Echange de bons procédés [PV Ethel]

Je laisse tomber ma craie dans un pot posé sur mon bureau situé à l’avant de la salle. Les lycéens reprennent rapidement les devoirs donnés pour le prochain cours dans leur agenda alors que la sonnerie retentit à l’extérieur de la salle. Le cours d’aujourd’hui s’était plutôt bien passé, j’ai été ravi de voir une majorité de la classe participer, être réactifs quand on leur posait des questions, et même venir me demander des précisions. Je crois que je peux quitter l’établissement en étant satisfait de ma performance au travail pour la journée, j’espère qu’ils ont tous bien compris les résolutions d’équations que j’ai expliquées pendant une bonne heure à mes troisième années, c’est certain que ça tombera aux examens alors ce chapitre est à maîtriser, absolument. Après m’être essuyé les mains à une serviette, je salue les retardataires qui s’apprêtent à quitter la salle juste avant moi. C’est en éteignant les lumières derrière moi que je ne peux pourrais pas être plus épanoui dans ma vie professionnelle.

Oui, j’aime mon métier, ma proximité avec les élèves, la matière que j’enseigne, mon implication pour la vie du lycée, il n’y a pas un seul moment où je me dis que j’ai fait le mauvais choix en revenant à l’académie Keimoo, de l’autre côté de la salle de classe. Le sourire aux lèvres, je passe la porte d’entrée du bâtiment et inspire l’air frais du mois de Mai. Je me sens beaucoup mieux que la semaine dernière où je ruminais parce que mes élèves de l’an passé me manquaient. La page s’est tournée, je suis désormais prêt à m’adapter à ces nouvelles têtes…et à revoir régulièrement des anciennes. C’est vrai, ça fait une semaine que j’ai revu Dawkins-san aujourd’hui, et dans une heure environ…je vais donner mon premier cours particulier en échange de taches ménagères. C’est toujours différent d’expliquer quelque chose quand on est face à une personne qu’à une classe entière, je ne suis pas vraiment stressé à l’idée de me retrouver seul avec la rouquine, mais plutôt parce que je crains d’échouer une seconde fois dans ma tentative de rendre les mathématiques compréhensibles pour elle.

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3 rue de la chance, deuxième étage, appartement 22. Quartier Hiryuu. J’ai vérifié une dizaine de fois que je ne m’étais pas trompé dans mon mail afin qu’elle ne finisse pas par s’égarer dans le quartier Bougu à cause d’un caractère mal écrit, ça serait la meilleure quand même. Quinze heures et trente minutes, nous avions convenu de commencer le cours à dix-sept heures afin que la jeune femme puisse assister à ses cours d’art à l’université. De mon côté, cela me laisse le temps de m’organiser. En voyant sa copie, j’ai compris que même les bases étaient à peine acquises, qu’il fallait que je balaie les programmes des quatre années de lycée sans aller trop vite, ni trop lentement. Si nous avions plus de temps devant nous, s’il y avait des vacances scolaires par exemple, nous aurions pu revoir les notions par année, mais ce n’est malheureusement pas possible pour lui faire atteindre un niveau solide avant son partiel qui arrive à grands pas.

J’ai donc opté par un regroupement par thème, pour le premier semestre, nous mettrons l’accent sur l’arithmétique. Son professeur risque de tirer une drôle de tête s’il la voit cartonner dans les exercices de suites numériques ou sur les équations diophantiennes, et de frôler les aberrations mathématiques en géométrie, mais je suppose que c’est mieux que de la laisser avec un niveau bancal partout. Enfin, si elle aussi motivée qu’elle en avait l’air quand elle est venue me demander de lui rendre service, nous aurons peut-être un peu le temps d’aborder la géométrie plane. Au pire, je pense que pas mal d’étudiants font ça : réviser à fond une partie du cours et jeter le reste aux oubliettes en espérant que ça ne tombe pas aux examens. Quelle naïveté de penser ainsi !

Tic Tac Tic Tac

Encore une quinzaine de minutes et elle devrait sonner, j’espère qu’elle connait bien le quartier. Dans le salon, Chris est scotché devant la télévision, imitant le présentateur qui annonce la météo pour demain sur un ton monotone. En tout, j’ai prévu six exercices à faire en deux heures, les questions recouvrent l’ensemble des compétences à maîtriser et la difficulté est croissante, j’espère avoir le temps de tout pouvoir traiter avec elle, sans quoi je n’aurais pas d’autre choix que de lui donner la feuille de correction que j’ai également préparée, sans pouvoir lui fournir d’explications supplémentaires ou répondre à ses questions. Dans ce cas, les cours particuliers seraient bien inutiles. Je pose mon stylo et m’étire sur ma chaise avant de me lever pour aller regarder aux fenêtres. Un coup d’œil à droite, un autre à gauche, pas de trace d’Ethel Dawkins pour le moment. N’ayant pas d’autres coordonnées que son e-mail universitaire, je ne peux pas la joindre pour savoir si elle a un empêchement ou quelque chose dans le genre.

Ding Dong

« Chris, va ouvrir ! »

Il râle, affiche le menu pause sur sa console et sort de l’appartement pour ouvrir la porte d’entrée, deux étages plus bas. Espérons que ce soit elle et pas le facteur.