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 Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]

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MessageSujet: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyLun 16 Nov 2009 - 21:15

    La nuit était tombée sur Keimoo. Seul le vent demeurait éveillé, giflant les murs de l’académie avec mélodie. C’était cette mélodie qui l’avait poussée à être ici, c’était indéniable. Debout, immobile, ses cheveux roux tombant sur ses épaules, sauvages, donnant à son regard quelque chose de fragile, de félin. Des larmes très fines coulaient sur ses joues pâles, tandis qu’elle avait entre ses mains tremblantes des pointes blanches, chaussures qui n’étaient autre qu’un souvenir enfoui, précieux, qui ne devait pas être là.



    C’était le vent qui l’avait amenée à être ici. Cette mélodie harmonieuse et violente, qui l’avait tirée de son sommeil agité, qui lui avait donné froid et chaud en même temps, qui avait fait naître en elle des cauchemars inévitables. Elle s’était débattue longtemps avec ses couvertures avant de se lever, faible, la tête dans le brouillard. Dieu seul sait pourquoi elle s’était vêtue, comme ça, de cette robe d’un blanc immaculé, relativement courte, pas très adaptée à ce temps, à cette température. Sa camarade de chambre l’avait observée bouger lentement, fluidement, enfiler ces collants opaques, sortir de la pièce avec une peluche sous un bras, des chaussures de l’autre. Pour une fois que l’adolescente dormait à l’internat, il fallait qu’elle se comporte bizarrement, qu’elle maugréé dans son sommeil, qu’elle dérange. Et elle dérangeait, c’était évident, car elle ne prenait même pas le soin de fermer derrière elle, laissant une lumière très fine s’infiltrer sur le visage de sa colocataire Barbie qui n’apprécia pas le geste. Le couloir sous ses pieds était froid, gelé, mais ne la réveillait pas. Elle semblait guidée par la musique, cette musique, et ses doigts vinrent bientôt heurter le mur puis, plus doucement, l’effleurèrent seulement. Elle avançait, plongée dans ce rêve éveillé, ses pupilles claires étant à demi fermées. Morphée l’attirait, la poussait, bien qu’elle ne marchait pas vite. Engoncée dans sa crise de somnambulisme, elle eut vite fait d’atterrir là, dans cette salle sombre, à peine submergée par les rayons de la lune. Il était à peine onze heures du soir, elle venait de se réveillée, surprise par un objet qui la fit trébucher.



    Ellen était tombée, lâchant tout ce qu’elle avait dans les mains. Lorsqu’elle prit conscience de son accoutrement, elle gémit, passant ses mains fébrilement sur ses jambes, comme si cela allait éteindre le cauchemar. Mais la nostalgie l’emporta sur la peur, si bien qu’elle s’empara très vite de ses pointes, dans le but de les lancer au travers de la pièce, avant de partir…Seulement, lorsque ses doigts rencontrèrent la soie des chaussures, elle frémit, de longs souvenirs lui vrillant la tête. Elle se voyait, plus jeune, cependant de la même taille. Le sourire aux lèvres, les cheveux bien lisses et bien attachés, une charmante jupe en tuile, faisant des courbettes, balançant ses jambes, tournoyant d’une manière si fine et gracieuse que tout le monde savait qu’elle allait devenir belle, douée…Une future danseuse étoile, comme elle l’avait toujours désiré. Et puis, il y avait ce déchirement, ses hurlements horribles, l’effroi qu’elle avait éprouvé. Un grand vide qui mit fin à sa carrière. Ellen lâcha ses pointes, fit quelques pas en arrière. Hésitante, elle les observait d’un air méfiant. Et, contre toute attente, elle se pencha, s’assit. Etirant ses jambes devant elle, elle avança doucement ses bras vers ses pieds courbés qu’elle réussit à atteindre avec une facilité déconcertante, ce qui lui extirpa un sourire d’enfant. Elle le fit plusieurs fois, fière, mais son regard croisa la cicatrice qui ornait sa cheville. Une longue cicatrice mal réparée omniprésente.

    La jeune femme attrapa ses chaussures qu’elle enfila rapidement – l’habitude qu’elle n’avait pas perdu, c’était un peu comme le vélo : ça ne s’oubliait pas. Simplement, elle se releva avec une extrême prudence, les morceaux de bois au bout de chacun des chaussons lui pesant indéfiniment lourds au bout de son corps. Elle fit quelques pas, marchant avec méfiance, puis décida d’utiliser une table redressée contre le mur comme appui. Posa sa main tremblante sur le pied de celle-ci, définitivement bien accrochée par des lanières, et souleva sa jambe sur le côté, de manière à pouvoir attraper son talon au creux de sa paume. Malheureusement au bout de quelques secondes de maintiens, elle sentit comme une sensation désagréable au ventre. Une sortie de mini déchirement qui la fit gémir, replacer sa jambe correctement. Elle n’était pas assez entraînée, elle en faisait trop. Mais ce n’était pas ça qui allait arrêter son délire nocturne, dicté par le vent lui-même, par la folle négligence de l’adolescente qui devait encore être sous l’emprise du rêve. Mais non…c’était bien elle, qui se dressait sur la pointe des pieds, courbant son dos vers l’avant en une révérence digne d’une princesse. Un sourire délectable aux lèvres, elle se complaisait dans cette retrouvaille avec la danse, l’adrénaline lui donnant une force bien supérieure à celle des souvenirs.

    Mais le bonheur ne pouvait pas durer. Alors qu’elle tenta de tourner sur elle-même, jetant sa jambe sur le côté pour lui donner de l’élan et allongeant les bras gracieusement, elle sentit une résistance effrayante venant de sa cheville blessée. Paniquée, elle cessa tout mouvement, s’écroula par terre tant l’arrêt était inopiné. Apeurée, elle se mit à pleurer, perdue. Ses mains tremblantes se mirent à défaire rapidement les lacets de ses chaussures, avant de balancer les dits chaussons au travers de la pièce. Elle ramena ses genoux contre elle, les serrant avec force, ses doigts tâtant légèrement sa cheville récalcitrante, qui lui avait causé tant de peine, et qui semblait décidée à réitérer la souffrance. Le cœur battant à cent à l’heure, elle tenta de réguler sa respiration, sans quoi elle allait défaillir. Mais après tout, elle était résistante. Alors elle fut surprise par des bruits, qui lui venaient de la porte entre ouverte sur une silhouette qui découpait à peine les rayons de la lune. Ellen se releva à la hâte, chancela une seconde, avant de se tenir droite et immobile, plissant les paupières, et tenant étroitement entre ses doigts sa peluche.


    « Qui est là… ? »
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyDim 22 Nov 2009 - 20:33

Longeant les couloirs sombres de l'académie, les doigts effleurant le mur sur sa droite, Tsumi déambulait, tête baissée. Il avançait d'un pas lent, hésitant, perdu, comme si ses jambes n'avaient plus la force de le tenir debout, comme s'il n'était plus qu'un fantôme de lui-même. Ses cheveux courts semblaient humides ; il venait une fois de plus de les couper à l'aide d'un cutter. Son regard n'était qu'une expression du vide. Et il déambulait encore.

Plus ses pas le portaient en avant, plus la racaille s'efforçait de ne pas tomber. Il sentait les coups, mais refusait de se laisser aller, refusait de se faire emporter par un vent violent et indéfinissable. Jetant un regard vitreux vers ses pieds nus, il ne vit rien se mouvoir ; pourtant il savait qu'un vent le poussait à continuer son chemin. Il n'avait qu'à s'adapter. Cependant, son corps n'en pouvait plus de cette mascarade, de cette force puisée dans le mensonge, et ses jambes fléchirent. Se laissant tomber, telle une feuille morte quittant l'arbre qui l'avait créée, Tsumi ne chercha même pas à se sauver de sa propre chute. Soudain, un cri. Une forme fantomatique, mais cependant matérielle le temps d'un instant, le redressa. La silhouette disparut, vivace et sans nom, bien que le grand brun eut reconnu le visage fin d'Akemi. D'une main, il chassa vivement cette ombre. Non, il ne voulait plus en entendre parler, plus jamais. C'était sa faute, il n'avait qu'à ne pas l'aimer. La racaille lui avait-elle demandé un quelconque amour ? Oui, dans un sens...

Quelques pas encore, et une silhouette. Différente de celle du joli blond ; plus forte, plus violente. Elle le poussa à terre, mais derechef, Tsumi ne se laissa pas faire. Elle volait telle un spectre, se matérialisa ensuite vers le couloir en obstruant la fine lumière qui s'y filtrait. Des cheveux rouges, du sang dans la main. Le sourire mauvais du garçon se murent en un rire affreux, mais ce furent des pleurs d'enfant qui résonnèrent dans l'esprit de la racaille. Chasser ces cris était futile. En posant son regard vide sur la main du garçon, il la vit se refermer sur quelque chose d'ensanglanté dont les gouttes remontaient à lui. Il fixa ensuite sa poitrine ; elle était aussi sanguinolente. Riant aux éclats, Tsumi mourut...

Pour revenir à la réalité.

Ce fut alors en sueur que la racaille se redressa vivement dans son lit. Instinctivement, Tsumi posa sa main gauche à l'emplacement de l'organe vital qui tapait violemment contre sa poitrine, et se griffa la peau. Grimaçant, il ferma les yeux et retira ses draps pour s'assoir au bord de son lit. La tête entre ses mains, le jeune homme tentait tant bien que mal de retrouver une respiration calme, régulière. Pourquoi se faisait-il poursuivre par ces fantômes ? Ses rêves empiraient au fur et à mesure qu'il les faisait, sans pouvoir rien faire pour les arrêter. Cela faisait des semaines qu'il n'arrivait plus à dormir d'un sommeil apaisant. Depuis qu'il s'était enfermé malencontreusement dans le stade avec Sora, Tsumi était troublé. Avec Wunjo, ça passait mieux, l'alcool aillant effacé une partie de sa mémoire malgré que la majorité de ses souvenirs soient encore présents dans son esprit. Kodaa... Décidément, les beaux garçons savaient faire tourner la tête à Keimoo.

Tsumi se mordit la lèvre, haineux envers lui-même. Plus de six mois qu'il avait déménagé dans cette ville, et pas moyen de s'éloigner psychologiquement d'Osaka. D'un geste vif, il se leva de son lit, enfilant un pantalon sauvagement jeté à terre au milieu d'autres vêtements de jeunes hommes, et s'engouffrant tout aussi rapidement dans le couloir ; la porte légèrement entrouverte laissa un filtre de lumière qui réveilla un de ses camarades de dortoir, lequel se retourna et se rendormit aussitôt. Il était torse nu, et venait de subir les effet d'un vent automnal et glacial. « Bientôt l'hiver » pensa-t-il en frissonnant.

Sans aucun moyen de se réchauffer, mais refusant de faire demi-tour, Tsumi se mit à errer dans les couloirs de l'académie. Il se frottait de temps à autre les bras, sourcils froncés, cherchant à fuir ces démons cauchemardesques qui ne cessaient de le poursuivre. Ah, qu'ils étaient obstinés ! Heureusement pour lui, le grand brun trouva de quoi se réchauffer et calmer son anxiété croissante : un paquet de cigarettes « emprunté » à un élève de première année - ben quoi ? Il était nécessaire de montrer aux petits jeunes qu'ils l'étaient trop pour se permettre de se balader avec la clope au bec - et son briquet habituel. Allumer la cigarette prit un instant d'immobilité à Tsumi, qui reprit sa marche lentement, savourant l'amer senteur du tabac. Il finit enfin par faire attention à son environnement ; les portes menant aux salles de classe s'étendaient jusqu'au bout du couloir.

Lui qui ne venait que peu par ici, quelle ironie du sort.

Soudain, des bruits étranges attisèrent sa curiosité. Tsumi se dirigea alors à pas de loup au fond du couloir, vers une porte ouverte, de plus en plus excité au fur et à mesure que ses pas le portaient en avant. Aussi curieux que de coutume, il jeta un oeil rapide dans la pièce ; une personne y était. La racaille ne put voir que son dos, mais sa longue chevelure cuivrée lui indiquait que l'inconnu était du sexe opposé. Vêtue de blanc et de douceur, elle dansait. Intrigué, quoique déçu car il espérait démasquer un quelconque réseau d'élèves rebelles à l'académie, le jeune tatoué s'adossa simplement à l'encadrement de la porte, jambes croisées, et consumait sa cigarette. Etrange scène, qui ne lui était au fond pas tellement inconnue.

Mais alors qu'il se torturait les méninges, la jeune fille vacilla et tomba à terre, jetant ensuite violemment ses chaussures de danse à travers la salle. Surpris, Tsumi ne bougea pourtant pas d'un pouce, en fin observateur. Sanglotant, elle ramena ses genoux à elle et semblait anéantie par sa chute. Une mauvaise chute peut-être, qui sait ? Cependant la racaille en avait assez d'espionner. Ecrasant sa cigarette contre sa paume, il frotta ses deux mains pour chasser le mégot légèrement fumant ; suivirent ensuite des applaudissements qui mirent la demoiselle sur le qui-vive. Réaction normale, il n'y avait pas de doute.

Se redressant vivement, la rouquine demanda au garçon de décliner son identité. La peluche entre ses doigts serrés fit sourire Tsumi, qui s'avança dans la pièce, fermant la porte au passage. Un petit claquement résonna ; ce fut le seul bruit qui brisa les quatre minutes de silence. La politesse n'était pas le fort du jeune tatoué, loin de là. Il glissa son regard sur la danseuse, de la tête aux pieds, sans complexe. Ce ne fut qu'après qu'il finit par ouvrir la bouche, adoptant un ton fluide.

    « Tu ne me connais pas ? Pourtant, il me semble t'avoir déjà vue quelque part... »
Son sourire, contrairement à l'habitude, n'exprimait non pas du sadisme mais une curiosité compatissante. Curiosité, car il était persuadé de l'avoir déjà vu quelque part, et ce n'étaient pas dans ces couloirs trop anguleux, mais aussi compassion parce que sa chute lui avait rappelé son rêve. La lune baignait de ses rayons argentés les yeux de la demoiselle, illuminant les larmes qui perlaient en leurs cils. Où était passé son aversion pour la gentillesse ? Son sadisme le rattrapa bien assez tôt.

    « C'est mignon, tu ne me connais vraiment pas ? Ça ne te dit rien ? »
Il indiqua de l'index le tatouage noir et imposant sur sa joue gauche. Ce genre de détails ne semblent pourtant pas passer inaperçu. Coupant l'inspiration de la jeune fille, il enchaîna.

    « Tadashii Tsumi. Et à qui ai-je l'honneur, ma jolie ? »
Il s'inclina légèrement, imitant ces aristocrates français du XVIIIe siècle, son sourire carnassier toujours accroché à ses lèvres, mais se redressa bien assez vite, s'approchant de sa nouvelle proie avec envie. Peut-être son nom n'était pas si important au fond, s'il en finissait rapidement avec elle.

    « Et que fait une aussi frêle demoiselle toute seule dans la nuit ? Tu danses pour attirer les loups ? Si c'est le cas, je dois dire que tu es en passe de réussir. Je n'aime pas laisser les filles comme toi aussi tristes dans leur solitude. »
Façon de parler, on allait dire. Sur ce, Tsumi leva une de ses mains vers le visage de la danseuse, décrocha une des larmes perlant au bout d'un cil à l'aide de son index. Il fixa ensuite d'un regard absent cette gouttelette. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas pleuré pour quelqu'un, ni même pour lui-même.
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyMar 8 Déc 2009 - 19:28


    La peluche serrée contre son ventre, Ellen paniqua quant à cette nouvelle présence, qui l’avait sûrement vue danser, tomber : dans une panique qui ne lui était généralement pas propre, surtout en public. Elle jeta alors un regard sur le côté, constatant que ses chaussons de danse avaient trouvé refuge derrière une table cassée, là où on aurait pu les retrouver sans les chercher vraiment. Ce fût presque avec soulagement qu’elle se détendit un peu, rassurée. Elle n’aurait pas pensé que ses vêtements étaient terriblement trop explicites de la situation, d’autant que cette personne, encore voilée par la nuit, l’avait sûrement épiée. Son regard brillant encore des larmes se posa alors sur la silhouette.

    Ellen vit un déluge de fumée opaque s’émaner des deux paumes frottées l’une contre l’autre de l’inconnu qui se tenait là. Une désagréable odeur de tabac vint chatouiller ses narines, tandis qu’un applaudissement régulier et traître bourdonnait dans ses oreilles, telle une alerte : la voix de la raison lui soufflait de ne pas rester ici, en la compagnie fâcheuse d’un jeune homme qui, dans l’ombre, ne lui offrait aucune possibilité de mise en confiance. De longues minutes de silence, pendant lesquelles l’adolescente réfugia son cœur contre sa peluche aux couleurs immaculées, qu’elle tenait désormais fortement serrée sur sa poitrine – à défaut de pas avoir d’autre issus pour manifester son inquiétude et sa peur. L’inconnu fit quelques pas, dévoilant son visage tatoué à la lune. Un visage aux traits fins et harmonieux, une chevelure de jais et un regard pénétrant ; mais, ce qui lui paru le plus familier furent les dessins noirs qui envahissaient les contours de ses joues, ses pommettes, le chiffre adroitement tracé sur sa joue gauche. Elle déglutit difficilement, laissant libre cour à l’inconnu de lui répondre. D’après lui, il fallait qu’elle l’ait déjà connu avant : un brin de narcissisme qui lui fit comprendre qu’elle faisait face à la classe rebelle de ce lycée. Il l’avait déjà vue quelque part ? Keimoo était un labyrinthe de couloirs où ils auraient pu facilement se croiser. Il souriait, d’un de ces sourires qu’elle redoutait le plus. Partagée entre l’envie de penser qu’il souriait vraiment, sincèrement, ou plutôt par sadisme gourmand, l’adolescente fit un pas en arrière alors qu’il lui montrait de l’index son tatouage.

    Il lui sembla qu’à cet instant on aurait pu profiter de son absence psychologique pour lui faire n’importe quoi : elle n’aurait pas affiché de résistance. Ce jeune homme lui disait en effet quelque chose : ces tatouages, elle les avaient déjà vus. Un jeune homme dans une foule aux regards brillants, qui l’observait, elle, Ellen, danser pour un ballet renommé. Elle avait alors, à l’époque, un sourire d’enfant, un sourire de future danseuse étoile ; aux côtés des plus grands ; sur la scène des plus grands. Le lac des cygnes n’avait plus aucun secret pour elle. Cependant, si elle avait accepté d’aller à Keimoo pour ses études, il y avait une circonstance atténuante à cela. « A mon avis, personne ne te reconnaîtra là-bas. Tu seras connue pour tes photos, pas pour le reste, ma chérie. », telles disaient les paroles si rassurantes de son père, à l’aube de sa rentrée au lycée.

    « Je ne t’ai jamais vu avant, nulle part ailleurs qu’ici à cet instant précis. Désolée. »

    Une telle affirmation, sortie de la bouche d’Ellen, sonnait réellement comme un mensonge. Son regard fuyant et son attitude maladive le prouvaient. Elle se reculait légèrement, au fur et à mesure qu’il avançait, craignant un geste déplacé, une attitude négative face aux balivernes de la jeune fille qui, pourtant, avait prit pour habitude que de raconter n’importe quoi à qui croyait déjà la connaître, et à qui cherchait à se faire reconnaître. Dans le meilleur des cas, elle s’était trompée sur toute la ligne, ses souvenirs s’étant mêlés aux cauchemars de cette soirée horrible où elle avait failli perdre l’usage de sa cheville. Le dénommé Tsumi finit par se présenter, lui faisant une courbette digne des plus grands des anciennes époques. Lorsqu’il se redressa, elle manqua de suffoquer tant ce sourire lui faisait peur. Néanmoins, il attisait en elle un effroyable sentiment de curiosité. La pâleur de ses traits trahissait un manque de sommeil, ainsi que les très légères cernes qui soulignaient son regard gourmand. Il y avait sur ce visage une peinture avare de sentiments refoulés ; effrayant et mystérieux, presque attendrissant. Si elle s’était écoutée, elle aurait levé sa main tremblante, rassemblé tout son courage pour poser le minimum de sa chaleur sur la joue de cette brute épaisse. Instinctivement, elle songea que cela aurait fait une magnifique photographie, extrêmement expressive. Si bien que sa voix fut la première à manifester son trouble, légère et frissonnante : emprunte d’une certaine méfiance mais d’un attrait peu commun.

    « Ellen Shizen... »

    Elle se rendit compte, à ce moment-là, qu’elle avait donné sa véritable identité, alors qu’elle aurait pu jouer sur les sons. Ellen pouvait se transformer en Ella, tandis que Shizen se serait vêtu d’un petit Shelzon. Un nom américain qui aurait probablement brouillé toutes les pistes. Bien que le jeune homme ne semblait pas plus que ça attiré par ce qu’elle était, mais plutôt parce qu’elle représentait actuellement pour lui : une proie idéale. Cet endroit était propice au viol. Voir au meurtre. Mais bien sûr, elle se faisait des films. Enfin…elle l’espérait.

    « Et que fait une aussi frêle demoiselle toute seule dans la nuit ? Tu danses pour attirer les loups ? Si c'est le cas, je dois dire que tu es en passe de réussir. Je n'aime pas laisser les filles comme toi aussi tristes dans leur solitude. »

    La main qui se leva vers elle la fit d’instinct fermer les yeux, comme si elle avait eu l’impression qu’elle allait se faire violenter. L’adolescente frémit cependant en sentant à peine le doigt de Tsumi effleurer ses cils pour recueillir une larme, légère et fine, n’ayant pas eu le courage de plonger sur les sillages des autres, le long d’une joue humide et luisante. Elle ouvrit brusquement ses yeux d’azur, croisa celui du jeune homme : il y avait là un tel mélange de sentiments qu’elle ne su que dire. Elle éleva son bras, repoussa la main de l’inconnu et le poussa de ses deux paumes contres son torse. Se frayant un chemin entre les tables et lui, sa cheville lui résista, désirant alors rester là où elle était pour se tordre, dans les règles de l’art. Elle s’affala par terre, à genoux, une main tenant fermement ce pied récalcitrant, cette douleur palpitante. Elle se sentait si stupide, si énervée !

    « Laisse-moi tranquille, je n’ai pas besoin de ta pitié, va voir ailleurs, je ne suis pas la bonne proie ! »

    Elle s’aida du mur pour se relever, prenant soin de ne pas trop s’appuyer sur ses souvenirs. Marchant à faible allure, elle s’approcha de son interlocuteur.

    « Et je ne dansais PAS ! »

    Un mensonge gros comme une maison pour apaiser cet orgueil horrible d’avoir raté ces pas, pour avoir été observée ne pas réussir, pour être prise pour l’une de ces Barbies qui pouvaient se jeter dans le lit de n’importe qui : cherchant pitié et compassion pour assouvir leurs désirs. Son ego en avait prit un sérieux coup. Boitillant jusqu’au lieu où elle avait balancé ses chaussons, elle essuya d’une paume frénétique ses yeux de nouveau mouillés. Elle comptait bien faire demi-tour et rejoindre sa chambre, le plus vite possible.
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyJeu 31 Déc 2009 - 17:35

Etait-ce la fatigue qui lui donnait cette impression, ou bien la jeune danseuse tremblait-elle de peur à la vue de Tsumi ? En même temps, se retrouver en pleine nuit face à un personnage dont la lueur argentée de la lune reflétait un tatouage et un sourire peu rassurants, ça ne donnait pas franchement un sentiment de sécurité. La racaille en était consciente, oui, mais ne s'attendait pas à des expressions si explicites de la part de sa jolie camarade ; il avait l'habitude que l'on dissimule l'insécurité et la méfiance par de l'agressivité, ce qui lui allait tout aussi bien. En réalité, tant qu'on le craignait ou qu'on l'attaquait, il trouvait cela normal ; agréable dans le premier cas, intéressant ou à taire dans le deuxième. Mais à cet instant, la frayeur qu'il ressentait chez sa belle proie ne produisait chez Tsumi qu'un sentiment proche de la surprise, bien que son but soit atteint.


    « Je ne t’ai jamais vu avant, nulle part ailleurs qu’ici à cet instant précis. Désolée. »
    « Mmh... »

La réponse de la petite brunette lui semblait un peu fade, un peu creuse. Elle semblait vouloir être convaincante, mais ne l'était qu'à peine. Pour la racaille, elle devait sans doute commencer à camoufler sa peur par du courage, ou quelque chose qui s'en approche. Il était persuadé pourtant que ce visage au teint de porcelaine ne lui était vraiment pas inconnu. Et bien qu'il l'ait déjà aperçu dans l'académie - son meilleur souvenir se rapportant à elle devait certainement provenir du réfectoire, mais ça restait très vague - il pensait bien avoir déjà vu la jeune fille ailleurs, et plus tôt aussi.

Mais il laissa bientôt aller ses réflexions, ressasser son passé n'étant pas une de ses occupations favorites. Une voix frêle le tira de ses pensées, présentant la demoiselle sous le nom d'Ellen. Elle semblait venir du vieux continent, mais le fumeur invétéré préférait ne pas se fier aux apparences. Après tout, s'il n'usait pas de quelques mots lettons, qui pourraient deviner qu'avec un nom à consonance japonaise comme le sien, son sang était moitié européen, moitié asiatique ? Ses cheveux aussi pourraient être une preuve de ce métissage honteux, mais Tsumi les coloraient très régulièrement. Il avait déjà une sainte horreur de son prénom, s'il fallait qu'en plus on découvre qu'il n'était pas un véritable japonais, mais un demi-étranger, il serait vraiment dans l'embarras. Tout en replongeant inconsciemment dans ses rêveries, il n'avait pas remarqué qu'Ellen devenait étrange, comme curieuse de le découvrir. Mais cela, il ne le découvrit qu'en plongeant son regard dans le sien.

Et là, ce fut lui qui s'effraya.
Une telle curiosité le mettait mal à l'aise, voire très mal à l'aise. Au début, il s'attendait simplement qu'elle le menace de hurler s'il l'approchait de trop près, ou alors qu'elle l'agresse pour pouvoir mieux s'enfuir. Seulement non ; Ellen le scrutait. Ses prunelles, expressives, douces et perçantes, semblaient s'immiscer en lui, transpercer son être pour tout connaître de lui. Et d'un seul coup, il eut un sursaut tout en éloignant sa main du visage de la danseuse. Dans cet élan, elle semblait reprendre ses esprits, repoussant de plus belle et la main, et le corps entier de Tsumi. Ce fut rapide. Son cerveau étant à moitié noyé de sommeil, la racaille ne réagit pas dans l'immédiat, laissant la demoiselle tenter de s'enfuir en la suivant du regard. Dès qu'elle atteindrait le couloir, il la poursuivrait. Ou pas.

Cependant, Ellen tomba à terre et s'empara de l'une de ses chevilles une fois à genoux. Elle pleurait, criait, se rebellait aussi peut-être. « La bonne proie », de la « pitié », c'était donc ça qui l'enrageait tant. Stoïque, Tsumi restait coi à l'observer se relever avec difficulté, il se sentait presque anesthésié sur place, les paupières à demi closes. Il n'empêche, une telle révolte de la part de la demoiselle était plutôt mal choisie ; ainsi déterminée, elle rendait la chasse plus corsée, ce qui attisait l'envie de Tsumi de transformer sa provocation en véritable jeu. Ellen criait, il allait la faire hurler.

Dans un soupir, Tsumi redevint Tsumi, retrouvant en un instant toutes ses capacités sensorielles. Le sourire carnassier qu'il avait abandonné plus tôt se dessina derechef sur son visage et, décidé, il s'avançait d'un pas sonore vers la jeune fille qui boitait, tout en se frottant joyeusement les mains. Les dés étaient jetés.


    « Et je ne dansais PAS ! »
    « Ah oui ? »

Une large pointe d'ironie dans sa voix, la racaille s'approchait davantage de la demoiselle en robe blanche, se glissant entre les tables comme un serpent.


    « Tut tut tut ! Ne bouge pas comme ça si tu t'es fait une entorse. Viens par ici, ma mignonne... »

Et pour accompagner ses paroles, Tsumi s'empara habillement d'Ellen, aussi légère qu'une poupée de porcelaine. Ses mains tenaient solidement son corps, au cas où elle aurait la mauvaise idée de se débattre et de faire une autre chute en moins de deux. Il s'approcha d'une table, souffla dessus pour repousser un maximum de poussière, et déposa son charmant colis immaculé dessus. Lui intimant de ne pas bouger, la racaille se mit à observer la cheville douloureuse avec des airs de médecin en herbe. Une cicatrice aux formes peu régulières striait l'articulation ; ce n'était finalement peut-être pas une entorse. Tout en continuant son examen, il prétexta que la robe d'Ellen le gênait pour pouvoir la remonter un peu. Bien sûr, le fumeur n'attendit pas l'approbation de la danseuse - qu'il n'aurait jamais eue - pour le faire. Ses jambes étaient fines, et en caressant sa cheville, Tsumi se rendit également compte que sa peau était douce, pâle. Sans doute bon nombre de Japonaises la jalouseraient pour avoir un teint aussi clair. Par contre, ça n'avait pas été une idée très... judicieuse de s'enfuir au fond de la salle pour échapper au jeune homme. A moins... Qu'allait-elle donc faire vers ses tables renversées ?

Ni une ni deux, Tsumi tourna les yeux vers ces tables en question, se redressa et s'y dirigea. En les contournant, il découvrit une paire de chaussures particulières. Un sourcil levé, il se demandait où il pouvait avoir déjà vu quelque chose d'aussi étonnant. Elles étaient dotées d'une partie en bois, sans doute signe d'une grande rigueur. Ou raideur. Et ce mot le ramena des années en arrière. Il se souvenait maintenant : C'était aux Etats-Unis, lors de vacances en famille organisées par son père. Ils avaient, à l'aide de Kinsue, son grand frère, traîné Tsumi dans cet espèce d'opéra dont il ne voulait absolument pas entendre parler. Sa rage, ses ronchonnements durant le début du spectacle, et puis finalement ce sentiment de respect face à ces artistes qui s'envolaient et dansaient sur scène, tous ces souvenirs lui remontaient en mémoire. Il n'avait pas aimé le spectacle, mais alors pas du tout, mais un visage l'avait marqué. C'était celui de la petite danseuse étoile, l'enfant-star qui gagnait de plus en plus de renommée dans la Californie. Il s'en rappelle encore, ses parents avaient chanté les éloges du spectacle pendant le reste des vacances, surtout son père qui en était ravi.

Et là, Tsumi ressentait une force étonnante pénétrer en lui. Un sourire hautement narquois s'affichait désormais sur son visage, et il montrait les ballerines à Ellen avec triomphe.


    « Alors, comme ça tu ne dansais PAS ? »

La racaille imitait le ton qu'avait prit la demoiselle pour la fin de sa phrase. Content de lui, il s'approcha de nouveau d'elle, toute trace de sommeil disparue.


    « Ben voyons ! Tu crois que je vais avaler tes salades peut-être ? »

Il se tut un instant avant de reprendre, le regard défiant celui de son interlocutrice.


    « Je me souviens de toi maintenant : Ellen Shizen, l'espoir de la danse classique ! Les photos, la danse, la gloire, l'accident ensuite à ce que je vois. Apparemment, t'as tout claqué ensuite. Dommage, non ? Ça avait pourtant pas l'air bien désastreux comme vie, et au lieu de t'en vanter, t'en as honte. Je me trompe ? Sinon, faudrait que tu m'expliques pourquoi tu te caches comme une voleuse pour tenter quelques pas. »

Le discours s'acheva presque là. Sûr qu'il la tenait entre ses mains, ou pas tout à fait vu que ce ne serait plus amusant si tout devait s'arrêter là, Tsumi restait devant Ellen, la tête penchée vers la sienne, une envie de jouer encore plus pétillante dans ses iris onyx. Tout en posant les chaussures de la demoiselle sur ses genoux avec délicatesse, ses lèvres s'approchèrent de son oreille gauche avec lenteur.


    « Qu'est-ce que tu me donnerais pour me faire taire ? Ça... ou ça... ? »

Tout en susurrant ces mots peu plaisants, Tsumi effleura d'abord les lèvres de la jolie poupée brune du bout de ses doigts, puis descendit sa main plus bas, bien plus bas, sans rompre le contact avec le corps d'Ellen.
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyVen 19 Fév 2010 - 16:20


    Boitillant jusqu’à ses chaussons de danse, Ellen n’entendit pas le jeune homme se glisser derrière elle. Ce fût lorsqu’elle se retourna qu’elle sentit ses bras s’enrouler autour de sa taille, telle les griffes d’un prédateur. Il la soulevait avec une facilité déconcertante, la tenant contre de lui de manière à pouvoir la déplacer sans qu’elle ait pu se débattre, se dégager. Toutefois, elle le repoussait, ses mains battant l’air et griffant les bras de l’inconnu pour qui elle vouait désormais une peur indomptable. Son cœur battait si fort qu’il aurait pu détruire ses côtes ; et elle redoutait réellement ce qui allait se passer par la suite. Elle imaginait, dans ce laps de temps si court, qu’il allait la violer de la pire manière que ce soit, et qu’elle aurait beau hurler, personne ne l’entendrait. La porte était fermée, la pièce isolée, et tout le monde dormait à cette heure ci. Personne ne viendrait la délivrer de ce futur enfer où elle en sortirait traumatisée…Si seulement elle en sortait. Peut être que ce jeune homme avait l’intention de l’achever pour qu’elle ne dise rien, à moins qu’il ne sache d’avance qu’elle était du genre à se prostrer dans un silence de carpe lorsque tout allait mal. Mais apparemment, elle s’était fait des films. Il la déposa sur une table qu’il avait auparavant dépoussiéré d’un souffle, avant de lui ordonner de ne pas bouger. Effrayée, elle s’exécuta, redoutant un excès de colère ou de violence de son interlocuteur. D’ordinaire, elle aurait pu se défendre. Un minimum. Mais là, elle n’avait même pas la force de pouvoir s’enfuir, à moins que l’adrénaline ne lui confère une force inconsidérable. C’était impossible, ceci dit.

    Les doigts de Tsumi se bloquèrent sur sa cheville, sur la cicatrice qui serpentait sur sa peau laiteuse. Il souleva sa robe, elle rabattit bien violemment ses mains pour la remettre en place, le regard noir, profondément choquée par son comportement, bien que calme soit-il. Il s’éloignait, tandis qu’elle restait assise sur la table, s’attendant au pire. Elle n’aurait pas eu le temps d’esquisser le moindre geste, de toute manière. Déjà, et à son plus grand damne, il avait ramassé ses chaussons, les regardait. Et alors, son regard changea. Elle fut pétrifiée de comprendre qu’il pensait, qu’il réfléchissait. Qu’il se souvenait, peut-être. Elle ne dit rien face au sarcasme du jeune homme. Son cœur battait de plus en plus vite. Elle cru qu’elle allait imploser face à la vérité qu’il déclara, et qui s’imposa à elle telle l’ampleur d’un viol. Le viol de son âme, son meurtre.

    « … Ça avait pourtant pas l'air bien désastreux comme vie, et au lieu de t'en vanter, t'en as honte. Je me trompe ? Sinon, faudrait que tu m'expliques pourquoi tu te caches comme une voleuse pour tenter quelques pas. »

    Déjà, il était près d’elle, lui susurrant un chantage monstrueux à l’oreille, tandis que sa main glissait bien trop sur le corps de la demoiselle. Figée, elle ne bougeait pas, les yeux dans le vide, le souffle coupé. Ses mains caressèrent ses chaussons, posés sur ses genoux. Elle en tritura les coutures, et brusquement, fini par repousser Tsumi d’un coup d’épaule, avant de le frapper au visage avec les chaussures, suffisamment fort pour que les objets tracent une marque rouge foncée sur son tatouage, et en lui lançant un brusque « Tais-toi ! » à la figure. Ses yeux débordaient de larmes, elle serrait les dents et crispait les tempes pour ne pas pleurer à chaudes larmes, pour ne pas se montrer vulnérable devant ce type qui, pourtant, avait trouvé la faille. Probablement la seule qui puisse la mettre dans un état pareil. Elle était choquée. Pétrifiée de peur, de regret, d’un mélange incompréhensible de sentiments emmêlés, et qui lui vrillaient le cœur. Parce que c’était bien lui, dans le public, qui l’avait observée danser. Parce que c’était cette petite tête au regard presque ennuyé qui avait été forcée à l’épier, sur scène. Elle se souvenait de lui, mais le pire était qu’il se souvienne aussi bien d’elle, de son passé. Et qu’il lui dise aussi fort, aussi méchamment, toute la réalité de ces évènements. Sa gorge se noua, elle n’arrivait pas à parler. Néanmoins, elle le repoussa de ses paumes, se mit debout, chancela mais réussi à se maintenir sur ses deux pieds. Son regard noir était posé sur lui. Elle lisait encore tout ces sentiments sur son visage tatoué, et malgré toute la souffrance qu’il lui faisait endurer, elle n’arrivait pas à pouvoir le frapper, lui hurler dessus : elle ne le connaissait pas, mais elle arrivait à cerner en lui quelque chose de différent.

    « Ne parles pas de ce que tu ne sais pas.. ! Tu es qui pour prétendre que j’ai honte ? Tu ne sais pas ce que j’ai vécu ! »

    L’adolescente souffla un coup, sa main empoignant le tissu de sa robe au niveau de son cœur, tant il lui faisait mal à battre si vite. Elle sentait le sang affluer bien trop rapidement jusqu’à son cerveau, lui donnant petit à petit le tournis. Elle n’arrivait pas à conserver son calme, et déjà les larmes coulaient sur ses joues, traçant leurs sillons sur sa peau d’albâtre. Cet inconnu avait trouvé le moyen de la réduire à un état de petite fille fragilisée par un accident, frêle, et désormais inoffensive. Elle laissa tomber les chaussons qui tombèrent par terre dans un bruit sourd puis, s’approcha comme elle le pu du garçon, qu’elle força à regarder dans les yeux. Posant sa paume sur la joue qu’elle avait elle-même abîmée, elle chercha à trouver, en toute innocence, s’il n’y avait pas autre chose en lui. Il en savait bien trop sur elle, elle pouvait se permettre une telle familiarité. Mais très vite elle s’était reculée, les larmes brouillant sa vue. Elle se sentait pitoyable.

    « Fais ce que tu veux de moi…du moment que tu gardes tout ça pour toi. »

    Sa voix était tremblante, avait perdu de son tonus, de cette vitalité qui avait toujours fait d’Ellen une personne résistante aux chocs verbaux. Elle avait baissé les yeux, soumise. Elle ne pouvait plus prétendre qu’il mentait. Il avait gagné en la blessant de telle façon qu’il pouvait l’avoir pour lui, entièrement ; même en ignorant ce qui s’était passé, ce qu’elle était devenu, et qu’elle fuyait ce passé par angoisse et par peur de l’échec. Elle avait juste honte d’avoir échoué là où elle aurait du excellé. Quand bien même elle aurait essayé de le lui avouer, ce genre de personnage ne savait pas écouter les gens, et elle supposa que sa douleur lui était jouissive, qu’il devait se sentir extrêmement supérieur. Pourtant, lui aussi devait avoir quelque chose en lui qui le blessait…il ne pouvait pas comprendre ça, seulement ça ? Il souriait, et elle n’aimait pas son sourire. Elle aurait voulu ne jamais venir ici, ne jamais succomber à la tentation de danser, encore une fois.

    Et en y repensant, il n’y avait que la vérité qui blessait, n’est-ce pas ?
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyMar 13 Juil 2010 - 23:35

Instinctivement, les doigts du garçon arrêtèrent leur course au niveau des hanches d'Ellen, glissant près de son nombril. Plus bas, en vérité, ça ne l'intéressait absolument pas. Sauf pour l'effrayer. Dans cette atmosphère tendue, aux émotions pilées, Tsumi commençait à se sentir moins à l'aise ; comme gêné. Peut-être son cauchemar le hantait plus qu'il ne le pensait, mais quelque chose le dérangeait dès à présent. Il était distrait à ce moment, et était loin de se douter que la jolie poupée de porcelaine lui assènerait un coup à l'épaule, avant de lui envoyer ses chaussures au visage.


    « Tais-toi ! »

Sous la surprise, il s'éloigna d'elle légèrement, portant une main à sa joue endolorie, mi-vexé de n'avoir rien vu venir, mi-soulagé de savoir que son œil n'avait pas été touché. Légèrement courbé, son visage grimaçait, sûr d'une chose à présent : il en avait marre. Qu'elle courre, qu'elle s'en aille, qu'elle crie sa peur ; ça ne lui plaisait plus de la poursuivre. Tsumi venait de mettre le doigt dessus, ça ne l'amusait plus de jouer la terreur. Ni avec elle, ni avec personne.

Ça devait être passager, ou pas, mais en ce moment, il était sincère envers lui-même. Et alors qu'il s'imaginait seul dans cette vieille salle de classe, il ouvrit les yeux sur le visage d'Ellen. Elle le fixait intensément. Cette fois, c'était lui qui avait peur. Peur de l'inquisition. Peur du regard scrutateur. Peur qu'elle le découvre. Peur que ce qu'il cachait sous son tatouage obscène ne le trahisse à ses yeux.

Détourne ces billes azur
De mon corps torturé.
Cachant ma vérité,
Il craint ton regard trop pur.

Tu prétends que je ne connais rien à ta honte,
Elle est pourtant seule qui, dans ma gorge, remonte.
Détache de moi tes yeux scrutateurs
Qui sont pour mon cœur un poison tueur...



Il ne s'était pas rendu compte qu'elle avait laissé ses chaussons de danse à terre. Cependant, malgré qu'il haïsse les gestes inquisiteurs, Tsumi ne bougea pas lorsque les doigts fins de la petite danseuse touchèrent son visage, lorsque sa main s'attarda sur sa joue tatouée. Seuls ses pupilles s'affolaient. Et il ne disait rien, peut-être tétanisé par ce qui semblait être du courage et de l'audace, non pas de la provocation et de l'insolence. Lui, il n'avait pas de courage. Aucun. Même pas celui de s'avouer à lui-même qui il est réellement. Tsumi, la racaille crainte et irrespectueuse. Rien ne pouvait aller dans son sens, il n'était pas authentique.

Il eut néanmoins le courage de détourner le visage, les yeux, alors qu'Ellen reculait de quelques pas. Ses larmes le dérangeaient, il aurait mieux fait de rester couché, quand bien même ses cauchemars le vidaient davantage de son énergie que le spectacle qui se déroulait dans cette salle.


    « Pfff... Ne t'inquiète pas... »

Et hop, coup de cafard. Il soupira, retrouvant son humeur première, anxieuse et amère, et fixa une table au bout de la salle pour ne pas voir la jolie brune. Elle semblait si fragile, à quoi bon la détruire plus que son accident le fit ? Sur ce point, il ne trouva aucun intérêt, aucune satisfaction à la blesser. Un sentiment nouveau. Sans doute momentané également. Un peu confus, il nicha son visage grimaçant dans la paume de sa main gauche.


    « Tu peux partir, je ne te ferai rien. Et je garderai tout ça pour moi, ce sera comme si on ne s'était jamais vus ici. »

Sa main resta sur son visage, comme un bandeau sur ses yeux pour l'empêcher de voir la jeune fille quelques instants. Finalement, étonné de ne pas entendre ses pas s'éloigner, il retira sa paume de son visage tatoué, aperçut Ellen toujours présente, soupira de nouveau en balayant la salle du regard. Il se retourna, fit quelques pas, s'arrêta et avança d'une allure vive et lourde vers la danseuse, les traits toujours grimaçants. Tsumi ne savait pas que faire, c'était très agaçant. Ses mains se posèrent sur les épaules de la fragile Ellen, les empoignant plus violemment que voulu, et la secoua légèrement, comme pour la réveiller. Il lui demanda pourquoi elle ne s'en allait pas, pourquoi elle restait là, et enfin pourquoi elle l'avait examinée comme elle l'avait fait, quelques instants plus tôt. Puis, se trouvant soudainement idiot, il la relâcha, fit quelques pas en arrière, de côté, tel un animal enfermé, paniqué, qui se rend compte que des barreaux restreignent sa force et sa liberté. La présence de la brune au teint de porcelaine le troublait. Elle réagissait si peu comme les autres filles.

Les filles, Tsumi avait pris l'habitude de les classer globalement dans deux catégories : les chattes et les chiennes. Ce n'était pas bien compliqué. Les premières ronronnaient, câlinaient, collaient, faisaient les mignonnes et baisaient. Et quand Tsumi ou elles en avaient marre de leur relation sans chemin précis, elles s'en allaient ronronner vers d'autres maîtres, traîtresses parfois, ou recevaient une pantoufle dans le postérieur par le jeune homme, laquelle les traumatisaient suffisamment pour qu'elles s'enfuient et n'aient jamais l'idée de revenir s'y frotter. Les deuxièmes étaient généralement plus hargneuses ; elles aboient, mordent à certaines occasions, attaquent et attaquent encore. Elles ont des yeux emplis de haine et de rage, attendent la moindre faiblesse de Tsumi pour mieux tenter de lui sauter à la gorge. Ce sont celles qui amusent le plus la racaille. Il se plaît à les dresser, parfois à coups de fouet, ou les agresser, les effrayer, ce qui revenait à les soumettre ou à les faire fuir sans qu'elles ne demandent leur reste. Mise à part ces deux catégories, il y avait celles dont il se moquaient éperdument, et qui se moquaient éperdument de lui, qu'il ne classait dans aucune catégorie particulière. Seulement... il ne pouvait classer Ellen ni dans le premier genre, ni le deuxième, et car elle ne lui était pas indifférente il ne pouvait la définir comme inexistante. Cela le perdait.

Là où il avait assis la danseuse plus tôt, Tsumi s'y assis à son tour. Elle n'avait pas le droit de le perturber ainsi, pas le droit de faire davantage tournoyer les pensées confuses qui s'agitaient déjà si vivement dans son esprit. Habituellement, il n'aurait pas chercher à comprendre, il aurait simplement frapper pour éloigner la source de nouveaux tourments et ce, fort loin. Mais le jeune torturé ne l'avait pas fait ; ce qui n'arrangeait pas son désarroi. Agité, le garçon finit par se lever et fondit sur la jeune fille un poing menaçant. Cependant, il cessa son geste à quelques centimètre du visage d'Ellen, pour finalement poser ses doigts sur sa joue de porcelaine.


    « Shizen... Dis-moi pourquoi, pourquoi tu t'entêtes à danser si tu as mal ? Qu'est-ce qui te pousse à avancer en sachant que ton accident a, j'imagine, brisé ton rêve ? »

Son regard était profond, et cherchait sincèrement des réponses dans les prunelles d'Ellen. Courbé pour que son visage soit à la même hauteur que celui de la jeune fille, pour qu'il y ait un sentiment d'égalité, Tsumi resta proche d'elle. Un vrai Japonais verrait irrespectueux et insolent son comportement, son attitude. Or, ce soir et ce depuis longtemps, il avait mis de côté son excès d'orgueil ainsi qu'une partie de son masque. Car il était sincère et sincère en montrant que ces questions l'importaient.
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptyJeu 22 Juil 2010 - 17:20

    Il y eut, pendant de longues minutes, un silence religieux et mal à l'aise. Ellen n'avait pas bougé de sa place initiale, les bras piqués de chair de poule, ses chaussons de danse échoués à ses pieds, et ses cheveux tombant sur ses épaules, cachant en partie son visage baissé. Une soumission indigne de sa personne, tandis qu'elle s'attendait à sentir les mains du jeune homme se poser sur elle, comme ce qu'elle lui avait permit de faire, en échange d'un silence complet sur sa véritable nature. Elle avait encore dans l'esprit son regard farouche quand elle avait posé ses doigts sur sa joue, quand elle l'avait sondé de ses yeux océan. Quand elle avait cherché à y voir quelque chose de purement sincère, et qu'elle avait presque trouvé dans son attitude. L'adolescente passa la paume de sa main sur sa propre joue, essuyant les larmes qui y étaient restées, rendant ses pommettes humides et collantes. Elle était terriblement malade de savoir qu'un type tel que Tadashii connaissait son secret, l'un des deux seuls qui avaient heurtés sa vie pour toujours. Quand elle leva les yeux, elle le vit cacher son visage dans sa main, lui laissant ainsi, de par ses paroles, le champs libre de toute évasion. C'était désormais à son tour de trouver sa faille, son point faible.

    Il n'était plus le rebelle par qui elle avait été persécutée et blessée aussi profondément qu'une arme blanche aurait pu le faire enfoncée dans son cœur ; mais il témoignait là de sa propre faiblesse, si sincère qu'elle resta plantée là, innocemment inquiète et curieuse à la fois. Son cœur fit des bonds maladroits quand il lui annonça qu'il ne dirait rien, que leur rencontre ne vaudrait rien en dehors de cette pièce. Elle ne su si elle devait le croire, mais il y avait quelque chose de perceptible dans sa voix, qui la touchait.

    Alors il s'approcha d'elle dangereusement, la saisit par les épaules, et Ellen eut soudainement peur de s'être trompée sur lui. Qu'au final, il avait changé d'avis. Qu'il allait la violenter comme dans ses pires peurs et qu'elle finirait très mal, à la fin. Mais au lieu de cela, elle eut droit à des questions pour le moins étonnantes, auxquelles elle ne s'attendait pas du tout. Pourquoi elle ne partait pas ? Pourquoi elle l'avait examinée. Elle se questionna elle-même pour finalement ne pas trouver de réponse valables. Il l'avait secouée et, choquée, elle demeura muette, se reculant tout autant qu'il s'était lui-même écarté d'elle. Il alla s'asseoir, elle considéra cela comme une nouvelle chance pour elle de partir. Mais très vite il fondait sur elle, poing levé, prêt à la frapper. L'adolescente n'eut aucunement le temps de fuir, fermant les yeux avec frayeur, ses deux mains en avant qui vinrent se poser sur le torse de Tadashii dont elle sentit la main chaude posée délicatement sur sa joue.

    Ellen tremblait, la peur s'était emparée de tous ses membres. Maintenant qu'il savait son secret et qu'il cherchait à savoir, à comprendre, elle était au summum de sa faiblesse.

    « Ellen..., murmura-t-elle. Juste Ellen... »

    Française de souche, elle n'avait trouvé que ça à dire. Au Japon, il était certain que la politesse voulait qu'on nomme les gens par leurs noms de familles, mais elle, elle n'aimait pas ça, et ce fût la seule chose qui lui sauta aux yeux. Sa voix frémissante retenait de lourds sanglots. Elle rouvrit les yeux, et croisa le regard du jeune homme. Son visage était très proche du siens, mais il ne lui sembla y voir aucune ambiguïté. Seulement cette énorme sincérité qui s'échappait de lui, cette nature étrange qu'il lui dévoilait sans se cacher. Ouvert à elle, cherchant à lire en elle, et lui permettant aussi de pouvoir lire en lui. La noirceur de ses yeux cachaient un fardeau dont elle ignorait la nature, mais elle su d'instinct qu'il était aussi lourd que son propre mal être.

    « Danser me fait mal, mais me permet de m'accrocher à quelque chose... Cette souffrance me fait avancer, même si ça me brise à chaque fois... Et je pense...que tu comprends. C'est ce que je lis dans tes yeux... »

    La demoiselle illustra ses paroles en levant doucement sa main, craignant une réaction opposée à l'attitude qu'il avait. D'un doigt, elle caressa d'abord le front, traçant une ligne sur son œil puis sur sa joue.

    « Pourquoi est-ce que tu cherches à comprendre ? »

    Ellen murmurait à peine, et avait très bien compris que chacun bouleversait l'autre, de par les attitudes étranges qu'ils avaient, selon l'un ou selon l'autre. L'adolescente, quant à elle, se savait complètement chamboulée par ce qu'elle ressentait : de la peur, de la honte, de la nostalgie, de la curiosité. Autant de choses qui se chevauchaient dans sa tête, lui donnait presque le tournis. Jamais, au grand jamais elle n'aurait pu imaginer que son escapade soit pour elle une sorte d'obligation face à la réalité de son passé. La jeune fille se mit à frissonner, le froid de la nuit mordant sa peau. Lentement, elle s'empara de la main de Tadashii, qu'elle obligea à s'agenouiller. Elle fit courir les doigts du garçon sur la cicatrice qui dominait sa cheville douloureuse, telle qu'il l'avait déjà touchée quelques minutes auparavant. Mais là, c'était différent. Il savait tout, désormais ; et elle voulait lui faire comprendre que sa recherche était inutile, et qu'il l'avait blessée au plus profond de son âme. Cette cicatrice qui en disait long sur le mal être de cette danseuse déchue qui n'avait jamais eu le courage de rééduquer son pied. Ellen baissa la tête, les larmes l'avait submergée. Elle pleurait à chaudes larmes comme jamais elle n'avait pleuré de sa vie, ne se souciant plus d'être observée.
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MessageSujet: Re: Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi]   Escapade Nocturne ... [Pv Tsumi] EmptySam 14 Aoû 2010 - 17:21

Cela faisait aujourd'hui plus de trois ans que Tsumi se sentait plus différent des autres que jamais. Depuis ce fameux jour, ce cours de Japonais dont il se rappelle encore très bien, bien que tout le travail qui s'y déroula ne l'intéressa pas plus que de coutume. Le seul souvenir marquant de cette heure fut le visage perdu d'un nouvel élève qu'il prit pour une fille ; les traits d'Akemi. Encore ce jour, la racaille était persuadée qu'il devait à l'androgyne son mal-être le plus profond, ses souffrances et ses haines les plus acerbes, et s'accusait encore de s'être fait piégé par le bel éphèbe aux airs d'ange. Tsumi lui en voulait, car Akemi lui avait révélé une part de sa nature véritable, mais monstrueuse, un recoin de son être que le jeune homme aurait tant aimé ne jamais posséder. Il souhaitait la force, la puissance, la domination sur autrui ; être admiré, être le meilleur. Rencontrer Akemi prouva à Tsumi que tout ce qu'il désirait n'était que des chimères, que des mensonges qu'il se répétait à tue-tête. Les réactions que le blond provoquait à l'intérieur de lui-même étaient le premier obstacle à combattre pour atteindre ce qu'il recherchait. Or, les affronter serait s'auto-détruire ; un cercle vicieux qui jamais ne lui permettra de devenir celui qu'il rêve d'être.

Akemi, qui l'avait inquiété, perdu, volé, torturé, ne l'avait pas un instant abandonné. Présent sans cesse pour celui qu'il aimait, présent pour celui qui ne se lassait pas de le détruire. Tsumi le considérait comme un ennemi, le pire de toutes les vipères qui enlaçaient son corps pour mieux y enfoncer ses crocs envenimés. Mais il ne pouvait pas s'empêcher de le garder à ses côtés. Le jeune androgyne lui avait révélé l'amour, et il le haïssait pour cela. Cet amour, depuis ce fameux jour où ils se rencontrèrent, le détruisait de l'intérieur, dévorait ses entrailles et son coeur. Les insultes homophobes de sa bande d'amis n'avaient rien amélioré à l'état du jeune homme, qui commença à s'auto-mutiler pour se punir de la faiblesse qui envahissait son être. Comment être fort si une part de soi vous traîne dans l'impossibilité de sortir de l'infériorité ?



<< Le Seigneur écoute les prières
de ceux qui prient pour oublier la
haine. Mais il est sourd à ceux qui
veulent échapper à l'amour.
>>
Paolo Coelho, La Cinquième Montagne.


Il avait passer des heures à prier les kamis dans le haiden du temple le plus éloigné de chez lui - pas question de se faire surprendre, écrivait assez régulièrement sur des emas à l'intention des dieux shintoïstes, concentré comme il le pouvait pour qu'ils apaisent son coeur torturé. En vain. Etait-ce parce que Tsumi portait un nom qui les irritait, le tsumi étant considéré comme la transgression de certaines interdictions, comme une action mauvaise qui fait obstacle à la communication entre l'homme et les kamis ? Ou alors était-ce parce que Tsumi ne croyait en eux qu'une fois persuadé d'être au fond du gouffre ? Peu importe les raisons, chaque jour qui naissaient voyait croître l'attirance du garçon envers l'objet de son désir. Refouler ses sentiments les amplifiant, il se mutilait autant le corps et l'esprit qu'il ne tentait de briser Akemi.



<< L'amour, le grand amour, n'a
parfois rien à voir avec la justice ;
l'amour doit souvent se montrer cruel.
>>
Eric-Emmanuel Schmitt, L'Evangile selon Pilate.


Tsumi est de ces personnes qui refusent d'entendre et de voir les vérités essentielles pour soi-même qui dérangent. Tant qu'on ne les lui enfoncent pas dans la tête, tant qu'on ne lui prouvent pas par tous les moyens qu'il a tort, il se voilera la face. Il restera aveugle. L'amour est déjà quelque chose de difficile à assumer pour lui, imaginez alors son visage lorsqu'il comprit son attirance envers les hommes. Inimaginable, dirait son auteur vénérée. Aimer, c'est le summum de l'imbécilité. On s'oublie, on s'embrouille, on ne peut vivre serein. Un cauchemar. Il a haït aimer Akemi. Tsumi haïssait tant ce sentiment qu'il se mentit, qu'il le camoufla par la violence et la colère. Jusqu'au jour où il déménagea, et que la vérité lui sauta au visage, comme un fou qui étrangle son bourreau par désespoir. Seulement, il était trop tard pour lui, tout était fini.



<< Un amour peut être guéri par un
autre amour, comme un poison est
souvent chassé par un autre poison.
>>
John Dryden.


