension chuta considérablement. Lukas aurait bien aimé marchander avec cette pie mais elle était déjà trop loin. De plus, le regard furieux qu'elle leur avait adressé eût suffit à l'en dissuader. Autant ne pas l'énerver plus, au risque d'être renvoyé de la bibliothèque jusqu'à la fin de l'année. Il soupira donc faiblement, comprenant qu'il était coincé entre ces murs pour une bonne partie de l'après-midi. Fort heureusement, il n'avait rien prévu en ce samedi ensoleillé. Toutefois, l'idée même d'être cloué ici l'irritait, par question de principe.

Or, il n'avait pas le choix. Il était désormais impossible de quitter la salle sans que la surveillante le remarque. S'il se faisait prendre, ranger ces livres paraîtrait amusant comparé à ce que la sorcière lui réserverait. Ainsi, il se résigna à son sort. En un mouvement synchronisé, les deux adolescents finirent par rompre le lien qui les unissait l'un à l'autre. L'idée les avait traversé au même instant, ce qui permettait de ne contrarier personne. L'escrimeur en fut soulagé, pouvant enfin retrouver ses deux mains. Il se tourna aussitôt vers l’étagère dévastée qui gisait à terre. Autour d’elle, les différents manuscrits étaient éparpillés un peu partout. Nombre d’entre eux n’avaient pas supporté le choc et s’en voyait défigurés avec une reliure pliée voire arrachée en deux parties distinctes. Pour n’importe quel amoureux de la littérature, ce spectacle était tout bonnement affreux. Toutefois, malgré cela, le meuble ancien semblait avoir tenu le coup. A vue d’œil, il ne présentait aucune fissure majeure et aucun de ses rayons ne s’était déboîté de l’armature. Tandis qu’il observait ce massacre, le jeune homme entendit l’inconnue lui parler. Il inclina la tête dans sa direction tout en lui adressant un sourire magnifique, comme à chaque autre fille qu’il croisait
.

- Tout le plaisir est pour moi, répondit-il dans un japonais assez approximatif. Je ne pouvais décemment pas rester sans rien faire alors que quelqu’un avait besoin de mon aide. Mais si j’étais toi, j’attendrai avant de me remercier. En réalité, c’est de ma faute si l’étagère est tombée.

Le jeune homme avait prit la liberté de tutoyer son interlocutrice sans même s’en rendre compte. C’était un luxe qu’il se permettait de prendre avec les lycéens, trouvant cela inutile de jouer sur les formalités. Il avait comprit, avec le temps, que les gens d’ici préféraient tutoyer sans état d’âme leurs semblables. Au départ, cela l’avait choqué. Venant d’un milieu extrêmement aisé, il était habitué à vouvoyer les personnes qu’il croisait. Dans l’aristocratie anglaise, c’était le minimum de la politesse. Toutefois, ici, les adolescents ne partageaient pas les mêmes mœurs. Il s’y était donc habitué, n’ayant d’autre choix que de s’adapter à ce langage qui lui paraissait grossier. Ainsi, il avait été clair avec la demoiselle en face de lui. Lui être reconnaissant pour ce qu'il avait fait était inutile. Non seulement c'était un geste tout à fait normal, mais en plus il était la cause principale de ce drame. Deux raisons qui ne permettaient pas de tels remerciements. Reportant ainsi son attention sur le champ de bataille, Lukas se pencha pour ramasser un ouvrage à ses pieds. En lettrines appliquées était écrit le titre « Princesse de Clèves », rédigé par Madame de La Fayette. Ce roman lui disait quelque chose, il lui semblait qu’il en avait déjà vu la couverture quelque part. Alors que son regard parcourait la couverte qui avait résisté, par on ne sait quel miracle, à la chute fatale, une image vint s’insinuer dans ses pensées. Il revit, l’espace d’un instant, sa mère parcourir ces mêmes pages, assise sur un canapé composant l’un des salons de la résidence familiale. Une fois ce flash-back terminé, il reporta son attention sur l’adolescente qui était toujours à ses côtés, lâchant au passage le bouquin. Lui avait-elle dit quelque chose entre temps ? Pas moyen de le savoir. Toujours était-il qu’elle ne paraissait pas prête à le laisser ranger l’étagère tout seul. En effet, l’ignoble bibliothécaire, dans sa grande injustice, lui avait aussi assigné cette tâche fastidieuse qu’alors qu’elle n’y était pour rien. De toute façon, depuis son poste de vigie, la vieille aigrie les observait à travers ses lunettes qu’elle ne cessait de remonter sur son nez. Bien qu’il eût le dos tourné, l’anglais put aisément deviner la mine sinistre qu’elle devait afficher. Elle les avait repérés et n’allait sûrement pas les lâcher du regard tant que l’étagère ne serait pas à nouveau sur pied. Ces deux yeux de souris braqués sur lui, le comte avait du mal à rester impassible. Il se retint de lui renvoyer cette expression menaçante qui ne les quittait plus car cela n’aurait fait qu’aggraver la situation.

