Anguille sous roche N°6

Dans la pièce sombre résonnait le bip incessant d’un réveil qui affichait 6:30. Dans son lit, la jeune fille se tourna en grognant, puis tapa violemment sur l’appareil. Presque de suite après, elle replongeait dans le sommeil. Mais ce ne fut que de courte durée, car une dizaine de minutes après, une nouvelle sonnerie retentissait. Râlant de plus belle, Naoko se voyait dans l’obligation de se réveiller, même si elle aurait souhaité dormir un peu plus longtemps.

La tête dans les vapes, elle se redressa dans son lit et fixa le mur devant elle durant de longues minutes. Encore embrumée dans son sommeil, elle bailla à s’en décrocher la mâchoire, s’étira et s’extirpa avec difficulté de son lit. Enfilant ses chaussons, elle traina des pieds jusqu’à la chambre d’Oswald. Elle toqua trois fois à la porte, comme chaque matin, attendit quelques secondes une réponse qui indiquerait l’éveil de son colocataire, puis elle toqua une nouvelle fois.
N’attendant pas qu’il se lève, elle se dirigea ensuite vers sa salle de bain pour se laver le visage, et constater dans le miroir l’ampleur des dégâts sur ses traits fatigués. Elle avait peu dormi, en cause, un devoir à rendre qu’elle avait complètement oublié, et qu’elle dû faire à la hâte.

Déambulant dans les couloirs tel un zombie, elle s’arrêta dans la cuisine pour sortir le nécessaire de petit déjeuner pour deux. S’asseyant à la table du salon, elle remplit son bol de lait sans énergie, avant d’y verser une bonne dose de céréales. Ce n’est que lorsqu’elle commença à les mâchonner mollement qu’Oswald fit son apparition, en forme. Il était toujours plein d’énergie le matin, et cela ne faisait qu’amplifier la fatigue de la japonaise.

Après avoir engloutit le premier repas de la journée, elle retourna à l’étage pour se doucher et s’habiller, sans grande motivation. Elle soupira en pensant à la journée de cours qui l’attendait, n’étant absolument pas dans une optique de travail en ce jour. Mais elle se résigna, car après tout, ce n’est pas comme si elle avait le choix.

Ouvrant les volets de sa chambre, elle constata que, malgré la saison estivale, le temps n’était pas au beau fixe. Il avait plus la nuit, et le ciel était gris. L’avantage, c’est que la température allait être agréable, de moins pour la matinée. Prenant ses affaires, la jeune fille se dirigea donc vers la sortie de la maison.
S’asseyant sur la marche de l’entrée, elle enfilait nonchalamment ses converses, surprise de constater qu’Oswald était lui déjà parti. D’habitude, il était toujours le dernier, et arrivait tout juste à l’heure. Ce n’est qu’en se relevant pour regarder l’horloge qu’elle en comprit la raison. Elle était en retard.

Ne supportant pas l’idée de ne pas arriver dans les temps, Naoko prévoyait toujours pour arriver en avance. Ayant trop perdu de temps en cette matinée, elle se retrouvait trop juste pour faire le chemin à pied comme elle en avait l’habitude.
Réagissant au quart de tour, la japonaise eu l’idée de faire le trajet en vélo, ce qu’elle ne faisait jamais. Mais la situation l’exigeait. Ainsi, elle enfourcha l’engin, et d’un coup de pédale, parti au quart de tour.

Slalomant entre les autres usagers de la piste cyclable qui sillonnait la rue, Naoko restait tout de même prudente. Elle fut étonnée de la vitesse à laquelle elle arriva à destination, et se dit qu’elle devrait prendre le vélo plus souvent. Même si la marche restait son moyen de transport favori.

Descendant de son vélo, elle fit quelque pas à ses côtés pour arriver jusqu’au grand parking. De nombreux étudiants venaient avec leur propre voiture, souvent des derniers modèles au prix exorbitants. D’autres arrivaient, conduit par un chauffeur. Se dirigeant vers le parking à vélo, elle constata qu’il était bien vide, et compris que ce n’était pas le genre des gosses-de-riche de se taper une suée pour arriver jusqu’au lycée où à l’université.
Elle soupira et rangea son deux-roues dans l’emplacement prévu à cet effet. Posant son sac au sol, elle le fouilla afin de trouver l’antivol, qu’elle eut un mal fou à accrocher. Une fois-ceci fait, elle se redressa brusquement.

Dans son mouvement, elle vint malencontreusement cogner contre une personne qui passait derrière elle. Faisant volte-face, elle baissa la tête rapidement et bafouilla quelques excuses à demi-mots. Puis, relevant les yeux, elle fut surprise de constater que la chevelure flamme lui était familière. Le regard couleur prairie était le même que celui croisé il y a quelques jours dans le parc. Au début elle n’en était pas sûre, mais plus elle la croisait, et plus elle se souvenait l’avoir vu plus tôt. Au casino. Dans les jardins. En ville. Et cette toute première fois. Furtivement, sur la passerelle.

La japonaise fronça doucement les sourcils alors qu’elle regardait l’étrangère s’éloigner après ce court échange de mots. Réalisant l’heure, elle ne traina pas plus longtemps et se dirigea avec hâte jusqu’à sa salle de classe. Mais la silhouette trop mince de la jeune femme lui restait en tête. Etait-ce vraiment dû au hasard ?

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