Mais à peine les regrets et les tourments s'éloignaient de lui en même temps qu'il s'éloignait d'Osaka que l'ouragan refit surface en Tsumi. Ce n'était plus Akemi cette fois, Akemi n'était pas roux. Mais les cauchemars n'avaient pas cessé. Et à cet instant, alors que les doigts d'Ellen se posèrent sur son torse mutilé, le jeune homme enviait l'image sereine de l'océan que reflétaient les prunelles de la danseuse. Curieusement, il ne savait que faire face à elle qui lui inspirait à la fois la confiance et la crainte. Jamais Tsumi ne s'était montré aussi près de craquer devant un élève, ou même un habitant de Keimoo. Le masque haineux se fissurait, il en avait conscience ; cependant il hésitait encore à le laisser éclater ou à le réparer en quelques mots et gestes. Ils avaient l'air aussi vulnérables l'un que l'autre. La voix d'Ellen l'écarta de ses pensées dans un léger sursaut.


    « Très bien, Ellen... »

Sa voix était presque éteinte, aux allures fantômatiques. Tsumi fixait néanmoins toujours la belle demoiselle, qui semblait retenir ses larmes avec peine. Sur le coup, il se sentit coupable de sa douleur, mais ses scrupules s'envolèrent bien assez tôt ; son esprit s'interdisait de les formuler. Cependant, il s'efforça de prêter entière attention aux paroles d'Ellen. Elle trouvait qu'il pouvait la comprendre. Pourtant, il ne la comprit pas.

Ce qu'il n'arrivait pas à comprendre, c'était d'où elle puisait le courage d'avancer. Le brun ne lui répondit pas, fermant simplement ses paupières lorsque les doigts de la jeune fille effleurèrent doucement son visage. Il hocha ensuite la tête, d'un mouvement imperceptible, écrasé par sa lâcheté. Il refusait toujours de se l'avouer, mais il était lâche, beaucoup trop lâche pour porter attention à ses sentiments, pour affronter les autres au nom de ce qu'il aimait et de ce qu'il nécessitait. Au lieu de quoi, Tsumi était un mouton suivant les autres dans la bêtise. On pourrait même dire qu'à cause de ses craintes et de ses complexes, il ne marchait pas à côté de ses compagnons laineux, non, il fonçait dans le tas pour mieux les dépasser. Car il croyait que ce chemin médiocre était sa voie.

Mais l'était-il réellement ? Il était encore tôt pour en tirer conclusion.

Tsumi sut ce qu'il pouvait lui répondre. Entrouvant à demi les lèvres, s'apprêtant à formuler le pourquoi il cherchait à comprendre, il resta cependant coi. Qu'allait-il lui dire ? Pouvait-il avoir confiance en elle, et suffisamment en lui-même pour lui avouer ce qu'il ressentait ? Ellen était bien plus courageuse que lui, et ce, même si elle laissait ses larmes serpenter le lond de ses joues enfantines. Tsumi n'avait pas osé montrer ses émois et ses sentiments les plus profonds à quiconque depuis bien longtemps déjà, et avait peur de tous. Il le savait et en avait honte, persuadé qu'il ne serait jamais apprécié, admiré à sa juste valeur. Seulement, il ne se rendait pas compte qu'en enfouissant ce qui faisait de lui un être sensible comme tout autre, le jeune homme laissait fâner ce qui le rendait vrai et bon. Tout partait dans une crise identitaire infernale dans laquelle il ne se retrouvait plus. Parce qu'il se bandait les yeux et cherchait ses réponses sans désirer les voir. Au fond, peut-être qu'Ellen était une réponse à ses question ; peut-être était-elle celle qui pourrait l'aider.

Mais il en doutait. Et dans le doute, il restait en retrait, pour ne pas risquer un coup de poignard inattendu. Car oui, c'était évident, chaque poupée de porcelaine pouvait cacher ce genre d'arme sous sa robe pastel et bouffante, et la dégainer après avoir envoûté sa victime de ses grands yeux colorés. Ellen semblait brisée, elle était donc constitué d'un corps coupant, d'une âme certainement dangereuse. Mais Tsumi était excessivement las et fort fatigué de ses cauchemars perpétuels. Sortant son paquet de cigarettes de la poche de son jeans, il porta l'une des cibiches à ses lèvres, se redressant sur ses jambes devant Ellen, toujours assise. Sa main glissa de la cicatrice de sa cheville au poignet droit de la jeune fille, et la regarda d'un oeil mi-clos. Ses doigts étaient fins, à l'instar des siens, mais bien plus petits. La gorge de la racaille se nouait progressivement, sans qu'il puisse expliquer pourquoi, et il ne se préoccupait plus d'allumer sa cigarette, esquissant un semblant de son sourire habituellement carnassier. Cette nuit était terriblement étrange pour lui, dans sa tête et dans son coeur.


    « Ellen, tu es forte. C'est admirable, et je n'ai probablement pas fait un compliment pareil à quelqu'un depuis des années... Même si tu es bloquée et que tu souffres de ta situation, tu avances et reste toi-même. Je t'envie un peu... »

Sa dernière phrase resta un faible murmure, mais il était persuadé qu'elle avait pu l'entendre. Tsumi s'ouvrait à elle, il le sentait. Finalement, quite à ce que ses dires le poursuivent à Keimoo, autant aller jusqu'au bout. Il pourrait toujours se suicider pour sauver son semblant d'honneur. Mais à ce moment, il n'y pensait pas, et se fichait pas mal de ce qu'autrui penserait de ce qu'il dirait à la petite danseuse.


    « Tu sais... Mmh, non, tu ne sais pas. Je ne suis pas normal mentalement, sans doute, et la douleur me rend parfois fou de panique. J'ai peur qu'on découvre cette maladie qui me ronge, et je fais tout pour être fort malgré cette saloperie qui me traîne au fond. Je n'arrive pas à vivre normalement. J'essaie de tout faire pour oublier, éviter, fuir ou détruire cette chose honteuse qui me domine, et au final je suis dans un sale état, et tout ce que je fais est inutile. »

Il pensait à ses anciennes crises d'anorexie, à ses côtes marquées qu'on pouvait encore distinguer aujourd'hui.


    « Dans le fond, estime-toi heureuse. Peut-être qu'une opération ou de l'entraînement pourra te permettre un jour de danser et d'être la talentueuse Ellen d'avant, mais dans mon cas, rien ne changera, et tous ne peuvent que me rejetter ou avoir pitié. Même toi, tu dois me trouver pitoyable, n'est-ce pas ? »

Un immense sourire déforma son visage, lui donnant une expression plutôt agressive et désagréable. Pourtant, Tsumi n'essayait pas d'effrayer Ellen, mais plutôt à ne pas se sentir sérieux, ou se mettre à l'aise à sa façon. Car tous ces mots l'embarrassaient plus qu'autre chose, même s'il ne cessait de tourner autour du pot. C'était presque vraiment ridicule de sa part, lui qui se croyait si fort et si sûr de lui-même. Les secrets savent toujours mieux détruire qu'aider à avancer sereinement.

C'est moche.

Le jeune homme se saisit de la cigarette posée au coin de sa bouche. Il la contempla un instant, d'un air un peu dédaigneux, puis la porta au visage d'Ellen. Il ne la forçait à rien, si ce n'était à la garder là, entre les fins bout de chair rose que formaient ses lèvres. Les yeux plongés dans ceux de la poupée au teint immaculé, il dressa son index devant sa propre bouche, faisant signe à la jeune fille de rester silencieuse, immobile. Cherchant au fond de sa poche son briquet, il le porta au niveau de leurs visages, l'allumant et laissant la flamme lécher doucement le bout de la cigarette pendant quelques secondes. Lorsque les feuilles hachées rougirent suffisamment, Tsumi se redressa, la main tenant du bout des doigts le menton d'Ellen.

    « Tu ne fumes pas, apparemment ; essaie. Juste une fois. Normalement, tu vas trouver ça tout simplement dégueulasse... »

Il attendit une réaction de sa part, qu'elle exécute sa demande. Son regard couleur charbon se posa sur sa droite, un peu dans le vide, et il soupira avant de se décider à expliquer son geste.


    « Essaie. Et le dégoût que tu ressentiras pour ta cigarette, je peux t'assurer qu'il est bien maigre face au dégoût que je ressens pour les femmes, pour leur sexe. Je hais ma différence, à tel point que je me mets à tout détester, moi y compris. »

Nerveux, Tsumi laissa échapper un petit rire, qui devint moqueur. Oui, il se moquait de lui-même, tant il se trouvait idiot de confier cela à une inconnue. Une inconnue qui lui inspirait pourtant confiance...
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