*- Puisqu’il n’y a pas d’autre solution, autant se débarrasser de cette corvée au plus vite, pensa-t-il en s’approchant du meuble allongé sur le dallage.*

Même si l’étagère était aisément tombée, il n’était pas certain qu’elle se remette debout avec la même facilité. Après tout, bien qu’elle soit branlante et vieille, elle n’en restait pas moins lourde. C’est pourquoi, sans attendre plus longtemps, Lukas retroussa les manches de sa chemise blanche. Par chance, le meuble avait légèrement glissé et s’était écarté du mur, de quoi lui permettre de se frayer un chemin. Il ne se gêna pas pour marcher sur les différentes œuvres qui tapissaient le sol, ayant d’autres choses en tête à ce moment là. Il réussit à placer ses doigts sous l’étagère qui était calée par une pile de trois romans d’au moins huit cent pages. Il put aussi la soulever avec moins de difficultés qu’il ne l’avait imaginé. Dès que le meuble fut à nouveau sur pied, il remarqua qu’il y avait quatre rayons vides. Chaque roman était classé dans un ordre précis, disposé en ordre alphabétique selon le nom de l’auteur. Décidément, cela risquait de prendre énormément de temps. Pour plus de sûreté, l’adolescent préféra rester calé contre le mur pour retenir une éventuelle seconde chute. On était jamais trop prudent. Puis, sans attendre sa nouvelle partenaire de rangement, il entama sa tâche pour le moins ennuyante. Jetant un rapide coup d’œil au nom de l’auteur, il tombe sur un texte de Victor Hugo et son célèbre « Les Misérables ». Dans cette histoire, c’était plus eux les misérables. Condamnés à ranger les ouvrages de la bibliothèque… ce n’était vraiment pas une partie de plaisir. Se décalant sur la droite, il décida de poser le roman sur le second rayon. Il réitéra ensuite son geste pour deux autres œuvres, trois, quatre, et ainsi de suite. Au final, Lukas commença enfin à offrir son attention à la pauvre inconnue qui devait se charger du classement par sa faute
.

- Au fait, mon nom est Lukas Birtwistle, du club d’escrime, finit-il par préciser pour engager poliment la conversation. Je suis désolé que tu sois obligée de faire ça aussi.

A travers les rayons vides, il observa son interlocutrice de ses yeux bleus cendrés. Jamais auparavant il ne l’avait croisé dans l’Académie. Peut-être était-elle nouvelle, ou simplement discrète. Toujours était-il qu’il avait beau essayer de se rappeler, il était persuadé de ne pas avoir remarqué son visage jusqu’à aujourd’hui. Etait-ce la même chose pour elle ? A moins que sa popularité se soit déjà chargé de ce détail.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] Empty
MessageSujet: Re: Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]   Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe] Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Une étagère s'écroule sur la lectrice de ses livres [Inoe]
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
₪ Académie Keimoo ₪ :: Archives Rp's :: Rp's 2012 et antérieurs-
Sauter vers: