Un petit remontant [PV Rydia]

Depuis que j'avais signé le contrat pour mes débuts en solo avec Butterfly Records quelques jours plus tôt, je passais le plus clair de mon temps au studio d'enregistrement. Entre ça et les cours, je n'avais presque plus de moments à moi, sans compter que la maison de disque m'avait planifié un bon nombre d'interviews et de passage à la télé dans les semaines à venir. Pourtant, il y avait longtemps que je ne m'étais pas sentie aussi motivée. J'étais ravie d'être de nouveau occupée et de reprendre ma carrière en main. Bien sur, je savais aussi qu'à présent il allait m'être de plus en plus difficile de conserver la petite existence tranquille et anonyme que j'avais réussi à mener à Keimoo depuis plusieurs mois, mais je m'aviserais en temps voulu et m'adapterais. Je ne voulais pas trop y penser pour l'instant.

Cette après midi, j'avais décidé de prendre du temps pour moi afin de trainer en centre ville et profiter de la météo clémente. On sentait bien que les beaux jours approchaient même si la température n'était pas encore très élevée. Vêtue d'un tregging en cuir et d'une veste rouge, une paire de lunettes aux verres teintés sur le nez, je franchis la porte de la Pâtisserie Del Lys. J'avais envie de me faire plaisir et de me poser un peu. En plus, comme il était 16 heures passées, je pouvais bien m'autoriser un petit goûter. J'avais entendu dire qu'ils faisaient des trucs super bons, aussi je n'étais pas surprise qu'il y ait un peu de monde. Comme l'endroit n'était pas grand, il n'y avait presque plus de tables libres. Je parvins néanmoins à repérer une place dans un coin quand mon téléphone sonna. Le numéro de mon frère ne tarda pas à s'afficher et je décrochais tout en allant m'installer.

« Caïn ?»
« Ouai. Le mec de la maison de disque m'appelé... Apparemment ils ont décidé que ce serait intéressant d'organiser un face à face entre Tanosuke et toi pour faire grimper l'audience à l'émission de demain soir... »

Je faillis trébucher, heurtant légèrement une table et m'arrêtais dans mon avancée sous le choc de la nouvelle, mon cerveau peinant à appréhender l'information.

« Attends... C'est une blague ?! »
«Non...»
« Il y a pas moyen ! Je refuse de me retrouver en présence de l'autre abruti, j'te dis ! C'est hors de question ! »
« T'as pas vraiment le choix, tout a été programmé. Et puis, tu ne voudrais pas te dégonfler face à ce connard et le laisser gagner, pas vrai ? »
Silence éloquent de ma part.
« C'est bien ce qui me semblait. Allez bisous, à plus tard. »
« Mais je... »

Mon satané frangin me connaissait trop bien et savait exactement quel argument m'opposer. C'était presque une attaque mesquine de sa part que d'appuyer ainsi ainsi sur ma fierté et mes pulsions revanchardes. Pourtant, il avait raison. Même si je le pouvais, je ne me défilerais pas. Cela ne m'empêchait pas de trouver l'idée de cette confrontation particulièrement déplaisante, diabolique même. C'était digne d'un coup du Roi des démons alias Reiji en personne. Caïn mis un terme à la conversation avant que je n'ai réussi à rassembler suffisamment mes esprits pour émettre la moindre protestation. Je me retrouvais momentanément dans un espèce d'état second à fixer mon portable comme s'il venait de lui pousser des cornes, frustrée que mon traitre de frère est osé raccrocher ainsi après m'avoir lancé une telle bombe. Merci pour le soutien. Comme je m'étais figée en plein milieu à mi chemin de la table libre, je parcourus les derniers mètres et m'assis machinalement, perdue dans mes pensées.

La serveuse ne tarda pas à faire irruption devant moi pour s'enquérir de ce que je voulais. Je ne me privais pas pour commander un gâteau à l'air particulièrement délicieux accompagné d'un thé au jasmin. Cela au moins aurait le mérite de chasser cette foutue émission de mon esprit et de me remonter le moral bien comme il faut. C'est alors que, comme fait exprès, la radio allumée en fond sonore se mit à passer une chanson de GoldenStorm, si bien que la voix de «l'autre abruti» réussit à venir me hanter jusque dans ce moment de plaisir et de tranquillité.

« Cette fois, c'est sur, c'est un coup du Roi des démons.. » Marmonnais-je sombrement pour moi même.